Direction générale de la santé
Sous-direction promotion de la santé
et prévention des maladies chroniques
Bureau santé des populations
Circulaire DGS no 2007-430 du 7 décembre 2007 relative au programme régional daccès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS)
NOR : SJSP0731552C
Références :
Loi no 98-657 du 29 juillet 1998 dorientation relative à la lutte contre les exclusions ;
Loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;
Loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.
Textes abrogés ou modifiés : circulaire DGS/SD 6D no 2002-100 du 19 février 2002 relative aux programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins en faveur des personnes en situation précaire (PRAPS).
Annexes :
Annexe I. - Contexte législatif, budgétaire et épidémiologique ;
Annexe II. - Stratégie dactions santé précarité ;
Annexe III a-b-c. - Les publics prioritaires (IIIa), les dispositifs (IIIb), les politiques locales (IIIc) ;
Annexe IV. - Les évaluations ;
Annexe V. - Charte dOttawa ;
Annexe VI. - Les bonnes pratiques dans les interventions visant à réduire les inégalités sociales de santé.
La ministre de la santé, de la jeunesse et des sports à Mesdames et Messieurs les directeurs et chefs de service de ladministration centrale (pour information) ; Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de lhospitalisation (pour information) ; Messieurs les préfets de région, président du groupement régional de santé publique, (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour exécution]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour information]).
Les programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins en faveur des personnes les plus démunies (PRAPS) ont été instaurés par la loi no 98-657 du 29 juillet 1998 dorientation relative à la lutte contre les exclusions (art.71). La première génération de PRAPS a couvert la période 2000-2002 puis une deuxième génération a été mise en place en 2003 et est arrivée à échéance en 2006.
La présente circulaire vise à définir la poursuite des PRAPS dans le cadre des Plans régionaux de santé publique (PRSP) résultant de la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et du cadre budgétaire fixé par la loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).
Il convient avant toute chose de définir les concepts suivants, que sont la précarité et les inégalités de santé. En 2000, lObservatoire national de la pauvreté et de lexclusion sociale a proposé la définition suivante proche de celle du Haut comité de santé publique (HCSP) : « La pauvreté est linsuffisance de ressources, la précarité cest la fragilité, linstabilité des situations. La notion de précarité englobe celle de pauvreté. Elle fait référence aux incertitudes et aléas qui pèsent sur les individus au-delà même de leurs ressources du moment ». Le nombre de personnes en situation précaire était estimé entre 10 et 15 millions en 2004. La pauvreté, définie par un niveau de vie inférieur à la moitié du niveau de vie médian, concerne 3 600 000 de personnes dont 1 000 000 qui travaillent sans dépasser ce seuil de pauvreté (notion de « travailleurs pauvres »). Quant à lexclusion, suivant la définition minimaliste du HCSP, qui considère quun exclu est une personne, qui malgré son état de pauvreté, ne bénéficie pas des possibilités daide correspondant le plus à sa situation, le nombre de personnes concernées peut être estimé à 300 000 personnes.
Le lien entre la situation sociale et de multiples aspects de létat de santé (comportements à risque, incidence et pronostic de nombreuses pathologies, modalités de la prise en charge, mortalité, accès à la prévention) est à présent bien établi dans la littérature scientifique, notamment en France (Fassin et al., 2000 ; Joubert et al., 2001 ; Goldberg et al., 2003 ; HCSP, 2003 ; Moulin et al., 2005 ; ONPES, 2006). Les données recueillies au fil des années ont montré quen dépit dune amélioration globale et incontestable de la santé dans les pays industrialisés, les inégalités de santé non seulement persistent mais ne cessent de saggraver depuis la période consécutive à la Seconde Guerre mondiale.
Ces données témoignent de risques de mort prématurée ainsi que de survenue de maladie et daccident pendant lenfance (mais aussi à lâge adulte) plus élevés dans les groupes sociaux désavantagés. On observe également chez ces derniers un accès limité à la santé, et notamment aux actions préventives, avec par exemple, une fréquence plus faible de dépistages de maladies et des vaccinations. Cependant, il convient de rappeler que lobservation de ces résultats nest pas confinée aux extrêmes de léchelle sociale, mais quil existe une distribution socialement stratifiée (le gradient social de santé) des problèmes de santé (Marmot, Shipley et Rose, 1984) qui appelle des stratégies daction couvrant létendue du spectre social et pas seulement les plus vulnérables.
Par ailleurs, réduire les inégalités de santé ne consiste pas seulement à agir sur laccès aux soins, mais à intervenir plus en amont sur les déterminants à lorigine des problèmes de santé considérés. Aujourdhui, les inégalités sociales ou géographiques, en matière daccès à la prévention, sont probablement plus importantes quen matière daccès aux soins. Une politique volontariste dans le domaine de la prévention, pour ne pas être simpliste ou réductrice, doit sappuyer sur une compréhension approfondie des phénomènes conduisant certains groupes sociaux à adopter des comportements à risque. La réflexion en matière dinégalités de santé devrait notamment porter sur les représentations de la santé et de ses déterminants afin daboutir à des politiques plus opérationnelles et plus rationnelles. (rapport « La santé en France 2002 », HCSP).
LObservatoire national de la pauvreté et de lexclusion sociale précise que « paradoxalement, les campagnes de prévention, que ce soit à travers des actions de dépistage ou déducation à la santé, peuvent conduire à court terme à un accroissement des inégalités sociales de santé, les populations les plus favorisées y étant plus réceptives et leur contenu étant quelque fois inadapté au public cible » (rapport ONPES 2003-2004).
LObservatoire national des zones urbaines sensibles en collaboration avec linstitut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) présente une étude sur létat de santé et de recours aux soins des personnes vivant en ZUS et les écarts de létat de santé entre habitants ZUS et autres types de quartiers de la même agglomération. Limpact des déterminants de létat de santé et celui du recours aux soins sont plus amplifiés pour la population des ZUS. Pour exemple, la probabilité de se déclarer en mauvaise santé est de 6,9 points plus élevée pour les femmes que pour les hommes. Hors ZUS, cet effet marginal est de 3,5 points plus fort (source : INSEE, enquête santé 2002-2003, rapport ONZUS 2006 p. 107).
Vous trouverez en complément dans lAnnexe 1 des éléments de contexte législatif, budgétaire et épidémiologique qui peuvent servir dappui à la mise en oeuvre de cette circulaire.
1. Le cadre dintervention
Une stratégie nationale en faveur de la santé des personnes
en situation de précarité
Les PRAPS sont des outils importants pour la réduction des inégalités de santé. Toutefois, la lutte contre les inégalités de santé sinscrit dans une stratégie plus globale dactions qui dépasse leur simple niveau dintervention.
Sappuyant sur les acquis de la loi du 29 juillet 1998 précitée, la direction générale de la santé (DGS), en lien avec la direction de lhospitalisation et de lorganisation des soins (DHOS), la direction générale de laction sociale (DGAS), la direction de la recherche, des études, de lévaluation et des statistiques (DREES), la direction de la population et des migrations (DPM) et la délégation interministérielle à la ville (DIV), a dégagé dès 2005 des axes stratégiques et pistes dactions, permettant de donner un cadre pour la politique publique en matière de réduction des inégalités de santé (annexe II).
Les publics et problématiques prioritaires
a) Les publics prioritaires
Comme le montrent les études épidémiologiques et sociologiques, les publics susceptibles de bénéficier des actions du PRAPS sont hétérogènes. Les PRAPS sadressent aux personnes subissant un phénomène de précarisation parmi lesquelles peuvent être identifiées des populations spécifiques en fonction du niveau de revenus, du statut social, de lorigine, etc.
Ainsi, il convient de mettre en oeuvre des actions spécifiques et/ou adaptées vis-à-vis des populations pour lesquelles laccès et lusage de la prévention et des soins posent une difficulté et notamment (mais pas exclusivement) auprès :
- des gens du voyage ;
- des jeunes en situation de vulnérabilité ;
- des familles monoparentales féminines et des personnes âgées des quartiers de la politique de la ville ;
- des populations étrangères, immigrées ou issues de limmigration notamment lorsquelles vivent dans les foyers de travailleurs migrants, les résidences sociales ou dans des habitats dégradés, avec une attention particulière pour les immigrés vieillissants isolés ;
- des personnes détenues et sortant de prison.
Certaines régions pourront identifier des publics spécifiques comme par exemple les travailleurs saisonniers.
b) Problématiques prioritaires
Les personnes vivant dans la précarité ayant leurs spécificités et leurs besoins propres, les régions lors de leur diagnostic initial devront dégager les problématiques locales à prioriser pour agir favorablement dans le cadre de la prévention et des soins. Les régions pourront sappuyer sur les plans et programmes de santé publique nationaux, qui ont défini des programmes spécifiques à mettre en oeuvre vis-à-vis des publics en situation de précarités tel que le plan santé-mentale, ou qui ont identifié ces populations comme étant prioritaires tels que le plan tuberculose.
Dans le cadre de la politique nationale transversale d« inclusion sociale », laccès à la santé et aux soins sarticule autour de plusieurs objectifs :
- garantir laccès aux soins des personnes disposant de faibles ressources ;
- ouvrir dans les meilleurs délais et avec les meilleures garanties de rigueur dans linstruction de la demande, le bénéfice de laide médicale de lEtat aux personnes qui remplissent les conditions fixées par la loi ;
- améliorer le dépistage organisé du cancer du sein ;
- promouvoir la santé des élèves, avec comme objectif prioritaire la visite médicale à 6 ans et les suites nécessaires à ces visites ;
- réduire lexposition des populations à certains risques environnementaux, plus particulièrement la lutte contre le saturnisme et à lintoxication au monoxyde de carbone.
Pour laccès aux soins, il sera souhaitable de sattacher aux procédures daccès aux droits mais également à leffectivité de ces droits. Cest par exemple pouvoir réduire les difficultés daccès à une domiciliation, agir sur les refus de soins pour des personnes ayant des droits ouverts...
Vous trouverez en annexe III, pour les publics suscités, des orientations, mesures et recommandations prioritaires ainsi quune liste déléments et de dispositifs qui pourront guider votre réflexion et le débat dans votre région.
Les PRAPS, un volet incontournable des plans régionaux
de santé publique (PRSP)
La loi no 2004-806 du 9 août 2004 précitée (art. L. 1411-11 du code de la santé publique) prévoit que tous les PRSP « comportent un ensemble coordonné de programmes et dactions pluriannuels dans la région et obligatoirement un programme régional pour laccès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS) ». En outre, lexistence de territoires concentrant les personnes en situation de précarité économique et sociale, notamment les territoires urbains de la politique de la ville, marque la nécessité dune convergence autour du processus de territorialisation du PRSP.
Une évaluation des PRAPS
Plus que tout autre programme, les PRAPS ont fait lobjet de plusieurs évaluations.
La première génération de ces programmes (2000-2002) a bénéficié dune première évaluation nationale publiée en juillet 2003. Elle montre que les publics bénéficiaires en 2000 étaient principalement, « tout public précaire », les jeunes de 16-25 ans et les professionnels. Dans les constats, les difficultés sont les mêmes partout et certains thèmes, comme la souffrance psychique, sont apparus dans la plupart des régions comme une nette priorité. Les diagnostics de lensemble des besoins des publics et des territoires méritent dêtre approfondis et actualisés. De plus, le passage du diagnostic à la définition des objectifs est assez souvent flou. Il a été aussi constaté labsence de participation du secteur privé ou libéral des champs sanitaires.
Lefficacité des actions est réelle, des résultats positifs ont été constatés dans le sens dune meilleure prise en charge, par la mise en oeuvre dactions innovantes, et par une réelle dynamisation des professionnels et des réseaux de santé. Par contre, les modalités de suivi, de gestion et de pilotage ont semblé encore déficientes, notamment par labsence de bilan systématique.
La deuxième évaluation réalisée en 2004 et publiée en juillet 2005, sest située à la phase de lancement des PRAPS de deuxième génération et a fait suite à la première. Elle a porté principalement sur la pertinence des objectifs au regard des besoins régionaux et nationaux et sur leurs modalités de pilotage. Concernant lélaboration des PRAPS 2, le diagnostic régional indique les publics cibles mais explicite peu leurs problèmes daccès. Par ailleurs, les actions répertoriées sont pertinentes mais les conditions sont partiellement réunies pour que leur efficacité soit à léchelle des problèmes des publics. Lefficacité des actions se trouve réduite, dune part, par le fait que le budget ne permet de toucher quune fraction minime des populations en situation précaire, dautre part, si les professionnels touchés ont pu améliorer les pratiques, ce nest le cas que là où le territoire est couvert à un niveau fin. Dans les deux cas, lextension à une échelle plus opérationnelle na pas été réalisée (persistance et extension). Toutefois, lefficacité de cette mise en réseau locale a progressé depuis les PRAPS 1 (annexe IV).
En mai 2004, à partir de lensemble des évaluations réalisées, linspection générale des affaires sociales (IGAS) a remis un rapport intitulé « synthèse des bilans de la loi dorientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions ». Il classe les PRAPS dans les dispositifs dont le bilan est jugé globalement positif, même sils appellent des améliorations qualitatives. Les PRAPS paraissent être un « dispositif légitime et apte à motiver une réelle dynamique de transversalité ». Si ces programmes restent largement perfectibles, « tous les acteurs saccordent à souligner leur rôle dans le décloisonnement entre santé et social, entre les divers services de lEtat concernés, entre les services déconcentrés de lEtat et les collectivités territoriales, avec le monde associatif, pour lamélioration des pratiques à légard des publics en situation de précarité ou dexclusion ».
2. Les orientations pour lélaboration des PRAPS
dans le cadre des PRSP
2.1. Définitions et objectifs
Les programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins doivent permettre, à partir de concertation et de coordination :
- de mettre en oeuvre des actions permettant aux populations les plus démunies daccéder au système de santé en bénéficiant des prestations répondant au droit commun et en accédant à des actions de préventions primaires et secondaires adaptées aux spécificités de chaque public ;
- de rechercher des solutions innovantes, interprofessionnelles, ou interinstitutionnelles à des problématiques clairement identifiées ;
- damener les professionnels sanitaires et sociaux à développer une culture partagée (échange dinformations, de pratiques, de savoir faire dans le respect des compétences de chacun) apte à améliorer létat de santé des usagers ;
- de donner de la cohérence à lensemble de ces actions.
Les PRAPS sont des programmes majeurs qui participent à la lutte contre les inégalités de santé et à ce titre ils regroupent :
- lensemble des actions de santé en faveur des populations en situation de précarité dans chaque programme des PRSP ;
- les actions spécifiques daccompagnement qui permettent aux personnes les plus marginalisés daccéder aux dispositifs de droit commun.
2.2. Principes délaboration
Ces principes sont les suivants :
- rechercher larticulation avec les autres politiques sectorielles (emploi, logement...) ;
- adapter les dispositifs de droit commun à la population démunie ;
- rechercher la participation des usagers à tous les niveaux du programme (diagnostic, action, évaluation) ;
- favoriser la coordination et la concertation des professionnels autour des problèmes de santé des personnes en situation de précarité ;
- assurer le déploiement du programme par le développement du partenariat avec des territoires de proximité et leurs élus en particulier avec lappui des politiques territoriales de lEtat (politique de la ville : ateliers santé ville au titre du volet santé des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), politique de laménagement du territoire, notamment au titre des territoires de projet, pays et agglomérations ;
- lavis des conférences régionales de santé (CRS) doit être sollicité.
2.3. Démarche délaboration
a) Le diagnostic initial
Le diagnostic initial inclut des données concernant spécifiquement les populations précaires. Pour cela, il mobilise les analyses et les données quantitatives nationales sur les problématiques de santé et daccès aux soins des populations concernées et sappuie sur une information qualitative et quantitative, spécifiquement pour identifier :
- les difficultés et les freins à laccès à la prévention ;
- les difficultés daccès aux droits et aux soins, notamment en ce qui concerne lapplication des dispositions relatives à la couverture maladie universelle (CMU), laide médicale dEtat (AME) et aux assurances complémentaires ;
- les freins à la participation de certains professionnels sanitaires et sociaux (notamment les médecins et chirurgiens-dentistes libéraux) au diagnostic et à la mise en oeuvre des programmes ;
- les déterminants des inégalités sociales et spatiales observées localement.
Ce diagnostic doit tenir compte des démarches territoriales en particulier au titre des Ateliers santé ville propres en effet à préciser les difficultés daccessibilité aux soins et à la prévention telles quappréciées localement en concertation, au plus près des besoins des habitants. Il doit pouvoir prendre en compte la diversité des publics et des situations dans une approche globale de la personne (Annexe III c et V).
b) Les actions
Les actions doivent concerner à la fois les personnes vulnérables, les professionnels et les structures institutionnelles et associatives. Elles peuvent être expérimentales :
auprès des personnes vulnérables :
Le rapport 2003-2004 de lObservatoire national de la pauvreté et de lexclusion sociale (ONPES) relève que des actions de prévention et déducation à la santé pouvaient à court terme, accroître les inégalités de santé en atteignant pas ou peu, voire pas du tout, les populations les plus défavorisées.
Les interventions doivent être des vecteurs datténuation des disparités, notamment en sassurant que les mesures prises ont bien eu les effets escomptés, et en particulier parmi les groupes sociaux les plus désavantagés. Ces actions devront sinspirer des « bonnes pratiques » repérées dans ce champ tant au niveau national quau niveau européen (annexe VI).
Auprès des professionnels :
Par des actions de formation, permettre aux professionnels de mieux travailler ensemble, de dégager des partenariats et des complémentarités tout en respectant leurs champs de compétence afin de répondre au mieux aux besoins de ces publics.
Ces actions veilleront si possible à y associer les personnes précaires, afin de permettre lexpression directe de leurs besoins et attentes.
Il conviendra également de soutenir et développer les réseaux de santé pour créer une dynamique centrée autour des personnes en situation de précarité :
Auprès des structures institutionnelles et associatives.
Les actions qui contribuent de façon identifiable et vérifiable à un meilleur accès à la santé doivent mobiliser les institutions et organismes publics et privés de droit commun, les établissements de santé, les centres de planification ou déducation familiale, les centres dhébergement et de réinsertion sociale (CHRS), les structures daccueil des populations migrantes, les missions locales... pour que ceux-ci intègrent les problèmes de santé des populations précaires dans lensemble de leur projet.
Il convient de veiller à la qualité de la prise en charge médicale et sociale tant à lhôpital (quil soit doté ou non dune Permanence daccès aux soins de santé : PASS) quen ville en mobilisant les professionnels libéraux et notamment, le cas échéant, via lAtelier santé ville.
Les actions développées dans le PRAPS, sans se substituer au droit commun, permettent une réelle approche des problèmes daccès à la prévention et aux soins.
c) Pilotage et évaluation
Un « référent santé/précarité régional » et son suppléant seront désignés dans chaque région pour assurer le pilotage régional du PRAPS. Les coordonnées du référent et de son suppléant sont transmises à la DGS au plus tard deux mois après la diffusion de la présente circulaire.
Ses missions sont :
- de mettre en place et dactualiser le diagnostic initial, tant à légard des problèmes non résolus (thématiques ou géographiques) que des initiatives déjà prises ;
- de définir les axes dintervention qui se traduiront en actions dans le cadre du GRSP ;
- dassurer le lien entre le niveau régional et le niveau national. Les éléments de bilan, pilotage et évaluation seront transmis annuellement au niveau national ;
- danimer ou participer à lanimation régionale en sintégrant dans les dispositifs déjà existants.
Dune manière générale, le référent est dans lorganisation régionale mise en place par le GRSP pour accompagner les projets territoriaux, principalement au titre des CUCS, qui sattachent à mieux connaître et réduire les problèmes de prévention et daccessibilité rencontrés par les publics en situation de précarité économique et sociale. Le référent apporte son concours au cadrage et à la valorisation de la contribution des ateliers santé ville, à la mise en oeuvre de la politique de santé publique sur sa valence santé-précarité, ainsi quau processus dévaluation des CUCS susceptible dêtre mis en place par les acteurs de la politique de la ville.
Le pilotage
Il sappuie sur lutilisation du Système dinformation (SI) des PRSP, outil réalisé à partir dune nomenclature harmonisée à lensemble du territoire des actions de santé publique (http ://www.intranet.sante.gouv.fr/sant/sd1/lpsp_2006/org_reg/prsp/accueil_prsp/suivi.htm). Ce système dinformation permettra de réaliser des bilans annuels des actions du PRSP selon :
- les typologies des populations bénéficiaires ;
- les lieux de réalisation ;
- les modalités dintervention ;
- les financements ;
- les objectifs du PRSP ;
- les thématiques telles que rapportées dans la classification LOLF - programme 204/santé publique et prévention :
- « Pilotage de la politique de santé publique, autres actions dont santé précarité » : soit dans le cadre de la ligne des moyens de la sous-action 1.5. Cette ligne regroupera en particulier les actions spécifiques ne pouvant émarger dans les autres et notamment les actions expérimentales. Elle intègre les actions de partenariat avec les territoires de proximité pour lélaboration ou la mise en oeuvre de programmes ou de projets collectifs de santé publique ou ;
- « Déterminants de santé, Pathologies à forte morbidité/mortalité, Qualité de vie et handicaps ».
Pour ce qui concerne les éléments financiers, le SI permettra didentifier la part des financements GRSP et des autres financeurs pour les actions ciblées.
Lévaluation
Lévaluation est un exercice qui simpose pour tous les programmes de santé publique. Elle permet de savoir si les activités ont réellement été mises en oeuvre et si elles répondent bien aux besoins de la population. Elle indique si il y a nécessité de réajuster laction et comment, afin den améliorer la qualité et lefficacité. Enfin, elle permet de justifier les actions auprès des partenaires et des citoyens.
Limplantation et les résultats des actions relevant des PRAPS devront être rapportés en prenant appui sur des outils dévaluation validés ou en cours de validation comme loutil de catégorisation des résultats des activités de prévention et de promotion de la santé, Preffi, la grille danalyse de la qualité des actions/projets menés dans la perspective de réduire les inégalités sociales de santé présentée en annexe VI et en associant à chaque objectif de celles-ci un ou plusieurs indicateurs.
