Circulaire DGAS/SD 3 C n° 2005-224 du 12 mai 2005 relative à laccueil temporaire des personnes handicapées
NOR : SANA0530194C
Date dapplication : immédiate.
Références :
Article L. 312-1 du code de laction sociale et des familles issu de la loi no 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant laction sociale et médico-sociale.
Articles D. 312-8 à D. 312-10 du code de laction sociale et des familles résultant du décret no 2004-231 du 17 mars 2004 relatif à la définition et à lorganisation de laccueil temporaire des personnes handicapées et des personnes âgées dans certains établissements et services mentionnés au I de larticle L. 312-1 et à larticle L. 314-8 du code de laction sociale et des familles.
Le ministre des solidarités, de la santé et de la famille à Mesdames et Messieurs les préfets de région, (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour exécution]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour exécution]) ; Mesdames et Messieurs les directeurs et chefs de service de ladministration centrale (pour information).
Laccueil temporaire sappuie sur larticle L. 312-1 du code de laction sociale et des familles issu de la loi no 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant laction sociale et médico-sociale. Les articles D. 312-8 à D. 312-10 du code de laction sociale et des familles, introduits par le décret no 2004-231 du 17 mars 2004 relatif à la définition et à lorganisation de laccueil temporaire des personnes handicapées et des personnes âgées dans certains établissements et services mentionnés au I de larticle L. 312-1 et à larticle L. 314-8 du code de laction sociale et des familles, en fixent les principes.
Lun des objectifs majeurs de la loi précitée consiste à diversifier les prises en charge ainsi que la gamme des établissements et services sociaux et médico-sociaux accueillant des publics fragiles, notamment les personnes âgées et les personnes handicapées. La nomenclature des établissements et services a été définie dans le code de façon très souple afin de diversifier au maximum la palette de loffre et de favoriser le libre choix entre les prises en charge en institution et laccompagnement hors les murs.
A ce titre, il est rappelé que larticle L. 312-1 du code de laction sociale et des familles confère une base légale aux prises en charge à titre permanent, temporaire, sur un mode séquentiel, à temps complet ou partiel, avec ou sans hébergement, en internat, en semi-internat, externat, en accueil familial et en milieu ordinaire de vie.
Le décret précité du 17 mars 2004 permet de promouvoir et de développer très sensiblement ce mode daccompagnement innovant pour les personnes âgées comme pour les personnes handicapées. Il définit ses conditions de mise en oeuvre et précise la place de laccueil temporaire.
Laccueil temporaire des personnes handicapées justifie une approche particulière. Les présentes instructions précisent certains points du décret susvisé. Elles tiennent notamment compte des conclusions du groupe de travail animé en 2003 par M. Olivin (Jean-Jacques), président du groupe de réflexion et de réseau pour laccueil temporaire des personnes handicapées (GRATH).
I. - LACCUEIL TEMPORAIRE DES PERSONNES HANDICAPÉES : UNE RÉPONSE NOVATRICE AUX MARGES DE LA PRISE EN CHARGE INSTITUTIONNELLE :
Souvent vu comme un séjour de répit ou comme une modalité « daide aux aidants », laccueil temporaire est un instrument déterminant de la politique de maintien à domicile des personnes handicapées qui le souhaitent et de soutien à leur famille. Mais son apport va plus loin. Il constitue aussi un élément de souplesse et de réactivité dans la palette des différentes modalités daccompagnement. En autorisant les temps de répit, de réflexion ou la mise en place darticulations entre différents dispositifs daccompagnement, il contribue à la réalisation du projet de vie des personnes handicapées.
Quelles sont les situations auxquelles peut répondre laccueil temporaire ?
a) Laide aux « aidants »
La situation la plus communément invoquée est celle de « laide aux aidants ». Certaines personnes handicapées font le choix de vivre dans leur entourage familial. Il peut aussi sagir dun choix par défaut. Des relais sont parfois nécessaires en cas dindisponibilité provisoire de la famille (hospitalisation, obligation professionnelle...) ou de besoin de prise de distance dans une relation permanente. La cohabitation peut aussi conduire à des problèmes relationnels, qui mettent en cause léquilibre de vie des personnes ou de la famille, auxquels laccueil temporaire peut apporter une réponse. Cette réponse est importante dans une perspective de prévention des situations de maltraitance subies tant par les personnes handicapées que parfois leur famille. Elle ne peut cependant consister en un simple éloignement, solution au seul problème relationnel ponctuel. Elle doit mettre en oeuvre une démarche qui, outre la distance, permette les évolutions et les adaptations requises du projet de la personne handicapée.
