SANT4 - Bulletin Officiel N°2008-1: Annonce N°53


Direction générale de la santé

Sous-direction promotion de la santé
et prévention des maladies chroniques
Bureau santé des populations


Circulaire DGS no 2007-430 du 7 décembre 2007 relative au programme régional d’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS)

NOR :  SJSP0731552C

Références :
        Loi no 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions ;
        Loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;
Loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.
        Textes abrogés ou modifiés : circulaire DGS/SD 6D no 2002-100 du 19 février 2002 relative aux programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins en faveur des personnes en situation précaire (PRAPS).
Annexes :
        Annexe    I.  -  Contexte législatif, budgétaire et épidémiologique ;
        Annexe   II.  -  Stratégie d’actions santé précarité ;
        Annexe  III a-b-c.  -  Les publics prioritaires (IIIa), les dispositifs (IIIb), les politiques locales (IIIc) ;
        Annexe   IV.  -  Les évaluations ;
        Annexe    V.  -  Charte d’Ottawa ;
        Annexe   VI.  -  Les bonnes pratiques dans les interventions visant à réduire les inégalités sociales de santé.
La ministre de la santé, de la jeunesse et des sports à Mesdames et Messieurs les directeurs et chefs de service de l’administration centrale (pour information) ; Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de l’hospitalisation (pour information) ; Messieurs les préfets de région, président du groupement régional de santé publique, (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour exécution]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour information]).
    Les programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins en faveur des personnes les plus démunies (PRAPS) ont été instaurés par la loi no 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions (art.71). La première génération de PRAPS a couvert la période 2000-2002 puis une deuxième génération a été mise en place en 2003 et est arrivée à échéance en 2006.
    La présente circulaire vise à définir la poursuite des PRAPS dans le cadre des Plans régionaux de santé publique (PRSP) résultant de la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et du cadre budgétaire fixé par la loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).
    Il convient avant toute chose de définir les concepts suivants, que sont la précarité et les inégalités de santé. En 2000, l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale a proposé la définition suivante proche de celle du Haut comité de santé publique (HCSP) : « La pauvreté est l’insuffisance de ressources, la précarité c’est la fragilité, l’instabilité des situations. La notion de précarité englobe celle de pauvreté. Elle fait référence aux incertitudes et aléas qui pèsent sur les individus au-delà même de leurs ressources du moment ». Le nombre de personnes en situation précaire était estimé entre 10 et 15 millions en 2004. La pauvreté, définie par un niveau de vie inférieur à la moitié du niveau de vie médian, concerne 3 600 000 de personnes dont 1 000 000 qui travaillent sans dépasser ce seuil de pauvreté (notion de « travailleurs pauvres »). Quant à l’exclusion, suivant la définition minimaliste du HCSP, qui considère qu’un exclu est une personne, qui malgré son état de pauvreté, ne bénéficie pas des possibilités d’aide correspondant le plus à sa situation, le nombre de personnes concernées peut être estimé à 300 000 personnes.
    Le lien entre la situation sociale et de multiples aspects de l’état de santé (comportements à risque, incidence et pronostic de nombreuses pathologies, modalités de la prise en charge, mortalité, accès à la prévention) est à présent bien établi dans la littérature scientifique, notamment en France (Fassin et al., 2000 ; Joubert et al., 2001 ; Goldberg et al., 2003 ; HCSP, 2003 ; Moulin et al., 2005 ; ONPES, 2006). Les données recueillies au fil des années ont montré qu’en dépit d’une amélioration globale et incontestable de la santé dans les pays industrialisés, les inégalités de santé non seulement persistent mais ne cessent de s’aggraver depuis la période consécutive à la Seconde Guerre mondiale.
    Ces données témoignent de risques de mort prématurée ainsi que de survenue de maladie et d’accident pendant l’enfance (mais aussi à l’âge adulte) plus élevés dans les groupes sociaux désavantagés. On observe également chez ces derniers un accès limité à la santé, et notamment aux actions préventives, avec par exemple, une fréquence plus faible de dépistages de maladies et des vaccinations. Cependant, il convient de rappeler que l’observation de ces résultats n’est pas confinée aux extrêmes de l’échelle sociale, mais qu’il existe une distribution socialement stratifiée (le gradient social de santé) des problèmes de santé (Marmot, Shipley et Rose, 1984) qui appelle des stratégies d’action couvrant l’étendue du spectre social et pas seulement les plus vulnérables.
    Par ailleurs, réduire les inégalités de santé ne consiste pas seulement à agir sur l’accès aux soins, mais à intervenir plus en amont sur les déterminants à l’origine des problèmes de santé considérés. Aujourd’hui, les inégalités sociales ou géographiques, en matière d’accès à la prévention, sont probablement plus importantes qu’en matière d’accès aux soins. Une politique volontariste dans le domaine de la prévention, pour ne pas être simpliste ou réductrice, doit s’appuyer sur une compréhension approfondie des phénomènes conduisant certains groupes sociaux à adopter des comportements à risque. La réflexion en matière d’inégalités de santé devrait notamment porter sur les représentations de la santé et de ses déterminants afin d’aboutir à des politiques plus opérationnelles et plus rationnelles. (rapport « La santé en France 2002 », HCSP).
    L’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale précise que « paradoxalement, les campagnes de prévention, que ce soit à travers des actions de dépistage ou d’éducation à la santé, peuvent conduire à court terme à un accroissement des inégalités sociales de santé, les populations les plus favorisées y étant plus réceptives et leur contenu étant quelque fois inadapté au public cible » (rapport ONPES 2003-2004).
    L’Observatoire national des zones urbaines sensibles en collaboration avec l’institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) présente une étude sur l’état de santé et de recours aux soins des personnes vivant en ZUS et les écarts de l’état de santé entre habitants ZUS et autres types de quartiers de la même agglomération. L’impact des déterminants de l’état de santé et celui du recours aux soins sont plus amplifiés pour la population des ZUS. Pour exemple, la probabilité de se déclarer en mauvaise santé est de 6,9 points plus élevée pour les femmes que pour les hommes. Hors ZUS, cet effet marginal est de 3,5 points plus fort (source : INSEE, enquête santé 2002-2003, rapport ONZUS 2006 p. 107).
    Vous trouverez en complément dans l’Annexe 1 des éléments de contexte législatif, budgétaire et épidémiologique qui peuvent servir d’appui à la mise en oeuvre de cette circulaire.

1.  Le cadre d’intervention
Une stratégie nationale en faveur de la santé des personnes
en situation de précarité

    Les PRAPS sont des outils importants pour la réduction des inégalités de santé. Toutefois, la lutte contre les inégalités de santé s’inscrit dans une stratégie plus globale d’actions qui dépasse leur simple niveau d’intervention.
    S’appuyant sur les acquis de la loi du 29 juillet 1998 précitée, la direction générale de la santé (DGS), en lien avec la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS), la direction générale de l’action sociale (DGAS), la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), la direction de la population et des migrations (DPM) et la délégation interministérielle à la ville (DIV), a dégagé dès 2005 des axes stratégiques et pistes d’actions, permettant de donner un cadre pour la politique publique en matière de réduction des inégalités de santé (annexe II).

Les publics et problématiques prioritaires
a)  Les publics prioritaires

    Comme le montrent les études épidémiologiques et sociologiques, les publics susceptibles de bénéficier des actions du PRAPS sont hétérogènes. Les PRAPS s’adressent aux personnes subissant un phénomène de précarisation parmi lesquelles peuvent être identifiées des populations spécifiques en fonction du niveau de revenus, du statut social, de l’origine, etc.
    Ainsi, il convient de mettre en oeuvre des actions spécifiques et/ou adaptées vis-à-vis des populations pour lesquelles l’accès et l’usage de la prévention et des soins posent une difficulté et notamment (mais pas exclusivement) auprès :
    -  des gens du voyage ;
    -  des jeunes en situation de vulnérabilité ;
    -  des familles monoparentales féminines et des personnes âgées des quartiers de la politique de la ville ;
    -  des populations étrangères, immigrées ou issues de l’immigration notamment lorsqu’elles vivent dans les foyers de travailleurs migrants, les résidences sociales ou dans des habitats dégradés, avec une attention particulière pour les immigrés vieillissants isolés ;
    -  des personnes détenues et sortant de prison.
    Certaines régions pourront identifier des publics spécifiques comme par exemple les travailleurs saisonniers.

b)  Problématiques prioritaires

    Les personnes vivant dans la précarité ayant leurs spécificités et leurs besoins propres, les régions lors de leur diagnostic initial devront dégager les problématiques locales à prioriser pour agir favorablement dans le cadre de la prévention et des soins. Les régions pourront s’appuyer sur les plans et programmes de santé publique nationaux, qui ont défini des programmes spécifiques à mettre en oeuvre vis-à-vis des publics en situation de précarités tel que le plan santé-mentale, ou qui ont identifié ces populations comme étant prioritaires tels que le plan tuberculose.
    Dans le cadre de la politique nationale transversale d’« inclusion sociale », l’accès à la santé et aux soins s’articule autour de plusieurs objectifs :
    -  garantir l’accès aux soins des personnes disposant de faibles ressources ;
    -  ouvrir dans les meilleurs délais et avec les meilleures garanties de rigueur dans l’instruction de la demande, le bénéfice de l’aide médicale de l’Etat aux personnes qui remplissent les conditions fixées par la loi ;
    -  améliorer le dépistage organisé du cancer du sein ;
    -  promouvoir la santé des élèves, avec comme objectif prioritaire la visite médicale à 6 ans et les suites nécessaires à ces visites ;
    -  réduire l’exposition des populations à certains risques environnementaux, plus particulièrement la lutte contre le saturnisme et à l’intoxication au monoxyde de carbone.
    Pour l’accès aux soins, il sera souhaitable de s’attacher aux procédures d’accès aux droits mais également à l’effectivité de ces droits. C’est par exemple pouvoir réduire les difficultés d’accès à une domiciliation, agir sur les refus de soins pour des personnes ayant des droits ouverts...
    Vous trouverez en annexe III, pour les publics suscités, des orientations, mesures et recommandations prioritaires ainsi qu’une liste d’éléments et de dispositifs qui pourront guider votre réflexion et le débat dans votre région.