Sagissant des actions expérimentales, il convient dès lengagement initial :
- de définir leurs modalités dévaluation. Des indicateurs sur le processus mais également quelques uns concernant lefficacité seraient souhaitables ;
- de sassurer dans la durée des partenariats techniques et financiers nécessaires afin de garantir la pérennisation de laction si lexpérience savère positive ;
- de prévoir leur extension, lorsquelles ont prouvé leur efficacité.
Les observatoires régionaux de la santé (ORS) et les équipes universitaires devraient pouvoir vous aider dans cette démarche dévaluation.
Vous veillerez à la bonne articulation des travaux dévaluation de votre programme, avec la formation spécialisée de la conférence régionale de santé (CRS) en charge du suivi et de lévaluation du PRSP et des programmes qui le composent.
3. Financement des actions développées
dans le cadre des PRAPS
Le financement sinscrit globalement dans le cadre des crédits du budget opérationnel du programme « Santé publique et prévention ». La mise en oeuvre de ces crédits incombe désormais au GRSP.
Certaines actions peuvent bénéficier de cofinancements des collectivités territoriales. La participation du Fonds dintervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) pourra être également utilement sollicitée.
4. Rôle de ladministration centrale
Dans le cadre de lanimation des PRAPS, la DGS garantit :
- la diffusion des recherches fondamentales ainsi que des données statistiques de références nationales et internationales en particulier européennes ;
- le partage entre les régions des connaissances entre le social et le sanitaire ;
- la diffusion de bonnes pratiques à partir des expériences issues des régions ;
- la lisibilité et le pilotage au niveau national des PRAPS à partir des bilans fournis par les régions. Dans ce cadre, la DGS diffuse une synthèse nationale de ces bilans.
Pour ce faire, la DGS mettra en place régulièrement des journées thématiques, ainsi quun outil de communication pour permettre la diffusion de ces informations.
Pour toutes informations ou difficultés éventuelles relatives à la mise en oeuvre de cette circulaire, vous pouvez contacter mes services (DGS/MC1, bureau des populations, courriel : lionel.lavin@sante.gouv.fr).
Pour la ministre et par délégation : Le directeur général de la santé, D. Houssin |
ANNEXE I
CONTEXTE LÉGISLATIF, BUDGÉTAIRE ET ÉPIDÉMIOLOGIQUE
La loi no 98-657 du 29 juillet 1998 dorientation relative à la lutte contre les exclusions a prévu un outil essentiel pour faire reculer les inégalités en matière de santé : le PRAPS (programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins). Cest le premier programme de santé qui a donné toute sa place à cette articulation entre le sanitaire et le social. Construit dans une démarche ascendante (programme construit à partir de diagnostic local), il a associé les acteurs du secteur social et du secteur médical en facilitant les coopérations institutionnelles (notamment avec les conseils généraux).
Cette loi a permis de créer deux dispositifs complémentaires visant à réduire les inégalités de santé : les permanences daccès aux soins de santé (PASS) ainsi que le dispositif de gratuité des soins sous condition de ressources (la CMU).
La loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique place la lutte contre les inégalités de santé au coeur des politiques de santé.
Larticle L. 1411-1-1 du code de la santé publique dispose ainsi que « laccès à la prévention et aux soins des populations fragilisées constitue un objectif prioritaire de la politique de santé. Les programmes de santé publique mis en oeuvre par lEtat ainsi que par les collectivités territoriales et les organismes dassurance maladie prennent en compte les difficultés spécifiques des populations fragilisées ». En outre, larticle L. 1411-18 précise que « les programmes mis en oeuvre par lEtat, les groupements régionaux de santé publique, les collectivités territoriales et les organismes dassurance maladie prennent en compte les difficultés particulières des personnes les plus démunies et des personnes les plus vulnérables. » Enfin, larticle L. 1411-11 prévoit que chaque plan régional de santé publique doit comporter un ensemble coordonné de programmes et dactions pluriannuels dans la région et notamment un programme régional pour laccès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies.
Le second des neuf principes exprimés dans le rapport dobjectifs de la loi relative à la politique de santé publique est le principe de réduction des inégalités, principe selon lequel la définition des objectifs et lélaboration des plans stratégiques doivent systématiquement prendre en compte les groupes les plus vulnérables, en raison de leur exposition à des déterminants spécifiques de la fréquence et/ou de la gravité du problème visé, y compris les déterminants liés à des spécificités géographiques.
La loi du 9 août 2004 prévoit, dans chacune des régions, lélaboration dun plan régional de santé publique (PRSP), tenant compte à la fois des objectifs nationaux et des spécificités régionales. Lensemble des PRSP sont arrêtés par les préfets de région et chacun deux comprend notamment des actions dans les domaines couverts par les cinq plans stratégiques présentés dans la loi et des volets spécifiques dont le PRAPS. La loi prévoit la création dun groupement régional de santé publique (GRSP) ayant pour mission de mettre en oeuvre les programmes de santé contenus dans le PRSP.
Le GRSP est constitué sous la forme dun groupement dintérêt public entre lEtat (et les établissements publics de lEtat intervenant dans le domaine de santé publique - INPES et InVS), lARH, lURCAM et la CRAM. Il est présidé par le préfet de région et a pour directeur le DRASS. Les collectivités qui le souhaitent peuvent adhérer au GRSP.
En conséquence, les organismes notamment associatifs menant des actions dans le cadre des PRAPS sont désormais financés par les GRSP.
La loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) a introduit un changement de la logique de fonctionnement de lEtat en substituant à une logique de gestion de moyens, une approche par objectifs de résultats, permettant au citoyen, au contribuable, à lusager, de juger lEtat sur sa performance. Responsabilisation, pilotage stratégique, contrôle de gestion, mesure dactivité, nouvelle comptabilité supposent une modification du système de management de ladministration de lEtat.
Les indicateurs de suivi associés à la loi relative à la politique de santé publique participant à la mesure des inégalités desanté
DREES
(Annexe qui sappuie sur les documents « LEtat de santé de la population en France en 2006 » (DREES, 2007) et « Les indicateurs de suivi de latteinte des 100 objectifs du rapport annexé à la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique » (ministère de lemploi, de la cohésion sociale et du logement, ministère de la santé et des solidarités, DGS, DREES, juillet 2005). Ces deux documents sont accessibles à partir du lien suivant : http://www.sante.gouv.fr/drees/index.html (ouvrages et rapports).
Malgré lamélioration des conditions de vie et les progrès des prises en charge médicales, des disparités sociales significatives en matière de santé demeurent plus importantes en France que dans dautres pays européens selon un rapport 2002 du Haut Comité de santé publique. Les recherches se sont multipliées pour essayer didentifier les facteurs explicatifs de ces inégalités de santé. Ont été ainsi avancés : les conditions de vie, y compris de travail, les modes de vie et comportements à risque, le rôle cumulatif des différences de conditions au cours de la vie, la causalité inverse selon laquelle létat de santé expliquerait les différences de revenus, leffet de la structure sociale (position relative, domination hiérarchique et perte dautonomie), le rôle du système de santé et de soins et certains facteurs nationaux dont pourraient faire partie les politiques sanitaires et sociales. Aucune de ces hypothèses ne suffit à elle seule à expliquer le phénomène qui est à lévidence une résultante de causalités combinées. Il nen reste pas moins important den suivre les évolutions au moyen dindicateurs synthétiques. Limpact des politiques publiques, tant de réduction des inégalités de niveau de vie ou déducation que daccès au système de santé et de soin, pourra ainsi être suivi à moyen et long terme à laide de ces données chiffrées réévaluées chaque année jusquen 2008.
En annexe à la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique figurent cent objectifs de santé publique. Les indicateurs retenus pour suivre latteinte de ces objectifs ont été précisés par un groupe de travail sous légide de la DREES et de la DGS. Ce groupe était composé des principaux producteurs de données sanitaires nationales, auxquels ont été systématiquement associés des experts de chacun des thèmes considérés.
Parmi les cent objectifs, deux ciblent directement les inégalités de santé. Il sagit des objectifs 33 et 34. Le premier annonce vouloir « réduire les obstacles financiers à laccès aux soins pour les personnes dont le niveau de revenu est un peu supérieur au seuil ouvrant droit à la CMU ». Le deuxième objectif énoncé souhaite « réduire les inégalités devant la maladie et la mort par une augmentation de lespérance de vie des groupes confrontés aux situations précaires ».
Ces objectifs se réfèrent en partie à des indicateurs transversaux portant sur les inégalités de santé présentés de façon synthétique dans le tableau ci-dessous.
Définir des indicateurs de mesure des inégalités de santé suppose de déterminer les champs de la santé pertinents dans lesquels on souhaite observer des écarts et leur évolution mais aussi didentifier les critères sociaux appropriés pour mettre en évidence ces écarts.
Concernant les champs de la santé pertinents, le rapport de définition des indicateurs de suivi des objectifs de la loi relative à la santé publique (juillet 2005) a retenu :
Des indicateurs synthétiques de santé :
- santé perçue ;
- santé fonctionnelle ;
- maladies chroniques ;
- espérance de vie à 35 ans ;
- espérance de vie sans incapacité à 35 ans ;
- mortalité prématurée.
Des indicateurs daccès aux soins :
- proportion de personnes dépourvues de couverture maladie complémentaire ;
- proportion de personnes ayant déclaré avoir dû renoncer à des soins pour des raisons financières.
Des indicateurs spécifiques :
- des indicateurs portant sur la survenue ou la gravité de problèmes de santé spécifiques pour chacun des objectifs correspondants ;
- des indicateurs de comportement (nutrition, consommation dalcool, de tabac...) traités avec les objectifs thématiques correspondants.
Concernant les critères sociaux, deux variables de stratification ont été choisies :
- la répartition de la population en 6 catégories selon la classification « profession et catégorie sociale » (PCS) qui est le plus souvent utilisé en France ;
- la répartition de la population selon le niveau détudes en quatre catégories (primaire, premier niveau secondaire, niveau secondaire supérieur, enseignement supérieur).
Santé perçue, santé fonctionnelle et maladies chroniques selon
la catégorie socioprofessionnelle et selon le niveau détudes
En dépit de son caractère général et de la subjectivité dont elle semble relever, la santé perçue apparaît comme un indicateur pertinent de létat de santé, très lié aux autres indicateurs de létat de santé. Un gradient social est relevé dans la déclaration, par les individus, de leur état de santé : les ouvriers suivis des agriculteurs perçoivent un moins bon état de santé ainsi que des limitations fonctionnelles et des maladies chroniques plus fréquentes ; les cadres et les professions intellectuelles supérieures se situent à lautre extrême. Les différences sont encore plus marquées entre les actifs et les inactifs. Une explication tient à la composition du groupe des inactifs où lon observe une surreprésentation des retraités et des personnes handicapées (cf. tableau 1).
Tableau no 1
Santé perçue, santé fonctionnelle, maladies chroniques selon la catégorie socioprofessionnelle (pourcentage)
CATÉGORIE socioprofessionnelle |
PART DE LA POPULATION DÉCLARANT... | |||
---|---|---|---|---|
Etre en moins bon état de santé* |
Etre limité depuis au moins 6 mois dans les activités que les gens font habituellement** |
Avoir une maladie ou un problème de santé chronique ou durable*** |
PART DANS la population totale |
|
Agriculteurs exploitants | 95 | 20 | 29 | 1 |
Artisans, commerçants, chefs dentreprise | 96 | 13 | 24 | 3 |
Cadres et professions intellectuelles supérieures | 97 | 8 | 22 | 7 |
Professions intermédiaires | 97 | 11 | 23 | 13 |
Employés | 95 | 13 | 27 | 17 |
Ouvriers | 93 | 16 | 27 | 14 |
Retraités | 76 | 47 | 63 | 27 |
Autres inactifs | 87 | 20 | 27 | 16 |
Ensemble | 88 | 23 | 36 | 100 |
Champ : Personnes âgées de plus de 15 ans vivant en logement ordinaire en France métropolitaine Source : DREES, « LÉtat de santé de la population en France en 2006 », tableau 24, p. 58. Il sagit de données provisoires issues de lEnquête statistique sur les ressources et les conditions de vie (SRCV) 2004, INSEE. * Libellé de la question : « Comment est votre état de santé en général ? très bon, bon, assez bon, mauvais, très mauvais ». ** Libellé de la question : « Avez-vous une maladie ou un problème de santé qui soit chronique ou de caractère durable (y compris séquelles daccidents, handicaps) ». *** Libellé de la question : « Depuis au moins 6 mois, en raison de problèmes de santé, êtes-vous limité dans les activités que les gens font habituellement ? ». |
Quant à leffet du niveau de diplôme des répondants, il apparaît clairement un gradient de santé déclarée croissant entre ceux qui ne sont pas diplômés et ceux qui ont des diplômes les plus élevés. Un constat similaire est observé dans lUnion Européenne (cf. tableau 2).
Tableau no 2
Santé perçue, santé fonctionnelle, maladies chroniques selon le niveau détudes (pourcentage)
NIVEAU DE DIPLOME | PART DE LA POPULATION DÉCLARANT... | |||
---|---|---|---|---|
Etre en moins bon état de santé* |
Etre limité depuis au moins 6 mois dans les activités que les gens font habituellement** |
Avoir une maladie ou un problème de santé chronique ou durable*** |
PART DANS la population totale |
|
Sans diplôme ou CEP | 77 | 38 | 50 | 34 |
CAP-BEPC | 93 | 19 | 32 | 33 |
Bac-Bac + 2 | 96 | 12 | 26 | 22 |
Diplôme supérieur | 97 | 10 | 22 | 11 |
Ensemble | 88 | 23 | 36 | 100 |
Champ : Personnes âgées de plus de 15 ans vivant en logement ordinaire en France métropolitaine. Source : DREES, « LÉtat de santé de la population en France en 2006 », tableau 25, p. 58. Il sagit de données provisoires issues de lEnquête statistique sur les ressources et les conditions de vie (SRCV) 2004, INSEE. * Libellé de la question : « Comment est votre état de santé en général ? très bon, bon, assez bon, mauvais, très mauvais ». ** Libellé de la question : « Depuis au moins 6 mois, en raison de problèmes de santé, êtes-vous limité dans les activités que les gens font habituellement ? ». |
Lespérance de vie à 35 ans selon la catégorie sociale
Le seuil de 35 ans correspond à lâge où les variables actuellement utilisées pour la caractérisation des groupes sociaux sont « stabilisées » pour la majorité de la population : les études sont en général terminées et la vie professionnelle initiée. Entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990, lespérance de vie à 35 ans a augmenté pour toutes les catégories sociales. Ce sont toujours les ouvriers qui vivent le moins longtemps et les cadres et professions intellectuelles supérieures qui ont lespérance de vie la plus longue. Sur la période 1991-1999, les hommes cadres ou exerçant une profession intellectuelle supérieure ont une espérance de vie à 35 ans de 46 ans contre 39 ans pour les ouvriers. Pour les femmes, ces chiffres sont respectivement de 50 ans et 47 ans. Ainsi, les différences de mortalité sont plus faibles chez les femmes que chez les hommes. Les écarts despérance de vie entre catégories socioprofessionnelles se sont accrus chez les hommes alors quils restaient stables chez les femmes (cf. tableau 3).
Tableau no 3
Espérances de vie des hommes et des femmes à 35 ans, par période et catégorie socioprofessionnelle (en années)
CATÉGORIES et professions intellectuelles supérieures |
PROFESSIONS intermédiaires |
AGRICULTEURS | ARTISANS, commerçants, chefs dentreprise |
EMPLOYÉS | OUVRIERS | INACTIFS non retraités |
ENSEMBLE | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Hommes | ||||||||
1976-1984 | 41,5 | 40,5 | 40,5 | 39,5 | 37,0 | 35,5 | 27,5 | 38,0 |
1983-1991 | 43,5 | 41,5 | 41,5 | 41,0 | 38,5 | 38,5 | 27,5 | 39,0 |
1991-1999 | 46,0 | 43,0 | 43,5 | 43,0 | 40,0 | 39,0 | 28,5 | 41,0 |
Femmes | ||||||||
1976-1984 | 47,5 | 46,5 | 45,5 | 46,0 | 45,5 | 44,5 | 44,5 | 45,0 |
1983-1991 | 49,5 | 48,0 | 47,0 | 47,5 | 47,5 | 46,5 | 45,5 | 46,5 |
1991-1999 | 50,0 | 49,5 | 48,5 | 49,0 | 48,5 | 47,0 | 47,0 | 48,0 |
Champ : France entière. Source : DREES, « LEtat de santé de la population en France en 2006 », tableau 26, p. 59. Il sagit de données issues de léchantillon démographiques permanent et état civil, INSEE. |
Le taux de mortalité prématurée
Le taux de mortalité prématurée : indicateur classique qui témoigne de la mortalité survenue avant un âge donné, habituellement 65 ans. Ce taux est près de trois fois supérieur chez les hommes : 306,7 % chez les hommes contre 134,6 % chez les femmes (mortalité avant 65 ans, données dEurostat, 2002). Le niveau de la mortalité prématurée varie aussi selon les régions françaises. Les taux de décès les plus élevés sobservent dans le Nord - Pas-de-Calais puis en Picardie, Haute-Normandie, Champagne-Ardenne et en Bretagne. Les taux les plus faibles en Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes, Ile-de-France et Alsace (cf. carte ci-dessous).
Source : « LEtat de santé de la population en France en 2006 », DREES, pp. 219
La proportion de personnes qui ont renoncé à des soins optiques ou dentaires au cours des 12 derniers mois pour des raisons financières
Pour appréhender lobjectif 33, un indicateur, la « proportion de personnes qui ont renoncé à des soins optiques ou dentaires au cours des 12 derniers mois pour des raisons financières » a été retenu par le groupe dexperts. Le choix de retenir les soins dentaires et optiques tient au fait que 49 % des renoncements aux soins concernent la santé bucco-dentaire et 18 % les lunettes. A partir des données de lEnquête santé protection sociale (SPS) pour lannée 2004, cette proportion a été estimée à 10 % parmi les personnes âgées de 18 ans et plus avec des variations observées selon le sexe (les femmes sont davantage concernées, 11,6 % contre 8,2 %), lâge (le renoncement est sensiblement plus élevé dans le groupe dâges intermédiaires des 30-59 ans) et le revenu (le renoncement diminue à partir dun revenu mensuel de 2 500 euros par ménage). Le renoncement dans le domaine dentaire est aussi plus stable jusquà un revenu de 2 500 euros mensuels. Il baisse ensuite de manière importante avec la croissance du revenu. Dans le domaine optique, les renoncements les plus importants touchent les personnes disposant dun revenu du ménage inférieur à 1 300 euros. Il tend ensuite à diminuer quand le revenu sélève jusquà 2 200 euros par ménage puis se stabilise ensuite quel que soit le niveau de revenus.
ANNEXE II
MINISTÈRE DE LA SANTÉ DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS
DIRECTION GÉNÉRALE DE LA SANTÉ
STRATÉGIE DACTIONS SANTÉ PRÉCARITÉ (SASP)
Sept axes stratégiques pour une amélioration de la santé
des populations en situation de précarité
Synthèse des travaux ayant associé : la direction générale de la santé (DGS), la direction de lhospitalisation et de lorganisation des soins (DHOS), la direction générale de laction sociale (DGAS), la direction de la recherche, des études, de lévaluation et des statistiques (DREES), et la délégation interministérielle à la ville (DIV).
Coordination : direction générale de la santé
Résumé
Nos sociétés présentent une structuration sociale inégalitaire, à lorigine dinégalités sociales de santé. Au sein de cet ensemble, des flux représentent la dynamique des individus et de la société : processus dexclusion v/s processus dinclusion, précarisation v/s « stabilisation ». Les populations en difficulté sociale peuvent être caractérisées par différentes variables rendant compte, le plus souvent imparfaitement, de leur positionnement ou de leur trajectoire. Les personnes subissant un phénomène de précarisation constituent le sous-ensemble le plus large au sein duquel de nombreuses sous populations peuvent être identifiées en fonction du niveau de revenus, du statut social, de lorigine, etc. Pour le Haut Comité de la santé publique, « Le recoupement des études publiées sur le sujet montre quil existe en France probablement de dix à quinze millions de personnes qui dans une période récente de leur vie ont à un moment ou à un autre perdu quelques-unes des sécurités essentielles qui assurent une certaine stabilité, et vivent donc dans une situation de grande vulnérabilité, notamment du point de vue de leur santé (haut comité de la santé publique. La progression de la précarité en France et ses effets sur la santé. Rennes. Editions de lENSP, 1998.. »). Par ailleurs, on compte en France, un million de mineurs pauvres, 2,5 millions de bénéficiaires de laide alimentaire, un million de travailleurs pauvres et près de 5 millions de bénéficiaires de la CMU-C.
Les ruptures et conditions de vies passées et présentes qui caractérisent la précarité sociale induisent ou révèlent des problèmes de santé, parfois aussi elles en découlent. Elles rendent moins à même les personnes de repérer et de soigner ces problèmes de santé, qui saggravent et se cumulent. Entre consultation tardive et renoncement, ce type de recours aux soins limite aussi les chances de guérison et de récupération. Ces personnes cumulent des difficultés sociales, problèmes de santé et de soins.
Parcours de vie défavorables et processus qui mènent à la mauvaise santé sont intriqués, depuis lenfance. La réponse est donc nécessairement plurielle et dépasse le strict champ de la santé publique. Pourtant en sappuyant sur les acquis de la loi du 29 juillet 1998, relative à la lutte contre les exclusions, et sur le nouveau cadre fourni par la loi du 9 août 2004, relative à la politique de santé publique, il a été possible de dégager un certain nombre de pistes dactions sanitaires, sappuyant sur les principes suivants :
- maintenir un lien étroit entre santé et social mais identifier clairement ce qui, tant en termes de budget que de responsabilité et champs dintervention relève de lun ou lautre secteur ;
- renforcer la qualité des soins prodigués à lhôpital (PASS, notamment) comme en ville ; en effet, pour les populations les plus en difficulté, la demande de soins est le plus souvent la seule initiative témoignant dune démarche de santé ;
- sappuyer sur les résultats positifs de la loi de lutte contre les exclusions pour améliorer les actions de santé envers les plus démunis ;
- mettre en oeuvre, de façon transitoire, les dispositifs les plus adaptés à certaines caractéristiques des publics vulnérables, même si laccès au droit commun doit être lobjectif finalement poursuivi.