A titre dexemple, on peut considérer la situation dune personne lourdement handicapée vivant habituellement dans sa famille. Bien que bénéficiant des aides humaines et techniques nécessaires, elle peut avoir besoin dun accueil temporaire en établissement pour soulager son entourage, ou encore dun accueil temporaire permettant une prise en charge par une autre équipe pouvant favoriser un mode relationnel différent et contribuer à un meilleur équilibre familial.
b) Une période de distanciation et de réadaptation
pour linstitution accueillant la personne handicapée
Une institution confrontée à une situation difficile et soumise à une pression intense peut avoir besoin dune phase de distanciation afin de se mettre en capacité de mieux répondre aux besoins de la personne handicapée. Ce temps de distanciation doit notamment être mis à profit :
- pour recentrer lorganisation de léquipe et mieux poursuivre la prise en charge ;
- pour faire évoluer une prise en charge existante ou mettre en place un nouveau projet ;
- pour modifier un projet devenu obsolète ;
- pour favoriser lacquisition de compétences des personnels ;
- pour que la personne handicapée développe dautres ressources nécessaires afin daccompagner lévolution de son accompagnement.
Ainsi, un établissement accueillant des personnes très perturbées (personnes atteintes dimportants troubles envahissants du développement ou de troubles graves du comportement) qui nécessitent une mobilisation permanente de léquipe, peut se voir offrir la possibilité de sappuyer sur une autre équipe, dans une autre institution, pour prendre de la distance, dénouer des situations complexes et élaborer une nouvelle stratégie de prise en charge. Laccueil temporaire constitue ici un outil de prévention des situations de crise. Larticle R. 314-122 du code de laction sociale et des familles permet, à ce titre et sous certaines conditions, linstauration dune prise en charge partagée.
Il ne saurait toutefois constituer le moyen dévacuer les situations gênantes et de les faire résoudre par dautres. Il sagit bien de reconnaître que certaines personnes handicapées en souffrance peuvent perturber gravement le fonctionnement dune institution voire remettre en cause léquilibre de son équipe. A ce titre, les personnes handicapées elles-mêmes, comme les personnels qui les encadrent, ont besoin dun temps de répit.
Pour être profitable et impacter favorablement lévolution du projet de vie de la personne handicapée, la démarche de distanciation doit nécessairement se préparer.
Il est aussi préférable, dans les cas complexes, de prévoir de façon anticipée des périodes daccueil temporaire avec une certaine régularité plutôt que de devoir gérer des situations de crise qui demandent ensuite un long travail de restauration de léquilibre des personnes et des institutions. Cette disposition aide à prévenir la maltraitance par une gestion institutionnalisée des situations de conflit ainsi que par lexpression des besoins et des difficultés de chacun.
c) Une modalité dessai ou dexpérimentation
dans laccompagnement de la personne
Laccueil temporaire peut aussi constituer un mode dessai et être ainsi un outil programmé de la prise en charge. Certaines situations nécessitent des évolutions à brève échéance (essai de retour à domicile ou de prise charge dans une institution). Dans ce cadre, il peut être indiqué daccompagner ces tentatives par des périodes daccueil temporaire ouvertes et utilisées en cas de besoin.
Il faut aussi être conscient que, dans une prise en charge au long cours, qui risque, du fait de lallongement de la durée de la vie, dêtre de plus en plus longue, la vie institutionnelle a besoin de stimulant tant pour la personne que pour léquipe. Les seules ressources internes, mêmes mobilisées et vigilantes, ainsi que limagination de léquipe, soit pour amener les personnes accompagnées dans un projet plus ambitieux, soit pour le rendre effectif, ne sont pas toujours suffisantes. Le recours à laccueil temporaire permet dobserver la personne dans un autre environnement et ainsi dexpérimenter dautres pratiques.
d) Une articulation entre deux projets daccompagnement
qui préserve les acquis de la personne handicapée
Laccueil temporaire peut aussi constituer une solution de maintien des acquis et de lautonomie entre deux prises en charge afin de ne pas compromettre lévolution et lautonomie de la personne.