Les PRAPS, un volet incontournable des plans régionaux
de santé publique (PRSP)

    La loi no 2004-806 du 9 août 2004 précitée (art. L. 1411-11 du code de la santé publique) prévoit que tous les PRSP « comportent un ensemble coordonné de programmes et d’actions pluriannuels dans la région et obligatoirement un programme régional pour l’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies (PRAPS) ». En outre, l’existence de territoires concentrant les personnes en situation de précarité économique et sociale, notamment les territoires urbains de la politique de la ville, marque la nécessité d’une convergence autour du processus de territorialisation du PRSP.

Une évaluation des PRAPS

    Plus que tout autre programme, les PRAPS ont fait l’objet de plusieurs évaluations.
    La première génération de ces programmes (2000-2002) a bénéficié d’une première évaluation nationale publiée en juillet 2003. Elle montre que les publics bénéficiaires en 2000 étaient principalement, « tout public précaire », les jeunes de 16-25 ans et les professionnels. Dans les constats, les difficultés sont les mêmes partout et certains thèmes, comme la souffrance psychique, sont apparus dans la plupart des régions comme une nette priorité. Les diagnostics de l’ensemble des besoins des publics et des territoires méritent d’être approfondis et actualisés. De plus, le passage du diagnostic à la définition des objectifs est assez souvent flou. Il a été aussi constaté l’absence de participation du secteur privé ou libéral des champs sanitaires.
    L’efficacité des actions est réelle, des résultats positifs ont été constatés dans le sens d’une meilleure prise en charge, par la mise en oeuvre d’actions innovantes, et par une réelle dynamisation des professionnels et des réseaux de santé. Par contre, les modalités de suivi, de gestion et de pilotage ont semblé encore déficientes, notamment par l’absence de bilan systématique.
    La deuxième évaluation réalisée en 2004 et publiée en juillet 2005, s’est située à la phase de lancement des PRAPS de deuxième génération et a fait suite à la première. Elle a porté principalement sur la pertinence des objectifs au regard des besoins régionaux et nationaux et sur leurs modalités de pilotage. Concernant l’élaboration des PRAPS 2, le diagnostic régional indique les publics cibles mais explicite peu leurs problèmes d’accès. Par ailleurs, les actions répertoriées sont pertinentes mais les conditions sont partiellement réunies pour que leur efficacité soit à l’échelle des problèmes des publics. L’efficacité des actions se trouve réduite, d’une part, par le fait que le budget ne permet de toucher qu’une fraction minime des populations en situation précaire, d’autre part, si les professionnels touchés ont pu améliorer les pratiques, ce n’est le cas que là où le territoire est couvert à un niveau fin. Dans les deux cas, l’extension à une échelle plus opérationnelle n’a pas été réalisée (persistance et extension). Toutefois, l’efficacité de cette mise en réseau locale a progressé depuis les PRAPS 1 (annexe IV).
    En mai 2004, à partir de l’ensemble des évaluations réalisées, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) a remis un rapport intitulé « synthèse des bilans de la loi d’orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions ». Il classe les PRAPS dans les dispositifs dont le bilan est jugé globalement positif, même s’ils appellent des améliorations qualitatives. Les PRAPS paraissent être un « dispositif légitime et apte à motiver une réelle dynamique de transversalité ». Si ces programmes restent largement perfectibles, « tous les acteurs s’accordent à souligner leur rôle dans le décloisonnement entre santé et social, entre les divers services de l’Etat concernés, entre les services déconcentrés de l’Etat et les collectivités territoriales, avec le monde associatif, pour l’amélioration des pratiques à l’égard des publics en situation de précarité ou d’exclusion ».

2.  Les orientations pour l’élaboration des PRAPS
dans le cadre des PRSP
2.1.  Définitions et objectifs

    Les programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins doivent permettre, à partir de concertation et de coordination :
    -  de mettre en oeuvre des actions permettant aux populations les plus démunies d’accéder au système de santé en bénéficiant des prestations répondant au droit commun et en accédant à des actions de préventions primaires et secondaires adaptées aux spécificités de chaque public ;
    -  de rechercher des solutions innovantes, interprofessionnelles, ou interinstitutionnelles à des problématiques clairement identifiées ;
    -  d’amener les professionnels sanitaires et sociaux à développer une culture partagée (échange d’informations, de pratiques, de savoir faire dans le respect des compétences de chacun) apte à améliorer l’état de santé des usagers ;
    -  de donner de la cohérence à l’ensemble de ces actions.
    Les PRAPS sont des programmes majeurs qui participent à la lutte contre les inégalités de santé et à ce titre ils regroupent :
    -  l’ensemble des actions de santé en faveur des populations en situation de précarité dans chaque programme des PRSP ;
    -  les actions spécifiques d’accompagnement qui permettent aux personnes les plus marginalisés d’accéder aux dispositifs de droit commun.

2.2.  Principes d’élaboration

    Ces principes sont les suivants :
    -  rechercher l’articulation avec les autres politiques sectorielles (emploi, logement...) ;
    -  adapter les dispositifs de droit commun à la population démunie ;
    -  rechercher la participation des usagers à tous les niveaux du programme (diagnostic, action, évaluation) ;
    -  favoriser la coordination et la concertation des professionnels autour des problèmes de santé des personnes en situation de précarité ;
    -  assurer le déploiement du programme par le développement du partenariat avec des territoires de proximité et leurs élus en particulier avec l’appui des politiques territoriales de l’Etat (politique de la ville : ateliers santé ville au titre du volet santé des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), politique de l’aménagement du territoire, notamment au titre des territoires de projet, pays et agglomérations ;
    -  l’avis des conférences régionales de santé (CRS) doit être sollicité.

2.3.  Démarche d’élaboration
a)  Le diagnostic initial

    Le diagnostic initial inclut des données concernant spécifiquement les populations précaires. Pour cela, il mobilise les analyses et les données quantitatives nationales sur les problématiques de santé et d’accès aux soins des populations concernées et s’appuie sur une information qualitative et quantitative, spécifiquement pour identifier :
    -  les difficultés et les freins à l’accès à la prévention ;
    -  les difficultés d’accès aux droits et aux soins, notamment en ce qui concerne l’application des dispositions relatives à la couverture maladie universelle (CMU), l’aide médicale d’Etat (AME) et aux assurances complémentaires ;
    -  les freins à la participation de certains professionnels sanitaires et sociaux (notamment les médecins et chirurgiens-dentistes libéraux) au diagnostic et à la mise en oeuvre des programmes ;
    -  les déterminants des inégalités sociales et spatiales observées localement.
    Ce diagnostic doit tenir compte des démarches territoriales en particulier au titre des Ateliers santé ville propres en effet à préciser les difficultés d’accessibilité aux soins et à la prévention telles qu’appréciées localement en concertation, au plus près des besoins des habitants. Il doit pouvoir prendre en compte la diversité des publics et des situations dans une approche globale de la personne (Annexe III c et V).

b)  Les actions

    Les actions doivent concerner à la fois les personnes vulnérables, les professionnels et les structures institutionnelles et associatives. Elles peuvent être expérimentales :
    auprès des personnes vulnérables :
    Le rapport 2003-2004 de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (ONPES) relève que des actions de prévention et d’éducation à la santé pouvaient à court terme, accroître les inégalités de santé en atteignant pas ou peu, voire pas du tout, les populations les plus défavorisées.
    Les interventions doivent être des vecteurs d’atténuation des disparités, notamment en s’assurant que les mesures prises ont bien eu les effets escomptés, et en particulier parmi les groupes sociaux les plus désavantagés. Ces actions devront s’inspirer des « bonnes pratiques » repérées dans ce champ tant au niveau national qu’au niveau européen (annexe VI).
    Auprès des professionnels :
    Par des actions de formation, permettre aux professionnels de mieux travailler ensemble, de dégager des partenariats et des complémentarités tout en respectant leurs champs de compétence afin de répondre au mieux aux besoins de ces publics.
    Ces actions veilleront si possible à y associer les personnes précaires, afin de permettre l’expression directe de leurs besoins et attentes.
    Il conviendra également de soutenir et développer les réseaux de santé pour créer une dynamique centrée autour des personnes en situation de précarité :
    Auprès des structures institutionnelles et associatives.
    Les actions qui contribuent de façon identifiable et vérifiable à un meilleur accès à la santé doivent mobiliser les institutions et organismes publics et privés de droit commun, les établissements de santé, les centres de planification ou d’éducation familiale, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), les structures d’accueil des populations migrantes, les missions locales... pour que ceux-ci intègrent les problèmes de santé des populations précaires dans l’ensemble de leur projet.
    Il convient de veiller à la qualité de la prise en charge médicale et sociale tant à l’hôpital (qu’il soit doté ou non d’une Permanence d’accès aux soins de santé : PASS) qu’en ville en mobilisant les professionnels libéraux et notamment, le cas échéant, via l’Atelier santé ville.
    Les actions développées dans le PRAPS, sans se substituer au droit commun, permettent une réelle approche des problèmes d’accès à la prévention et aux soins.

c)  Pilotage et évaluation

    Un « référent santé/précarité régional » et son suppléant seront désignés dans chaque région pour assurer le pilotage régional du PRAPS. Les coordonnées du référent et de son suppléant sont transmises à la DGS au plus tard deux mois après la diffusion de la présente circulaire.
    Ses missions sont :
    -  de mettre en place et d’actualiser le diagnostic initial, tant à l’égard des problèmes non résolus (thématiques ou géographiques) que des initiatives déjà prises ;
    -  de définir les axes d’intervention qui se traduiront en actions dans le cadre du GRSP ;
    -  d’assurer le lien entre le niveau régional et le niveau national. Les éléments de bilan, pilotage et évaluation seront transmis annuellement au niveau national ;
    -  d’animer ou participer à l’animation régionale en s’intégrant dans les dispositifs déjà existants.
    D’une manière générale, le référent est dans l’organisation régionale mise en place par le GRSP pour accompagner les projets territoriaux, principalement au titre des CUCS, qui s’attachent à mieux connaître et réduire les problèmes de prévention et d’accessibilité rencontrés par les publics en situation de précarité économique et sociale. Le référent apporte son concours au cadrage et à la valorisation de la contribution des ateliers santé ville, à la mise en oeuvre de la politique de santé publique sur sa valence santé-précarité, ainsi qu’au processus d’évaluation des CUCS susceptible d’être mis en place par les acteurs de la politique de la ville.