Les propositions sarticulent ainsi autour de sept axes stratégiques :
1. Mettre effectivement les populations précaires au coeur des politiques de santé publique ;
2. Améliorer laccès à une couverture maladie ;
3. Améliorer laccès à des soins de qualité ;
4. Agir précocement sur lenfant et la famille ;
5. Accentuer leffort de prévention en agissant sur les principaux facteurs de risque comportementaux et environnementaux ;
6. Mener des actions spécifiques ;
7. Encourager la recherche et la diffusion des savoirs.
Axe 1 : mettre effectivement les populations précaires
au coeur des politiques de santé publique
Il nexiste pas de pathologie spécifique de la pauvreté ou de la précarité. Mais on observe un surcroît de risque pour ces populations en termes de mortalité, morbidité et handicap. Le premier axe vise donc à relever le défi posé par ce constat épidémiologique, en faisant en sorte que les populations précaires soient les premières bénéficiaires de la politique de santé publique, au niveau national (en lien avec le niveau européen), régional et local. Il sagit dappliquer effectivement les nouvelles dispositions du code de la santé publique concernant la place centrale que doivent occuper les populations vulnérables dans lensemble des plans et programmes, y compris dans les plans dalerte ou durgence, quils soient dinitiative centrale ou déconcentrée.
Pour cela, il est nécessaire de prendre en compte les populations les plus vulnérables dans lensemble des processus de programmation et de planification. Les dispositions techniques proposées ne seront toutefois efficaces quaprès quun nouvel élan politique ait été donné au niveau national, voire européen.
Il est également important de renforcer les démarches et dispositifs spécifiques (tels les programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins - PRAPS), propres à décloisonner les pratiques et fédérer les acteurs de santé publique, dont la qualité peut encore être améliorée mais dont les moyens doivent être également prévus à la hauteur des enjeux posés.
Enfin, la question des inégalités de santé doit être prise en compte dans les territoires de proximité en :
- développant une connaissance partagée des politiques publiques (logiques, organisations...) dans le cadre desquelles les projets locaux doivent être développés au bénéfice de la santé des publics démunis et vulnérables ;
- suscitant limplication des pouvoirs publics locaux par une mise en évidence de leurs capacités daction vis-à-vis des inégalités sociales de santé et dans un esprit de lisibilité et reproductibilité de laction locale ;
- développant les volets et projets de santé des contrats territoriaux passés entre lÉtat et les collectivités locales, en tenant un compte particulier des problématiques daccès et de recours aux soins des publics démunis et vulnérables et moyennant des logiques de financement tripartites (collectivités locales et État santé et politique de la ville).
Axe 2 : améliorer laccès à une couverture maladie
Les déterminants des inégalités de santé sont nombreux et complexes. Toutefois, laccès aux droits, cest à dire en lespèce, laccès à une couverture maladie, est essentiel pour permettre de résoudre tout ou partie des difficultés financières afin de préserver ou recouvrer sa santé.
La direction de la sécurité sociale nayant pas participé au travail inter directionnel, les autres directions estiment quil faut au minimum proposer la mise en place dun système dinformation de laccès à une couverture maladie, en liaison étroite avec la CNAMTS et les conseils nationaux des ordres professionnels. Cet organisme aurait pour rôle de veiller et dalerter sur les difficultés techniques, éthiques et déontologiques qui pourraient apparaître préjudiciables aux populations les plus vulnérables, à loccasion notamment de la mise en oeuvre des dispositions de la loi 2004-810, du 13 août 2004, relative à lassurance maladie.
Axe 3 : améliorer laccès à des soins de qualité
La loi prévoit légalité daccès aux soins. Pourtant, dans les faits, laccès à des soins de qualité est encore problématique pour les personnes en difficulté sociale. Les propositions pour améliorer leffectivité de légalité daccès aux soins et la prise en charge médicale des personnes en situation de précarité dans les établissements de santé sarticulent selon les axes suivants :
- intégrer la dimension de précarité dans la prise en charge en urgence ;
- affirmer le rôle des permanences daccès aux soins de santé (PASS) dans les territoires de santé, en consolidant, développant et améliorant lefficience du dispositif par des recommandations aux établissements, la mise en place dun groupe de veille du dispositif, le recensement des PASS existantes et des besoins auprès des ARH, et en veillant à une meilleure couverture territoriale ;
- développer les réseaux de santé pour créer une dynamique centrée autour du patient en situation de précarité ;
- sensibiliser et former les professionnels de santé afin quils intègrent le fait social à la dimension sanitaire de leur mission, notamment par un effort portant sur les formations initiale et continue, mais également en impliquant les médecins libéraux dans des actions de santé publique au bénéfice des populations précaires ;
- renforcer la qualité des interventions sanitaires au cours des prises en charge sociales en faisant en sorte que linvestissement des professionnels, des structures et organismes à compétence sociale sur le champ des problématiques de santé soit de qualité et complémentaire avec celui du secteur sanitaire.
Axe 4 : agir précocement sur lenfant et la famille
Les inégalités de santé se construisent pour partie dès lenfance, voire dès la période périnatale. Les objectifs suivants feront lobjet dun rapprochement avec ceux qui seront arrêtés par le plan dactions en faveur de la santé des jeunes, actuellement en phase de concertation interne à la DGS :
- améliorer, en période périnatale, le repérage et la prise en charge des femmes et couples en situation de précarité ;
- renforcer le rôle de lécole, du collège et du lycée comme des lieux privilégiés déducation pour la santé et de dépistage ;
- assurer aux enfants handicapés un niveau de prévention et déducation à la santé identique à celui de la population générale du même âge ;
- mieux prendre en charge la souffrance psychique et les troubles mentaux des plus jeunes.
Axe 5 : accentuer leffort de prévention en agissant sur les principaux facteurs de risque comportementaux et environnementaux
La modélisation des différents déterminants des inégalités de santé permet de mettre en évidence le rôle de nombreux facteurs. Parmi ceux-ci, les comportements de santé et lenvironnement immédiat des individus jouent un rôle important.
Il est nécessaire de proposer un certain nombre de mesures visant à :
- réduire la prévalence du tabagisme au sein des catégories sociales défavorisées (poursuivre laugmentation de la taxation sur la vente de tabac, favoriser laccès des plus défavorisés à des substituts nicotiniques, développer les consultations hospitalières de tabacologie) ;
- réduire la consommation excessive dalcool au sein des catégories sociales les moins favorisées (engager une réflexion sur la taxation différentielle entre les boissons alcoolisées et non alcoolisées, mener une action spécifique dans les entreprises, poursuivre les efforts entrepris pour améliorer la prise en charge des personnes en difficulté avec lalcool sur lensemble du territoire) ;
- réduire lexposition au plomb et au CO (mesures du PNSE) ;
- réduire la fréquence des accidents de la vie courante au sein des populations précaires ;
- lutter contre les conséquences sanitaires de lhabitat insalubre ;
- améliorer la nutrition comme déterminant de la santé, en développant un volet du PNNS2 sur laction en faveur des populations défavorisées, portant sur la demande et sur loffre de produits.
Axe 6 : mener des actions spécifiques
En direction des personnes détenues ou sortant de prison, en adaptant lensemble des politiques de santé publique au milieu pénitentiaire, en particulier :
- le plan en psychiatrie et santé mentale ;
- le programme national hépatites virales C et B 2002-2005 ;
- le plan national de santé bucco-dentaire ;
- les mesures de lutte contre la tuberculose,
et en assurant la continuité des soins pour les sortants de prison, en adéquation avec le droit commun.
- en direction des migrants, en mettant laccent, en 2005, sur le VIH et les hépatites.
En direction des personnes privées demploi, en mettant en place, pour les jeunes éloignés de lemploi, des dispositions relatives à la santé dans les mesures daccompagnement prévues par le plan de cohésion sociale et en élaborant une expérience de suivi sanitaire des autres catégories de personnes sans emploi à léchelle dune région.
Axe 7 : encourager la recherche et la diffusion des savoirs
Il sagit là de développer, à lintérieur des travaux sur les inégalités de santé et de lépidémiologie sociale, les connaissances sur les parcours menant aux inégalités et à la précarité, notamment en matière détat de santé, avec une attention particulière aux données statistiques et épidémiologiques correspondantes ainsi que la compréhension socio-anthropologique des relations entre santé et précarité par des études fines biographiques et monographiques, ces relations étant encore mal connues (approche qualitative).
Cet axe prévoit notamment, lélaboration sous légide de la DREES, sur cinq ans, dun programme de recherches quantitatives et qualitatives, en fonction des besoins prioritaires, des expertises existantes et des capacités des producteurs de données (IRDES, INED, INSEE, InVS, CNAMTS, CNAF, Fonds CMU) à sinscrire dans ce programme.
ANNEXE III a
LES PUBLICS PRIORITAIRES
Les populations issues de limmigration migrants
1. Les pathologies
Certains déterminants de la santé, logement, saturnisme, promiscuité, séquelles de tortures parfois, mauvaise alimentation, carences diverses et retard dans laccès aux soins, sont à lorigine dune morbidité plus importante. Des maladies infectieuses comme la tuberculose, les hépatites virales et le VIH-sida sont davantage représentées chez les personnes migrantes en difficulté. En ce qui concerne ces deux affections le problème est particulièrement important pour les personnes originaires dAfrique subsaharienne.
2. La protection sociale
Sous réserve de résidence régulière et stable et de ressources inférieures à un certain plafond sur le territoire français, la couverture médicale universelle (CMU) prend en charge les étrangers en situation régulière. Laide médicale dEtat (AME) complète ce dispositif pour les personnes en situation irrégulière. Afin de pallier les difficultés daccès aux soins des personnes en situation irrégulière, la circulaire du 16 mars 2005 relative à la prise en charge des soins urgents délivrés à des étrangers résidant en France de manière irrégulière et non bénéficiaires de laide médicale de lEtat (art. L. 254-1 du code de laction sociale et des familles, issu de larticle 97 de la loi de finances rectificative pour 2003 du 30 décembre 2003) vise à permettre une prise en charge des soins urgents quelle que soit la situation administrative des personnes au regard du séjour. Des difficultés sont signalées par les associations travaillant en faveur des migrants ou par les personnels des PASS quant à laccès effectif au système de soins ou aux différentes formes de protection sociale (voir à ce sujet les rapports de lIGAS relatifs à la CMU et à lAME).
3. Les populations les plus en difficulté
Il existe plus spécifiquement des problèmes sanitaires et sociaux pour ce qui est :
- des immigrés vivant en foyers de travailleurs migrants (FTM). Construits dans les années 1960-1970, ces foyers étaient destinés à des travailleurs isolés. Prévus comme habitat transitoire, ils sont devenus lhabitat durable de personnes isolées (en France du moins) originaires surtout du Nord de lAfrique et de lAfrique de lOuest, qui y vivent parfois depuis plusieurs décennies. 120 000 places sont disponibles réparties dans environ 700 foyers ou résidences sociales issues des foyers, mais le nombre doccupants est supérieur (environ 140 000) du fait de la suroccupation importante de certains de ces foyers franciliens. Ils sont surtout implantés en Ile-de-France (270 établissements), en Rhône-Alpes et dans la région PACA.
a) Les Maghrébins représentent environ la moitié de la population de ces établissements. La proportion de personnes retraitées est élevée et augmentera dans les années à venir.
b) Parmi les occupants (officiels ou non officiels) des foyers où prédominent des migrants dAfrique subsaharienne, en particulier en Ile-de-France, les moins de soixante ans sont nombreux. Les occupants de ces foyers se trouvent dans une situation sociale souvent précaire et sont soumis à de plus grands risques sanitaires du fait de mauvaises conditions de logement, denvironnement et dhygiène. Ils sont plus à risque de contracter des affections telles que tuberculose, VIH ou hépatites ;
- des immigrés vieillissants isolés vivant hors des FTM ou résidences sociales et de ce fait difficilement repérables. Ils ont de grandes difficultés à accéder aux dispositifs communs de prise en charge ;
- des jeunes et notamment en ce qui concerne laccès à la prévention, à léducation sexuelle et au respect mutuel filles et garçons.
4. Mesures prioritaires
Laccent sera mis sur la mise en oeuvre des recommandations des différents programmes nationaux (VIH, tuberculose, hépatites et psychiatrie).
Les actions pour parfaire la connaissance des problèmes rencontrés par certains migrants pour accéder à la couverture médicale universelle ou à laide médicale dEtat seront privilégiées.
La problématique de la santé des populations migrantes sera abordée en privilégiant :
- laccès aux droits, à la prévention et aux soins dans les structures communes mais aussi dans les permanences daccès aux soins de santé (PASS) ;
- la possibilité de bénéficier aussi bien de lallocation personnalisée dautonomie que des autres aides existant en ce secteur (aides ménagères, soins à domicile) en adaptant ces dispositifs à des groupes de personnes plutôt quà des individus ; il convient de souligner limportance dun travail avec les centres locaux dinformation et de coordination (CLIC), la politique de la ville et limportance de mener des actions conjointes avec les conseils généraux, les caisses primaires dassurance maladie, et de façon globale avec lAgence nationale pour la cohésion sociale et légalité des chances ;
- une réflexion sur le devenir des foyers à adapter avec dimportants travaux (faits dans le cadre du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants), particulièrement lorsque le public est vieillissant : cette démarche est déjà entreprise pour 170 foyers concernant 30 000 places avec la nécessité de produire, en fonction des caractéristiques des résidents, des logements respectant les normes « handicap » et accessibles aux personnes à mobilité réduite et dorganiser le recours au maintien à domicile. Il est important de prévoir un projet social à fort contenu dinterventions concernant la santé, porté par les DDASS et les conseils généraux. Par ailleurs deux établissement dhébergement pour personnes âgées dépendantes expérimentaux (à Colombes dans le 92 et Bobigny dans le 93) se créent et devront être évalués ;
- la prévention et laccès aux soins dans les foyers où réside une part importante de populations moins âgées ;
- une information réciproque entre les PRAPS et les PRIPI (programme régionaux dinsertion des populations immigrées).
La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 (art. 146) a donné un fondement législatif au programme régional dintégration des populations immigrées (PRIPI). Ce programme constitue au niveau régional le document de référence de laction de lEtat et de ses partenaires en matière daccueil et dintégration.
Le PRIPI recense à partir des besoins locaux et dans un document unique lensemble des actions concourant à laccueil, laccès aux droits et la promotion sociale et professionnelle des personnes immigrées. Il prévoit des orientations pluriannuelles et un programme annuel.
La responsabilité du PRIPI incombe au préfet de région.
Parce quil implique la mise en oeuvre dactions interministérielles partenariales et territorialisées, le PRIPI nécessite au niveau régional un pilotage fort qui incombe au préfet de région, lequel est assisté dun comité de pilotage rassemblant les préfets de départements, les services de lEtat, les acteurs publics et privés concernés, les représentants des collectivités territoriales. Lanimation de ce comité peut être confiée à la DRASS ou à la DRTEFP.
Le diagnostic initial doit permettre dapprécier leffort à consentir eu égard à limportance des populations concernées dans la région, leurs caractéristiques, lévaluation des actions déjà réalisées.
Le PRIPI couvre les différents domaines de lemploi, de léducation, de la santé, du logement, de la lutte contre les discriminations. Il met aussi en perspective les plans départementaux daccueil, prend en compte la déclinaison des différents accords-cadres conclus au plan national en faveur des jeunes et des femmes et assure larticulation avec les programmes pour lintégration arrêtés par les autres opérateurs.
Les jeunes en situation de vulnérabilité
Les jeunes en difficulté ne constituent pas un groupe homogène tant les situations et contextes de vie sont variés : étudiants « pauvres », jeunes en insertion, jeunes de la protection judiciaire de la jeunesse, primo-arrivants, jeunes en errance... Cependant, un certain nombre de problèmes relatifs à la santé se retrouvent chez ces différentes catégories de population tant en termes de fragilités, de souffrance psychologique et de comportements à risque, que de difficultés dans les conditions de vie, laccès à la prévention, aux droits et aux soins.
Ces difficultés sont plus importantes que pour les autres jeunes du même âge. Elles sont la source de nombreuses vulnérabilités.
Des données spécifiques sont disponibles concernant les jeunes en difficulté dinsertion sociale et professionnelle. Les résultats proviennent des enquêtes relatives aux jeunes consultants dans les centres dexamen de santé de lassurance maladie, des jeunes relevant de la protection judiciaire de la jeunesse, ou des enfants scolarisés (notamment en 3e). Cette dernière fait ressortir des écarts entre la situation dans les zones déducation prioritaire et les zones urbaines sensibles en comparaison avec des établissements situés en dehors.
Résultats des enquêtes sur la santé des jeunes en difficulté
Jeunes en insertion
Les études réalisées par le centre technique dappui et de formation des centres dexamen de santé renseignent sur létat de santé, les comportements et la fragilité sociale des jeunes en difficulté dinsertion professionnelle. Le rapport du CETAF de décembre 2005 établi pour 105 901 jeunes dresse un tableau préoccupant (confirmant la tendance relevée les années précédentes). Ainsi, une jeune fille sur trois, et un jeune homme sur cinq sestime en mauvaise santé, les prévalences de non-suivi médical sont deux fois plus élevées que chez les non-précaires (10 % chez les jeunes filles vs 4 % et 22 % chez les jeunes hommes vs 10 %) et les données de létude suggèrent que les jeunes en difficulté dinsertion adoptent des comportements à risque à un âge plus précoce (tabac, alcool).
Par ailleurs, des études sont menées par lINSERM (Marie Choquet) sur la santé des jeunes relevant de la protection judiciaire de la jeunesse. Létude réalisée en 1998 montrait de nombreux problèmes tant en termes de plaintes de santé, de troubles dépressifs allant jusquà la tentative de suicide que de comportements à risque (consommations, sexualité) et de violence. Lenquête 2005 confirme ces tendances. Si les jeunes de la PJJ sestiment dans une très large majorité bien portants, la différence avec la population scolaire est manifeste concernant les « conduites déchappement de la vie ordinaire » dont les absences scolaires réitérées, les fugues, les tentatives de suicide ainsi que les comportements de consommations de tabac et de substances illicites. Parallèlement, leur expérience est fortement marquée par la violence agie mais aussi subie (notamment par des agressions sexuelles). Nombre de ces traits sont particulièrement accentués chez les filles enquêtées.
Enfants scolarisés
Des renseignements précieux sont apportés par le dispositif denquête relatif aux bilans de santé menés à lécole (dans le cadre dun processus triennal alternatif : grande section de maternelle, classe de 3e et CM2). Ces données permettent de distinguer la situation dans les ZEP (voire les ZUS).
Les résultats de lenquête 2003-2004 relative aux adolescents scolarisés en classe de 3e (récemment publiés par la DREES) documentent les problèmes de surpoids et dobésité ainsi que les problèmes bucco-dentaires et sensoriels. Elles peuvent être mises au regard des conclusions précédemment dégagées au vu des données 2002-2003 relatives à la santé des enfants de grande section de maternelle et exploitées par lONZUS (sachant que 80 % des établissements en ZUS sont classés en ZEP).
Surpoids et obésité
Un adolescent sur six est en surpoids (obésité incluse) en classe de 3e et des écarts de prévalence vont du simple à plus du double entre les enfants de cadres et douvriers non qualifiés (9,8 % contre 23,4 %). La DRESS souligne que le surpoids apparaît comme le miroir des inégalités sociales (avec un effet loupe si on sintéresse uniquement à lobésité). « Toutes choses égales par ailleurs », le fait dêtre scolarisé en ZEP multiplie par 1,3 le risque dêtre en surpoids (lONZUS relève un surpoids affectant 17 % des enfants de grande section de maternelle en ZUS contre 12 % dans les autres établissements de leur agglomération).
Lenquête menée en 3e permet une comparaison avec la situation des enfants déjà enquêtés à cinq-six ans (grande section de maternelle). Par comparaison la DRESS note une augmentation des problèmes de surcharge pondérale : « Si on sintéresse aux élèves en surpoids (hors obésité) en 3e, 60,5 % avaient un poids normal à cinq-six ans, 31,8 % étaient déjà en surpoids (hors obésité) et 7,7 % avaient un indice de masse corporelle (IMC) traduisant une obésité. A contrario près de la moitié (47,8 %) des élèves en surpoids à cinq-six ans ont retrouvé un poids normal en 3e. Ce dernier résultat pourrait traduire lefficacité dune prise en charge précoce de la surcharge pondérale, quelle soit médicale ou non. »
Bucco-dentaire et troubles sensoriels
Létat de santé bucco-dentaire et la prise en charge des troubles sensoriels sont également des marqueurs indirects des inégalités sociales.
Si globalement près de 5 % des élèves de 3e ont au moins deux dents cariées non soignées, la proportion atteint 10 % dans les collèges situés dans une zone déducation prioritaire (pour les élèves de grande section de maternelle lONZUS relève que le pourcentage des enfants concernés est près de trois fois plus fort en ZUS que dans les autres établissements soit 19 % contre 6,7 %).
Le rapport 2005 de lONZUS montre que les défauts de vision savèrent plus fréquents parmi les élèves de grande section de maternelle situé en ZUS : ils sont observés lors de ces examens pour 21 % des élèves en ZUS contre 18 % pour les autres. Il est significatif que ces problèmes de vision étaient moins souvent connus avant lexamen pour les élèves en ZUS (problème connu avant lexamen pour seulement 7,5 % des enfants en ZUS contre 11,4 % ailleurs) et moins souvent traités par le port de lunettes (9,3 % en ZUS contre 12,0 % ailleurs).
Dune manière générale :
- les enquêtes relatives aux jeunes en difficulté dinsertion révèlent un taux élevé de jeunes sestimant en mauvaise santé, des données de suivi médical insatisfaisantes, une souffrance psychique importante et suggèrent ladoption de comportements à risques à un âge plus précoce... ;
- les enquêtes relatives aux enfants scolarisés soulignent de leurs côtés les écarts de situation pour les problèmes de surpoids et dobésité ainsi que pour la santé bucco-dentaire et les problèmes sensoriels (moins bien connus et traités).