Cette situation est fréquemment rencontrée lorsque lévolution de la personne handicapée (âge, évolution personnelle, etc.) implique un changement dans ses conditions daccompagnement ou le lieu de celui-ci. Laccueil temporaire, associé éventuellement à dautres interventions possibles, y compris dans le cadre du domicile, permet le maintien des acquis.
Il participe alors, avec dautres prises en charge, dune étape programmée dans le projet de vie de la personne.
Ainsi, laccueil temporaire peut être utilement mobilisé pour la période charnière que constitue le passage à lâge adulte. En létat, sagissant des jeunes adultes qui nont pas vocation à rejoindre le milieu ordinaire du travail et en instance daccueil en centre daide par le travail (CAT), la solution repose soit sur un retour en famille, le cas échéant assorti dun suivi de létablissement médico-social, soit sur une prolongation de laccompagnement au titre de « lamendement Creton ». Dans certaines situations, laccueil temporaire constitue une solution mieux adaptée qui concilie les besoins de la personne et la mobilisation nécessaire de moyens médico-sociaux. Ainsi, un jeune adulte sorti dun institut médico-professionnel (IMPro) pourra, si ses besoins le nécessitent, utilement bénéficier dune prise en charge en accueil temporaire, de durée et de contenu adaptés, pour préserver ses acquis, maintenir ses apprentissages et son degré dautonomie. Cette solution doit toutefois être programmée, réfléchie et sinscrire dans un projet de vie cohérent. Elle ne saurait constituer un pis-aller pour gérer une attente.
e) Une réponse à certaines situations durgence
Lurgence sapprécie tant pour la personne que pour son environnement, que la personne soit dans sa famille ou dans une structure.
Laccueil en urgence constitue une solution indispensable dans la palette des prises en charge. Il convient cependant de distinguer laccueil temporaire résultant de la conjonction des différents éléments évoqués précédemment et celui qui permet de résoudre une crise. Dans ce dernier cas, laccueil temporaire doit garder un caractère exceptionnel. En effet, le recours à laccueil temporaire comme instrument de gestion dune crise sanctionne généralement un processus long de dégradation de la relation entre la personne handicapée et son entourage, voire tout son environnement. Or, ce processus aurait vraisemblablement pu être interrompu par le recours à une opération programmée de distanciation.
Les admissions durgence réclament une approche particulière qui doit se retrouver dans le projet de la structure et le projet daccompagnement des personnes. Il faut dans le cas particulier de la crise prévoir le temps nécessaire pour restaurer des relations détériorées ou compromises ou pour permettre la mise en place dun nouveau projet individuel. Il est essentiel de profiter de ce temps de recul pour porter un regard nouveau sur la situation de la personne, analyser ses besoins et préparer les adaptations de son accompagnement.
f) Les périodes de fermeture des établissements et les périodes de vacances des personnes lourdement handicapées - un cas particulier de recours à laccueil temporaire pour assurer une continuité dans la prise en charge :
Certaines personnes handicapées nécessitent une prise en charge médico-sociale permanente, y compris lors de la fermeture de létablissement daccueil. Pour ces personnes, le développement de formules daccueil temporaire est justifié.
Cette situation concerne généralement les personnes lourdement handicapées qui nécessitent, y compris pendant cette fermeture, une prise en charge médico-sociale avec un plateau technique ou/et un encadrement spécialisé. Ces périodes de fermeture interviennent principalement pendant les congés scolaires. Laccueil temporaire peut alors intervenir et développer un projet qui prend appui sur des activités éducatives de socialisation (loisirs, sports, culture) qui se substituent aux activités scolaires, de formation ou de travail encadré.
Ainsi, une personne polyhandicapée pourra être accueillie dans une structure à la campagne ou au bord de la mer qui comporte les aménagements indispensables à sa situation. Elle continue à bénéficier des soins et de laccompagnement qui lui sont indispensables mais avec des activités éducatives allégées et un projet orienté vers les loisirs, les sports ou la culture. De même, des personnes autistes peuvent ainsi bénéficier à intervalle régulier de temps daccueil temporaire, y compris pendant les périodes de vacances scolaires ou celles de leur entourage.
