Circulaire DHOS/DSS/DGAS no 2005-141 du 16 mars 2005 relative à la prise en charge des soins urgents délivrés à des étrangers résidant en France de manière irrégulière et non bénéficiaires de laide médicale de lEtat (art. L. 254-1 du code de laction sociale et des familles, issu de lart. 97 de la loi de finances rectificative pour 2003 du 30 décembre 2003)
NOR : SANH0530112C
Date dapplication : immédiate.
Références :
Articles L. 251-1, L. 251-2, L. 253-2, L. 254-1 du code de laction sociale et des familles ;
Article L. 5126-4 du code de la santé publique ;
Articles L. 162-16-5, L. 321-1 et L. 331-2 du code de la sécurité sociale
Le ministre de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, la ministre déléguée à lintégration, à légalité des chances et à la lutte contre lexclusion à Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de lhospitalisation ; Monsieur le directeur de la Caisse nationale de lassurance maladie des travailleurs salariés ; Mesdames et Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales, direction de la solidarité et de la santé de Corse et de la Corse-du-Sud, direction interrégionale de la sécurité sociale dAntilles-Guyane, direction départementale de la sécurité sociale de la Réunion) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales) ; Mesdames et Messieurs les directeurs détablissements de santé (pour information et exécution).
Larticle 97 de la loi de finances rectificative pour 2003 modifie les conditions dattribution de laide médicale de lEtat (AME) aux étrangers en situation irrégulière en instaurant une condition de résidence ininterrompue de plus de trois mois en France. Elle crée une prise en charge des soins urgents des étrangers en situation irrégulière qui ne bénéficient pas de lAME.
La présente circulaire a pour objet de préciser les conditions dapplication de cette prise en charge.
Ces soins sont pris en charge dans tous les établissements de santé publics ou privés.
I. - CHAMP DES BÉNÉFICIAIRES DE LA PRISE
EN CHARGE DES SOINS URGENTS
Sont concernés les étrangers qui ne remplissent pas la condition de régularité de la résidence mentionnée à larticle L. 380-1 du CSS, cest-à-dire les étrangers en situation irrégulière au regard de la législation sur lentrée et le séjour des étrangers en France, et qui ne sont pas effectivement bénéficiaires de lAME.
Cette catégorie recouvre, en pratique, les étrangers en situation irrégulière qui :
- résident sur le territoire national depuis moins de trois mois. Sont donc exclus de la prise en charge les étrangers en simple séjour en France titulaires dun visa de court séjour.
ou
- résident en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois et ne sont pas bénéficiaires de lAME, soit quils ne remplissent pas les conditions requises pour lobtenir, soit quils nen aient pas sollicité lattribution, soit encore quils aient effectué une demande dAME dont le dossier est en cours dinstruction ou a été rejeté.
Les ressortissants de lUnion européenne, bénéficiant dune liberté de circulation dans les pays membres, ne peuvent connaître de situation dirrégularité au regard de la condition de résidence. Ils bénéficient par ailleurs de modalités spécifiques de prise en charge par les régimes dassurance maladie nationaux. Ils ne sont donc en aucun cas éligibles au dispositif des soins urgents.
Les soins urgents délivrés aux étrangers en situation irrégulière sont pris en charge par lEtat dans le cadre dune enveloppe financière limitative. Lattention des établissements est donc appelée sur les conditions de prise en charge des patients concernés afin que ne soient imputés sur cette enveloppe que les soins délivrés aux patients répondant aux critères définis ci-dessus. En particulier, les établissements devront sassurer que le patient ne peut se prévaloir daucune autre couverture maladie et rechercher auprès de lui les informations relatives à sa situation au regard du critère de résidence.
Si le patient ne peut prétendre à une prise en charge au titre des soins urgents, ni à aucune autre couverture maladie, la totalité des frais relatifs aux soins dont il a bénéficié lui est facturée.
Toutefois, des situations particulières peuvent se présenter : cest le cas lorsquun étranger en situation irrégulière dont létat de santé requiert des soins urgents (Cf. II -/II-1) est admis dans un établissement de santé sans quil soit immédiatement possible de déterminer la durée de sa résidence en France, faute de documents en ce sens.
Dans ce cas, le directeur de létablissement concerné établit une demande daide médicale de lEtat (AME) auprès de la caisse primaire dassurance maladie du lieu dimplantation de létablissement. Dans lintérêt de la personne elle-même, la délivrance de soins urgents ne doit jamais aboutir à suspendre la recherche de ses droits. Si la demande dAME est rejetée, les soins urgents qui ont été délivrés au patient font lobjet dune facturation au titre des soins urgents.
II. - CHAMP DES PRESTATIONS PRISES EN CHARGE
AU TITRE DES « SOINS URGENTS »
II.1. La notion de soins urgents
Seuls sont pris en charge les soins urgents dont labsence mettrait en jeu le pronostic vital ou pourrait conduire à une altération grave et durable de létat de santé de la personne ou de lenfant à naître. Doivent aussi être considérés comme urgents les soins destinés à éviter la propagation dune pathologie à lentourage ou à la collectivité (pathologies infectieuses transmissibles telles que la tuberculose ou le sida par exemple).
Compte tenu de la vulnérabilité particulière des enfants et des adolescents, tous les soins et traitements délivrés à lhôpital aux mineurs résidant en France, qui ne sont pas effectivement bénéficiaires de laide médicale de lÉtat, sont réputés répondre à la condition durgence mentionnée par larticle L. 254-1 du code de laction sociale et des familles.