Une problématique globale
Lenvironnement familial et social dans lequel évolue lenfant est un déterminant important de sa santé (présente et à venir). La qualité de lenvironnement socio-familial apparaît particulièrement cruciale durant la période de la grossesse et de la petite enfance pour la santé des futurs adolescents et adultes. Limportance des expériences de la petite enfance sur les comportements et la santé de ladulte est telle que lon entrevoit ainsi un véritable cycle de reproduction et de transmission des inégalités de santé (cf. note 1) . Linfluence de lenvironnement socio-familial est particulièrement attestée sagissant de la prématurité, du poids de naissance, de lasthme, de lobésité, des maladies mentales, de la souffrance psychique et des affections bucco-dentaires. Les inégalités sociales sont également très marquées dans le domaine du handicap, des conduites violentes, des consommations à risque et de la pratique des activités physiques.
Laspect multifactoriel est confirmé par les résultats dune étude qualitative menée en 2001 par le CRES de Picardie auprès de jeunes seize - vingt-cinq ans en filière préprofessionnelle qui indiquent que :
- ces jeunes souffrent dune faible estime de soi se traduisant par un intérêt réduit pour leur corps ;
- le recours aux soins intervient tardivement et seffectue uniquement à titre curatif ;
- ils rencontrent de nombreux obstacles administratifs et financiers dans laccès aux soins ;
- ils ont rarement accès à des informations adaptées ;
- il y a inadéquation entre les demandes de ce public et la réponse du système de soins ;
- les actions de prévention ne tiennent pas toujours compte de leurs représentations et de leur demande.
Des structures daccueil et daccompagnement des jeunes
Les points accueil et écoutes jeunes - PAEJ
Les points accueil et écoute jeunes, adolescents et jeunes majeurs, sont destinés à réduire les comportements à risque et visent à éviter les ruptures, rétablir la communication et le lien de confiance avec les parents et les adultes en général. Le jeune doit pouvoir exprimer son mal-être, formuler ses attentes, retrouver une capacité daction, restaurer une image de soi et des autres positive, réinvestir son parcours scolaire ou dinsertion, interrompre sa dérive vers des situations de dépendance et de marginalité, réduire sa consommation de cannabis. Il doit également être préparé et orienté positivement, le cas échéant, vers une structure de prise en charge sanitaire ou sociale.
Deux cent quarante structures (PAEJ et antennes) existent sur environ 80 % du territoire (données fin 2005). Soixante-six dentre elles ont été créées dans le cadre du plan Borloo. Elles accueillent plus de 40 000 jeunes âgés principalement de quinze à vingt-cinq ans et 15 000 parents pour quatre à cinq entretiens en moyenne.
Les missions locales - ML
Le réseau des missions locales (ML) et des points daccueil, dinformation et dorientation (PAIO) est composé de 600 structures réparties sur lensemble du territoire national y compris les territoires outre-mer. Elles sont financées par lEtat (ministère chargé du travail) à hauteur de 30 à 40 % et les collectivités locales. Ces structures ont pour fonction daccueillir les jeunes de seize à vingt-cinq ans, les informer, orienter, accompagner vers lemploi, la formation et vers des réponses dinsertion sociale : accès à la santé, au logement, aux droits, à la citoyenneté... Pour ce faire, elles doivent travailler en concertation avec lensemble des partenaires locaux susceptibles de répondre aux différentes situations des jeunes et de rechercher avec eux les réponses les plus adaptées dans le droit commun.
Si ces structures concernent linsertion sociale et professionnelle, elles nont pas pour mission le soin et la santé ; elles ont dans ce domaine une fonction danalyse en concertation avec les partenaires de ce champ, une fonction dorientation du public jeune vers laccès aux droits (couverture sociale, couverture complémentaire), une fonction dinformation et daccompagnement vers des réponses de droit commun.
Cette prise en charge globale permet aux ML de simpliquer avec efficacité dans les divers programmes nationaux, régionaux, locaux, en prenant en compte la situation de chaque territoire. (PRAPS, programme de prévention...).
Des orientations prioritaires
Amélioration du suivi des bilans de santé
Plus les difficultés dun enfant, dun adolescent ou dun jeune sont précocement détectées et rapidement prises en charge, plus grandes sont les chances déviter quelles nentraînent des conséquences dommageables à terme.
Des bilans de santé sont proposés à différents stades du parcours du jeune. La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de lenfance instaure quatre visites médicales obligatoires à six, neuf, douze et quinze ans pour tous les enfants au cours de leur scolarité. Ces visites doivent comporter un bilan de létat de santé physique et psychologique et ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. Si des problèmes spécifiques de santé sont révélés à cette occasion, le jeune devra être orienté et accompagné vers une prise en charge adaptée (cf. circulaire DGS/DESCO mai 2002).
Un bilan de santé est également proposé par les missions locales aux jeunes en insertion professionnelle. Ce bilan est accompagné en amont dune sensibilisation visant à en expliquer lobjectif et le déroulement. Le centre dexamens de santé peut effectuer par la suite un suivi destiné à orienter le jeune en cas de besoin et faire le lien avec le médecin traitant. Cet accompagnement du jeune est une occasion daccueil et découte permettant daborder avec lui les questions de prévention et déducation pour la santé.
Développement de la prévention et de léducation
pour la santé
Lobjectif de léducation pour la santé est d« aider chaque jeune à sapproprier progressivement les moyens dopérer des choix, dadopter des comportements responsables, pour lui-même comme vis-à-vis dautrui et de lenvironnement ». Cest dès le plus jeune âge que les enfants doivent être sensibilisés aux comportements positifs en matière de santé, de respect de soi et des autres. Léducation pour la santé est une composante essentielle dune politique de prévention. Elle contribue à léducation à la citoyenneté : ne se limitant pas à la seule transmission de connaissances, elle vise à faire réfléchir les jeunes sur leur propre santé, à les conduire à lautonomie et à la responsabilité vis-à-vis deux-mêmes et de la société.
Toutes les structures accueillant des jeunes sont à même de développer des actions de ce type en les adaptant aux attentes de leur public, en cohérence avec les orientations de santé publique.
Léducation à la santé a une dimension transversale et doit sinscrire dans un projet éducatif global mobilisant tous les personnels intervenant auprès des jeunes, chacun selon ses missions. Elle nécessite donc un effort particulier dinformation et de formation de ces personnels qui pourront simpliquer dans des programmes, en collaboration avec des intervenants spécialistes de la prévention.
Au niveau régional, des pôles de compétence en éducation pour la santé créés dans le cadre des schémas régionaux déducation pour la santé (SREPS) offrent un soutien pour la mise en oeuvre de programmes et contribuent à la cohérence des actions sur un territoire donné.
Articulation des différents acteurs
Les multiples déterminants de la vulnérabilité des jeunes en recherche dinsertion (héritages socioculturels, environnement physique, économique...), nécessitent une synergie particulière de nombreux partenaires (élus, professionnels, secteur associatif) au niveau national, régional et local.
Les réponses reposent sur une prise de conscience des différents acteurs du monde de la santé, de linsertion professionnelle, de linsertion sociale et familiale, et sur une stratégie de mise en réseau de tous les interlocuteurs visant à la fois linsertion et le bien-être du jeune.
Favoriser laccès aux soins, aux droits (protection sociale, logement...), à la prévention et à léducation pour la santé, en renforçant le lien social et en encourageant des actions de promotion de santé, pour concourir à améliorer la qualité de vie des jeunes, leur bien-être et leur autonomie : tel est lobjectif de la charte de la santé des jeunes en insertion sociale et professionnelle signée le 10 mai 2006 par les ministres chargés de lemploi, linsertion professionnelle des jeunes, la santé ainsi que par la présidente du Conseil national des missions locales.
Les personnes détenues
Au 1er juillet 2007, le nombre des personnes incarcérées sélevait à 58 402 dont 2 152 femmes et 722 mineurs incarcérés.
La loi no 94-43 du 18 janvier 1994 (santé publique et protection sociale) a modifié fondamentalement la prise en charge sanitaire des personnes détenues en confiant leur santé au service public hospitalier. De nombreux rapports (IGAS, conseil de lEurope, parlementaires) ont jugé cette réforme pertinente.
Les besoins en soins restent importants compte tenu, dune part, du nombre croissant des personnes incarcérées et, dautre part, des pathologies rencontrées. Les caractéristiques épidémiologiques connues même si elles restent insuffisantes et parcellaires renseignent sur les axes de priorité de santé publique à mettre en oeuvre :
La santé mentale
Daprès Rouillon (F.) (rapport dexpert pour laudition publique sur lexpertise psychiatrique pénale de janvier 2007), la prévalence de la schizophrénie parmi les personnes détenues serait comprise entre 3,8 et 8 % et celle des psychoses chroniques non schizophréniques entre 1,6 et 8 %. Les troubles dépressifs concernent 35 à 40 % des personnes détenues. Ces chiffres sont à mettre en rapport avec lévaluation communément admise pour la population générale selon laquelle la prévalence de la schizophrénie est denviron 1 % et que 5 % des Français présenteraient un état dépressif une année donnée. Pour une comparaison internationale, la méta-analyse de Fazel et Danesh (2002) pose une prévalence des psychoses schizophréniques de 4 % dans les établissements pénitentiaires des pays ayant publié des données épidémiologiques sur les troubles mentaux en détention.
En ce qui concerne le phénomène suicidaire, la direction de ladministration pénitentiaire indique dans une note datée du 14 mai 2007 que quatre-ving-treize personnes sont mortes par suicide dans les prisons françaises en 2006, soit un taux de 15,7 pour 10 000. Ce chiffre, en diminution, reste à consolider par une politique de prévention active, passant notamment par la formation des personnels (de surveillance, SPIP et des équipes sanitaires) au repérage de la crise suicidaire.
Les addictions
La population incarcérée se caractérise par une prévalence élevée des phénomènes daddiction à lentrée en prison. Selon une enquête du ministère de la santé menée en 2003 auprès des personnes entrées en prison (cf. note 2) huit entrants sur dix ont été jugés « en bon état de santé général » lors de la visite médicale à leur arrivée. Pour autant, constate létude, « ils déclarent beaucoup plus de consommation de substances psychoactives - alcool, tabac, drogues illicites, médicaments psychotropes - que lensemble de la population » et « pour le quart dentre eux, des consommations qui se cumulent ». Au regard de la précédente enquête de 1997 qui avait également porté sur la visite médicale dentrée dans les maisons darrêt, la prévalence des consommations à risque de substances psychoactives « a eu tendance à diminuer ». En 2003, un tiers des entrants (33,3 %) déclare avoir consommé des drogues illicites de façon régulière et prolongée dans lannée précédant leur incarcération, du cannabis le plus souvent (29,8 %, en hausse par rapport à 1997), des opiacés (6,5 %, en baisse), de la cocaïne ou du crack (7,7 %, en baisse), des médicaments « utilisés de façon toxicomaniaque » (5,4 %, en baisse), et du LSD, de lecstasy, des colles ou solvants (4 %, en hausse).
En ce qui concerne le tabac, près de quatre entrants sur cinq (77,8 %) déclare fumer du tabac quotidiennement et un sur sept (15 %) consomme plus de vingt cigarettes par jour. La prévalence du tabagisme quotidien est plus élevée parmi les entrants en prison que dans lensemble de la population et ce quel que soit lâge. Elle est, par exemple, environ deux fois plus importante pour les hommes métropolitains âgés de dix-huit à cinquante-quatre ans (81 % contre 40 % daprès lenquête EPCV (cf. note 3) . Concernant les femmes un peu moins de deux entrantes sur trois (63 %) déclarent fumer du tabac quotidiennement contre près de quatre hommes sur cinq (78,5 %). Ainsi, La prévalence dun tabagisme quotidien important est sept fois plus élevée parmi les femmes entrant en prison que parmi les femmes en population générale (cf. note 4) .
Selon les déclarations des entrants qui font état dune polyconsommation, il apparaît que lassociation la plus fréquente, alcool et drogues illicites, « concerne un peu plus de la moitié » dentre eux et que 42 % des usagers de drogues illicites ont déclaré une consommation excessive dalcool. Près dun entrant sur cinq cumule lusage dau moins deux substances psychoactives.
Les maladies infectieuses
La prévalence de maladies infectieuses dorigine virale est plus élevée en milieu carcéral que dans la population générale. Les résultats de la dernière enquête de prévalence réalisée en 2003 montraient une prévalence de linfection par le VIH de 1,04 % (0,21 % dans la population générale) et des anticorps anti-VHC de 4,1 % (0,84 % dans la population générale).
Les données du premier observatoire en prison de lhépatite C (POPHEC) qui regroupe environ 50 % des unités de consultations et de soins ambulatoires UCSA lévalue à 7,1%.
Lenquête de la DREES sur la santé des personnes entrées en prison en 2003 indique que 0,6 % des entrants se déclarait être séropositif pour le VIH (ils étaient 0,9 % en 1998), 0,3 % être co-infectés (VIH/VHC ou VIH/VHB). Ils sont 30 % à déclarer avoir fait un test de dépistage de lhépatite C et 3,1 % à être contaminés, 1,5 % déclarent être sous traitement anti-VHC. Environ 6,5 % des entrants en prison déclarent avoir consommé une drogue par voie intraveineuse au moins une fois au cours de leur vie. Ces derniers sont plus nombreux que les autres à avoir eu recours au dépistage. En 2003, le dépistage du VHC a été proposé par le médecin lors de lexamen dentrée à 66 % des nouvelles personnes détenues.
Une attention particulière devra être portée à la tuberculose. En effet, les données épidémiologiques disponibles montrent que lincidence de la tuberculose en 2004 des personnes en établissement pénitentiaire est denviron quatre-vingt-dix cas pour 100 000, soit dix fois plus élevée quen population générale (cf. note 5) .
Santé bucco-dentaire
Bien quelles soient souvent fragmentaires, les données disponibles soulignent toutes le mauvais état de santé bucco-dentaire des personnes détenues.
Ainsi, le rapport du Haut Comité de la Santé publique sur la santé en milieu carcéral publié en janvier 1993 soulignait déjà limportance des besoins en soins dentaires des personnes détenues. En 2003, la moitié des entrants en détention nécessitait des soins bucco-dentaires et 2,7 % des soins urgents (DREES). Diverses études locales ou régionales, notamment lenquête conduite en 2006-2007 par le service médical de lassurance maladie dans les établissements pénitentiaires de Bretagne, confirment la forte prévalence des pathologies bucco-dentaires dans cette population : caries, parodontopathies, séquelles de traumatismes dentaires, nombre de dents absentes.
Cette situation sexplique par les facteurs suivants :
- les détenus proviennent très majoritairement de milieux sociaux défavorisés et leur mauvais état bucco-dentaire est dabord le reflet de cette réalité sociologique et la conséquence des facteurs de risque qui laccompagnent : pratiques dhygiène bucco-dentaires moins largement diffusées que dans la population générale ; moindre recours à la prévention par les fluorures ; moindre recours aux soins (crainte de la douleur, obstacles financiers à laccès aux soins, prothétiques en particulier) ;
- au cours du séjour en détention, il existe des facteurs daggravation de cet état : alimentation déséquilibrée (prises répétées de produits sucrés et de sodas) ; stress, états dépressifs et prise de psychotropes (doù sécheresse buccale favorisant la carie) ; tabac ; alcool ; autres toxiques.
Ce mauvais état bucco-dentaire nest pas sans conséquences sur létat général (douleur, infection), et peut entraîner des complications, en particulier en cas de pathologies associées (VIH, diabète, maladies cardio-vasculaires). En outre, un très mauvais état dentaire peut être un handicap dans la vie sociale et même constituer un véritable marqueur de marginalité. La restauration dun bon état de santé bucco-dentaire, au-delà de son enjeu de santé, contribue donc également à une meilleure image de soi, et, par là, à de meilleures chances de réinsertion.
La période de détention permet, dans certains cas, dentreprendre le traitement des pathologies préexistantes et dinformer les détenus sur les comportements (hygiène, alimentation, sevrage alcoolo-tabagique,...) favorables à la santé bucco-dentaire. Mais la santé bucco-dentaire est souvent sous-estimée dans la prise en charge sanitaire des personnes détenues et les moyens matériels humains et organisationnels affectés à la prise en charge de la santé bucco-dentaire en milieu carcéral ne permettent pas toujours de répondre de façon satisfaisante à la situation.
A la demande de la DGS, un groupe de travail sur ce sujet a été constitué en 2007 et une étude sur la prise en charge de la santé bucco-dentaire des détenus est en cours. Elle devrait déboucher, en 2008, sur des propositions de mesures damélioration.
Recommandations
Les politiques de santé publique doivent être adaptées au milieu pénitentiaire. Certaines recommandations citées ci-dessus et concernant les jeunes, les gens du voyage et migrants ont du sens à sappliquer au public détenu.
La prise en charge thérapeutique de linfection par le VIH et les hépatites est identique à celle préconisée en milieu libre.
Il convient également de mieux prendre en compte la continuité des soins à la sortie.
Les actions de prévention et déducation pour la santé ont une grande importance dans un lieu de privation de liberté où létat de santé des personnes est déficient.
Les gens du voyage
LEtat français nautorise pas les recensements ethniques. Une étude publiée en 2000 met en évidence combien, si le repérage est nécessaire pour la connaissance de la population et lengagement dactions appropriées, il peut être générateur de stigmatisation et de précarisation pour la population étudiée. En conséquence, les données chiffrées sur ce public de nationalité française sont imprécises.
En France, les gens du voyage sédentaires seraient le groupe le plus nombreux, puis les semi-sédentaires, enfin les itinérants, au nombre de 140 000 environ.
Sous lappellation générique gens du voyage et/ou « tsigane », on distingue généralement, notamment en France :
- les Manouches ou Sinti qui se trouvent dans le Nord, lOuest, lAlsace-Lorraine ;
- les Gitans regroupés en Provence, Languedoc-Roussillon, Pyrénées, et marqués par une influence espagnole ;
- les Rom, dernier groupe arrivé dEurope centrale et très traditionaliste ;
- enfin des individus isolés ou membres de multiples groupes qui vivent en habitat mobile.
La région Ile-de-France et certaines villes situées sur les grands axes de circulation routiers constituent également des territoires daccueil pour les gens du voyage ; 10 000 places de stationnement sont actuellement installées ; les besoins recensés sélèveraient à plus de 38 000 places permanentes auxquelles sajoutent celles nécessaires au stationnement de passage.
En termes de revenus économiques et à titre dexemple : en Charente-Maritime, 70 % des gens du voyage perçoivent le RMI.
Environ 60 % des enfants de familles itinérantes sont scolarisés. La fréquentation des collèges, et plus encore des lycées, est très faible.
Pour de nombreux enfants du voyage, le français nest pas la langue maternelle.
Selon le Conseil de lEurope, 80 % des adultes sont analphabètes ou illettrés.
a) Etudes et statistiques sur létat de santé
La paupérisation des familles entraîne, comme chez la plupart des démunis, la négligence des domaines relatifs à la santé et à lhygiène. Les gens du voyage sont dans la situation générale des populations précaires pour lesquelles des inégalités en matière de santé sont souvent citées :
- au niveau de lEurope élargie, de nombreux rapports font état dune espérance de vie réduite (seulement 3 % des Tsiganes ont plus de 60 ans). Lexclusion, les expulsions, labsence de conditions de vie décentes sont fréquemment citées comme facteurs premiers de lécart entre lespérance de vie des Tsiganes et celle de lensemble de la population ;
- en France, 45 % des gens du voyage sont représentés par la tranche dâge 0-16 ans ;
- des habitudes alimentaires marquées par la précarité qui génèrent des problèmes de santé ;
- daprès Médecins du monde, 93 % des gens pouvant prétendre à une couverture médicale nont aucun droit ouvert et 26 % des patients ignorent tout de leurs droits à celle-ci.
On dispose de peu de données précises sur la prévalence des différentes maladies chez les gens du voyage, toutefois certains rapports font état :
Dune plus grande fréquence de certaines pathologies, par exemple :
- le saturnisme chez les enfants séjournant sur des terrains présentant une surcharge en plomb excessive ;
- les maladies cardio-vasculaires dues à une mauvaise alimentation générant obésité, surpoids et quelquefois cholestérol et diabète ;
- les accidents domestiques, en partie attribués aux modes et aux conditions de vie, le stress en lien avec « la traque » ;
- certains professionnels de santé notent que beaucoup denfants prennent des tranquillisants et parlent détat dangoisse intergénérationnelle ;
- un mauvais suivi de grossesse et des grossesses précoces. Labsence de précautions hygiéno-diététiques entraîne des troubles et labsence de repos favorise les fausses couches, la prématurité, etc. ;
- les maladies génétiques en lien avec la consanguinité des parents.
Laugmentation de la fréquence de ces pathologies est souvent attribuée à la promiscuité, à lhabituelle accumulation de petites pathologies mal prises en compte qui, à la longue, sont responsables de séquelles et dusures prématurées.
On observe également linsuffisance du taux de couverture vaccinale chez les enfants.
Laccès à la prévention en matière de santé rencontre les mêmes difficultés que pour les populations en situation de précarité. Mais sy ajoute le fait que les Tsiganes constituent un public à part à cause du fort taux dillettrisme parmi les adultes et de leur mode de vie itinérante.
Laccès aux services de santé. Cest une démarche particulièrement difficile pour les personnes qui nont pas de domicile fixe. 55 % des individus ayant besoin dune domiciliation administrative pour la CMU/AME nen ont pas. Les gens du voyage constituent moins de 1 % des allocataires de la CAF de Paris. Par contre, ils représentent près de la moitié des saisies sur prestations pour frais dhôpitaux. Ce chiffre signifie que la majorité dentre eux ne disposent pas de mutuelle et ne peuvent avancer les frais dhôpital. En effet, la CMU complémentaire est gratuite lorsque les revenus mensuels sont inférieurs aux barèmes fixés en fonction de la composition du foyer. Mais leffet de seuil génère de nouvelles exclusions (allocation adulte handicapé et minimum vieillesse par exemple).
Laccès à la médecine de ville reste également difficile. Il nest pas facile de trouver des infirmières, voire des médecins, qui acceptent de venir sur les terrains dispenser leurs soins. Dans le cadre de la réforme de lassurance maladie relative au médecin traitant les gens du voyage sont traités comme les VRP ou les forains. « Ils sont invités à choisir un médecin traitant. Ils le font en fonction de ce qui est le plus commode pour eux : proche du lieu de résidence habituelle ou de travail. Lorsquils sont en déplacement ou si leur médecin traitant est indisponible, ils peuvent consulter un autre médecin sans aucune pénalité. Par ailleurs, il leur est toujours possible de changer de médecin traitant à loccasion dune prochaine consultation médicale ». Il sera sans doute nécessaire dêtre vigilant afin que cette disposition ne représente pas un frein supplémentaire à laccès aux soins des gens du voyage.