Les activités sont alors davantage orientées vers la socialisation de la personne. Elles sont intégrées à leur projet de vie et sont identifiées au sein du projet éducatif et thérapeutique de la structure.
Il sagit dune forme de prise en charge médico-sociale temporaire qui sarticule généralement avec un accompagnement médico-social au long cours.
Ces situations ne peuvent être confondues avec lorganisation des loisirs et vacances des personnes handicapées dans leur ensemble, y compris lorsque ces vacances se déroulent dans des conditions particulières.
En effet, les personnes handicapées, comme le reste de la population, recourent à différentes formes de vacances quil sagisse de séjours en famille, en accueil ou en voyage. Certaines participent à des séjours de vacances spécialement conçus pour des groupes de personnes handicapées.
Cette catégorie de séjours seffectue dans des lieux et avec des activités adaptés à létat de santé des personnes accueillies qui tiennent compte de leurs déficiences. Ces formes daccueil ne confèrent pas pour autant aux structures un caractère médico-social et elles ne relèvent pas de ce type dagrément.
II. - AU REGARD DE SON POSITIONNEMENT DANS LE CHAMP MÉDICO-SOCIAL, LACCUEIL TEMPORAIRE JUSTIFIE DE MODALITÉS DORGANISATION ET DE FONCTIONNEMENT SPÉCIFIQUE
a) Une durée maximale de 90 jours par an
Larticle D. 312-10 - I du code de laction sociale et des familles limite la durée de laccueil temporaire à un maximum de 90 jours par période de 12 mois.
Laccueil temporaire peut se dérouler en une seule fois ou peut se renouveler plusieurs fois dans lannée dans les limites indiquées ci-dessus.
Ainsi, la situation dune personne atteinte de troubles graves (handicap physique avec autres déficiences associées, polyhandicap, autisme...) et prise en charge par sa famille constitue un bon exemple de recours à laccueil temporaire. La famille a besoin de pouvoir la confier plusieurs fois dans lannée à une structure à temps complet. Cet éloignement est nécessaire à la famille pour se ressourcer, garder son unité, son potentiel éducatif et ses possibilités daccompagner la personne tout au long de lannée. Ces périodes peuvent devenir plus fréquentes pendant certaines phases de lévolution : passage à lâge adulte, vieillissement etc. Le recours à laccueil temporaire peut venir compléter laide de service de soins à domicile ou intervenir en complément dun accueil à temps complet.
Plus encore que les autres modes de prise en charge, laccueil temporaire permet daider, de soulager, ou daccompagner les personnes handicapées et leurs « aidants » dans léducation et le soin. Cette aide doit pouvoir être programmée et renouvelée selon une fréquence adaptée pour acquérir une pleine efficacité. Il sapprécie avec une grande souplesse et peut prendre lensemble des formes de laccueil prévues à larticle L. 312-1 du code de laction sociale et des familles.
b) Une procédure dautorisation à distinguer
La création de places daccueil temporaire peut intervenir dans des établissements existants, dans des établissements nouvellement créés, dans le cadre de structures dédiées ou sous la forme de places daccueil temporaire dans une structure prévue pour une prise en charge au long cours.
Dans le cas dun établissement existant, laccueil temporaire étant une activité nécessairement distincte, elle doit être considérée comme une activité nouvelle et non comme un prolongement ou une extension du projet déjà autorisé.
Cela signifie que les créations de places daccueil temporaire, quelles que soient les modalités de laccueil et la capacité de cette section (même lorsquil sagit de quelques places) doivent faire lobjet dun dossier spécifique sur le contenu du projet et son coût en application des articles R. 313-2 et R. 313-3 du code de laction sociale et des familles.
Larrêté préfectoral relatif à lactivité de létablissement et à sa capacité doit mentionner laccueil temporaire et le nombre de places réservées à cet effet.
Sagissant des structures dédiées, au regard du public accueilli, lautorisation doit se référer aux instructions existantes (par exemple, pour les enfants, les articles D. 312-11 à D. 312-122 du code de laction sociale et des familles).
