SS 5 51 214 |
NOR : MESS9930002C
(Texte non paru au Journal officiel)
Référence : articles L. 513-1 et L. 521-2, alinéa 1er du code de la sécurité sociale.
Date d'application : immédiate.
La ministre de l'emploi et de la solidarité à Monsieur le directeur de la caisse nationale des allocations familiales ; Mesdames et Messieurs les préfets de région (direction des affaires sanitaires et sociales) ; Messieurs les préfets des régions de Martinique, Guadeloupe, Guyane, Réunion ; Madame le directeur de la sécurité sociale des Antilles Guyane ; Monsieur le directeur départemental de la sécurité sociale de la Réunion La position constante de la jurisprudence et plus particulièrement les récents arrêts rendus par la Cour de cassation, tendant à reconnaître un droit aux prestations familiales aux personnes assurant la charge financière de l'enfant qu'elles hébergent, conduisent à reconsidérer la notion de charge effective et permanente d'enfants. Cette notion, délicate à apprécier dans les situations de fait, telles les situations d'accueil par un tiers, doit donc désormais être appréciée selon la définition donnée par la jurisprudence.
La charge effective et permanente d'enfants est une condition fondamentale d'octroi des prestations familiales posée aux articles L. 513-1, L. 521-2, R. 512-1 à R. 513-1 du code de la sécurité sociale.
Légalement et prioritairement assumée par les parents, la diversité des situations d'accueil d'enfants implique que soient précisées, outre certaines dispositions du droit en la matière, les éléments permettant aux organismes débiteurs de s'assurer que ce droit est établi lorsque le tiers recueillant l'enfant revendique la qualité d'allocataire.
Tel est l'objet de la présente circulaire, élaborée dans le souci de concilier l'intérêt des familles recueillantes et les obligations des organismes débiteurs qui se doivent de vérifier le droit.
1. La condition de charge effective et permanente
1.1. Une situation de droit
L'article L. 521-2 du code de la sécurité sociale énonce : « Les allocations sont versées à la personne qui assume, dans quelques conditions que ce soit, la charge effective et permanente de l'enfant. »
Ce texte législatif est issu de la loi du 21 août 1946, créative du système des prestations familiales à une époque où le concept de la famille conduisait à ne reconnaître que les parents légitimes, naturels adoptifs et futurs adoptants comme assumant de droit la charge de l'enfant. Cette charge, assumée de manière permanente au foyer de l'allocataire, comporte, outre les frais d'entretien (logement, nourriture, habillement...) tirés des obligations alimentaires faites aux parents de l'enfant par le droit civil (art. 203 et 213 du code civil), les autres responsabilités parentales relatives aux devoirs de garde, de surveillance et d'éducation dans le but de protéger l'enfant dans sa sécurité, sa santé, sa moralité (art. 371-2 du code civil).
La condition de charge effective et permanente ne se limite donc pas aux seuls aspects matériels et financiers.
Naturellement et prioritairement assumée par les parents de l'enfant, ceux-ci sont également considérés comme continuant à assumer cette charge et conservent à ce titre la qualité d'allocataire dans certaines situations particulières.
Demeurent ainsi allocataires pour l'ouverture du droit aux prestations familiales :
Si les prestations familiales sont dans la plupart des cas versées au parent allocataire, les textes préservent néanmoins l'intérêt des tiers qui, sans avoir la qualité d'allocataire, assument partiellement la charge de l'enfant ou assurent les dépenses liées à son entretien.
Il s'agit de la qualité d'attributaire (personne entre les mains de laquelle sont versées les prestations, art. R. 513-2, alinéa 1) reconnue :
Ces dispositions ne sont cependant pas adaptées à toutes les situations de recueil d'enfants par une personne physique dès lors que cette dernière en assume la charge effective et permanente dans les faits.