Le recours aux services hospitaliers représente aujourdhui la voie principale daccès aux soins pour les publics en situation de précarité. Le mode de vie itinérant dune partie des populations tsiganes les conduit à préférer les urgences hospitalières à la médecine de ville. Une fois entré, le patient a accès à lensemble des services, ce qui provoque moins de discriminations négatives dans laccès aux soins.
Par contre, certains patients hospitalisés sortent de lhôpital contre avis médical (absence de mutuelle, impossibilité de stationner à proximité de lhôpital, mauvaises interprétations des informations médicales, méfiance à légard du corps médical, sentiments que les pratiques médicales prescrites sont dangereuses pour les Gitans, que lon fait souffrir plus que les autres patients, etc.). Selon une étude réalisée par Yseult Foucher, 50 % des femmes tsiganes sortent de la maternité contre avis médical.
Propositions :
1. Promouvoir le recours à la prévention, en facilitant laccès aux dispositifs de prévention par des interventions de santé, et permettre aux gens du voyage de bénéficier des actions de prévention définies dans les plans nationaux de santé publique.
2. Favoriser laccès et la continuité des soins, en sassurant de louverture de leurs droits et en facilitant laccès aux professionnels de santé (médecin traitants, PASS...) notamment pour le suivi des pathologies chroniques.
3. Appuyer, renforcer, laction locale pour mettre en oeuvre, sans discrimination, les dispositifs existants, en mobilisant les préfets, les partenaires notamment associatifs, et lensemble des réseaux locaux.
Autres publics
Les grands exclus
Laccès à la santé des personnes les plus exclues, appelées encore « en errance », « à la rue », « sans domicile stable », est caractérisée par linteraction de ces personnes avec le système de santé. Effectivement, laccès à la santé de ce type de populations nest pas simple pour de multiples raisons relevant à la fois des problèmes sanitaires et sociaux caractéristiques de la très grande précarité et de la forme que prend le système de santé pour y répondre, mais aussi des réactions individuelles face à la santé de personnes en situation de souffrance.
Comme bon nombre détudes le démontrent, la précarité est un état de vulnérabilité où lindividu se trouve confronté à des risques économiques et sociaux qui peuvent avoir des répercussions sur son état de santé physique et psychique (cf. note 6) . Les personnes en situation sociale difficile sont, plus que la moyenne, exposées tout au long de leur vie à des risques de santé. Ceci est dû au cumul de facteurs de risques quils subissent, résultat de lintrication des conditions de vie, des comportements, de lenvironnement et de lhistoire individuelle (cf. note 7) . Cependant, si le statut socio-économique de la personne joue un rôle important dans la perception de la santé et de laccès au système de soins, les déterminants individuels (les personnes à la rue ont souvent un passé difficile (cf. note 8) fait de ruptures familiales graves) et macroscopique (environnement immédiat ; la rue est un environnement violent où le stress est omniprésent ainsi que la possibilité daccéder à un certain nombre de toxiques) sont également à prendre en compte. Cette imbrication de multiples déterminants génère de la complexité dans la prise en charge sanitaire et sociale de cette population (cf. note 9) et la bonne réponse en termes daccès à la santé est difficile à trouver.
Les dispositifs semblant les plus appréciés par les personnes « à la rue » sont les structures dites « à bas seuil dexigence », ou « dispositifs intermédiaires » puisquils sont effectivement à mi-chemin du droit commun, sadaptant aux capacités de ce public, adoptant un seuil dexigence minimum pour y être accueilli (cf. note 10) . Le principe de ces dispositifs est doffrir une permanence, une présence constante du personnel qui permet détablir un lien de confiance, de restaurer un lien humain et social, étape indispensable et préalable à toutes les autres. Ces dispositifs permettent alors un accompagnement personnalisé vers le droit commun et ont pour objectif de ramener petit à petit la personne vers celui-ci et de lautonomiser dans son rapport aux institutions.
Toutefois, on observe un « effet pervers » de ce type de fonctionnement. Effectivement, laccès à ce type daccompagnement vers le droit commun est rassurant et confortable pour des personnes souvent très vulnérables et linconditionnalité de laccueil offert par ces structures ne permet den refuser laccès à qui que ce soit même si la personne se présente de multiple fois et que les projets mis en place échouent systématiquement. Cependant, on se retrouve face à un circuit alternatif qui permet, certes doffrir un accès à la santé le plus efficace possible à cette population très précarisée (cest de la réduction des risques), mais qui ne permet pas (ou difficilement) un retour vers le droit commun, les personnes narrivant pas à sémanciper de ces dispositifs qui ne peuvent pas les rejeter (cf. note 11) .
Les difficultés principales rencontrées par ce public pour accéder à la santé, dun point de vue structurel, sont le rapport difficile aux institutions (beaucoup dentre eux ont eu un passé institutionnel lié à une enfance douloureuse), un rapport au temps dégradé qui empêche dhonorer les rendez-vous, une défiance face à la règle et un refus de la frustration (pour les plus jeunes particulièrement), la perte fréquente des papiers nécessaires aux démarches, limpossibilité de suivre des démarches sur le long terme. Au niveau individuel, la désocialisation, des identités en miettes, une perte de lestime de soi sont autant de facteurs influant sur lattention à son propre corps et à sa santé, qui va être largement dégradée, jusquà devenir inexistante. Dans les conduites addictives, le corps devient un outil qui permet à lesprit doublier et la désocialisation saccompagne dune perte dattention à soi, en témoigne létat dhygiène et dabandon (devenu pathologique) de ceux que lon appelle les « clochards (cf. note 12) ». Tous les professionnels de la santé et du social saccordent à dire que la dégradation de létat physique dune personne, dû à un manque dhygiène et à une perte dattention à son corps, est un signal dalarme fort de désocialisation.
Les pathologies rencontrées chez les personnes vivant à la rue sont très souvent des pathologies aggravées (les mêmes quen population générale mais avec une prévalence plus forte) et non des pathologies spécifiques de la rue. Selon une exploitation de lenquête INSEE de 2001 auprès des personnes fréquentant les services dhébergement ou de distribution des repas chauds, « vivre longtemps dans la rue accentue la dégradation physique » et « létat de santé se dégrade proportionnellement à la durée globale passée dans la rue et cela quelle que soit la maladie. Ainsi, parmi les personnes ayant passé plus dune année dans la rue au cours de leur vie, 31 % souffrent de dépression. Viennent ensuite les maladies respiratoires, les maladies du système digestif, du foie et de la peau. Si les maladies psychiques peuvent rendre plus difficiles les conditions dhébergement, les conditions de vie dans la rue entraînent aussi une forte souffrance psychologique et compliquent laccès aux soins et le suivi des traitements (cf. note 13) . Un tiers des personnes ayant vécu au total plus dune année dans la rue déclare boire souvent du vin, de la bière ou de lalcool pour se sentir en forme le matin (cf. note 14) ».
Selon une nouvelle exploitation de lenquête INSEE de 2001 sur les sans-domicile, lexistence ou non dun lien social joue aussi un rôle en matière de santé (en termes de recours aux soins et dabus dalcool) : ceux qui entretiennent toujours des liens sociaux ont une meilleure santé perçue.
« En 2001, 16 % des sans-domicile usagers des services daide sestiment en mauvaise santé, contre 3 % de la population ayant un logement personnel. Les conditions de vie difficiles, le stress, une mauvaise alimentation fragilisent cette population et augmentent les risques dêtre malade. Ainsi, plus dun sans-domicile sur dix souffre de maladies respiratoires, de séquelles daccidents ou de maladies graves. Un sur quatre se juge dépressif. Les sans-domicile consultent des médecins assez régulièrement et trois sur dix ont été hospitalisés au moins une fois durant lannée 2000, le plus souvent en raison de troubles psychologiques. Quatre sur dix, bien que souffrant des dents, ne consultent pas le dentiste, et un tiers déclare avoir des problèmes de vue non corrigés. Cependant cette situation nest pas propre aux sans-domicile (cf. note 15) ».
Le public recourant à laide alimentaire
Environ 3 millions de personnes recourent chaque année à laide alimentaire. Cette aide financée tant par lEurope que par lEtat est fortement portée par la société civile (grandes entreprises, citoyens...). Elle repose sur des associations locales ou nationales qui ont la charge de la distribution des aliments.
Létude ABENA (alimentation et état nutritionnel des bénéficiaires de laide alimentaire) commandée par Dominique Versini en 2003, est la première étude portant directement sur cette population.
Les résultats épidémiologiques de cette étude indiquent que létat sanitaire des bénéficiaires de laide alimentaire comparé à celui de la population générale est significativement dégradé. Ainsi la prévalence de lobésité et du surpoids, de lanémie chez les femmes, est trois fois supérieure à celle de la population générale. De même le nombre des hommes et des femmes hypertendus est très supérieur à celui de la population générale. Enfin les anomalies lipidiques et glucidiques sont beaucoup plus souvent rencontrées chez les sujets de létude que dans la population générale, indiquant un risque élevé de maladies chroniques notamment de diabète et de maladies cardiovasculaires.
Les personnes âgées pluri-dépendantes
Une population très particulière narrive pas à être prise en charge actuellement tant sanitairement que socialement. Ce sont des personnes présentant des pathologies chroniques dégénératives et/ou induisant une absence dautonomie. Ces pathologies physiologiques (Korsakov, sclérose en plaques, Parkinson...) et/ou mentales (psychose, schizophrénie,...) touchent des personnes âgées de 50 ans et plus, très désocialisées, fortement alcooliques. Leur état sanitaire, parce que stable, ne relève pas de lhôpital et leur état social empêche leur entrée dans les établissements existants : EPAD, MAS, LHSS, CHRS, maison relais... Faute de savoir où les placer ces personnes errent dun CHRS à un LHSS, dune maison de retraite à lhôpital. Ces déplacements successifs détériorent leur état sanitaire et social. Actuellement, ce public embolise 35 % des LHSS mais en labsence de solution pérenne ces structures les gardent « en attendant ».
Population résidente en ZUS
La diversité des territoires et des contextes confirme la nécessité davoir une connaissance fine des caractéristiques de la population résidente. Les choix des publics cibles et les stratégies dactions préventives en découlent.
Les études nationales comparatives entre territoires visent à donner aux opérateurs et décideurs locaux des pistes de réflexion pour la connaissance de leurs territoires.
LONZUS (cf. note 16) et dautres études originales commanditées par la DIV (IRDES, INSERM 707) font apparaître les écarts de santé entre publics des territoires et la surreprésentation de certaines catégories de population (âge, genre, composition familiale, revenus...). Plusieurs études concernant différentes caractéristiques individuelles ou faisant référence à la diversité des quartiers de résidence ont été réalisées et publiées (cf. note 17) à partir dune cohorte représentative de lagglomération parisienne qui constitue un échantillon permettant deffectuer des analyses géographiques, spatiales et contextuelles sur le rôle que les déterminants territoriaux ont sur les dimensions de santé étudiées. Elles recueillent des données sociales très complètes, objectives et subjectives, sur les conditions de vie.
Près du tiers des résidents en ZUS (cf. note 18) se déclarent en mauvaise santé contre un quart des personnes qui ne vivent pas en ZUS, toutes choses égales par ailleurs, les personnes âgées de 60 à 79 ans résidant en ZUS ont plus de risque de se déclarer en mauvaise santé que celles âgées de 18 à 29 ans, et ont une plus forte probabilité dêtre hospitalisés. Quel que soit la tranche dâge, ce sont toujours les personnes vivant en ZUS qui ont la plus grande probabilité de se faire hospitaliser. Limpact des déterminants de létat de santé est plus important pour la population des ZUS.
Ainsi, la description sur la composition des ménages montre que les familles monoparentales (famille avec au moins un enfant de moins de 25 ans) sont les ménages chez lesquels on observe la plus grande proportion dhabitat en logement social (44,7 %) et sont surreprésentées dans la tranche de revenu la plus faible. Dans les ZUS, on compte davantage de familles monoparentales 21 % que dans les autres quartiers (15 %).
Les familles monoparentales féminines sont particulièrement touchées par la pauvreté notamment dans les ZUS, où 33 % dentre elles vivent sous le seuil de la pauvreté (- de 617 Euro nets par unité de consommation et par mois), quartiers de type « ouvrier » hors ZUS (23 %) et lensemble des autres quartiers (13 %).
Dans le cadre du recours régulier au médecin, cest dans les quartiers les plus défavorisés que le suivi gynécologique est le moins fréquent. A tous les âges, labsence de suivi régulier y est au minimum deux fois plus fréquent que dans les quartiers favorisés. Il est quatre fois plus fréquent entre 30 et 39 ans. Le suivi à lhôpital, aux dispensaires est deux fois plus fréquent dans les quartiers les plus défavorisés que dans les autres.
Le choix de publics cibles tels que les familles monoparentales féminines et les personnes âgées vise à attirer lattention en direction dun public dont lun est surreprésenté et lautre en augmentation dans les ZUS (ONZUS, Démographie, rapport 2004), ils ont en commun les déterminants sociaux et le recours tardifs daccès aux soins et à la prévention.
ANNEXE III b
LES DISPOSITIFS
LES CENTRES HÉBERGEMENT DE RÉINSERTION SOCIALE (CHRS) : UN DISPOSITIF CENTRAL DE LA LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS
Les CHRS offrent actuellement une capacité de plus de 32 000 places dhébergement dont 3 000 sont plus particulièrement destinées à laccueil en urgence. Ils constituent donc près dun sixième du parc dhébergement durgence destiné aux personnes en grande difficulté. Par ailleurs, une centaine de CHRS sur les 800 actuellement ouverts, participent dune façon ou dune autre à lorganisation de la veille sociale départementale, à travers la gestion des 115, déquipes mobiles ou encore daccueils de jour.
En 2005, ils ont accueilli plus de 140 000 personnes dont des familles avec enfants pour une proportion de près de 40 % (source : tableaux de bord CHRS 2005) ; 58 % des personnes hébergées ont plus de vingt-six ans, et 23 % ont entre dix-huit et vingt-cinq ans.
En moyenne, les personnes accueillies hors hébergement durgence restent environ 137 jours, ce qui représente un taux de rotation moyen du parc de 3,52 % des personnes hébergées en CHRS dinsertion ont pu être orientées en 2005 dans un logement.
Principales missions :
- accueil, notamment dans les situations durgence et hébergement (de lurgence à la réinsertion sociale) ;
- soutien et/ou accompagnement social ;
- veille sociale ;
- adaptation à la vie active et insertion par lactivité professionnelle ;
Activités pouvant être réalisées dans le cadre de ces missions (elles peuvent être développées avec ou sans hébergement) :
- hébergement : collectif ou individuel, regroupé ou éclaté ;
- actions de transition vers le logement ;
- soutien et accompagnement social :
Accueil de jour (point accueil, point écoute, vestiaire, etc.) ; prestations ambulatoires en milieu ordinaire.
Veille sociale :
- service téléphonique durgence (115) ;
- services mobiles allant « au devant » (équipes mobiles de type Samu social) ;
- services daccueil et dorientation.
Adaptation à la vie active et insertion par lactivité économique (partie accompagnement social).
Les centres dhébergement durgence
Les centres dhébergement durgence sont des établissements non conventionnés à laide sociale qui assurent la mise à labri sans discrimination de toute personne ou famille dépourvue dun toit. Il y avait environ 22 000 places durgence en 2007 (avant la mise en oeuvre du PARSA) dont 9 000 en places dhôtels.
Principales missions et caractéristiques
Lhébergement durgence est conçu comme inconditionnel. Cela signifie que ladmission nest pas conditionnée à lentrée dans une démarche dinsertion mais doit être adapté à la diversité des publics accueillis.
Les prestations dhébergement durgence recouvrent, sur une période de temps limitée, le gîte, le couvert, lhygiène et une première aide et orientation à caractère social et sanitaire.
Après le moment de laccueil en urgence, léquipe dintervenants qualifiés doit être en mesure de proposer soit un autre mode de prise en charge dans le même établissement, soit une orientation effective vers une solution adaptée.
Loffre de solutions au-delà de laccueil en urgence relève de la coresponsabilité de lensemble des acteurs du dispositif et plus largement encore, de lensemble des acteurs sociaux.
Les maisons relais
Devant le constat des difficultés daccès à un logement autonome pour des personnes rencontrant des difficultés économiques et sociales, auxquelles sajoutaient des problématiques personnelles disolement ou dexclusion, il a été en 2002 et suite à une expérimentation de cinq ans les maisons relais.
Cette formule de logements alternatifs répond à la nécessité de créer ou de recréer du lien social. La conception même des maisons relais, en petites unités de 15 à 25 logements, avec la présence quotidienne dun hôte (ou dun couple dhôtes) qui leur porte une attention personnalisée, facilite linstauration de ce lien, en même temps quelle offre un environnement sécurisant et chaleureux.
Les maisons relais constituent un outil supplémentaire dans les modes de prise en charge des personnes en situation de grande exclusion et dont les perspectives dinsertion et de retour à lautonomie sont très faibles : elles proposent un logement durable, sans limitation de durée, où les personnes peuvent, selon leurs propres termes : « enfin se poser » sans la préoccupation du lendemain.
Les résidences accueil
Le comité interministériel de lutte contre les exclusions (CILE) le 12 mai 2006 a décidé, dans le cadre de la recherche de solutions de logement adapté pour les personnes ayant un handicap psychique, la mise en place dune expérimentation.
Il sagit par ce programme qui relève du champ du logement social de proposer une offre de logements adaptés, avec trois caractéristiques essentielles : la présence dun hôte, un accompagnement social formalisé par des conventions et un accompagnement sanitaire, lui aussi formalisé par des conventions, notamment avec le secteur psychiatrique.
Le cahier des charges sest largement inspiré de lexpérience réussie des maisons relais mais les modalités de fonctionnement ont été adaptées aux besoins tout à fait spécifiques des personnes souffrant de handicap psychique, doù le choix dune dénomination particulière.
Lits halte soins santé (LHSS)
Crée en 2005 suite à la décision du Comité interministériel de lutte contre les exclusions (CILE) du 6 juillet 2004, le dispositif lits halte soins santé constitue un service médico-social au sens de larticle L. 312-1 9o du code de laction sociale et des familles.
En labsence de domicile, les lits halte soins santé permettent aux personnes de « garder la chambre », de recevoir des soins médicaux et paramédicaux, qui leur seraient dispensés à domicile sils en disposaient.
Ils constituent une modalité de prise en charge globale articulant fortement une dimension sociale avec hébergement temporaire, en un lieu spécifique ou non, de personnes sans domicile, quelle que soit leur situation administrative, et une dimension de soins et de prévention. Ce dispositif ne se substitue à aucune catégorie de structure sanitaire, médico-sociale ou sociale existante et ne doit pas être dédié à un type de pathologie donnée.
Financés sur lONDAM médico-social, au 28 février 2007, 470 lits ont été créés.
Equipes mobiles de psychiatrie
Le CILE du 6 juillet 2004 a prévu de définir et de développer les équipes mobiles de psychiatrie. Lobjet de ces équipes est dintervenir tant auprès des personnes en situation de précarité et dexclusion quauprès des personnes travaillant auprès delles, là où se trouvent les personnes en difficulté : rue (en équipe de maraude) lieux daccueil social ou dhébergement... En trois ans 70 équipes mobiles de psychiatrie ont été créées ou renforcées (13 en 2005, 31 en 2006 et 26 en 2007).
Le dispositif des permanences daccès aux soins (PASS)
Définition des PASS
Les PASS sont des cellules de prise en charge médico-sociale, créées dans les établissements de santé en application de larticle L. 6112-6 du code de la santé publique. Leur mission est de faciliter laccès et la prise en charge des personnes démunies non seulement à lhôpital, mais aussi aux réseaux institutionnels ou associatifs de soins, daccueil et daccompagnement social.
Larticle L. 6112-6 du code de la santé publique (CSP) a prévu la mise en place de permanences daccès aux soins de santé, par les établissements de santé. « Dans le cadre des programmes régionaux pour laccès à la prévention et aux soins prévus à larticle L. 1411-11, les établissements publics de santé et les établissements de santé privés participant au service public hospitalier mettent en place des permanences daccès aux soins de santé, qui comprennent notamment des permanences dorthogénie, adaptées aux personnes en situation de précarité, visant à faciliter leur accès au système de santé, et à les accompagner dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits. Ils concluent avec lEtat des conventions prévoyant, en cas de nécessité, la prise en charge des consultations externes, des actes diagnostiques et thérapeutiques ainsi que des traitements qui sont délivrés gratuitement à ces personnes. »
Larticle L. 1411-11 du CSP prévoit que le plan régional de santé publique (PRSP), comporte parmi ses programmes et actions, « un programme régional pour laccès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies ».
Incombe en outre aux établissements de santé, selon les articles L. 6112-1, 7o et L. 6112-2 du CSP, la mission de service public de contribuer « à la lutte contre lexclusion sociale, en relation avec les autres professions et institutions compétentes en ce domaine, ainsi que les associations qui oeuvrent dans le domaine de linsertion et de la lutte contre lexclusion, dans une dynamique de réseaux ».
Complémentarité de la PASS avec les autres acteurs sociaux
Il appartient aux établissements de santé de garantir « légal accès de tous aux soins quils dispensent », de veiller « à la continuité de ces soins, en sassurant quà lissue de leur admission ou de leur hébergement, tous les patients disposent des conditions dexistence nécessaires à la poursuite de leur traitement. A cette fin, ils orientent les patients sortants ne disposant pas de telles conditions dexistence vers des structures prenant en compte la précarité de leur situation » (art. L. 6112-2 du CSP).
En outre, « lassistant de service social » « affecté, pour tout ou partie de son temps, à la structure des urgences est notamment chargé », dorganiser « la prise en charge sanitaire et sociale adaptée » des patients à leur « sortie de cette structure » (art. D. 6124-21 du code de la santé publique).
Le rôle de la PASS qui favorise laccès à la santé et louverture des droits pour les publics les plus en difficulté, sarticule avec celui des professionnels chargés du suivi sanitaire, social, administratif des patients : équipes de soins, service social de lhôpital, assistant de service social affecté à la structure des urgences, bureau des entrées...