Toutefois, ces établissements pouvant accueillir des personnes atteintes de différentes formes de handicap, lagrément ne peut simplement se référer à laddition des normes prévues par les différents textes concernés. Il en résulte que ces normes devront chaque fois être analysées au regard de la mission de la structure et des objectifs de prise en charge et donc comporter les adaptions conformes à sa taille et au projet dorganisation et de fonctionnement. Les équipements, pour un temps daccompagnement limité, peuvent être allégés et les équipes être moins diversifiées dans leur composition. Ainsi, lappareillage nécessaire pour une rééducation au long cours ne simpose pas dans le cadre dune prise en charge de durée limitée, à la condition que le projet détablissement comme les projets individuels ne le nécessitent pas. Cet examen attentif, critique et de bon sens des projets ne saurait toutefois porter atteinte à une stricte vigilance sagissant du respect des conditions de sécurité et de la qualité de la prise en charge.
La spécificité de laccueil temporaire sinscrit dans le projet détablissement. Notamment, dans lhypothèse dune structure ne disposant que de quelques places daccueil temporaire, il convient que le projet détablissement prévoie expressément les modalités de cet accueil spécifique, de même que lévaluation de cette activité.
Le projet détablissement ou de service doit être le résultat dune réflexion sur lorganisation de la prise en charge, les rapports avec létablissement où se situent les places daccueil temporaire et notamment lutilisation des moyens ou services existants, les relations avec la famille, léquipe et/ou la structure qui suit habituellement la personne.
Une importance particulière doit être accordée dans la procédure dautorisation à leffectif des personnels et à ladaptation de cet effectif (en nombre et qualification) aux personnes accueillies, en fonction des modalités de mise en oeuvre de laccueil temporaire.
c) Une composition des équipes cohérente
avec les caractéristiques de laccueil temporaire
Les effectifs prévus pour laccueil temporaire doivent être appréciés et parfois renforcés, selon les catégories concernées, par rapport aux ratios dencadrement habituel en établissement ou service.
Sagissant des personnels thérapeutiques, la présence de quelques personnes handicapées supplémentaires, dans le cadre de places daccueil temporaire dans une structure préexistante, nimplique pas obligatoirement le renforcement de léquipe médicale ou paramédicale. En effet, il peut être souhaitable dans certaines formes daccueil temporaire dalléger, voire de suspendre une thérapie ou des rééducations pendant la durée de laccueil temporaire, la prise en charge éducative ou laccompagnement humain pouvant en revanche être renforcé à cette occasion.
Si nécessaire, il conviendrait alors plutôt de privilégier le maintien des relations avec les praticiens traitants habituels de la personne accueillie sous forme dindications et de recommandations, les interventions directes nétant mobilisées quà titre exceptionnel. Cette organisation ne doit notamment pas entraîner des retours réguliers vers lesdits praticiens traitants et des déplacements incessants entre lieux daccueil temporaire et lieux de soins.
Toutefois, sagissant de laccueil de personnes très lourdement handicapées nécessitant des soins médicaux et paramédicaux constants (personnes polyhandicapées par exemple), il peut savérer nécessaire denvisager un renforcement de léquipe soignante si celle-ci, dans sa configuration habituelle, nest pas en mesure dassurer la prise en charge avec toute lintensité ou la spécificité voulue.
Il existe aussi des cas où laccueil temporaire est, pour partie, justifié par la nécessité deffectuer des rééducations intensives qui ne peuvent avoir lieu dans le lieu de vie ou daccueil habituel. La présence de médecins et /ou psychologues et/ou rééducateurs est alors indispensable. En tout état de cause, leffectif des personnels médicaux et paramédicaux est étroitement lié au projet et à létendue des collaborations extérieures que celui-ci prévoit, tant dans un service adossé à une structure existante que dans le cadre dune structure dédiée.
Laccueil temporaire implique un positionnement particulier des personnels par rapport aux pratiques du secteur. En effet, ils doivent se mobiliser pour un temps donné sur un projet impliquant des apports dont ils ne verront pas obligatoirement les effets. Les équipes doivent bénéficier dune formation adaptée pour être en capacité de sadapter aux personnes reçues, à la brièveté des séjours et à la rotation importante des personnes accueillies. Elles doivent être en capacité détablir, en très peu de temps, les relations nécessaires de collaboration avec dautres services concernés, en amont et en aval, par la prise en charge des personnes. Elles doivent aussi procéder à des évaluations plus régulières, définissant des objectifs qui pourront être remis en cause rapidement par dautres équipes.