Le pilotage

    Il s’appuie sur l’utilisation du Système d’information (SI) des PRSP, outil réalisé à partir d’une nomenclature harmonisée à l’ensemble du territoire des actions de santé publique (http ://www.intranet.sante.gouv.fr/sant/sd1/lpsp_2006/org_reg/prsp/accueil_prsp/suivi.htm). Ce système d’information permettra de réaliser des bilans annuels des actions du PRSP selon :
    -  les typologies des populations bénéficiaires ;
    -  les lieux de réalisation ;
    -  les modalités d’intervention ;
    -  les financements ;
    -  les objectifs du PRSP ;
    -  les thématiques telles que rapportées dans la classification LOLF - programme 204/santé publique et prévention :
        -  « Pilotage de la politique de santé publique, autres actions dont santé précarité » : soit dans le cadre de la ligne des moyens de la sous-action 1.5. Cette ligne regroupera en particulier les actions spécifiques ne pouvant émarger dans les autres et notamment les actions expérimentales. Elle intègre les actions de partenariat avec les territoires de proximité pour l’élaboration ou la mise en oeuvre de programmes ou de projets collectifs de santé publique ou ;
        -  « Déterminants de santé, Pathologies à forte morbidité/mortalité, Qualité de vie et handicaps ».
    Pour ce qui concerne les éléments financiers, le SI permettra d’identifier la part des financements GRSP et des autres financeurs pour les actions ciblées.

L’évaluation

    L’évaluation est un exercice qui s’impose pour tous les programmes de santé publique. Elle permet de savoir si les activités ont réellement été mises en oeuvre et si elles répondent bien aux besoins de la population. Elle indique si il y a nécessité de réajuster l’action et comment, afin d’en améliorer la qualité et l’efficacité. Enfin, elle permet de justifier les actions auprès des partenaires et des citoyens.
    L’implantation et les résultats des actions relevant des PRAPS devront être rapportés en prenant appui sur des outils d’évaluation validés ou en cours de validation comme l’outil de catégorisation des résultats des activités de prévention et de promotion de la santé, Preffi, la grille d’analyse de la qualité des actions/projets menés dans la perspective de réduire les inégalités sociales de santé présentée en annexe VI et en associant à chaque objectif de celles-ci un ou plusieurs indicateurs.
    S’agissant des actions expérimentales, il convient dès l’engagement initial :
    -  de définir leurs modalités d’évaluation. Des indicateurs sur le processus mais également quelques uns concernant l’efficacité seraient souhaitables ;
    -  de s’assurer dans la durée des partenariats techniques et financiers nécessaires afin de garantir la pérennisation de l’action si l’expérience s’avère positive ;
    -  de prévoir leur extension, lorsqu’elles ont prouvé leur efficacité.
    Les observatoires régionaux de la santé (ORS) et les équipes universitaires devraient pouvoir vous aider dans cette démarche d’évaluation.
    Vous veillerez à la bonne articulation des travaux d’évaluation de votre programme, avec la formation spécialisée de la conférence régionale de santé (CRS) en charge du suivi et de l’évaluation du PRSP et des programmes qui le composent.

3.  Financement des actions développées
dans le cadre des PRAPS

    Le financement s’inscrit globalement dans le cadre des crédits du budget opérationnel du programme « Santé publique et prévention ». La mise en oeuvre de ces crédits incombe désormais au GRSP.
    Certaines actions peuvent bénéficier de cofinancements des collectivités territoriales. La participation du Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) pourra être également utilement sollicitée.

4.  Rôle de l’administration centrale

    Dans le cadre de l’animation des PRAPS, la DGS garantit :
    -  la diffusion des recherches fondamentales ainsi que des données statistiques de références nationales et internationales en particulier européennes ;
    -  le partage entre les régions des connaissances entre le social et le sanitaire ;
    -  la diffusion de bonnes pratiques à partir des expériences issues des régions ;
    -  la lisibilité et le pilotage au niveau national des PRAPS à partir des bilans fournis par les régions. Dans ce cadre, la DGS diffuse une synthèse nationale de ces bilans.
    Pour ce faire, la DGS mettra en place régulièrement des journées thématiques, ainsi qu’un outil de communication pour permettre la diffusion de ces informations.
    Pour toutes informations ou difficultés éventuelles relatives à la mise en oeuvre de cette circulaire, vous pouvez contacter mes services (DGS/MC1, bureau des populations, courriel : lionel.lavin@sante.gouv.fr).

Pour la ministre et par délégation :
Le directeur général de la santé,
D.  Houssin

ANNEXE  I
CONTEXTE LÉGISLATIF, BUDGÉTAIRE ET ÉPIDÉMIOLOGIQUE

    La loi no 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions a prévu un outil essentiel pour faire reculer les inégalités en matière de santé : le PRAPS (programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins). C’est le premier programme de santé qui a donné toute sa place à cette articulation entre le sanitaire et le social. Construit dans une démarche ascendante (programme construit à partir de diagnostic local), il a associé les acteurs du secteur social et du secteur médical en facilitant les coopérations institutionnelles (notamment avec les conseils généraux).
    Cette loi a permis de créer deux dispositifs complémentaires visant à réduire les inégalités de santé : les permanences d’accès aux soins de santé (PASS) ainsi que le dispositif de gratuité des soins sous condition de ressources (la CMU).
    La loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique place la lutte contre les inégalités de santé au coeur des politiques de santé.
    L’article L. 1411-1-1 du code de la santé publique dispose ainsi que « l’accès à la prévention et aux soins des populations fragilisées constitue un objectif prioritaire de la politique de santé. Les programmes de santé publique mis en oeuvre par l’Etat ainsi que par les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladie prennent en compte les difficultés spécifiques des populations fragilisées ». En outre, l’article L. 1411-18 précise que « les programmes mis en oeuvre par l’Etat, les groupements régionaux de santé publique, les collectivités territoriales et les organismes d’assurance maladie prennent en compte les difficultés particulières des personnes les plus démunies et des personnes les plus vulnérables. » Enfin, l’article L. 1411-11 prévoit que chaque plan régional de santé publique doit comporter un ensemble coordonné de programmes et d’actions pluriannuels dans la région et notamment un programme régional pour l’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies.
    Le second des neuf principes exprimés dans le rapport d’objectifs de la loi relative à la politique de santé publique est le principe de réduction des inégalités, principe selon lequel la définition des objectifs et l’élaboration des plans stratégiques doivent systématiquement prendre en compte les groupes les plus vulnérables, en raison de leur exposition à des déterminants spécifiques de la fréquence et/ou de la gravité du problème visé, y compris les déterminants liés à des spécificités géographiques.
    La loi du 9 août 2004 prévoit, dans chacune des régions, l’élaboration d’un plan régional de santé publique (PRSP), tenant compte à la fois des objectifs nationaux et des spécificités régionales. L’ensemble des PRSP sont arrêtés par les préfets de région et chacun d’eux comprend notamment des actions dans les domaines couverts par les cinq plans stratégiques présentés dans la loi et des volets spécifiques dont le PRAPS. La loi prévoit la création d’un groupement régional de santé publique (GRSP) ayant pour mission de mettre en oeuvre les programmes de santé contenus dans le PRSP.
    Le GRSP est constitué sous la forme d’un groupement d’intérêt public entre l’Etat (et les établissements publics de l’Etat intervenant dans le domaine de santé publique - INPES et InVS), l’ARH, l’URCAM et la CRAM. Il est présidé par le préfet de région et a pour directeur le DRASS. Les collectivités qui le souhaitent peuvent adhérer au GRSP.
    En conséquence, les organismes notamment associatifs menant des actions dans le cadre des PRAPS sont désormais financés par les GRSP.
    La loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) a introduit un changement de la logique de fonctionnement de l’Etat en substituant à une logique de gestion de moyens, une approche par objectifs de résultats, permettant au citoyen, au contribuable, à l’usager, de juger l’Etat sur sa performance. Responsabilisation, pilotage stratégique, contrôle de gestion, mesure d’activité, nouvelle comptabilité supposent une modification du système de management de l’administration de l’Etat.
Les indicateurs de suivi associés à la loi relative à la politique de santé publique participant à la mesure des inégalités desanté