Bilan du dispositif
16 millions deuros ont été accordés depuis 1999 pour leur fonctionnement par les lois de financement de la sécurité sociale. Pour améliorer laccès aux soins des femmes enceintes en situation de précarité, le plan périnatalité a prévu un financement de 0.150 millions deuros pendant cinq ans (2005 à 2009).
A ce jour, près de 400 permanences daccès aux soins de santé sont implantées en France : pour la plupart dans les centres hospitaliers disposant dun service durgences pour un objectif initial de 300 PASS (circulaire DH-AF1/DGS-SP2/DAS-RV3 no 98-736 du 17 décembre 1998).
Elaboration de recommandations sur lorganisation des PASS
Les évaluations commandées par la DHOS, lANAES et lIGAS en 2003 montrent le bien-fondé du dispositif, une couverture géographique satisfaisante et une adéquation aux besoins des populations visées.
A partir de ces travaux et dun certain nombre de retours dexpériences recueillis auprès des acteurs opérationnels lors de journées régionales ou de formations, un tableau de recommandations et de bonnes pratiques sur lorganisation des permanences daccès aux soins de santé (PASS) est en cours de finalisation. Il sagit notamment de mobiliser les acteurs clefs de la PASS (service social, encadrement infirmier, corps médical, direction, comité de pilotage), de formaliser les partenariats internes et externes, détablir des protocoles de repérage, dorientation et de suivi des patients, dinscrire la PASS dans les démarches dévaluation de la qualité, et de mesurer son activité. La diffusion de ces recommandations est prévue fin 2007.
Formation des acteurs à laccès aux soins des publics
en situation de précarité
Enfin, des actions de formations nationales sont également proposées depuis 2006 par lassociation nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) aux professionnels des PASS (et aussi des services durgence) afin de les aider à mieux prendre en charge les publics en situation de précarité dont les migrants, à mieux structurer la PASS et améliorer sa performance.
ANNEXE III c
LES POLITIQUES LOCALES
Les ASV
La loi du 1er août 2003 a été élaborée en vue de réduire les inégalités sociales et les écarts de développement entre les territoires (en particulier entre les quartiers sensibles et le reste de leur agglomération). LEtat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs élaborent et mettent en oeuvre, par décisions concertées ou par voie de conventions, des programmes daction dans les zones urbaines sensibles définies au 3 de larticle 42 de la loi no 95-115 du 4 février 1995 dorientation pour laménagement et le développement du territoire. Ces programmes et actions sappliquent aussi désormais aux nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville définis avec les Contrats urbains de cohésion sociale qui font suite aux contrats de ville (2000-2006).
La santé est affirmée comme un des cinq thèmes prioritaires de la politique de la ville pour la cohésion sociale afin dencourager les acteurs locaux à mieux prendre en compte la prévention et laccès aux soins pour les habitants des quartiers en difficulté.
La politique de santé et la politique de la ville convergent donc aujourdhui pour reconnaître la nécessité de prendre en compte la situation de certains territoires où se concentrent des difficultés sociales et urbaines, et de faire de la démarche des ateliers santé ville lune des déclinaisons territoriales des plans régionaux de santé publique (PRSP).
Le PRSP a vocation à bénéficier à lensemble de la région et tient compte de la géographie des territoires : inégalités observées, territoires de santé du SROS, compétences territoriales notamment sur le cadre de vie et doit cibler les ressources locales au vu des priorités.
Dans cette optique, il a été décidé dans le cadre de lélaboration des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) de généraliser la démarche des ateliers santé ville, expérimentée dans le cadre de la politique de la ville. A partir de 2006, 160 nouveaux ateliers santé ville seront créés, pour porter à 300 le nombre dASV pour 2008 (9). (On en comptait 140 fin 2005.) Comme pour lensemble des autres secteurs dintervention des CUCS, lASV doit comporter des programmes dactions pluriannuels évaluables.
Missions
Pour le développement et le suivi de projets locaux de santé publique entre les élus et les services déconcentrés de lEtat, les ateliers santé ville doivent présenter une programmation dont les préalables sont structurés par trois composantes :
- la composante connaissance et identification des besoins (diagnostic) a pour objet dobjectiver létat de santé de la population locale et ses déterminants, notamment les conditions de vie souvent mises en cause dans les perceptions des acteurs locaux de la santé ;
- la composante santé publique et prévention consiste, par la connaissance territoriale de la situation sanitaire et sociale au niveau local, à définir les objectifs prioritaires des projets locaux de santé publique, au titre des ASV dans le cadre des CUCS, et à mettre en oeuvre les moyens de leur réalisation (exemple : programmation des activités ASV suivant les objectifs stratégiques et opérationnels concernant les thématiques de santé mentale, addictions, nutrition, accessibilité et offre de soin, habitat, dépistages, formations...) ;
- la composante accès et recours au système de soins et de santé doit conduire à préciser et aider à résoudre les difficultés daccès au système de santé et à loffre de soins, compte tenu des éléments danalyse contenus dans le schéma régional dorganisation sanitaire (III) et le PRAPS, sagissant en particulier des liens entre les établissements de santé (projets locaux de santé) et les publics isolés et démunis des territoires prioritaires des communes.
Recommandations :
- sassocier au travail des ASV pour définir les actions prioritaires à mettre en oeuvre dans le cadre des PRAPS au sein des territoires défavorisés ;
- outre un maillage plus fin de lorganisation socio-sanitaire (établissement de santé, centre de soins, médecine de ville...), il convient de favoriser limplantation de dispositifs spécifiques tels : les équipes mobiles spécialisées en psychiatrie (EMP), les médiateurs sociaux existants à former sur des thèmes de prévention en santé, les maisons de santé et espaces de prévention, les permanences hospitalières daccès aux soins de santé, les réseaux de santé médico-sociaux de proximité, en veillant particulièrement à linteraction entre les dispositifs existants et les acteurs de la politique de la ville.
Eléments pour une labellisation du projet atelier santé ville et du suivi de la démarche, programme 2007-2009 du volet santé du contrat urbain de cohésion sociale (DIV).
I. - CADRE OPÉRATIONNEL DE MISE EN OEUVRE ET DE SUIVI ASV DE LÉTAT : CONSTITUTION DE COMITÉS DE PILOTAGE
Les comités de pilotage (pour la création dun ASV puis pour sa programmation annuelle) à mobiliser se situent à différents niveaux :
- communal ou intercommunal : le comité de pilotage opérationnel local pour le suivi des projets locaux de santé publique de lASV dans certains cas au niveau de lagglomération où les villes doivent garder une place prépondérante ;
- départemental : préfectures et DDASS animent et mobilisent les représentants des communes concernées, des associations et des réseaux médico-sociaux au service des projets locaux de santé publique suivis par les ateliers santé ville qui élaborent le plan local de santé publique ;
- régional : le niveau régional (DRASS/SGAR) est un appui au développement des méthodes de projet, à élaborer des diagnostics territoriaux infra régionaux et à développer des formations pour les activités de lASV et des acteurs impliqués via lINPES, lORS, les SREPS, les CODES, les universités, les centres de ressources politique de la ville...
II. - ÉLÉMENTS PRINCIPAUX À IDENTIFIER DANS LE PROJET ASV (CES DISPOSITIONS SAPPLIQUENT AUX PROJETS EXISTANTS AINSI QUAUX NOUVEAUX PROJETS ASV 2007)
II a. Pilotage, suivi et évaluation
Identification dune équipe locale responsable de la démarche ASV et présidée par l(es) élu(s) concerné(s) ;
Réalisation dun diagnostic local partagé préexistant au projet territorial et/ou éléments de contexte motivant dune part, la déclinaison locale des objectifs des plans nationaux et PRSP et dautre part, ceux concernant les actions spécifiques aux territoires ;
Présentation dune programmation annuelle des activités de lASV ;
Descriptif dune méthodologie envisagée pour le suivi et lévaluation des projets locaux de santé publique ;
Qualification des ressources de proximité en matière de soins et de prévention (état des lieux de la démographie médicale et para médicale publique et privée).
II b. Coordination territoriale au service des projets locaux
de santé publique
Identification du positionnement transversal du coordinateur de lASV dans lorganigramme de la commune pour une plus grande marge de réalisation des activités de la démarche :
- données recueillies pour le suivi dun observatoire local de santé ;
- implication des habitants explicite dans la méthodologie de projets, de suivi et dévaluation ;
- mobilisation de professionnels de santé publics/privés et des associations ;
- articulation avec dautres dispositifs ou programmes de la politique de la ville ;
- articulation avec dautres dispositifs ou programmes de la politique de santé publique, dont les articulations avec les projets de santé des établissements de santé dans le cadre du SROS III.
III. c. Indicateurs dactivités de lASV
Les principaux indicateurs à prendre en compte sont :
- nombre de projets de santé publique, objectifs et thèmes suivis par lASV (initiatives locales spécifiques et déclinaison PRSP, MILDT, etc.) ;
- nombre dhabitants impliqués dans les projets de santé publique ;
- crédits demandés/crédits accordés concernant les projets de santé publique initiés par lASV et ceux concernant la déclinaison des PRSP (appel à projets) ;
- partenaires institutionnels sollicités/partenaires effectivement impliqués ;
- professionnels de santé secteur public sollicités/ professionnels effectivement impliqués ;
- professionnels de santé secteur privé sollicités/ professionnels effectivement impliqués.
Les autres indicateurs du tableau de bord des activités de lASV est en cours de finalisation au terme dune expérimentation menée au 1er semestre 2007 sur trois régions.
Textes de référence
Loi no 2003-710 du 1er août 2003 dorientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. JO du 2 août 2003. Chapitre 1er : réduction des inégalités dans les zones urbaines sensibles, annexe I, point 4 : santé.
Plan santé mentale : circulaire DHOS/O2/DGS/6C/DGAS/1A/1B no 2005-521 du 23 novembre 2005 relative à la prise en charge des besoins en santé mentale des personnes en situation de précarité et dexclusion et à la mise en oeuvre déquipes mobiles spécialisées en psychiatrie.
Circulaire DHOS/O2/DGS/6c/DGAS/1A/1B no 2005-521 du 23 novembre 2005 relative à la prise en charge des besoins en santé mentale des personnes en situation de précarité et dexclusion et à la mise en oeuvre déquipes mobiles spécialisées en psychiatrie.
Comité interministériel des villes du 9 mars 2006.
Circulaire relative à lélaboration des contrats urbains de cohésion sociale, 24 mai 2006 et fiche « Programmation santé des contrats urbain de cohésion sociale ».
Circulaire interministérielle DGS/DHOS/SD 1A no 2006-383 du 4 septembre 2006 relative à lélaboration et à la mise en oeuvre des projets de santé publique dans les territoires de proximité et au développement des ateliers santé ville.
ANNEXE IV
ÉVALUATION NATIONALE DES PROGRAMMES RÉGIONAUX DACCÈS À LA PRÉVENTION ET AUX SOINS (PRAPS) (JUILLET 2003)
Résumé analytique
Le comité de pilotage du 16 avril 2003 a clôturé lévaluation nationale de la première génération (2000-2002) des 26 Programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins (PRAPS) en examinant le rapport final et les recommandations émises par lévaluateur. Lancée en mai 2002 par la DGS, cette évaluation fait directement suite à un certain nombre de constats : si les PRAPS 1 ont permis de créer une dynamique partenariale et de décloisonner les secteurs et acteurs concernés dans le champ sanitaire et social, il convient toutefois que les PRAPS 2 - en cours délaboration - intègrent un certain nombre dévolutions, sagissant de leur méthode délaboration, de leur pertinence, de leur mise en oeuvre et de leur suivi et évaluation, tant au niveau régional que national.
Les conclusions remises par lévaluateur ont permis de répondre en majeure partie aux 9 questions évaluatives posées dans le cahier des charges, établi par la DGS début 2002 :
1. Dans quelle mesure les actions mises en oeuvre localement par les PRAPS sont pertinentes par rapport aux besoins constatés dans chaque région ?
2. En quoi les PRAPS ont permis didentifier les populations vulnérables et de mieux connaître leurs problèmes de santé ?
3. Dans quelle mesure les actions mises en oeuvre localement par les PRAPS sont-elles cohérentes au regard des objectifs fixés par la loi et les directives nationales et au regard des autres programmes de santé et de prévention ?
4. De quelle façon les PRAPS ont-ils favorisé laccès au droit commun des personnes vivant dans des conditions précaires ?
5. Les PRAPS ont-ils contribué à créer ou pérenniser des dispositifs spécifiques ?
6. Dans quelle mesure le travail en réseau, recommandé par les PRAPS, est-il une stratégie de mobilisation efficace dans lobjectif daméliorer laccessibilité ?
7. Des instruments de suivi et de mesure et des indicateurs adaptés ont-ils été mis en place localement ?
8. Les outils mis en place par ladministration centrale ont-ils été pertinents et adaptés au pilotage national des PRAPS ?
9. Quelles modalités de gestion des PRAPS pourraient être modifiées pour renforcer les impacts attendus en matière daccès aux droits, à la prévention et aux soins ?
Les constats majeurs formulés par lévaluateur sont, comme généralement en évaluation, à la fois positifs et critiques. Le jugement évaluatif est prolongé par des recommandations autour de 3 axes :
- lidentification et la prise en compte des caractéristiques et des besoins des populations cibles ;
- la cohérence interne et la cohérence externe des PRAPS ;
- les outils de suivi, de pilotage et dévaluation des PRAPS, notamment au niveau national.
Lévaluation, qui sest déroulée de fin mai 2002 à mi-avril 2003, sest notamment fondée sur létude approfondie de 4 régions : Picardie, Poitou-Charentes, PACA et Rhône-Alpes. Elle a donné lieu à lélaboration de différents rapports de « diagnostic » et à une série de recommandations (13 fiches) que la présente note de communication synthétise à grands traits.
Les PRAPS, de quoi parle-t-on ?
Rapide photographie des PRAPS des 22 régions métropolitaines en 2000.
En 2000, première année « opérationnelle » pour les PRAPS 1, plus de 1 390 actions ont été mises en oeuvre dans les 22 régions métropolitaines.
Les financements
Au total, les PRAPS ont bénéficié de 33,5 millions deuros en 2000 (plus de 220 millions de francs), quelles que soient les sources de financements (Etat, collectivités territoriales, assurance maladie...). Les analyses de la répartition entre financeurs montrent que :
- en tenant compte de lensemble des chapitres budgétaires concernés, lEtat est le 1er financeur des PRAPS avec près de 18,3 millions deuros (120 millions de francs). Le 47-11-20 représente à lui seul 45 % du volume total des financements ;
- les collectivités territoriales arrivent en deuxième position, avec plus de 22 % du volume total des financements, soit plus de 7,4 millions dEuros (plus de 49 millions de francs) ;
- la ligne PRAPS du FNPEIS na été créée quen 2001, mais les données disponibles pour lannée 2000 montrent que la CNAM a abondé les PRAPS pour près de 1,8 million deuros (plus de 12 millions de francs).
Les opérateurs
Les actions des PRAPS sont largement mises en oeuvre par le secteur associatif (21 % des porteurs de projets) puis par les missions locales ou PAIO (14 %), les centres daccueil ou dhébergement (8 %) et les hôpitaux (7 %). Cependant, lanalyse des données disponibles reste limitée du fait du poids de la catégorie « autres porteurs de projets » (30 %) ou des non réponses (6 %). Ces porteurs de projets, et donc les actions mises en oeuvre grâce aux PRAPS, se concentrent en zones urbaines (plus de 70 % des actions) et notamment dans les quartiers ou territoires « politique de la ville ».
Les publics bénéficiaires
Enfin, les publics bénéficiaires des PRAPS en 2000 se répartissent en 8 catégories. Parmi celles-ci, les jeunes de 16 à 25 ans (26 % des publics), les professionnels (11 %) semblent être prioritairement visés, alors que la catégorie « tout public précaire » arrive en tête (28 %).
Une pertinence et une cohérence externe globalement avérées mais qui méritent dêtre améliorées.
Les réponses apportées par les PRAPS correspondent aux objectifs identifiés au niveau national et régional... mais à eux seuls : ainsi, les PRAPS sont des programmes dont la pertinence est réelle, mais en partie limitée par la faiblesse des « diagnostics ». En effet, force est de constater que les diagnostics nont pas toujours su identifier lensemble des besoins des publics et des territoires cibles. Cette difficulté de diagnostic (identification et caractérisation des situations, besoins et attentes des publics cibles) a dailleurs été récemment soulignée par lIGAS. Par défaut de méthodes, doutils, de moyens et de capitalisation, les PRAPS nont donc pas toujours permis de mieux connaître globalement les publics vulnérables et leurs problèmes de santé sur tous les territoires régionaux couverts. Ils ont en revanche permis de mieux les connaître au niveau local (là où sont mises en oeuvre les actions étudiées), et parfois au-delà lorsque les diagnostics préalables à lélaboration du PRAPS étaient suffisamment affinés.
Les « diagnostics » et les objectifs des PRAPS ont été formalisés selon des modalités variables et présentent des contenus hétérogènes notamment parce quils ont été élaborés à partir de la combinaison variable de différentes données. Certaines régions ont privilégié une approche « quantitative » (indicateurs statistiques), dautres ont travaillé selon une approche ascendante et qualitative via des groupes de travail ou des études ad hoc, dautres enfin ont combiné les différentes approches. Aujourdhui la difficulté est la même partout : comment actualiser les diagnostics et intégrer aux PRAPS 2 les évolutions de la situation sanitaire et sociale des territoires et des caractéristiques et besoins des publics ? Les évaluations régionales des PRAPS 1 dans la quasi-totalité des régions sont toutefois loccasion de réactualiser ces diagnostics. En ce qui concerne les objectifs, le passage du diagnostic à la définition des objectifs, semble avoir conduit dans de nombreuses régions à une certaine « dilution ».
Ainsi, les objectifs des PRAPS sont souvent jugés trop « consensuels » ou trop généraux par une grande majorité des acteurs rencontrés, même si leur élaboration a donné lieu à de nombreux échanges et débats en GTR et CRPS.
Enfin, lévaluateur souligne que larticulation entre les différents programmes et acteurs reste insuffisante, sauf entre PRAPS et PRS, deux dispositifs qui sarticulent généralement bien, même si cette articulation est plus de niveau stratégique quopérationnel. Enfin, parmi les acteurs concernés par les PRAPS, il convient de relever labsence de participation du secteur privé ou libéral du champ sanitaire, sauf exceptions.
Une efficacité réelle mais encore en devenir en direction des bénéficiaires
Tous les impacts des PRAPS 1 nont pas pu être mis en évidence via lévaluation nationale car pour certains ils ne se sont pas encore produits (comme le souligne aussi lIGAS dans son dernier rapport). Lévaluateur considère dailleurs que les PRAPS agissent le plus souvent en deux temps :
- dabord sur les professionnels et acteurs de terrain du champ sanitaire et social ;
- ensuite seulement sur les publics en situation précaire... doù la nécessité de poursuivre certaines actions via les PRAPS 2 et de pouvoir réaliser régulièrement leur évaluation, tant au niveau régional que national.
Les PRAPS ont globalement produit des résultats positifs qui ont été classés en trois grandes catégories par lévaluateur.
1. Les réponses apportées aux publics précaires
vont dans le sens dune meilleure prise en charge
Les actions étudiées montrent que les PRAPS permettent une meilleure prise en compte et prise en charge des problèmes de santé des publics touchés. Ils ont notamment permis un accueil renforcé, une plus grande écoute et une meilleure prise en charge des publics dans les lieux daccueil, dhébergement, dinsertion... Toutefois, les résultats produits par les actions étudiées ne permettent pas de se prononcer de manière fiable sur laccès des publics au droit commun : si les actions ont souvent conduit à accompagner les publics « pris en charge » vers le soin, la question de la « fin » de laccompagnement reste entièrement posée : à quel moment laccompagnant peut-il et doit-il considérer que la personne accompagnée est suffisamment autonome, reconstruite ou apte à prendre en charge seule sa santé ?
2. Les actions innovantes ou expérimentales
en direction des publics
Les PRAPS ont dans quelques cas permis de mettre en oeuvre des actions innovantes, avec cependant une limite liée à la nature même du « processus » qui laisse insuffisamment le temps de lexpérimentation, le droit à lerreur et qui ne permet pas toujours détendre ces actions expérimentales. Ces actions nouvelles en direction des publics ont pu voir le jour grâce aux PRAPS selon trois « canaux » différents :
- en amont grâce à lidentification de besoins spécifiques auxquels les autres dispositifs ne répondaient pas ;
- via lapport de financements qui faisaient défaut à des actions déjà « dans les cartons » ou de compléments de financement à des actions pré existantes ;
- enfin, par lexpérimentation hors des cadres pré définis par des dispositifs « de droit commun ».
3. Les résultats indéniables au niveau des professionnels concernés qui montrent limportance que revêt le travail en réseau
Au niveau des professionnels eux-mêmes, les PRAPS ont été un facteur évident de dynamisation, de structuration et dinstitutionnalisation des réseaux santé/social. Ils ont dautres parts conduits à lévolution et à lamélioration des pratiques professionnelles de part et dautre à limage dune « fertilisation croisée ».
Des modalités de gestion, de suivi et de pilotage à homogénéiser et à structurer pour quelles ne soient plus le talon dAchille des PRAPS Si lon constate une sensibilisation croissante aux méthodes et outils de suivi, de pilotage et dévaluation, les « procédures et pratiques » actuelles restent encore trop hétérogènes et insuffisamment outillées par les acteurs locaux (DRASS et DDASS) et de portée limitée au niveau national qui rencontre des difficultés à « rendre compte » des PRAPS. Faute de méthodes, outils et moyens adéquats, aux niveaux départemental, régional et national, les actions ne font pas systématiquement lobjet de bilans permettant de mettre en évidence et de comparer leurs apports, leurs résultats ou les difficultés rencontrées. Ce défaut de connaissance qualitative (effets constatés sur les publics touchés), mais aussi quantitative (nombre de personnes touchées par les actions), ne permet pas de valoriser comme il se doit les actions financées par les PRAPS. Ainsi, la reconduction, lextension (extension territoriale et sur des cibles de publics plus importantes) ou larrêt (parce que certaines actions ne sont pas pertinentes, efficientes ou efficaces) des actions ne dépendent donc pas danalyses formalisées et objectivées, mais essentiellement de la connaissance quen ont les coordonnateurs départementaux ou des capacités de financement... Enfin, lévaluation des actions est partout considérée et affichée en tant quexigence impérative conditionnant la connaissance des caractéristiques et besoins des publics cibles, la pertinence du PRAPS, lattribution des financements... Les DRASS et DDASS se donnent peu à peu les moyens de pallier cette difficulté via les évaluations régionales des PRAPS lancées quasiment partout.