A cet égard, le recrutement de ces personnels constitue un enjeu de qualité et de succès de cette forme daccueil. Il doit privilégier la motivation, lexpérience, la polyvalence et ladaptabilité.
d) Des modalités dorientation propres à laccueil temporaire
La procédure de droit commun pour laccueil temporaire reste la saisine préalable de la commission compétente afin de programmer et préparer laccueil des personnes. La commission a la possibilité de prévoir plusieurs séjours en accueil temporaire.
Elle se fonde sur les avis de léquipe pluridisciplinaire amenée à évaluer les besoins en accueil temporaire de la personne et de son environnement, au même titre que ses autres besoins.
La commission, comme pour toute forme daccueil temporaire, doit se prononcer :
- sur la durée exacte de laccueil temporaire (nombre de jours) ;
- sur la périodicité éventuelle de cette forme daccueil (durée éventuellement en plusieurs séjours fractionnés dans la limite des 90 jours) ;
- sur les modalités de laccueil temporaire : à temps complet, de jour comme de nuit, à temps partiel en accueil à la journée, par séquence dans la journée ou dans la semaine (ex : 3 heures tous les jours ou 3 jours par semaine...) ou en le modulant avec dautres activités ou dautres formes de prise en charge.
Elle peut, en regard de situations bien identifiées, se prononcer sur un nombre de jours daccueil temporaire sur lannée en cours avec indication de la périodicité des temps daccueil, afin que les besoins de la personne puissent se concilier avec les possibilités daccueil des structures concernées. Cette souplesse offerte par laccueil temporaire nécessite un réel suivi.
Sauf indication thérapeutique contraire, la personne devra, dans la mesure du possible, être accueillie dans la structure la plus proche de son domicile ou de son lieu habituel de prise en charge afin de faciliter les liaisons, les relations, et de limiter les temps de transport.
Dans les situations durgence, larticle D. 312-10 du code de laction sociale et des familles prévoit une procédure dadmission qui introduit des aménagements dans le fonctionnement habituel de la commission. La commission est saisie, le cas échéant a posteriori, et doit répondre dans des délais très courts. Les équipes pluridisciplinaires placées auprès de cette commission sont destinataires des avis et de toutes indications pouvant les aider dans leur évaluation en cas daccueil selon la procédure durgence. Elles peuvent ainsi confirmer les solutions daccueil temporaires en cours, mais aussi en fixer la durée et éventuellement prévoir, dans la limite des 12 mois suivants, les autres périodes daccueil temporaire nécessaires.
La commission doit notamment être attentive au respect des délais de saisine par les établissements pratiquant des accueils durgence ainsi quà la transmission, par ces mêmes établissements, du bilan établi à lissue du séjour.
La plus grande vigilance doit aussi être exercée sur le respect des critères de recours à laccueil temporaire par la commission compétente, par les établissements qui le pratiquent et par les autorités de contrôle et de tarification.
En effet, les places daccueil temporaire, notamment dans les établissements ne disposant que de quelques places en complément dune activité permanente, ne doivent pas être détournées de leur destination. Elles ne constituent pas une variable dajustement du nombre des autres places autorisées.
Si laccueil temporaire est considéré par la personne ou par sa famille comme une manière daccéder à une prise en charge prolongée, on aura sans doute augmenté très provisoirement la capacité daccueil « permanent » dun établissement mais de fait, rien naura été résolu pour les situations complexes visées par ce dispositif.
Laccueil temporaire nest pas destiné à pallier les insuffisances de places en accueil « permanent ». Le développement de la création de places en établissements et de services daccompagnement médico-sociaux se poursuit au travers des différents programmes pluriannuels.
e) Les travaux en cours pour adapter les modalités de financement
et de participation aux spécificités de laccueil temporaire
Pour favoriser le développement de laccueil temporaire et pour lui donner toute la souplesse et la réactivité qui doivent le caractériser, il apparaît souhaitable de recourir au forfait global dans les établissements à prix de journée et à la dotation globale dans les établissements qui ne font que de laccueil temporaire.