DREES

    (Annexe qui s’appuie sur les documents « L’Etat de santé de la population en France en 2006 » (DREES, 2007) et « Les indicateurs de suivi de l’atteinte des 100 objectifs du rapport annexé à la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique » (ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, ministère de la santé et des solidarités, DGS, DREES, juillet 2005). Ces deux documents sont accessibles à partir du lien suivant : http://www.sante.gouv.fr/drees/index.html (ouvrages et rapports).
    Malgré l’amélioration des conditions de vie et les progrès des prises en charge médicales, des disparités sociales significatives en matière de santé demeurent plus importantes en France que dans d’autres pays européens selon un rapport 2002 du Haut Comité de santé publique. Les recherches se sont multipliées pour essayer d’identifier les facteurs explicatifs de ces inégalités de santé. Ont été ainsi avancés : les conditions de vie, y compris de travail, les modes de vie et comportements à risque, le rôle cumulatif des différences de conditions au cours de la vie, la causalité inverse selon laquelle l’état de santé expliquerait les différences de revenus, l’effet de la structure sociale (position relative, domination hiérarchique et perte d’autonomie), le rôle du système de santé et de soins et certains facteurs nationaux dont pourraient faire partie les politiques sanitaires et sociales. Aucune de ces hypothèses ne suffit à elle seule à expliquer le phénomène qui est à l’évidence une résultante de causalités combinées. Il n’en reste pas moins important d’en suivre les évolutions au moyen d’indicateurs synthétiques. L’impact des politiques publiques, tant de réduction des inégalités de niveau de vie ou d’éducation que d’accès au système de santé et de soin, pourra ainsi être suivi à moyen et long terme à l’aide de ces données chiffrées réévaluées chaque année jusqu’en 2008.
    En annexe à la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique figurent cent objectifs de santé publique. Les indicateurs retenus pour suivre l’atteinte de ces objectifs ont été précisés par un groupe de travail sous l’égide de la DREES et de la DGS. Ce groupe était composé des principaux producteurs de données sanitaires nationales, auxquels ont été systématiquement associés des experts de chacun des thèmes considérés.
    Parmi les cent objectifs, deux ciblent directement les inégalités de santé. Il s’agit des objectifs 33 et 34. Le premier annonce vouloir « réduire les obstacles financiers à l’accès aux soins pour les personnes dont le niveau de revenu est un peu supérieur au seuil ouvrant droit à la CMU ». Le deuxième objectif énoncé souhaite « réduire les inégalités devant la maladie et la mort par une augmentation de l’espérance de vie des groupes confrontés aux situations précaires ».
    Ces objectifs se réfèrent en partie à des indicateurs transversaux portant sur les inégalités de santé présentés de façon synthétique dans le tableau ci-dessous.
    Définir des indicateurs de mesure des inégalités de santé suppose de déterminer les champs de la santé pertinents dans lesquels on souhaite observer des écarts et leur évolution mais aussi d’identifier les critères sociaux appropriés pour mettre en évidence ces écarts.
    Concernant les champs de la santé pertinents, le rapport de définition des indicateurs de suivi des objectifs de la loi relative à la santé publique (juillet 2005) a retenu :
Des indicateurs synthétiques de santé :
    -  santé perçue ;
    -  santé fonctionnelle ;
    -  maladies chroniques ;
    -  espérance de vie à 35 ans ;
    -  espérance de vie sans incapacité à 35 ans ;
    -  mortalité prématurée.
Des indicateurs d’accès aux soins :
    -  proportion de personnes dépourvues de couverture maladie complémentaire ;
    -  proportion de personnes ayant déclaré avoir dû renoncer à des soins pour des raisons financières.
    Des indicateurs spécifiques :
    -  des indicateurs portant sur la survenue ou la gravité de problèmes de santé spécifiques pour chacun des objectifs correspondants ;
    -  des indicateurs de comportement (nutrition, consommation d’alcool, de tabac...) traités avec les objectifs thématiques correspondants.
    Concernant les critères sociaux, deux variables de stratification ont été choisies :
    -  la répartition de la population en 6 catégories selon la classification « profession et catégorie sociale » (PCS) qui est le plus souvent utilisé en France ;
    -  la répartition de la population selon le niveau d’études en quatre catégories (primaire, premier niveau secondaire, niveau secondaire supérieur, enseignement supérieur).

Santé perçue, santé fonctionnelle et maladies chroniques selon
la catégorie socioprofessionnelle et selon le niveau d’études

    En dépit de son caractère général et de la subjectivité dont elle semble relever, la santé perçue apparaît comme un indicateur pertinent de l’état de santé, très lié aux autres indicateurs de l’état de santé. Un gradient social est relevé dans la déclaration, par les individus, de leur état de santé : les ouvriers suivis des agriculteurs perçoivent un moins bon état de santé ainsi que des limitations fonctionnelles et des maladies chroniques plus fréquentes ; les cadres et les professions intellectuelles supérieures se situent à l’autre extrême. Les différences sont encore plus marquées entre les actifs et les inactifs. Une explication tient à la composition du groupe des inactifs où l’on observe une surreprésentation des retraités et des personnes handicapées (cf.  tableau 1).
    

Tableau no 1
Santé perçue, santé fonctionnelle, maladies chroniques selon la catégorie socioprofessionnelle (pourcentage)

CATÉGORIE
socioprofessionnelle
PART DE LA POPULATION DÉCLARANT...
Etre en moins
bon état de santé*
Etre limité depuis au moins
6 mois dans les activités
que les gens font
habituellement**
Avoir une maladie ou
un problème de santé
chronique ou durable***
PART DANS
la population totale
Agriculteurs exploitants 95 20 29 1
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise 96 13 24 3
Cadres et professions intellectuelles supérieures 97 8 22 7
Professions intermédiaires 97 11 23 13
Employés 95 13 27 17
Ouvriers 93 16 27 14
Retraités 76 47 63 27
Autres inactifs 87 20 27 16
Ensemble 88 23 36 100
Champ : Personnes âgées de plus de 15 ans vivant en logement ordinaire en France métropolitaine
Source : DREES, « L’État de santé de la population en France en 2006 », tableau 24, p. 58. Il s’agit de données provisoires issues de l’Enquête statistique sur les ressources et les conditions de vie (SRCV) 2004, INSEE.
* Libellé de la question : « Comment est votre état de santé en général ? très bon, bon, assez bon, mauvais, très mauvais ».
** Libellé de la question : « Avez-vous une maladie ou un problème de santé qui soit chronique ou de caractère durable (y compris séquelles d’accidents, handicaps) ».
*** Libellé de la question : « Depuis au moins 6 mois, en raison de problèmes de santé, êtes-vous limité dans les activités que les gens font habituellement ? ».

    Quant à l’effet du niveau de diplôme des répondants, il apparaît clairement un gradient de santé déclarée croissant entre ceux qui ne sont pas diplômés et ceux qui ont des diplômes les plus élevés. Un constat similaire est observé dans l’Union Européenne (cf. tableau 2).

Tableau no 2
Santé perçue, santé fonctionnelle, maladies chroniques selon le niveau d’études (pourcentage)

NIVEAU DE DIPLOME PART DE LA POPULATION DÉCLARANT...
Etre en moins
bon état de santé*
Etre limité depuis au moins
6 mois dans les activités
que les gens font
habituellement**
Avoir une maladie ou
un problème de santé
chronique ou durable***
PART DANS
la population totale
Sans diplôme ou CEP 77 38 50 34
CAP-BEPC 93 19 32 33
Bac-Bac + 2 96 12 26 22
Diplôme supérieur 97 10 22 11
Ensemble 88 23 36 100
Champ : Personnes âgées de plus de 15 ans vivant en logement ordinaire en France métropolitaine.
Source : DREES, « L’État de santé de la population en France en 2006 », tableau 25, p. 58. Il s’agit de données provisoires issues de l’Enquête statistique sur les ressources et les conditions de vie (SRCV) 2004, INSEE.
* Libellé de la question : « Comment est votre état de santé en général ? très bon, bon, assez bon, mauvais, très mauvais ».
** Libellé de la question : « Depuis au moins 6 mois, en raison de problèmes de santé, êtes-vous limité dans les activités que les gens font habituellement ? ».

L’espérance de vie à 35 ans selon la catégorie sociale

    Le seuil de 35 ans correspond à l’âge où les variables actuellement utilisées pour la caractérisation des groupes sociaux sont « stabilisées » pour la majorité de la population : les études sont en général terminées et la vie professionnelle initiée. Entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990, l’espérance de vie à 35 ans a augmenté pour toutes les catégories sociales. Ce sont toujours les ouvriers qui vivent le moins longtemps et les cadres et professions intellectuelles supérieures qui ont l’espérance de vie la plus longue. Sur la période 1991-1999, les hommes cadres ou exerçant une profession intellectuelle supérieure ont une espérance de vie à 35 ans de 46 ans contre 39 ans pour les ouvriers. Pour les femmes, ces chiffres sont respectivement de 50 ans et 47 ans. Ainsi, les différences de mortalité sont plus faibles chez les femmes que chez les hommes. Les écarts d’espérance de vie entre catégories socioprofessionnelles se sont accrus chez les hommes alors qu’ils restaient stables chez les femmes (cf. tableau 3).

Tableau no 3
Espérances de vie des hommes et des femmes à 35 ans, par période et catégorie socioprofessionnelle (en années)

CATÉGORIES
et professions
intellectuelles
supérieures
PROFESSIONS
intermédiaires
AGRICULTEURS ARTISANS,
commerçants,
chefs
d’entreprise
EMPLOYÉS OUVRIERS INACTIFS
non retraités
ENSEMBLE
Hommes                
1976-1984 41,5 40,5 40,5 39,5 37,0 35,5 27,5 38,0
1983-1991 43,5 41,5 41,5 41,0 38,5 38,5 27,5 39,0
1991-1999 46,0 43,0 43,5 43,0 40,0 39,0 28,5 41,0
Femmes                
1976-1984 47,5 46,5 45,5 46,0 45,5 44,5 44,5 45,0
1983-1991 49,5 48,0 47,0 47,5 47,5 46,5 45,5 46,5
1991-1999 50,0 49,5 48,5 49,0 48,5 47,0 47,0 48,0
Champ : France entière.
Source : DREES, « L’Etat de santé de la population en France en 2006 », tableau 26, p. 59. Il s’agit de données issues de l’échantillon démographiques permanent et état civil, INSEE.

Le taux de mortalité prématurée

    Le taux de mortalité prématurée : indicateur classique qui témoigne de la mortalité survenue avant un âge donné, habituellement 65 ans. Ce taux est près de trois fois supérieur chez les hommes : 306,7 % chez les hommes contre 134,6 % chez les femmes (mortalité avant 65 ans, données d’Eurostat, 2002). Le niveau de la mortalité prématurée varie aussi selon les régions françaises. Les taux de décès les plus élevés s’observent dans le Nord - Pas-de-Calais puis en Picardie, Haute-Normandie, Champagne-Ardenne et en Bretagne. Les taux les plus faibles en Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes, Ile-de-France et Alsace (cf. carte ci-dessous).

    Source : « L’Etat de santé de la population en France en 2006 », DREES, pp. 219

La proportion de personnes qui ont renoncé à des soins optiques ou dentaires au cours des 12 derniers mois pour des raisons financières
    Pour appréhender l’objectif 33, un indicateur, la « proportion de personnes qui ont renoncé à des soins optiques ou dentaires au cours des 12 derniers mois pour des raisons financières » a été retenu par le groupe d’experts. Le choix de retenir les soins dentaires et optiques tient au fait que 49 % des renoncements aux soins concernent la santé bucco-dentaire et 18 % les lunettes. A partir des données de l’Enquête santé protection sociale (SPS) pour l’année 2004, cette proportion a été estimée à 10 % parmi les personnes âgées de 18 ans et plus avec des variations observées selon le sexe (les femmes sont davantage concernées, 11,6 % contre 8,2 %), l’âge (le renoncement est sensiblement plus élevé dans le groupe d’âges intermédiaires des 30-59 ans) et le revenu (le renoncement diminue à partir d’un revenu mensuel de 2 500 euros par ménage). Le renoncement dans le domaine dentaire est aussi plus stable jusqu’à un revenu de 2 500 euros mensuels. Il baisse ensuite de manière importante avec la croissance du revenu. Dans le domaine optique, les renoncements les plus importants touchent les personnes disposant d’un revenu du ménage inférieur à 1 300 euros. Il tend ensuite à diminuer quand le revenu s’élève jusqu’à 2 200 euros par ménage puis se stabilise ensuite quel que soit le niveau de revenus.