Au-delà du pilotage opérationnel, se pose la question de lanimation du réseau des « partenaires institutionnels » du PRAPS. Or, il convient de constater que parmi lensemble des partenaires potentiels ou effectifs (ARH, URCAM et organismes de type CAF/MSA, collectivités territoriales, secteur sanitaire libéral...), deux types de partenaires sont impliqués à un niveau moindre que les autres. Dune part, les collectivités territoriales restent trop peu impliquées en amont (définition des objectifs, choix des actions à financer...), à lexception de certains CPER dont les volets santé « intègrent » les PRAPS, alors quelles sont les premiers co-financeurs des PRAPS. Dautre part, le secteur sanitaire libéral, malgré ladhésion des représentants rencontrés par lévaluateur à la « philosophie » des PRAPS, simplique plutôt dans dautres dispositifs, comme les réseaux ville - hôpital ou dautres réseaux plutôt du « ressort » des ARH. Par ailleurs, en dépit des résultats positifs soulignés par lensemble des professionnels rencontrés et constatés par lévaluateur, ces résultats souffrent de limites qui sont plus liées au dispositif PRAPS lui-même quà la nature des actions mises en oeuvre et qui laissent à penser que la pérennité des actions « lancées » par les PRAPS nest pas complètement assurée (y compris via dautres dispositifs spécifiques ou de droit commun). Si les processus de sélection des actions se sont largement améliorés grâce aux appels à projets de plus en plus communs avec lassurance maladie (les URCAM), ils engendrent encore trop souvent une logique de « guichet » et ne favorisent pas toujours lémergence de nouveaux porteurs de projets, de nouvelles actions ou de nouveaux territoires dintervention.
Enfin, les modalités de financement des PRAPS ne permettent pas de garantir la pérennité des actions financées : principe de lannualité budgétaire, faiblesse des montants financiers en jeu rapportés au nombre dactions financées, complexité des procédures de financement des porteurs de projets, sous utilisation de la possibilité de signer des conventions pluriannuelles...
Evaluation nationale du lancement des PRAPS
de deuxième génération (2003-2006)
Résumé analytique
Se situant à la phase de lancement des PRAPS de seconde génération, la présente évaluation porte sur la pertinence de leurs objectifs au regard des besoins régionaux et nationaux, et sur leurs modalités de pilotage. Les questions évaluatives étaient les suivantes :
1. Qualité du diagnostic des besoins régionaux et infra-régionaux ;
2. Pertinence des objectifs au regard de ce diagnostic ;
3. Cohérence des stratégies et actions inscrites aux PRAPS, par rapport à ces objectifs ;
4. Cohérence avec les autres dispositifs de lEtat et des collectivités ;
5. Implication actuelle et programmée des partenaires restés à la marge des cercles de décision des PRAPS 1 : collectivités territoriales, secteur libéral, bénéficiaires visés ;
6. Caractère opérationnel du système de pilotage et de suivi à léchelle nationale et régionale.
Ce dernier point revêt une importance particulière dans le contexte des lois LOLF et LSP : la DGS et en particulier les programmes de santé publique sont en effet un champ dexpérimentation pour le suivi de laction ministérielle.
Lanalyse sest appuyée sur les sources dinformation suivantes :
- études de cas, par entretiens et étude documentaire, dans cinq régions : Basse-Normandie, PACA, Pays de la Loire, Bretagne, Martinique ;
- dans toutes les autres régions, étude documentaire légère, entretien avec le coordonnateur PRAPS, et questionnaire rempli par celui-ci ;
- entretiens au niveau national, interactions avec le comité de pilotage de lévaluation, présentationsavec les coordonnateurs PRAPS.
Mission, objectifs et moyens impartis aux PRAPS
Les programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins (PRAPS) en direction des personnes en situation de précarité ont été institués par la loi du 29 juillet 1998 (circulaire DGS/SP2 no 1999-110 du 23 février 1999 relative à la mise en place de programmes régionaux daccès à la prévention et aux soins pour les personnes en situation de précarité.)
Les PRAPS de la seconde génération couvrent la période 2003-2006 et font lobjet de la circulaire DGS/DS6D no 2002-100 du 19 février 2002. relative à la lutte contre les exclusions (art. 71).
Selon le rapport du haut comité de la santé publique (1998), les personnes en situation de précarité représentent 20 à 25 % de la population française. »
Les PRAPS « constituent un outil de concertation et de coordination permettant dassocier de multiples partenaires : associations, mutuelles, organismes dassurance maladie, hôpitaux, organismes professionnels, collectivités locales et services de lEtat », et « invitent lensemble des acteurs du système sanitaire et social ainsi que tous les citoyens à sinterroger sur les causes » des « inégalités sociales en matière de santé » (Les passages entre guillemets dans ces lignes de présentation sont extraits du site « PRAPS » de la DGS.).
Des actions auprès des publics précaires et des professionnels sont financées par les DRASS sur un « budget PRAPS », qui fait partie des budgets déconcentrés des programmes de santé publique, utilisés pour alimenter un ou des appels à projets annuels. Ce budget est de lordre d1 euro par personne en situation précaire et par an.
Initialement, le PRAPS 1 disposait dun financement dédié : 15,1 MEuro en 2000. Depuis 2001, les budgets PRAPS ont été fondus avec ceux dautres programmes de santé dans la ligne 47.11.20. En 2004, ils ont été situés dans les « autres programmes de santé publique », pour lensemble desquels 13,4 MEuro ont été inscrits en loi de finances initiale.
A. - DU DIAGNOSTIC AU PROGRAMME :
LÉLABORATION DES PRAPS 2
Mi-2004, 13 documents PRAPS 2 avaient été produits ; lélaboration était en cours dans les autres régions.
A.1. Souvent associé à lévaluation du PRAPS 1, le diagnostic régional des besoins indique généralement les publics cibles, mais explicite peu leurs problèmes daccès
Le diagnostic préalable au PRAPS 2 a pris, dune région à lautre, des formes variées. Il a souvent été associé à une forme dévaluation du PRAPS 1, axée soit sur le fonctionnement du programme, soit, plus fréquemment, sur les actions financées. Dans une région sur deux, ce diagnostic a compris un repérage géographique des besoins.
Les PRAPS 2 désignent, plus précisément que les PRAPS 1, des publics en situation précaire, parmi lesquels sont cités, dune région à lautre, les jeunes de 16 à 25 ans sans emploi, les habitants de zones rurales, les immigrés en situation irrégulière.
Les données sanitaires par publics sont très rares et les PRAPS 2 ont rarement explicité quels obstacles rencontre chaque public.
Des problèmes sont cependant cités, essentiellement :
- les obstacles physiques ou géographiques à laccès aux soins ;
- la méconnaissance du système de santé et les problèmes de communication entre professionnels et personnes démunies ;
- la marginalisation vis-à-vis des systèmes sociaux et le désintérêt pour la santé ;
- le coût des soins pour certaines personnes pauvres.
Les trois premiers obstacles, non financiers, à laccès au système de santé, sont plus souvent cités dans les PRAPS 2 que dans les PRAPS 1, préparés alors que la CMU et la redéfinition de lAME étaient encore en projet.
Les évaluateurs recommandent que soit visé dans chaque région un diagnostic partagé entre acteurs, portant sur la relation entre offre et besoins des publics, ceci en explicitant la diversité des publics, notamment selon la géographie. Tout en mobilisant les données quantitatives dorigine nationale sur les problèmes daccès et la santé, ce diagnostic sappuierait sur une information qualitative constituée sur place pour le PRAPS.
A.2. Les actions répertoriées par les PRAPS sont pertinentes ; cependant, les conditions ne sont que partiellement réunies pour que lefficacité des PRAPS soit à léchelle des problèmes et des publics
La politique daccès aux soins bénéficie, plus que dautres politiques, dun consensus évident sur les principes. Les DRASS-DDASS, nayant quun poids limité sur loffre du système de santé, sappuient utilement sur ce consensus, mais au prix dobjectifs généraux donc peu opérationnels, qui font rarement référence aux publics identifiés dans le diagnostic, précisent peu les acteurs à mobiliser, rarement les indicateurs de réalisations ou résultats, et jamais les budgets nécessaires.
Par ailleurs, les moyens humains et financiers alloués aux PRAPS sont limités : dans ce cadre, pour que les réponses quils contiennent soient à léchelle des problèmes daccès et des publics visés, des conditions doivent être réunies :
- Les actions auprès des publics ne peuvent toucher, sur budget PRAPS, quune fraction minime des personnes en situation précaire. Elles trouvent un sens si elles sont pilotes, expérimentales, si elles produisent des leçons utilisables ensuite par dautres. Cela demande à la fois un suivi-évaluation et une communication sur les actions (cf. B infra).
- Laction auprès des organisations a des effets concrets pour les publics seulement à travers les solutions apportées par ces organisations aux problèmes de ces publics. Donc selon la cohérence entre ce quelles font, et le PRAPS (cf. A.3 infra).
- Laction en direction des professionnels na de portée pour les publics, que si lensemble des professionnels de première ligne sont touchés. Ce nest le cas que là où le territoire est couvert à un niveau fin, et/ou dans les quelques régions où a été fait un gros effort de communication sur les PRAPS.
Concernant ce dernier point, les PRAPS 2 comme les PRAPS 1 ont mis en avant une stratégie censée concilier modestie des moyens et diversité des situations des publics : le décloisonnement ou mise en réseau des professionnels de la santé et du social, de nature à favoriser une meilleure prise en charge, donc un meilleur accès à la prévention et aux soins : les professionnels de santé orientant plus facilement les personnes démunies vers les professionnels sociaux, et vice versa.
Leffectivité de cette mise en réseau locale varie très fortement dun département à lautre : cest au niveau départemental (et non régional) quelle peut être pilotée.
Elle a plutôt progressé depuis le PRAPS 1 : par exemple, des rencontres au sujet des populations précaires entre personnels soignants de psychiatrie et travailleurs sociaux, ont été organisées dans un secteur de psychiatrie sur cinq ; au total, les réunions locales sur le PRAPS ont associé sur douze mois près de 10 000 personnes ; un effectif significatif, même si les professionnels de la santé et du social sont plus dun million.
Cependant, nombre de DRASS et DDASS ressentent, à tort ou à raison, que la priorité donnée par le Ministère aux PRAPS samoindrit ce qui peut les inciter au repli sur un « mini-réseau » de correspondants proches deux, à linverse de la mobilisation visée.
Selon les évaluateurs, les finalités du PRAPS peuvent sinscrire dans les objectifs proposés par le GTNDO, en visant légalité dans le recours aux dépistages et aux soins, la mise en oeuvre efficace des dispositifs CMU, AME, PASS, et en soutenant les dynamiques en ville et à lhôpital visant à créer des réseaux de santé et des dispositifs de proximité prenant en compte la santé des personnes précaires.
La mise en oeuvre des PRAPS requiert non seulement des moyens financiers, mais aussi des ressources humaines accrues dans les DDASS et DRASS, condition de leffet de levier à obtenir sur laffectation des moyens de lassurance maladie et des collectivités locales (Des recommandations sur les actions elles-mêmes, appuyées sur les différents constats de lévaluation, figurent plus loin (A.4)).
A.3. Les PRAPS 2 sont cohérents avec les autres dispositifs sanitaires, PRS notamment. Le lien avec les Conseils généraux et leurs dispositifs est variable. Professionnels libéraux et usagers restent en marge des PRAPS
La recherche de cohérence entre le PRAPS et les autres dispositifs de lÉtat et des collectivités a été accrue dans les PRAPS 2, à en juger par les fréquentes citations, dans le texte des PRAPS, de dispositifs régionaux (PRS, SREPS, SROS) mais aussi nationaux (CMU, AME, politique de la ville) et départementaux (Sur un échantillon de 5 régions, entre 8 et 14 dispositifs sont cités dans le PRAPS 2, contre 1 à 6 dans le PRAPS 1).
La cohérence avec les dispositifs de santé est bien attestée. La cohérence entre le PRAPS et les PRS est favorisée par lexistence dappels à projets communs pour ces programmes ; certains coordonnateurs PRAPS sont aussi coordonnateurs des PRS.
En revanche, la prise en compte des dispositifs sociaux dans les PRAPS est hétérogène. Les DRASS et DDASS rencontrent des difficultés à toucher lensemble des acteurs « sociaux » concernés, les publics visés par le PRAPS relevant de dispositifs très divers selon quon se situe au niveau national, régional ou départemental.
En particulier, les dispositifs départementaux (souvent sociaux) sont mentionnés irrégulièrement. Ainsi, la PMI, qui pourrait être considérée comme au coeur dune approche à la fois sanitaire et sociale, est citée dans 3 PRAPS sur 12.
Ceci est à rapprocher de limplication des conseils généraux dans les PRAPS, très variable dune région et dun département à lautre. Dans la configuration institutionnelle existante, cette implication sest au moins avérée faisable : près dun conseil général sur deux est représenté au comité de suivi ; autant ont intégré une partie du PRAPS dans le volet santé de leur PDI ; un sur cinq prend part à la sélection des projets financés au titre du PRAPS...
Dautres partenaires potentiels, qui étaient à la marge des cercles de décision des PRAPS 1, le sont aussi pour les PRAPS 2 :
- la participation des professionnels libéraux au programme reste modeste à létape du diagnostic et marginale ensuite, même si, dans la moitié des régions, des professionnels soignants (pas forcément libéraux) sont au comité de suivi ;
- la participation dusagers au PRAPS est restée limitée à des cas isolés. Pour le PRAPS 2, le Limousin est cette exception : un comité des usagers y a été constitué pour le diagnostic, puis maintenu pour le suivi du programme.
Ailleurs, plusieurs freins institutionnels et sociologiques sopposent à la participation pourtant requise par la circulaire de 2002 ; largument du manque de savoir-faire devrait, en revanche, être moins invoqué à lavenir, grâce aux premières expériences et aux méthodes développées par ATD-quart monde (sachant que le savoir-faire est un aspect second, les freins principaux étant du côté de la volonté dassocier des usagers, et du temps de personne que les administrations y consacrent).
Concernant les appels à projets (ou appels doffre), les évaluateurs recommandent que loctroi de crédits soit fondé sur des prévisions explicites de réalisations et de résultats. Une large communication devrait être faite sur les appels à projets et spécifiquement sur les priorités du PRAPS.
Plus largement, les évaluateurs recommandent que lanimation par les DRASS et DDASS, associant des usagers dans un rôle consultatif, veille à un suivi des inégalités au sein de chacune des politiques régionales de santé, et utilise une partie de ses crédits pour saisir des opportunités dintervention au-delà des appels à projets.
Le rôle du niveau national (DGS) serait non seulement de faire vivre le « label » PRAPS et de catalyser léchange de bonnes pratiques, mais aussi dapporter des expériences internationales ainsi que des données statistiques de référence.
A.4. Recommandations spécifiques sur les actions
au titre des PRAPS
Lévaluation na pas porté sur les actions menées au titre des PRAPS 2, ceux-ci étant en phase de lancement ; cependant, les analyses de la stratégie des PRAPS (A.2 supra) et de leur fonctionnement partenarial (A.3) ont conduit les évaluateurs à des recommandations pour les actions futures.
Les actions auprès des publics en situation précaire devraient avoir une dimension expérimentale, donc produire et diffuser une information de suivi/auto-évaluation. Peuvent entrer dans le cadre du PRAPS les actions qui contribuent de façon identifiable et vérifiable à un meilleur accès à la santé, et sont une occasion de mobiliser les institutions et organismes de droit commun.
Les actions auprès des professionnels devraient permettre leur mise en réseau à léchelle locale ; de nombreuses actions à vocation dinterpellation/formation ont aussi leur place : interventions dans les formations initiales, dialogue entre personnes en situation précaire et professionnels, création dévènements autour des problèmes des publics précaires et des solutions - la mobilisation des professionnels étant utilisée comme levier pour influer sur les organisations.
Les actions visant directement les organisations devraient viser la prise en compte dans les schémas, budgets, décisions dorganisation, non seulement de la situation de publics « précaires » mais aussi des expériences capitalisées dans le cadre des PRAPS. Parmi les occasions dy contribuer, on compte :
- les révisions des PRAPS eux-mêmes, notamment celle dont la préparation du PRSP devrait être loccasion ;
- un travail entre financeurs sur les besoins spécifiques des publics, à loccasion de la préparation des appels à projets/appels doffres ;
- des travaux dévaluation, diagnostic, ou relecture analysant les politiques et systèmes de santé sous langle des inégalités.
B. LE SYSTÈME DE SUIVI
ET DE PILOTAGE DES PRAPS 2
B.1. Des outils sont progressivement constitués, et jugés légitimes, pour le suivi des actions financées par les DRASS sur « budget PRAPS »
Le « suivi » effectué par les DDASS consiste à rencontrer les structures financées, apprécier la qualité de leur travail, voire estimer les résultats de leurs actions. Il sagit dune « relation de suivi » individualisée, plus que dun « système de suivi » homogène.
Les DRASS, pour leur mission de programmation, devraient pouvoir juger de la valeur des actions menées au regard des objectifs poursuivis ; pour ce faire, à défaut de systèmes dinformation capables de retracer ces informations souvent qualitatives et spécifiques, et à défaut de contacts directs avec les porteurs de projet ou les publics, elles sappuient essentiellement sur la « relation de suivi » des DDASS.
Il ny a donc pas de phasage entre une « programmation régionale » dabord, une « mise en oeuvre départementale » ensuite ; mais une situation dinterface des coordonnateurs DRASS, entre le niveau départemental où se passe lessentiel du PRAPS, et le niveau national qui réglemente les programmes, en demande le texte et en alloue les fonds.
La pression du niveau national est donc la motivation principale pour la constitution de données de suivi harmonisées. Cette pression est jugée légitime par les professionnels de la santé publique, conscients de lutilité dindicateurs homogènes et quantifiables ; en échange de ce suivi, ils attendent du niveau national un retour dinformation, notamment pour nourrir les diagnostics territoriaux.
Par rapport aux débuts du PRAPS 1, un nombre accru de DRASS ont mis en place des outils formalisés de description des actions, allant au-delà du document-type national COSA de demande de subvention. Parmi les informations demandées : les résultats passés (pour une demande de renouvellement), le programme dans lequel laction sinscrit (PRAPS, PRS...), lobjectif général, spécifique, opérationnel auquel elle concourt, le territoire concerné, les moyens mobilisés...
Quelques DRASS émettent également des documents types à remplir ex post, fournissant des données plus précises et comparables que celles du rapport dactivité de la structure financée (la DRASS Bourgogne lavait fait pour le PRAPS 1). Des outils dauto-évaluation des actions par les porteurs de projets, ont été définis dans 9 régions malgré la difficulté de toute (auto-)évaluation dans ce domaine. Ils traitent des résultats, et aussi du pourquoi et comment ces résultats sont obtenus.
Par ailleurs, la DGS travaille, en lien avec des DRASS expérimentatrices, sur des indicateurs de suivi pour les PRAPS comme pour les autres programmes de santé.
B.2 Souvent limité à la gestion des fonds, le suivi couvre mal
les mécanismes de succès des PRAPS
Lefficacité des PRAPS - programmes à budget réduit, à vocation incitative et mobilisatrice - passe par un effet de levier sur les pratiques des professionnels et les décisions des organisations.
Certaines actions auprès des professionnels, de même que les actions auprès des organisations, ne relèvent pas des appels à projets, mais se traduisent plutôt par linvestissement en temps de personnel de ladministration, ainsi que par des achats de prestations : lédition dun bulletin dinformation par exemple.
Or, rares sont les PRAPS qui annoncent lévaluation de ce type dintervention (en associant, à chaque objectif, un ou des indicateurs de résultat), et encore plus rares sont ceux qui en ont prévu les moyens pratiques.
Globalement, si les systèmes de suivi des fonds (nouvelle version de GLB, India) et des temps (type AR peuvent permettre à lavenir de reconstituer les moyens alloués à divers types dactions, ils ne diront rien de ce qui est fait de ces moyens.
Pour rendre compte de lensemble des résultats du programme, il faudrait des indicateurs adaptés à chaque mode dintervention du PRAPS (actions directement tournées vers les publics, auprès des professionnels, auprès des organisations), et couvrant les différentes étapes du cycle de lintervention publique, notamment :
- situation : type de problème à résoudre par laction, public visé ;
- moyens : financements, temps de personne, ventilation par public et par territoire ;
- mise en oeuvre (certes diverse à la mesure de la variété des actions) ;
- Réalisations ;
- Résultats.
Dans le cas, qui devrait être fréquent, des actions à vocation expérimentale, leurs responsables devraient aussi faire lestimation des coûts, réalisation, résultats, que donnerait laction si on passait du cadre expérimental à un régime de croisière.
La mesure des impacts, en revanche, échappe au suivi de chaque projet, et relève plutôt doutils denquête, ou de traitement statistique, régionaux ou nationaux.
Les évaluateurs recommandent limplantation doutils harmonisés nationaux de suivi des actions, qui prévoiraient des variables paramétrables en fonction du PRAPS régional. Chaque action à vocation « expérimentale » devrait, en outre, être dotée dun dispositif adapté de suivi et dévaluation interne ou externe. Enfin, des évaluations des PRAPS, lancées en fonction des questions qui se posent à léchelle régionale, devraient bénéficier dun financement national.
Le niveau national pourrait concentrer ses propres efforts dévaluation sur le fonctionnement du système de suivi, sur les outils nationaux denquête ou de gestion, ainsi que sur la mesure de la situation : accès effectif des publics en situation précaire au système de santé, connaissances, attitudes, comportements des professionnels de santé.
B.3. Indicateurs recommandés pour le système de suivi
En complément de lévaluation proprement dite, et en tenant compte de travaux en cours à la DGS (outillage lié à la LOLF, nouvelle version de GLB...), les évaluateurs ont étudié et recommandé des indicateurs en fonction des types daction (cf. rapport, 5.3 et 6.3.2).