Ces dispositions ont été inscrites dans le projet de nouveau décret budgétaire et comptable, en cours de concertation, qui devrait prochainement venir compléter les articles R. 314-1 et suivants du code de laction sociale et des familles relatifs à la gestion budgétaire, comptable et financière et aux modalité de financement et de tarification des établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés au I de larticle L. 312-1 du code de laction sociale et des familles.
Ce mode de financement tiendrait mieux compte des spécificités de laccueil temporaire et notamment des mouvements dans laccueil des personnes.
En effet, laccueil ne peut pas toujours être programmé comme dans la plupart des autres structures qui réalisent la majorité des admissions à date fixe. Lorsque le dispositif sera bien inséré dans le champ médico-social, les périodes de vacances entre deux admissions devraient se réduire.
Le même projet de décret précise, sagissant des personnes adultes handicapées, en application de larticle L. 314-8 du code de laction sociale et des familles, « les conditions dans lesquelles les personnes accueillies temporairement peuvent être dispensées dacquitter tout ou partie des frais afférents à leur prise en charge ». Cest ainsi que pour permettre aux personnes concernées de garder les ressources nécessaires à la poursuite de leur projet de vie à domicile, la participation proposée pour les personnes en accueil temporaire dans les établissements visés au 7o de larticle L. 312-1-I du même code, ne peut pas excéder le forfait hospitalier. Dans les établissements relevant de laide sociale départementale, le montant de cette participation serait fixé par le règlement départemental daide sociale.
Dans lattente de ces probables évolutions de la réglementation, laccueil temporaire reste financé sous forme de prix de journée. Toutefois, la connaissance du contexte est importante. Elle ne peut quinciter les établissements et les services de tarification à clairement identifier les dépenses et recettes concernant laccueil temporaire, notamment dans les structures pour lesquelles laccueil temporaire constitue une activité annexe. Cette démarche simplifiera le travail nécessaire dévaluation et la procédure ultérieure.
III. - Une attention particulière doit être accordée au développement de cette modalité daccompagnement qui préfigure les évolutions à moyen terme du secteur médico-social
Laccueil temporaire sinscrit dans les grandes orientations de la loi no 2002-2 du 2 janvier 2002 et de la loi no 2005-102 du 11 février 2005 pour légalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Il participe de la réponse à plusieurs enjeux majeurs identifiés par ces textes et qui se conjuguent :
- accès et maintien des personnes handicapées dans les dispositifs de droit commun (école, emploi...) avec, pour ce faire, compensation du handicap par la mise en place daides techniques, daides humaines, daides financières et un accompagnement adapté ;
- modification de lapproche dans les procédures dorientation et à terme de lorganisation et du fonctionnement des services et des établissements ;
- évolution des établissements qui vont, pour partie, se rapprocher dun fonctionnement de service avec plateau technique comportant la diversité dapproches nécessaire ;
- mise en place dun projet individuel contractualisé avec lusager et sa famille qui sinscrit dans le projet détablissement et doit entraîner des prises en charge partielles, partagées et diversifiées dans le temps et dans lespace.
Le développement de laccueil temporaire induit le déploiement dinstruments et de pratiques qui favorisent une évolution du secteur médico-social en réponse à ces enjeux.
a) La mise en place dune démarche dynamique liant
accompagnement, évaluation et évolution du projet des personnes
La personne en accueil temporaire est placée dans une situation particulière. Elle se situe dans un processus en mouvement quil convient de prendre en compte et de mettre à profit.
Le dispositif qui accueille la personne se trouve dans lobligation de répondre à ses besoins immédiats tout en préparant la suite de son projet. Laccueil temporaire intervient donc comme moyen dobservation mais aussi comme un facteur dévolution dans la mesure où le projet a été conçu pour une courte durée et où les observations faites sont susceptibles dêtre utilisées et reprises.
Les projets daccompagnement personnalisés doivent être construits afin non seulement de créer une coupure, mais aussi pour inscrire positivement ce temps dans le parcours de la personne.
Laccueil temporaire confère une place particulière à lévaluation de la situation des personnes. Un de ses objectifs est de pouvoir, sur une durée limitée, procéder à des observations et si possible à un bilan et une évaluation.
b) Une procédure dévaluation des pratiques plus réactive
La réussite de laccueil temporaire tient largement à son insertion dans le paysage médico-social local et à son adaptation aux contraintes du terrain.