Sont pris en charge dans ce cadre les examens de prévention réalisés durant et après la grossesse et mentionnés aux articles L. 2122-1 et suivants du code de la santé publique ainsi que les soins à la femme enceinte et au nouveau-né.
Sont également prises en charge les interruptions de grossesse pour motif médical ainsi que les IVG, les conditions de délai régissant laccès à ces actes donnant un fondement légal à lurgence de lintervention.
Le médecin appelé à traiter le patient consigne dans le dossier médical de celui-ci les motifs justifiant le caractère urgent des soins dispensés. Ce dossier devra être présenté, sur demande, au médecin du contrôle médical de la caisse du lieu dimplantation de létablissement.
II.2. Les conditions de délivrance des soins
Larticle L. 254-1 du CASF dispose que les personnes sont prises en charge dans les conditions prévues à larticle L. 251-2 du même code. Aux termes de ce texte, sont pris en charge, les frais définis aux 1o , 2o , 4o et 6o de larticle L. 321-1 et à larticle L. 331-2 du code de la sécurité sociale ainsi que le forfait journalier mentionné à larticle 174-4 du code la sécurité sociale. Pour lapplication de ces articles, lâge de la majorité est celui fixé par la réglementation française, cest-à-dire 18 ans, et non celui fixé par la réglementation du pays dorigine. Sont donc pris en charge lensemble des frais relatifs à des soins dispensés en établissement de santé soit dans le cadre dune hospitalisation, soit dans le cadre des soins externes. Les bénéficiaires sont par ailleurs dispensés de lavance de frais.
Toutefois, larticle L. 254-1 limitant les soins urgents à ceux qui sont dispensés dans les établissements de santé, la prise en charge ne couvre pas lensemble du champ des prestations prévu au 1o de larticle L. 321-1 du CSS et, en particulier, la délivrance des médicaments postérieurement aux soins effectués dans létablissement.
Par dérogation, les médicaments, quils figurent ou non sur la liste de ceux qui peuvent être rétrocédés dans les conditions prévues à larticle L. 5126-4 du code de la santé publique et à larticle L. 162-16-5 du code de la sécurité sociale sont pris en charge dans le cadre des soins urgents, à condition quils aient été prescrits lors de la délivrance de ces soins urgents dans létablissement de santé (en externe ou en hospitalisation), y compris les antirétroviraux, si la prescription initiale est établie par un médecin de létablissement, et quun praticien de cet établissement aura attesté que la délivrance de médicaments, postérieurement aux soins délivrés dans la structure, est indispensable au succès du traitement engagé dans létablissement.
III. - FACTURATION
PAR LES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ
Les prestations délivrées dans le cadre de cette procédure des « soins urgents » sont facturées aux caisses primaires dassurance maladie du lieu dimplantation des établissements.
Pour les établissements anciennement sous dotation globale mentionnés aux a, b et c de larticle L. 162-22-6 et à larticle L. 162-22-16 du code de la sécurité sociale, les prestations seront facturées sur la base des tarifs de prestations (art. R. 714-3-19 du code de la santé publique) pour les soins ayant donné lieu à hospitalisation ou des tarifs de la nomenclature en vigueur pour les soins externes.
Pour les établissements mentionnés au d de larticle L. 162-22-6 (cf. note 1) du code de la sécurité sociale, elles seront facturées sur la base des dispositions des articles R. 162-31 et R. 162-32-1 issues du décret no 2001-356 du 23 avril 2001 pris en application de larticle L. 162-22-1 du code de la sécurité sociale et de larrêté du 23 avril 2001.
Lors de la liquidation par la caisse, limputation des frais au titre de la prise en charge des soins urgents pourra faire lobjet dun contrôle a posteriori par la caisse et, sagissant des éléments médicaux, par les services du contrôle médical.
Les établissements de santé recevront très prochainement des instructions leur permettant de facturer les soins délivrés en 2004 au titre de ce dispositif. Les soins délivrés depuis le 1er janvier 2005 feront lobjet dune instruction complémentaire.
Les prestations nentrant pas dans le dispositif soins urgents (cf. I et II supra) sont facturées en totalité au patient.
IV. - DISPOSITIF DE SUIVI DES DÉPENSES
PAR LES CAISSES PRIMAIRES DASSURANCE MALADIE
Un dispositif de suivi des dépenses effectivement réalisées au titre du dispositif de soins urgents de larticle L. 254-1 du CASF sera mis en place et vous en serez ultérieurement informés.
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Il est demandé aux directeurs détablissements dassurer linformation des services concernés et dappeler lattention des personnels médicaux sur les nouvelles modalités de prise en charge de cette catégorie de population. Des procédures internes doivent être instaurées pour permettre la vérification du caractère urgent des soins délivrés ainsi que lévaluation quantitative (montant, nombre de personnes) et qualitative (nature des soins, mode de prise en charge) des soins délivrés à cette catégorie de population.
Les difficultés dapplication de la présente circulaire pourront être signalées par courriel à ladresse suivante : regles-financ-hosp@sante.gouv.fr.
Le ministre de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, Jean-Louis Borloo |
Le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, Philippe Douste-Blazy |
La ministre déléguée à lintégration, à légalité des chances et à la lutte contre lexclusion, Nelly Olin |
NOTE (S) :
(1) Dans sa rédaction issue de la loi no 2003-1199 du 19 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004.