ANNEXE  II
MINISTÈRE DE LA SANTÉ DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS
DIRECTION GÉNÉRALE DE LA SANTÉ
STRATÉGIE D’ACTIONS SANTÉ PRÉCARITÉ (SASP)
Sept axes stratégiques pour une amélioration de la santé
des populations en situation de précarité

    Synthèse des travaux ayant associé : la direction générale de la santé (DGS), la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS), la direction générale de l’action sociale (DGAS), la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), et la délégation interministérielle à la ville (DIV).
    Coordination : direction générale de la santé

Résumé

    Nos sociétés présentent une structuration sociale inégalitaire, à l’origine d’inégalités sociales de santé. Au sein de cet ensemble, des flux représentent la dynamique des individus et de la société : processus d’exclusion v/s processus d’inclusion, précarisation v/s « stabilisation ». Les populations en difficulté sociale peuvent être caractérisées par différentes variables rendant compte, le plus souvent imparfaitement, de leur positionnement ou de leur trajectoire. Les personnes subissant un phénomène de précarisation constituent le sous-ensemble le plus large au sein duquel de nombreuses sous populations peuvent être identifiées en fonction du niveau de revenus, du statut social, de l’origine, etc. Pour le Haut Comité de la santé publique, « Le recoupement des études publiées sur le sujet montre qu’il existe en France probablement de dix à quinze millions de personnes qui dans une période récente de leur vie ont à un moment ou à un autre perdu quelques-unes des sécurités essentielles qui assurent une certaine stabilité, et vivent donc dans une situation de grande vulnérabilité, notamment du point de vue de leur santé (haut comité de la santé publique. La progression de la précarité en France et ses effets sur la santé. Rennes. Editions de l’ENSP, 1998.. »). Par ailleurs, on compte en France, un million de mineurs pauvres, 2,5 millions de bénéficiaires de l’aide alimentaire, un million de travailleurs pauvres et près de 5 millions de bénéficiaires de la CMU-C.
    Les ruptures et conditions de vies passées et présentes qui caractérisent la précarité sociale induisent ou révèlent des problèmes de santé, parfois aussi elles en découlent. Elles rendent moins à même les personnes de repérer et de soigner ces problèmes de santé, qui s’aggravent et se cumulent. Entre consultation tardive et renoncement, ce type de recours aux soins limite aussi les chances de guérison et de récupération. Ces personnes cumulent des difficultés sociales, problèmes de santé et de soins.
    Parcours de vie défavorables et processus qui mènent à la mauvaise santé sont intriqués, depuis l’enfance. La réponse est donc nécessairement plurielle et dépasse le strict champ de la santé publique. Pourtant en s’appuyant sur les acquis de la loi du 29 juillet 1998, relative à la lutte contre les exclusions, et sur le nouveau cadre fourni par la loi du 9 août 2004, relative à la politique de santé publique, il a été possible de dégager un certain nombre de pistes d’actions sanitaires, s’appuyant sur les principes suivants :
    -  maintenir un lien étroit entre santé et social mais identifier clairement ce qui, tant en termes de budget que de responsabilité et champs d’intervention relève de l’un ou l’autre secteur ;
    -  renforcer la qualité des soins prodigués à l’hôpital (PASS, notamment) comme en ville ; en effet, pour les populations les plus en difficulté, la demande de soins est le plus souvent la seule initiative témoignant d’une démarche de santé ;
    -  s’appuyer sur les résultats positifs de la loi de lutte contre les exclusions pour améliorer les actions de santé envers les plus démunis ;
    -  mettre en oeuvre, de façon transitoire, les dispositifs les plus adaptés à certaines caractéristiques des publics vulnérables, même si l’accès au droit commun doit être l’objectif finalement poursuivi.
    Les propositions s’articulent ainsi autour de sept axes stratégiques :
    1.  Mettre effectivement les populations précaires au coeur des politiques de santé publique ;
    2.  Améliorer l’accès à une couverture maladie ;
    3.  Améliorer l’accès à des soins de qualité ;
    4.  Agir précocement sur l’enfant et la famille ;
    5.  Accentuer l’effort de prévention en agissant sur les principaux facteurs de risque comportementaux et environnementaux ;
    6.  Mener des actions spécifiques ;
    7.  Encourager la recherche et la diffusion des savoirs.

Axe 1 : mettre effectivement les populations précaires
au coeur des politiques de santé publique

    Il n’existe pas de pathologie spécifique de la pauvreté ou de la précarité. Mais on observe un surcroît de risque pour ces populations en termes de mortalité, morbidité et handicap. Le premier axe vise donc à relever le défi posé par ce constat épidémiologique, en faisant en sorte que les populations précaires soient les premières bénéficiaires de la politique de santé publique, au niveau national (en lien avec le niveau européen), régional et local. Il s’agit d’appliquer effectivement les nouvelles dispositions du code de la santé publique concernant la place centrale que doivent occuper les populations vulnérables dans l’ensemble des plans et programmes, y compris dans les plans d’alerte ou d’urgence, qu’ils soient d’initiative centrale ou déconcentrée.
    Pour cela, il est nécessaire de prendre en compte les populations les plus vulnérables dans l’ensemble des processus de programmation et de planification. Les dispositions techniques proposées ne seront toutefois efficaces qu’après qu’un nouvel élan politique ait été donné au niveau national, voire européen.
    Il est également important de renforcer les démarches et dispositifs spécifiques (tels les programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins - PRAPS), propres à décloisonner les pratiques et fédérer les acteurs de santé publique, dont la qualité peut encore être améliorée mais dont les moyens doivent être également prévus à la hauteur des enjeux posés.
    Enfin, la question des inégalités de santé doit être prise en compte dans les territoires de proximité en :
    -  développant une connaissance partagée des politiques publiques (logiques, organisations...) dans le cadre desquelles les projets locaux doivent être développés au bénéfice de la santé des publics démunis et vulnérables ;
    -  suscitant l’implication des pouvoirs publics locaux par une mise en évidence de leurs capacités d’action vis-à-vis des inégalités sociales de santé et dans un esprit de lisibilité et reproductibilité de l’action locale ;
    -  développant les volets et projets de santé des contrats territoriaux passés entre l’État et les collectivités locales, en tenant un compte particulier des problématiques d’accès et de recours aux soins des publics démunis et vulnérables et moyennant des logiques de financement tripartites (collectivités locales et État santé et politique de la ville).

Axe 2 : améliorer l’accès à une couverture maladie

    Les déterminants des inégalités de santé sont nombreux et complexes. Toutefois, l’accès aux droits, c’est à dire en l’espèce, l’accès à une couverture maladie, est essentiel pour permettre de résoudre tout ou partie des difficultés financières afin de préserver ou recouvrer sa santé.
    La direction de la sécurité sociale n’ayant pas participé au travail inter directionnel, les autres directions estiment qu’il faut au minimum proposer la mise en place d’un système d’information de l’accès à une couverture maladie, en liaison étroite avec la CNAMTS et les conseils nationaux des ordres professionnels. Cet organisme aurait pour rôle de veiller et d’alerter sur les difficultés techniques, éthiques et déontologiques qui pourraient apparaître préjudiciables aux populations les plus vulnérables, à l’occasion notamment de la mise en oeuvre des dispositions de la loi 2004-810, du 13 août 2004, relative à l’assurance maladie.

Axe 3 : améliorer l’accès à des soins de qualité

    La loi prévoit l’égalité d’accès aux soins. Pourtant, dans les faits, l’accès à des soins de qualité est encore problématique pour les personnes en difficulté sociale. Les propositions pour améliorer l’effectivité de l’égalité d’accès aux soins et la prise en charge médicale des personnes en situation de précarité dans les établissements de santé s’articulent selon les axes suivants :
    -  intégrer la dimension de précarité dans la prise en charge en urgence ;
    -  affirmer le rôle des permanences d’accès aux soins de santé (PASS) dans les territoires de santé, en consolidant, développant et améliorant l’efficience du dispositif par des recommandations aux établissements, la mise en place d’un groupe de veille du dispositif, le recensement des PASS existantes et des besoins auprès des ARH, et en veillant à une meilleure couverture territoriale ;
    -  développer les réseaux de santé pour créer une dynamique centrée autour du patient en situation de précarité ;
    -  sensibiliser et former les professionnels de santé afin qu’ils intègrent le fait social à la dimension sanitaire de leur mission, notamment par un effort portant sur les formations initiale et continue, mais également en impliquant les médecins libéraux dans des actions de santé publique au bénéfice des populations précaires ;
    -  renforcer la qualité des interventions sanitaires au cours des prises en charge sociales en faisant en sorte que l’investissement des professionnels, des structures et organismes à compétence sociale sur le champ des problématiques de santé soit de qualité et complémentaire avec celui du secteur sanitaire.

Axe 4 : agir précocement sur l’enfant et la famille

    Les inégalités de santé se construisent pour partie dès l’enfance, voire dès la période périnatale. Les objectifs suivants feront l’objet d’un rapprochement avec ceux qui seront arrêtés par le plan d’actions en faveur de la santé des jeunes, actuellement en phase de concertation interne à la DGS :
    -  améliorer, en période périnatale, le repérage et la prise en charge des femmes et couples en situation de précarité ;
    -  renforcer le rôle de l’école, du collège et du lycée comme des lieux privilégiés d’éducation pour la santé et de dépistage ;
    -  assurer aux enfants handicapés un niveau de prévention et d’éducation à la santé identique à celui de la population générale du même âge ;
    -  mieux prendre en charge la souffrance psychique et les troubles mentaux des plus jeunes.
Axe 5 : accentuer l’effort de prévention en agissant sur les principaux facteurs de risque comportementaux et environnementaux
    La modélisation des différents déterminants des inégalités de santé permet de mettre en évidence le rôle de nombreux facteurs. Parmi ceux-ci, les comportements de santé et l’environnement immédiat des individus jouent un rôle important.
    Il est nécessaire de proposer un certain nombre de mesures visant à :
    -  réduire la prévalence du tabagisme au sein des catégories sociales défavorisées (poursuivre l’augmentation de la taxation sur la vente de tabac, favoriser l’accès des plus défavorisés à des substituts nicotiniques, développer les consultations hospitalières de tabacologie) ;
    -  réduire la consommation excessive d’alcool au sein des catégories sociales les moins favorisées (engager une réflexion sur la taxation différentielle entre les boissons alcoolisées et non alcoolisées, mener une action spécifique dans les entreprises, poursuivre les efforts entrepris pour améliorer la prise en charge des personnes en difficulté avec l’alcool sur l’ensemble du territoire) ;
    -  réduire l’exposition au plomb et au CO (mesures du PNSE) ;
    -  réduire la fréquence des accidents de la vie courante au sein des populations précaires ;
    -  lutter contre les conséquences sanitaires de l’habitat insalubre ;
    -  améliorer la nutrition comme déterminant de la santé, en développant un volet du PNNS2 sur l’action en faveur des populations défavorisées, portant sur la demande et sur l’offre de produits.