A ce titre, plusieurs paramètres doivent particulièrement faire lobjet de suivi et dévaluation afin de permettre les évolutions requises :
- le motif de laccueil temporaire : à quelle situation a-t-on répondu ?
- le temps moyen du séjour, avec identification des situations extrêmes ;
- le nombre de séjours uniques, le nombre de séjours répétés, la fréquence maximale de ces répétitions ;
- les suites de laccueil temporaire notamment en terme dévolution pour la personne ;
- les relations de la structure daccueil temporaire avec la famille et, le cas échéant, linstitution qui lui a confié la personne ;
- les échecs et leur analyse.
c) Une plus grande souplesse dans ladaptation
de loffre médico-sociale
Le développement de ce mode de prise en charge et lexpérience particulière qui en résultera peuvent aider les établissements et services à évoluer vers un mode de fonctionnement plus séquentiel, en réseau avec les autres structures médico-sociales ou sanitaires et avec les autres partenaires (école, milieu professionnel, etc.) conformément aux besoins de la personne.
Il entraîne des collaborations nouvelles et une meilleure ouverture de la structure sur lextérieur. Ce sont ces nouveaux modes de travail et dorganisation qui peuvent faire évoluer les établissements et services afin quils deviennent un élément dun dispositif et non un dispositif en soi amené à répondre seul à tous les besoins identifiés. Il peut conduire aussi à encourager une réflexion sur lensemble du projet détablissement.
Laccueil temporaire apparaît comme une bonne représentation de ce que devrait être, dans lavenir, le dispositif médico-social : plus réactif, proche de la personne, capable de formaliser rapidement des projets, de les faire aboutir et de les évaluer.
Laccueil temporaire peut notamment conduire les établissements et services à sortir dun fonctionnement trop rigide. Il peut représenter pour certains établissements une première forme de diversification dans leur activité.
d) Une cohérence dans laccompagnement
qui sinscrit dans un projet densemble
Laccueil temporaire doit sinsérer correctement dans le dispositif médico-social avec les collaborations nécessaires. Si tel nest pas le cas, il ne représentera plus quun temps sans grande signification dans la vie de la personne, une prise en charge trop courte et sans prolongement.
Toutes les garanties à mettre en oeuvre au titre de laccueil temporaire sont à penser pour lévolution du dispositif médico-social : implication et suivi des commissions chargées de lorientation et des équipes techniques, association étroite des familles, de lentourage et des associations représentant les usagers et leur famille pour leur permettre dexercer leur vigilance dans la cohérence de la prise en charge.
Il faut donner une réalité et du sens à laccueil temporaire. Il est indispensable de garantir la mise en place de projets diversifiés et adaptés dans la continuité pour lensemble des personnes.
Conclusion :
Il apparaît donc quen raison des situations concernées, de ses modalités de fonctionnement et de sa capacité dentraînement sur le secteur médico-social, laccueil temporaire, qui pouvait apparaître aux termes de la loi comme se limitant à un mode de prise en charge nouveau dans une palette à développer, constitue un axe de modernisation de loffre daccompagnement en direction des personnes handicapées.
Les services déconcentrés doivent sattacher au développement de places daccueil temporaire, aider et promouvoir les projets existants tout en restant très attentifs à la nature de ces projets, à leur objectif, à leur évolution et leur évaluation.
Laccueil temporaire doit être pris en compte dans la planification médico-sociale et faire lobjet dun développement prioritaire. Il doit ainsi être apprécié en termes déquipements nécessaires à inscrire dans les schémas départementaux tant pour les enfants que pour les adultes.
Dans un premier temps, il serait souhaitable de le développer prioritairement à partir des équipements existants. Ce nest pas la seule modalité de développement mais cest sans doute la plus simple. Des structures spécialement dédiées à laccueil temporaire pourront aussi être développées. Elles seront susceptibles de constituer des lieux dobservation privilégiés en termes de prise en charge et constitueront en outre une source denseignements utiles et transposables.
Je vous demande daccorder une grande vigilance et un traitement prioritaire aux projets de création ou de développement de structures qui comporteront des places daccueil temporaire.
Le directeur général de laction sociale, J.-J. Tregoat |