1.2. La situation de fait
Si le contenu et l'exercice effectif de la charge sont en règle générale confondus lorsque celle-ci est assumée par les représentants légaux de l'enfant, l'interprétation faite par la Cour de cassation de la notion de charge d'enfant permet de reconnaître également un droit aux prestations aux personnes physiques ayant ou non un lien de parenté avec l'enfant dont elles assument la charge dans les faits, les parents se soustrayant à leurs responsabilités dans ce domaine ou étant, pour motifs divers, dans l'incapacité de les assumer.
Les familles recueillantes se substituant dès lors aux parents dans l'exercice desdites responsabilités peuvent bénéficier des prestations sur production des pièces probantes permettant aux organismes débiteurs d'établir le droit, en s'assurant de la réalité et de la permanence de l'exercice de la charge par le tiers recueillant, exigées par l'article L. 521-2 du code de la sécurité sociale.
Il est rappelé à cet effet que la condition de résidence permanente en France opposable à l'enfant bénéficiaire des prestations familiales, est, aux termes de l'article R. 512-1 du code de la sécurité sociale réputée remplie pour l'enfant qui accomplit un ou plusieurs séjours hors de France, sous réserve que la totalisation de ces périodes n'excède pas trois mois au cours d'une même année civile.
La notion de résidence permanente et donc de charge s'entendent donc de facto d'une durée au moins égale à neuf mois au cours d'une même année civile.
2. Pièces justificatives attestant de l'exercice de la charge
2.1. Observations générales
Lorsque le tiers recueillant de l'enfant revendique la qualité d'allocataire, il est essentiel que la preuve du plein exercice permanent de la charge de l'enfant puisse être établie au moyen d'éléments probants, ceci pour respecter les principes suivants :
Les documents permettant à l'organisme débiteur de s'assurer de la situation des parents de l'enfant et du tiers recueillant doivent être fournis par ce dernier.
Ces pièces ne constituent pas en tout état de cause, une condition d'ouverture de droit, mais un moyen d'établir la condition légale de charge comme remplie.
2.2. Eléments de preuve
L'exercice de la charge par une personne recueillante peut être délicat à établir.
Pour établir la condition de droit, il s'avère nécessaire d'avoir recours à des pièces justificatives qui devront compléter la déclaration du tiers.
L'exigence de ces documents laissée à l'appréciation des organismes débiteurs, devra être adaptée aux situations individuelles et à l'intérêt de l'enfant. Ainsi, à titre d'exemple :
b) La production de pièces justificatives relatives à la garde ou tutelle des enfants peut ne pas être exigée, lorsque les parents demeurant en France sont dans l'incapacité objective d'assumer la charge de l'enfant (parent incarcéré, hospitalisation de très longue durée, insolvabilité des parents dont l'éloignement ne permet pas de maintenir les liens affectifs et éducatifs avec leurs enfants...).
Dans de telles situations, une enquête menée par l'organisme ou à défaut, la présentation de documents attestant de la situation parentale peuvent établir l'exercice de la charge et l'absence de paiement par un autre organisme.
Il est loisible à l'organisme débiteur qui l'estime utile, de compléter dans certains cas, l'examen de la demande par d'autres pièces justificatives.
Les caisses d'allocations familiales devront en revanche s'assurer, dans toutes les situations qui se présenteront :
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Ces dispositions visent à clarifier la notion de charge d'enfants et les moyens permettant de la constater dans des situations où elle est difficilement appréciable.
Je vous saurais gré de bien vouloir assurer la diffusion de la présente circulaire et de me faire connaître les difficultés que son application susciterait.
Pour la ministre et par délégation :
Le directeur de la sécurité sociale,
R. Briet
(1) Ces familles d'accueil sont un « prolongement » de l'aide sociale à l'enfance à laquelle les enfants demeurent juridiquement confiés : elles perçoivent, pour le service rendu, des indemnités d'entretien. Elles n'ont pas qualité pour être allocataires et ne peuvent percevoir les prestations en tant qu'attributaires. Il en est de même pour les personnes physiques auxquelles ont été confiés des enfants ayant fait l'objet d'un placement judiciaire avec prise en charge par le département des dépenses d'entretien, d'éducation et de conduite du mineur prévues à l'article 85 du code de la famille et de l'aide sociale.