Parmi ces indicateurs (à compléter par une information qualitative sur les voies et moyens de la réussite de chaque action) :
- Indicateurs de situation : effectifs, sur le territoire, de la population ciblée ; problème à résoudre par laction (nomenclature nationale).
- Indicateurs de moyens : financements Etat ; temps de personnel (y compris les professionnels participant à des actions) ; publics directs et publics finaux ; zone géographique et milieu dintervention.
- Indicateurs de mise en oeuvre : type de structure intervenante ; partenariat.
- Indicateurs de réalisations : comparaison des réalisations visées (ex ante) et effectives (ex post) ; retombées média ; nomenclature de types dactions ; indicateur de volume du service offert (horaires...).
- Indicateurs de résultats : comparaison des résultats visés (ex ante) et effectifs (ex post) ; nombre de personnes directement.
ANNEXE V
PROMOTION DE LA SANTÉ
Charte dOttawa
La première conférence internationale pour la promotion de la santé, réunie à Ottawa, a adopté le 21 novembre 1986 la présente « Charte » en vue de contribuer à la réalisation de lobjectif de la santé pour tous dici à lan 2000 et au-delà.
Inspirée avant tout, par lattente, de plus en plus manifeste, dun nouveau mouvement en faveur de la santé publique dans le monde, cette conférence sest concentrée sur les besoins des pays industrialisés, sans négliger pour autant ceux des autres régions. Elle a pris comme point de départ les progrès accomplis grâce à la déclaration dAlma-Ata sur les soins de santé primaires, les buts fixés par lOMS dans le cadre de la stratégie de la santé pour tous et le débat sur laction intersectorielle pour la santé, à lAssemblée mondiale de la santé.
Promotion de la santé
La promotion de la santé a pour but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de laméliorer. Pour parvenir à un état de complet bien-être physique, mental et social, lindividu, ou le groupe, doit pouvoir identifier et réaliser ses ambitions, satisfaire ses besoins et évoluer avec son milieu ou sy adapter. La santé est donc perçue comme une ressource de la vie quotidienne, et non comme le but de la vie ; cest un concept positif mettant laccent sur les ressources sociales et personnelles, et sur les capacités physiques. La promotion de la santé ne relève donc pas seulement du secteur de la santé : elle ne se borne pas seulement à préconiser ladoption de modes de vie qui favorisent la bonne santé ; son ambition est le bien-être complet de lindividu.
Conditions indispensables à la santé
La santé exige un certain nombre de conditions et de ressources préalables, lindividu devant pouvoir notamment :
- se loger ;
- accéder à léducation ;
- se nourrir convenablement ;
- disposer dun certain revenu ;
- bénéficier dun écosystème stable ;
- compter sur un apport durable de ressources ;
- avoir droit à la justice sociale et à un traitement équitable.
Tels sont les préalables indispensables à toute amélioration de la santé.
Plaidoyer pour la santé
La bonne santé est une ressource majeure pour le développement social, économique et individuel et une importante dimension de la qualité de la vie. Divers facteurs - politiques, économiques, sociaux, culturels, environnementaux, comportementaux et biologiques - peuvent tous la favoriser ou, au contraire, lui porter atteinte. La promotion de la santé a précisément pour but de créer, grâce à un effort de sensibilisation, les conditions favorables indispensables à lépanouissement de la santé.
Mise en place des moyens
Leffort de promotion de la santé vise à léquité en matière de santé. Le but est de réduire les écarts actuels dans létat de santé et de donner à tous les individus les moyens et les occasions voulus pour réaliser pleinement leur potentiel de santé. Cela suppose notamment que ceux-ci puissent sappuyer sur un environnement favorable, aient accès à linformation, possèdent dans la vie les aptitudes nécessaires pour faire des choix judicieux en matière de santé et sachent tirer profit des occasions qui leur sont offertes dopter pour une vie saine. Sans prise sur les divers paramètres qui déterminent la santé, les gens ne peuvent espérer parvenir à leur état de santé optimal, et il en est de même pour les femmes que pour les hommes.
Médiation
Le secteur de la santé ne peut, à lui seul, assurer le cadre préalable et futur le plus propice à la santé. La promotion de la santé exige, en fait, laction coordonnée de tous les intéressés : gouvernements, secteur de la santé et autres secteurs sociaux et économiques, organisations non gouvernementales et bénévoles, autorités locales, industries et médias. Quel que soit leur milieu, les gens sont amenés à intervenir en tant quindividus, ou à titre de membres dune famille ou dune communauté. Les groupes professionnels et sociaux, tout comme les personnels de santé sont, quant à eux, particulièrement responsables de la médiation entre les intérêts divergents qui se manifestent dans la société à légard de la santé.
Les programmes et les stratégies de promotion de la santé doivent être adaptés aux possibilités et aux besoins locaux des pays et des régions et prendre en compte les divers systèmes sociaux, culturels et économiques.
ACTIONS POUR PROMOUVOIR LA SANTÉ
Elaboration de politiques pour la santé
La promotion de la santé va bien au-delà des simples soins de santé. Elle inscrit la santé à lordre du jour des responsables politiques de tous les secteurs et à tous les niveaux, en les incitant à prendre conscience des conséquences de leurs décisions sur la santé et en les amenant à admettre leur responsabilité à cet égard.
La politique de promotion de la santé associe des approches différentes, mais complémentaires : mesures législatives, financières et fiscales et changements organisationnels, notamment. Il sagit dune action coordonnée conduisant à des politiques de santé, financières et sociales qui favorisent davantage déquité. Laction commune permet doffrir des biens et des services plus sûrs et plus sains, des services publics qui favorisent davantage la santé et des environnements plus propres et plus agréables.
La politique de promotion de la santé suppose que lon identifie les obstacles à ladoption de politiques pour la santé dans les secteurs non sanitaires, et les moyens de surmonter ces obstacles.
Le but doit être de faire en sorte que le choix le plus facile pour les responsables des politiques soit aussi le choix le meilleur du point de vue de la santé.
Création denvironnements favorables
Nos sociétés sont complexes et interconnectées et lon ne peut séparer la santé des autres objectifs.
Les liens qui unissent de façon inextricable les individus à leur milieu constituent la base dune approche socio-écologique à légard de la santé. Le grand principe directeur, pour le monde entier, comme pour les régions, les nations et les communautés, est la nécessité dune prise de conscience des tâches qui nous incombent tous, les uns envers les autres et vis-à-vis de notre communauté et de notre milieu naturel. Il faut appeler lattention sur le fait que la conservation des ressources naturelles, où quelles soient, doit être considérée comme une responsabilité mondiale.
Lévolution des modes de vie, de travail et de loisir doit être une source de santé pour la population, et la façon dont la société organise le travail doit permettre de créer une société plus saine. La promotion de la santé engendre des conditions de vie et de travail à la fois sûres, stimulantes, gratifiantes et agréables.
Lévaluation systématique des effets sur la santé dun environnement en évolution rapide notamment dans les domaines de la technologie, du travail, de lénergie et de lurbanisation est indispensable et doit être suivie dune action garantissant le caractère positif de ces effets sur la santé du public. La protection des milieux naturels et des espaces construits, ainsi que la conservation des ressources naturelles, doivent être prises en compte dans toute stratégie de promotion de la santé.
Renforcement de laction communautaire
La promotion de la santé passe par la participation effective et concrète de la communauté à la fixation des priorités, à la prise des décisions et à lélaboration et à la mise en oeuvre des stratégies de planification en vue datteindre une meilleure santé. Au coeur même de ce processus, il y a la dévolution de pouvoir aux communautés considérées comme capables de prendre en main leurs destinées et dassumer la responsabilité de leurs actions.
Le développement communautaire puise dans les ressources humaines et matérielles de la communauté pour stimuler lauto-assistance et le soutien social et pour instaurer des systèmes souples susceptibles de renforcer la participation et le contrôle du public en matière de santé. Cela exige un accès total et permanent à linformation et aux possibilités dacquisition de connaissances concernant la santé, ainsi quune aide financière.
Acquisition daptitudes individuelles
La promotion de la santé appuie le développement individuel et social grâce à linformation, à léducation pour la santé et au perfectionnement des aptitudes indispensables à la vie. Ce faisant, elle donne aux gens davantage de possibilités de contrôle de leur propre santé et de leur environnement et les rend mieux aptes à faire des choix judicieux.
Il est crucial de permettre aux gens dapprendre à faire face à tous les stades de leur vie et à se préparer à affronter les traumatismes et les maladies chroniques. Ce travail doit être facilité dans le cadre scolaire, familial, professionnel et communautaire et une action doit être menée par lintermédiaire des organismes éducatifs, professionnels, commerciaux et bénévoles et dans les institutions elles-mêmes.
Réorientation des services de santé
Dans le cadre des services de santé, la tâche de promotion est partagée entre les particuliers, les groupes communautaires, les professionnels de la santé, les établissements de services, et les gouvernements. Tous doivent oeuvrer ensemble à la création dun système de soins servant au mieux les intérêts de la santé.
Par-delà son mandat qui consiste à offrir des services cliniques et curatifs, le secteur de la santé doit sorienter de plus en plus dans le sens de la promotion de la santé. Les services de santé doivent se doter dun mandat plus vaste, moins rigide et plus respectueux des besoins culturels, qui les amène à soutenir les individus et les groupes dans leur recherche dune vie plus saine et qui ouvre la voie à une conception élargie de la santé, en faisant intervenir, à côté du secteur de la santé proprement dit, dautres composantes de caractère social, politique, économique et environnemental. La réorientation des services de santé exige également une attention accrue à légard de la recherche, ainsi que des changements dans lenseignement et la formation des professionnels. Il faut que cela fasse évoluer lattitude et lorganisation des services de santé, en les recentrant sur la totalité des besoins de lindividu considérés dans son intégralité.
LA MARCHE VERS LAVENIR
La santé est engendrée et vécue dans les divers contextes de la vie quotidienne, là où lindividu sinstruit, travaille, se délasse ou se laisse aller à manifester ses sentiments. Elle résulte du soin que lon prend de soi-même et dautrui et de la capacité à prendre des décisions et à maîtriser ses conditions de vie ; elle réclame, en outre, une société dans laquelle les conditions voulues sont réunies pour permettre à tous darriver à vivre en bonne santé.
Laltruisme, la vision globale et lécologie fondent les stratégies de promotion de la santé. Les auteurs de ces stratégies doivent donc partir du principe quà tous les niveaux de la planification, de la mise en oeuvre et de lévaluation de la promotion de la santé, tous les partenaires, hommes ou femmes, doivent être considérés comme égaux.
Lengagement à légard de la promotion
de la santé
Les participants à la conférence sengagent à :
- se lancer dans le combat afin de promouvoir des politiques pour la santé et à plaider en faveur dun engagement politique clair en faveur de la santé et de léquité dans tous les secteurs ;
- lutter contre les pressions exercées en faveur de produits dangereux, de la déplétion des ressources, de conditions et de cadres de vie malsains et dune alimentation déséquilibrée ; à appeler également lattention sur les questions de santé publique posées, par exemple, par la pollution, les dangers dordre professionnel, lhabitat et les peuplements ;
- combler les écarts de niveau de santé dans les sociétés et à lutter contre les inégalités dues aux règles et aux pratiques de ces sociétés ;
- reconnaître que les individus constituent la principale ressource de santé ; à les soutenir et à leur donner les moyens de demeurer en bonne santé, ainsi que leurs familles et leurs amis, par des moyens financiers et autres, et à accepter la communauté comme principal porte-parole en matière de santé, de conditions de vie et de bien-être ;
- réorienter les services de santé et leurs ressources au profit de la promotion de la santé ; à partager leur pouvoir avec dautres secteurs, dautres disciplines et, plus important encore, avec la population elle-même ;
- reconnaître que la santé et son maintien constituent un investissement social et un défi majeur ; et à traiter le problème général que posent les modes de vie sur le plan de lécologie.
Les participants à la conférence prient instamment toutes les personnes intéressées de se joindre à eux dans leur engagement en faveur dune puissante alliance pour la santé.
Appel pour une action internationale
La conférence demande à lOrganisation mondiale de la santé et aux autres organismes internationaux de plaider en faveur de la promotion de la santé, dans le cadre de tous les forums appropriés, et daider les pays à établir des stratégies et des programmes de promotion de la santé.
Les participants à la conférence sont fermement convaincus que, si les gens de tous milieux, les organisations non gouvernementales et bénévoles, les gouvernements, lOrganisation mondiale de la santé et tous les autres organismes concernés sunissent pour lancer des stratégies de promotion de la santé conformes aux valeurs morales et sociales dont sinspire cette charte, la santé pour tous dici lan 2000 deviendra réalité.
ANNEXE VI
GRILLE INPES DANALYSE DES BONNES PRATIQUES DANS LES INTERVENTIONS VISANT À RÉDUIRE LES INÉGALITÉS SOCIALES DE SANTÉ
De 2004 à 2007, lInstitut national de prévention et déducation à la santé (INPES) a participé au projet européen « Closing the gap : strategies for action to tackle health inequalities » [1], dont un des volets portait sur le développement dune base de données européenne des « bonnes pratiques » en promotion de la santé pour lutter contre les inégalités sociales de santé.
Ce projet initié en collaboration avec les agences de santé publique et de promotion de la santé de vingt-deux pays européens a permis de recenser près de quatre-vingt-dix projets (voir http ://www.health-inequalities.org). Les représentants institutionnels de chaque pays ont analysé les projets à partir dune liste de 11 critères de qualité (participation du public, accessibilité de laction, approche par lieux, diagnostic des besoins, pouvoir dagir, partenariats, évaluation, pérennisation, etc.). Ont été retenus les projets qui répondaient à au moins trois de ces critères. Lobjectif était plus de sassurer de la qualité de la démarche (du processus) plutôt que de la preuve de lefficacité. Parmi les projets retenus, la très grande majorité ciblait les publics de faible statut socio-économique, en situation familiale qualifiée de « difficile » ou résidant dans des quartiers défavorisés. Il sagissait principalement dactions mettant en oeuvre une démarche déducation pour la santé, ciblant les déterminants individuels (exemple : comportements liés à la nutrition, le tabac, lalcool...), le système de santé ou linsertion sociale. Très peu concernaient des déterminants de la santé plus macroscopiques comme les conditions environnementales, lenvironnement physique au travail ou à lécole, le logement.
Les connaissances relatives aux stratégies dactions à entreprendre pour infléchir efficacement la tendance sont peu développées. La plupart du temps en effet, ces actions sont conduites dans des contextes où les approches évaluatives classiques de lefficacité (études expérimentales ou quasi) sont impossibles à organiser. Afin de développer les connaissances et de soutenir la mise en place dactions de qualité dans ce domaine, et à partir de lexpérience européenne, lINPES conduit en 2007 un projet expérimental de sélection et danalyse de la qualité des actions menées en milieux complexes. Ce projet associe trois régions (Bretagne, Limousin, Rhône-Alpes). A terme, ce projet pilote devrait aboutir à la création dune base de données nationale des bonnes pratiques en promotion de la santé pour lutter contre les inégalités sociales de santé. Pour ce projet, linstitut développe une méthodologie de sélection et dévaluation des interventions fondée sur une approche dévaluation réaliste [1].
Une grille danalyse de la qualité des actions/projets menés dans la perspective de réduire les inégalités sociales de santé est en cours dutilisation à titre expérimental. Il sagit dune grille construite à partir de trois outils dévaluation des pratiques dans le champ de la promotion de la santé : a) la grille canadienne dévaluation de lefficacité des actions de santé communautaire [2], b) Preffi 2.0 [3] grille danalyse de lefficacité attendue des projets en promotion de la santé, et c) la grille danalyse des bonnes pratiques pour lutter contre les inégalités de santé élaborée dans le cadre du projet européen « Closing the gap » [4].
Cette grille est construite sous la forme dun questionnaire qui reprend les différentes étapes dune démarche de projet (planification de laction, mise en oeuvre, évaluation, pérennisation), ainsi quune rubrique spécifique concernant le renforcement du pouvoir dagir (empowerment) considéré comme une dimension essentielle dans un objectif de réduction des inégalités sociales de santé [5].
A chaque étape, des critères (activités, mécanismes, déterminants) généralistes de qualité dun projet de promotion de la santé ont été extraits des trois grilles citées ci-dessus, puis adaptés à la problématique des inégalités sociales de santé lorsque cela simposait.
Exemples de critères de qualité explorés par la grille :
- pertinence de lintervention au regard de la problématique des inégalités sociales de santé au niveau local/régional (analyse du problème) ;
- choix et conception des actions pour réduire les inégalités de santé ;
- implication des partenaires régionaux/locaux ;
- participation du public cible ;
- renforcement du pouvoir dagir (empowerment) du public cible ;
- adaptation et accessibilité de laction au public cible ;
- évaluation des processus et des effets de laction au regard des inégalités de santé.
Exemples ditems de la grille danalyse
1. Planification :
analyse du problème et des besoins
La nature du problème des inégalités de santé est décrite dans le projet.
Les déterminants sociaux susceptibles davoir un effet sur la problématique des inégalités sociales de santé identifiée sont décrits.
Des déterminants différents ont été identifiés pour les différents sous-groupes cibles de la population (âge, sexe, culture, position sociale...) concernés.
2. Mise en oeuvre :
accessibilité de laction
Les barrières de communication (langue, culture) sont prises en compte.
Les contraintes économiques du public bénéficiaire ont été prises en compte.
Les sources de discrimination (sexuelles, religieuses, culturelles...) sont prises en compte.
3. Evaluation
Les indicateurs deffets prennent en compte les sous-groupes de la population (ex : entre riches/pauvres, hommes/femmes, catégories socioprofessionnelles, etc.).
Lévaluation sinterroge sur déventuels circonstances ou effets secondaires imprévus ou contreproductifs (ex : accroissement des inégalités sociales de santé).
4. Pérennisation
Des activités propices à la poursuite des activités et de leurs effets à la suite de larrêt de laction ont été prévues dès le début de la planification du projet.
Des actions ont été entreprises pour stabiliser les ressources organisationnelles (financières, humaines, matérielles, formation) consacrées aux activités de lintervention.
5. Pouvoir dagir (empowerment)
Lintervention vise à renforcer la capacité dagir du(des) public(s) cible(s).
Des activités (ex : formations, jeux de rôle...) sont mises en place pour améliorer la « conscience critique ».
Bibliographie :
[1] Pawson, R. (2002). « Evidence-based Policy : The Promise of Realist Synthesis. » Evaluation 8(3) : 340-358. Canada on behalf of the Canadian Consortium of Health Promotion Research ; 223 pages.
[2] Hills, M. ONeill, M. Carroll, S. MacDonald, M. (2004) ; Effectiveness of Community Initiatives to Promote Health : An Assessment Tool ; Research report submitted to Health.
[3] Preffi 2.0 : outil de pilotage et danalyse de lefficacité attendue des interventions en promotion de la santé.
[4] http://www.health-inequalities.eu/?uid=dd33438 859b94d45856cd3cbbb673 a41&id=main2.
[5] Ridde V, Delormier T, Gaudreau L. Evaluation of Empowerment and Effectiveness : Universal Concepts ? In : McQueen DV, Jones CM, eds. Global Perspectives on Health Promotion Effectiveness. Volume I New York : Springer Science & Business Media, 2007 : 389-403.
NOTE (S) :
(1) Rapport du groupe technique national de définition des objectifs (analyse des connaissances disponibles sur des problèmes de santé sélectionnés, leurs déterminants et les stratégies de santé publique. Définition des objectifs) - 2003
(2) M-C Mouquet, La santé des personnes entrées en prison en 2003, ministère de lemploi, du travail et de la cohésion sociale, ministère des solidarités, de la santé et de la famille, DREES, Etudes et Résultats no 386 mars 2005.
(3) Enquête permanente sur les conditions de vie réalisée par lInstitut national de la statistique et des études économiques (INSEE)
(4) DREES, La santé des personnes entrées en prison en 2003, Etudes et résultats no 386 mars 2005.
(5) D. Che, D. Bitar, Les cas de tuberculose déclarés en France en 2004. BEH no 18-2006.
(6) De façon plus précise et plus complexe, il y a une interrelation entre la précarité, ce quelle génère et ce qui la cause puisquon sait, notamment, que certaines pathologies mentales peuvent être à lorigine dun état de précarisation tout comme la précarisation peut en être un déclencheur.
(7) Emmanuelle Cambois (DREES), Les personnes en situation sociale difficile et leur santé, Les Travaux de lObservatoire, 2003-2004, p 101.
(8) Lagarde E. « Le passé difficile des jeunes sans domicile », dans Populations & sociétés, Bulletin mensuel dinformation de linstitut national détudes démographiques, no 363, décembre 2000.
(9) En considérant la santé dans son sens global, nous prendrons en compte la prise en charge sociale au même titre que la prise en charge sanitaire, comme participant à un état de bien-être social, physique et mental.
(10) Cest-à-dire que le règlement y est minimum et concerne le respect des règles de la vie en commun, du lieu et du personnel qui y travaille.
(11) Rothé C. thèse de sciences politiques (en cours), Les « Jeunes en errance » et laccès aux soins. Une comparaison France-Irlande, université de Rennes 1, CRAPE/LAPSS, 2007.
(12) Voir P. Declerck, Les Naufragés, avec les clochards de Paris.
(13) Il faut donc préciser que, si la vie à la rue facilite le développement de pathologies mentales, celles-ci peuvent aussi préexister à la vie à la rue et en être un des déclencheurs. Cest notamment le cas pour des individus atteints de pathologies comme la schizophrénie ou les troubles bipolaires aigus ; ils ne peuvent pas vivre de façon autonome et, coupé dun lien social ou familial fort, se retrouvent rapidement en situation de précarité extrême.
(14) De la Rochère B., « La santé des sans-domicile usagers des services daide », Insee Première, n o 893 avril 2003.
(15) De la Rochère B., « La santé des sans-domicile usagers des services daide », Insee Première, n o 893 avril 2003.
(16) Rapport ONZUS, pp 67,71 sur les revenus et CMUc, pp 97, 113.
(17) SIRS Info INSERM 707 no 3 juillet 2007.
(18) http : //sig.ville.gouv.fr/