Axe 6 : mener des actions spécifiques

    En direction des personnes détenues ou sortant de prison, en adaptant l’ensemble des politiques de santé publique au milieu pénitentiaire, en particulier :
    -  le plan en psychiatrie et santé mentale ;
    -  le programme national hépatites virales C et B 2002-2005 ;
    -  le plan national de santé bucco-dentaire ;
    -  les mesures de lutte contre la tuberculose,
    et en assurant la continuité des soins pour les sortants de prison, en adéquation avec le droit commun.
    -  en direction des migrants, en mettant l’accent, en 2005, sur le VIH et les hépatites.
En direction des personnes privées d’emploi, en mettant en place, pour les jeunes éloignés de l’emploi, des dispositions relatives à la santé dans les mesures d’accompagnement prévues par le plan de cohésion sociale et en élaborant une expérience de suivi sanitaire des autres catégories de personnes sans emploi à l’échelle d’une région.

Axe 7 : encourager la recherche et la diffusion des savoirs

    Il s’agit là de développer, à l’intérieur des travaux sur les inégalités de santé et de l’épidémiologie sociale, les connaissances sur les parcours menant aux inégalités et à la précarité, notamment en matière d’état de santé, avec une attention particulière aux données statistiques et épidémiologiques correspondantes ainsi que la compréhension socio-anthropologique des relations entre santé et précarité par des études fines biographiques et monographiques, ces relations étant encore mal connues (approche qualitative).
    Cet axe prévoit notamment, l’élaboration sous l’égide de la DREES, sur cinq ans, d’un programme de recherches quantitatives et qualitatives, en fonction des besoins prioritaires, des expertises existantes et des capacités des producteurs de données (IRDES, INED, INSEE, InVS, CNAMTS, CNAF, Fonds CMU) à s’inscrire dans ce programme.

ANNEXE  III a
LES PUBLICS PRIORITAIRES
Les populations issues de l’immigration migrants
1.  Les pathologies

    Certains déterminants de la santé, logement, saturnisme, promiscuité, séquelles de tortures parfois, mauvaise alimentation, carences diverses et retard dans l’accès aux soins, sont à l’origine d’une morbidité plus importante. Des maladies infectieuses comme la tuberculose, les hépatites virales et le VIH-sida sont davantage représentées chez les personnes migrantes en difficulté. En ce qui concerne ces deux affections le problème est particulièrement important pour les personnes originaires d’Afrique subsaharienne.

2.  La protection sociale

    Sous réserve de résidence régulière et stable et de ressources inférieures à un certain plafond sur le territoire français, la couverture médicale universelle (CMU) prend en charge les étrangers en situation régulière. L’aide médicale d’Etat (AME) complète ce dispositif pour les personnes en situation irrégulière. Afin de pallier les difficultés d’accès aux soins des personnes en situation irrégulière, la circulaire du 16 mars 2005 relative à la prise en charge des soins urgents délivrés à des étrangers résidant en France de manière irrégulière et non bénéficiaires de l’aide médicale de l’Etat (art. L. 254-1 du code de l’action sociale et des familles, issu de l’article 97 de la loi de finances rectificative pour 2003 du 30 décembre 2003) vise à permettre une prise en charge des soins urgents quelle que soit la situation administrative des personnes au regard du séjour. Des difficultés sont signalées par les associations travaillant en faveur des migrants ou par les personnels des PASS quant à l’accès effectif au système de soins ou aux différentes formes de protection sociale (voir à ce sujet les rapports de l’IGAS relatifs à la CMU et à l’AME).

3.  Les populations les plus en difficulté

    Il existe plus spécifiquement des problèmes sanitaires et sociaux pour ce qui est :
    -  des immigrés vivant en foyers de travailleurs migrants (FTM). Construits dans les années 1960-1970, ces foyers étaient destinés à des travailleurs isolés. Prévus comme habitat transitoire, ils sont devenus l’habitat durable de personnes isolées (en France du moins) originaires surtout du Nord de l’Afrique et de l’Afrique de l’Ouest, qui y vivent parfois depuis plusieurs décennies. 120 000 places sont disponibles réparties dans environ 700 foyers ou résidences sociales issues des foyers, mais le nombre d’occupants est supérieur (environ 140 000) du fait de la suroccupation importante de certains de ces foyers franciliens. Ils sont surtout implantés en Ile-de-France (270 établissements), en Rhône-Alpes et dans la région PACA.
    a)  Les Maghrébins représentent environ la moitié de la population de ces établissements. La proportion de personnes retraitées est élevée et augmentera dans les années à venir.
    b)  Parmi les occupants (officiels ou non officiels) des foyers où prédominent des migrants d’Afrique subsaharienne, en particulier en Ile-de-France, les moins de soixante ans sont nombreux. Les occupants de ces foyers se trouvent dans une situation sociale souvent précaire et sont soumis à de plus grands risques sanitaires du fait de mauvaises conditions de logement, d’environnement et d’hygiène. Ils sont plus à risque de contracter des affections telles que tuberculose, VIH ou hépatites ;
    -  des immigrés vieillissants isolés vivant hors des FTM ou résidences sociales et de ce fait difficilement repérables. Ils ont de grandes difficultés à accéder aux dispositifs communs de prise en charge ;
    -  des jeunes et notamment en ce qui concerne l’accès à la prévention, à l’éducation sexuelle et au respect mutuel filles et garçons.

4.  Mesures prioritaires

    L’accent sera mis sur la mise en oeuvre des recommandations des différents programmes nationaux (VIH, tuberculose, hépatites et psychiatrie).
    Les actions pour parfaire la connaissance des problèmes rencontrés par certains migrants pour accéder à la couverture médicale universelle ou à l’aide médicale d’Etat seront privilégiées.
    La problématique de la santé des populations migrantes sera abordée en privilégiant :
    -  l’accès aux droits, à la prévention et aux soins dans les structures communes mais aussi dans les permanences d’accès aux soins de santé (PASS) ;
    -  la possibilité de bénéficier aussi bien de l’allocation personnalisée d’autonomie que des autres aides existant en ce secteur (aides ménagères, soins à domicile) en adaptant ces dispositifs à des groupes de personnes plutôt qu’à des individus ; il convient de souligner l’importance d’un travail avec les centres locaux d’information et de coordination (CLIC), la politique de la ville et l’importance de mener des actions conjointes avec les conseils généraux, les caisses primaires d’assurance maladie, et de façon globale avec l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances ;
    -  une réflexion sur le devenir des foyers à adapter avec d’importants travaux (faits dans le cadre du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants), particulièrement lorsque le public est vieillissant : cette démarche est déjà entreprise pour 170 foyers concernant 30 000 places avec la nécessité de produire, en fonction des caractéristiques des résidents, des logements respectant les normes « handicap » et accessibles aux personnes à mobilité réduite et d’organiser le recours au maintien à domicile. Il est important de prévoir un projet social à fort contenu d’interventions concernant la santé, porté par les DDASS et les conseils généraux. Par ailleurs deux établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes expérimentaux (à Colombes dans le 92 et Bobigny dans le 93) se créent et devront être évalués ;
    -  la prévention et l’accès aux soins dans les foyers où réside une part importante de populations moins âgées ;
    -  une information réciproque entre les PRAPS et les PRIPI (programme régionaux d’insertion des populations immigrées).
    La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 (art. 146) a donné un fondement législatif au programme régional d’intégration des populations immigrées (PRIPI). Ce programme constitue au niveau régional le document de référence de l’action de l’Etat et de ses partenaires en matière d’accueil et d’intégration.
    Le PRIPI recense à partir des besoins locaux et dans un document unique l’ensemble des actions concourant à l’accueil, l’accès aux droits et la promotion sociale et professionnelle des personnes immigrées. Il prévoit des orientations pluriannuelles et un programme annuel.
    La responsabilité du PRIPI incombe au préfet de région.
    Parce qu’il implique la mise en oeuvre d’actions interministérielles partenariales et territorialisées, le PRIPI nécessite au niveau régional un pilotage fort qui incombe au préfet de région, lequel est assisté d’un comité de pilotage rassemblant les préfets de départements, les services de l’Etat, les acteurs publics et privés concernés, les représentants des collectivités territoriales. L’animation de ce comité peut être confiée à la DRASS ou à la DRTEFP.
    Le diagnostic initial doit permettre d’apprécier l’effort à consentir eu égard à l’importance des populations concernées dans la région, leurs caractéristiques, l’évaluation des actions déjà réalisées.
    Le PRIPI couvre les différents domaines de l’emploi, de l’éducation, de la santé, du logement, de la lutte contre les discriminations. Il met aussi en perspective les plans départementaux d’accueil, prend en compte la déclinaison des différents accords-cadres conclus au plan national en faveur des jeunes et des femmes et assure l’articulation avec les programmes pour l’intégration arrêtés par les autres opérateurs.

Les jeunes en situation de vulnérabilité

    Les jeunes en difficulté ne constituent pas un groupe homogène tant les situations et contextes de vie sont variés : étudiants « pauvres », jeunes en insertion, jeunes de la protection judiciaire de la jeunesse, primo-arrivants, jeunes en errance... Cependant, un certain nombre de problèmes relatifs à la santé se retrouvent chez ces différentes catégories de population tant en termes de fragilités, de souffrance psychologique et de comportements à risque, que de difficultés dans les conditions de vie, l’accès à la prévention, aux droits et aux soins.
    Ces difficultés sont plus importantes que pour les autres jeunes du même âge. Elles sont la source de nombreuses vulnérabilités.
    Des données spécifiques sont disponibles concernant les jeunes en difficulté d’insertion sociale et professionnelle. Les résultats proviennent des enquêtes relatives aux jeunes consultants dans les centres d’examen de santé de l’assurance maladie, des jeunes relevant de la protection judiciaire de la jeunesse, ou des enfants scolarisés (notamment en 3e). Cette dernière fait ressortir des écarts entre la situation dans les zones d’éducation prioritaire et les zones urbaines sensibles en comparaison avec des établissements situés en dehors.

Résultats des enquêtes sur la santé des jeunes en difficulté
Jeunes en insertion

    Les études réalisées par le centre technique d’appui et de formation des centres d’examen de santé renseignent sur l’état de santé, les comportements et la fragilité sociale des jeunes en difficulté d’insertion professionnelle. Le rapport du CETAF de décembre 2005 établi pour 105 901 jeunes dresse un tableau préoccupant (confirmant la tendance relevée les années précédentes). Ainsi, une jeune fille sur trois, et un jeune homme sur cinq s’estime en mauvaise santé, les prévalences de non-suivi médical sont deux fois plus élevées que chez les non-précaires (10 % chez les jeunes filles vs 4 % et 22 % chez les jeunes hommes vs 10 %) et les données de l’étude suggèrent que les jeunes en difficulté d’insertion adoptent des comportements à risque à un âge plus précoce (tabac, alcool).
    Par ailleurs, des études sont menées par l’INSERM (Marie Choquet) sur la santé des jeunes relevant de la protection judiciaire de la jeunesse. L’étude réalisée en 1998 montrait de nombreux problèmes tant en termes de plaintes de santé, de troubles dépressifs allant jusqu’à la tentative de suicide que de comportements à risque (consommations, sexualité) et de violence. L’enquête 2005 confirme ces tendances. Si les jeunes de la PJJ s’estiment dans une très large majorité bien portants, la différence avec la population scolaire est manifeste concernant les « conduites d’échappement de la vie ordinaire » dont les absences scolaires réitérées, les fugues, les tentatives de suicide ainsi que les comportements de consommations de tabac et de substances illicites. Parallèlement, leur expérience est fortement marquée par la violence agie mais aussi subie (notamment par des agressions sexuelles). Nombre de ces traits sont particulièrement accentués chez les filles enquêtées.

Enfants scolarisés

    Des renseignements précieux sont apportés par le dispositif d’enquête relatif aux bilans de santé menés à l’école (dans le cadre d’un processus triennal alternatif : grande section de maternelle, classe de 3e et CM2). Ces données permettent de distinguer la situation dans les ZEP (voire les ZUS).
    Les résultats de l’enquête 2003-2004 relative aux adolescents scolarisés en classe de 3e (récemment publiés par la DREES) documentent les problèmes de surpoids et d’obésité ainsi que les problèmes bucco-dentaires et sensoriels. Elles peuvent être mises au regard des conclusions précédemment dégagées au vu des données 2002-2003 relatives à la santé des enfants de grande section de maternelle et exploitées par l’ONZUS (sachant que 80 % des établissements en ZUS sont classés en ZEP).

Surpoids et obésité

    Un adolescent sur six est en surpoids (obésité incluse) en classe de 3e et des écarts de prévalence vont du simple à plus du double entre les enfants de cadres et d’ouvriers non qualifiés (9,8 % contre 23,4 %). La DRESS souligne que le surpoids apparaît comme le miroir des inégalités sociales (avec un effet loupe si on s’intéresse uniquement à l’obésité). « Toutes choses égales par ailleurs », le fait d’être scolarisé en ZEP multiplie par 1,3 le risque d’être en surpoids (l’ONZUS relève un surpoids affectant 17 % des enfants de grande section de maternelle en ZUS contre 12 % dans les autres établissements de leur agglomération).
    L’enquête menée en 3e permet une comparaison avec la situation des enfants déjà enquêtés à cinq-six ans (grande section de maternelle). Par comparaison la DRESS note une augmentation des problèmes de surcharge pondérale : « Si on s’intéresse aux élèves en surpoids (hors obésité) en 3e, 60,5 % avaient un poids “normal” à cinq-six ans, 31,8 % étaient déjà en surpoids (hors obésité) et 7,7 % avaient un indice de masse corporelle (IMC) traduisant une obésité. A contrario près de la moitié (47,8 %) des élèves en surpoids à cinq-six ans ont retrouvé un poids normal en 3e. Ce dernier résultat pourrait traduire l’efficacité d’une prise en charge précoce de la surcharge pondérale, qu’elle soit médicale ou non. »

Bucco-dentaire et troubles sensoriels

    L’état de santé bucco-dentaire et la prise en charge des troubles sensoriels sont également des marqueurs indirects des inégalités sociales.
    Si globalement près de 5 % des élèves de 3e ont au moins deux dents cariées non soignées, la proportion atteint 10 % dans les collèges situés dans une zone d’éducation prioritaire (pour les élèves de grande section de maternelle l’ONZUS relève que le pourcentage des enfants concernés est près de trois fois plus fort en ZUS que dans les autres établissements soit 19 % contre 6,7 %).
    Le rapport 2005 de l’ONZUS montre que les défauts de vision s’avèrent plus fréquents parmi les élèves de grande section de maternelle situé en ZUS : ils sont observés lors de ces examens pour 21 % des élèves en ZUS contre 18 % pour les autres. Il est significatif que ces problèmes de vision étaient moins souvent connus avant l’examen pour les élèves en ZUS (problème connu avant l’examen pour seulement 7,5 % des enfants en ZUS contre 11,4 % ailleurs) et moins souvent traités par le port de lunettes (9,3 % en ZUS contre 12,0 % ailleurs).
    D’une manière générale :
    -  les enquêtes relatives aux jeunes en difficulté d’insertion révèlent un taux élevé de jeunes s’estimant en mauvaise santé, des données de suivi médical insatisfaisantes, une souffrance psychique importante et suggèrent l’adoption de comportements à risques à un âge plus précoce... ;
    -  les enquêtes relatives aux enfants scolarisés soulignent de leurs côtés les écarts de situation pour les problèmes de surpoids et d’obésité ainsi que pour la santé bucco-dentaire et les problèmes sensoriels (moins bien connus et traités).

Une problématique globale

    L’environnement familial et social dans lequel évolue l’enfant est un déterminant important de sa santé (présente et à venir). La qualité de l’environnement socio-familial apparaît particulièrement cruciale durant la période de la grossesse et de la petite enfance pour la santé des futurs adolescents et adultes. L’importance des expériences de la petite enfance sur les comportements et la santé de l’adulte est telle que l’on entrevoit ainsi un véritable cycle de reproduction et de transmission des inégalités de santé (cf. note 1) . L’influence de l’environnement socio-familial est particulièrement attestée s’agissant de la prématurité, du poids de naissance, de l’asthme, de l’obésité, des maladies mentales, de la souffrance psychique et des affections bucco-dentaires. Les inégalités sociales sont également très marquées dans le domaine du handicap, des conduites violentes, des consommations à risque et de la pratique des activités physiques.
    L’aspect multifactoriel est confirmé par les résultats d’une étude qualitative menée en 2001 par le CRES de Picardie auprès de jeunes seize - vingt-cinq ans en filière préprofessionnelle qui indiquent que :
    -  ces jeunes souffrent d’une faible estime de soi se traduisant par un intérêt réduit pour leur corps ;
    -  le recours aux soins intervient tardivement et s’effectue uniquement à titre curatif ;
    -  ils rencontrent de nombreux obstacles administratifs et financiers dans l’accès aux soins ;
    -  ils ont rarement accès à des informations adaptées ;
    -  il y a inadéquation entre les demandes de ce public et la réponse du système de soins ;
    -  les actions de prévention ne tiennent pas toujours compte de leurs représentations et de leur demande.

Des structures d’accueil et d’accompagnement des jeunes
Les points accueil et écoutes jeunes - PAEJ

    Les points accueil et écoute jeunes, adolescents et jeunes majeurs, sont destinés à réduire les comportements à risque et visent à éviter les ruptures, rétablir la communication et le lien de confiance avec les parents et les adultes en général. Le jeune doit pouvoir exprimer son mal-être, formuler ses attentes, retrouver une capacité d’action, restaurer une image de soi et des autres positive, réinvestir son parcours scolaire ou d’insertion, interrompre sa dérive vers des situations de dépendance et de marginalité, réduire sa consommation de cannabis. Il doit également être préparé et orienté positivement, le cas échéant, vers une structure de prise en charge sanitaire ou sociale.
    Deux cent quarante structures (PAEJ et antennes) existent sur environ 80 % du territoire (données fin 2005). Soixante-six d’entre elles ont été créées dans le cadre du plan Borloo. Elles accueillent plus de 40 000 jeunes âgés principalement de quinze à vingt-cinq ans et 15 000 parents pour quatre à cinq entretiens en moyenne.

Les missions locales - ML

    Le réseau des missions locales (ML) et des points d’accueil, d’information et d’orientation (PAIO) est composé de 600 structures réparties sur l’ensemble du territoire national y compris les territoires outre-mer. Elles sont financées par l’Etat (ministère chargé du travail) à hauteur de 30 à 40 % et les collectivités locales. Ces structures ont pour fonction d’accueillir les jeunes de seize à vingt-cinq ans, les informer, orienter, accompagner vers l’emploi, la formation et vers des réponses d’insertion sociale : accès à la santé, au logement, aux droits, à la citoyenneté... Pour ce faire, elles doivent travailler en concertation avec l’ensemble des partenaires locaux susceptibles de répondre aux différentes situations des jeunes et de rechercher avec eux les réponses les plus adaptées dans le droit commun.
    Si ces structures concernent l’insertion sociale et professionnelle, elles n’ont pas pour mission le soin et la santé ; elles ont dans ce domaine une fonction d’analyse en concertation avec les partenaires de ce champ, une fonction d’orientation du public jeune vers l’accès aux droits (couverture sociale, couverture complémentaire), une fonction d’information et d’accompagnement vers des réponses de droit commun.
    Cette prise en charge globale permet aux ML de s’impliquer avec efficacité dans les divers programmes nationaux, régionaux, locaux, en prenant en compte la situation de chaque territoire. (PRAPS, programme de prévention...).

Des orientations prioritaires
Amélioration du suivi des bilans de santé

    Plus les difficultés d’un enfant, d’un adolescent ou d’un jeune sont précocement détectées et rapidement prises en charge, plus grandes sont les chances d’éviter qu’elles n’entraînent des conséquences dommageables à terme.
    Des bilans de santé sont proposés à différents stades du parcours du jeune. La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance instaure quatre visites médicales obligatoires à six, neuf, douze et quinze ans pour tous les enfants au cours de leur scolarité. Ces visites doivent comporter un bilan de l’état de santé physique et psychologique et ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. Si des problèmes spécifiques de santé sont révélés à cette occasion, le jeune devra être orienté et accompagné vers une prise en charge adaptée (cf. circulaire DGS/DESCO mai 2002).
    Un bilan de santé est également proposé par les missions locales aux jeunes en insertion professionnelle. Ce bilan est accompagné en amont d’une sensibilisation visant à en expliquer l’objectif et le déroulement. Le centre d’examens de santé peut effectuer par la suite un suivi destiné à orienter le jeune en cas de besoin et faire le lien avec le médecin traitant. Cet accompagnement du jeune est une occasion d’accueil et d’écoute permettant d’aborder avec lui les questions de prévention et d’éducation pour la santé.

Développement de la prévention et de l’éducation
pour la santé

    L’objectif de l’éducation pour la santé est d’« aider chaque jeune à s’approprier progressivement les moyens d’opérer des choix, d’adopter des comportements responsables, pour lui-même comme vis-à-vis d’autrui et de l’environnement ». C’est dès le plus jeune âge que les enfants doivent être sensibilisés aux comportements positifs en matière de santé, de respect de soi et des autres. L’éducation pour la santé est une composante essentielle d’une politique de prévention. Elle contribue à l’éducation à la citoyenneté : ne se limitant pas à la seule transmission de connaissances, elle vise à faire réfléchir les jeunes sur leur propre santé, à les conduire à l’autonomie et à la responsabilité vis-à-vis d’eux-mêmes et de la société.
    Toutes les structures accueillant des jeunes sont à même de développer des actions de ce type en les adaptant aux attentes de leur public, en cohérence avec les orientations de santé publique.
    L’éducation à la santé a une dimension transversale et doit s’inscrire dans un projet éducatif global mobilisant tous les personnels intervenant auprès des jeunes, chacun selon ses missions. Elle nécessite donc un effort particulier d’information et de formation de ces personnels qui pourront s’impliquer dans des programmes, en collaboration avec des intervenants spécialistes de la prévention.
    Au niveau régional, des pôles de compétence en éducation pour la santé créés dans le cadre des schémas régionaux d’éducation pour la santé (SREPS) offrent un soutien pour la mise en oeuvre de programmes et contribuent à la cohérence des actions sur un territoire donné.

Articulation des différents acteurs

    Les multiples déterminants de la vulnérabilité des jeunes en recherche d’insertion (héritages socioculturels, environnement physique, économique...), nécessitent une synergie particulière de nombreux partenaires (élus, professionnels, secteur associatif) au niveau national, régional et local.
    Les réponses reposent sur une prise de conscience des différents acteurs du monde de la santé, de l’insertion professionnelle, de l’insertion sociale et familiale, et sur une stratégie de mise en réseau de tous les interlocuteurs visant à la fois l’insertion et le bien-être du jeune.
    Favoriser l’accès aux soins, aux droits (protection sociale, logement...), à la prévention et à l’éducation pour la santé, en renforçant le lien social et en encourageant des actions de promotion de santé, pour concourir à améliorer la qualité de vie des jeunes, leur bien-être et leur autonomie : tel est l’objectif de la charte de la santé des jeunes en insertion sociale et professionnelle signée le 10 mai 2006 par les ministres chargés de l’emploi, l’insertion professionnelle des jeunes, la santé ainsi que par la présidente du Conseil national des missions locales.

Les personnes détenues

    Au 1er juillet 2007, le nombre des personnes incarcérées s’élevait à 58 402 dont 2 152 femmes et 722 mineurs incarcérés.
    La loi no 94-43 du 18 janvier 1994 (santé publique et protection sociale) a modifié fondamentalement la prise en charge sanitaire des personnes détenues en confiant leur santé au service public hospitalier. De nombreux rapports (IGAS, conseil de l’Europe, parlementaires) ont jugé cette réforme pertinente.
    Les besoins en soins restent importants compte tenu, d’une part, du nombre croissant des personnes incarcérées et, d’autre part, des pathologies rencontrées. Les caractéristiques épidémiologiques connues même si elles restent insuffisantes et parcellaires renseignent sur les axes de priorité de santé publique à mettre en oeuvre :

La santé mentale

    D’après Rouillon (F.) (rapport d’expert pour l’audition publique sur l’expertise psychiatrique pénale de janvier 2007), la prévalence de la schizophrénie parmi les personnes détenues serait comprise entre 3,8 et 8 % et celle des psychoses chroniques non schizophréniques entre 1,6 et 8 %. Les troubles dépressifs concernent 35 à 40 % des personnes détenues. Ces chiffres sont à mettre en rapport avec l’évaluation communément admise pour la population générale selon laquelle la prévalence de la schizophrénie est d’environ 1 % et que 5 % des Français présenteraient un état dépressif une année donnée. Pour une comparaison internationale, la méta-analyse de Fazel et Danesh (2002) pose une prévalence des psychoses schizophréniques de 4 % dans les établissements pénitentiaires des pays ayant publié des données épidémiologiques sur les troubles mentaux en détention.
    En ce qui concerne le phénomène suicidaire, la direction de l’administration pénitentiaire indique dans une note datée du 14 mai 2007 que quatre-ving-treize personnes sont mortes par suicide dans les prisons françaises en 2006, soit un taux de 15,7 pour 10 000. Ce chiffre, en diminution, reste à consolider par une politique de prévention active, passant notamment par la formation des personnels (de surveillance, SPIP et des équipes sanitaires) au repérage de la crise suicidaire.

Les addictions

    La population incarcérée se caractérise par une prévalence élevée des phénomènes d’addiction à l’entrée en prison. Selon une enquête du ministère de la santé menée en 2003 auprès des personnes entrées en prison (cf. note 2) huit entrants sur dix ont été jugés « en bon état de santé général » lors de la visite médicale à leur arrivée. Pour autant, constate l’étude, « ils déclarent beaucoup plus de consommation de substances psychoactives - alcool, tabac, drogues illicites, médicaments psychotropes - que l’ensemble de la population » et « pour le quart d’entre eux, des consommations qui se cumulent ». Au regard de la précédente enquête de 1997 qui avait également porté sur la visite médicale d’entrée dans les maisons d’arrêt, la prévalence des consommations à risque de substances psychoactives « a eu tendance à diminuer ». En 2003, un tiers des entrants (33,3 %) déclare avoir consommé des drogues illicites de façon régulière et prolongée dans l’année précédant leur incarcération, du cannabis le plus souvent (29,8 %, en hausse par rapport à 1997), des opiacés (6,5 %, en baisse), de la cocaïne ou du crack (7,7 %, en baisse), des médicaments « utilisés de façon toxicomaniaque » (5,4 %, en baisse), et du LSD, de l’ecstasy, des colles ou solvants (4 %, en hausse).
    En ce qui concerne le tabac, près de quatre entrants sur cinq (77,8 %) déclare fumer du tabac quotidiennement et un sur sept (15 %) consomme plus de vingt cigarettes par jour. La prévalence du tabagisme quotidien est plus élevée parmi les entrants en prison que dans l’ensemble de la population et ce quel que soit l’âge. Elle est, par exemple, environ deux fois plus importante pour les hommes métropolitains âgés de dix-huit à cinquante-quatre ans (81 % contre 40 % d’après l’enquête EPCV (cf. note 3) . Concernant les femmes un peu moins de deux entrantes sur trois (63 %) déclarent fumer du tabac quotidiennement contre près de quatre hommes sur cinq (78,5 %). Ainsi, La prévalence d’un tabagisme quotidien important est sept fois plus élevée parmi les femmes entrant en prison que parmi les femmes en population générale (cf. note 4) .
    Selon les déclarations des entrants qui font état d’une polyconsommation, il apparaît que l’association la plus fréquente, alcool et drogues illicites, « concerne un peu plus de la moitié » d’entre eux et que 42 % des usagers de drogues illicites ont déclaré une consommation excessive d’alcool. Près d’un entrant sur cinq cumule l’usage d’au moins deux substances psychoactives.

Les maladies infectieuses

    La prévalence de maladies infectieuses d’origine virale est plus élevée en milieu carcéral que dans la population générale. Les résultats de la dernière enquête de prévalence réalisée en 2003 montraient une prévalence de l’infection par le VIH de 1,04 % (0,21 % dans la population générale) et des anticorps anti-VHC de 4,1 % (0,84 % dans la population générale).
    Les données du premier observatoire en prison de l’hépatite C (POPHEC) qui regroupe environ 50 % des unités de consultations et de soins ambulatoires UCSA l’évalue à 7,1%.
    L’enquête de la DREES sur la santé des personnes entrées en prison en 2003 indique que 0,6 % des entrants se déclarait être séropositif pour le VIH (ils étaient 0,9 % en 1998), 0,3 % être co-infectés (VIH/VHC ou VIH/VHB). Ils sont 30 % à déclarer avoir fait un test de dépistage de l’hépatite C et 3,1 % à être contaminés, 1,5 % déclarent être sous traitement anti-VHC. Environ 6,5 % des entrants en prison déclarent avoir consommé une drogue par voie intraveineuse au moins une fois au cours de leur vie. Ces derniers sont plus nombreux que les autres à avoir eu recours au dépistage. En 2003, le dépistage du VHC a été proposé par le médecin lors de l’examen d’entrée à 66 % des nouvelles personnes détenues.
    Une attention particulière devra être portée à la tuberculose. En effet, les données épidémiologiques disponibles montrent que l’incidence de la tuberculose en 2004 des personnes en établissement pénitentiaire est d’environ quatre-vingt-dix cas pour 100 000, soit dix fois plus élevée qu’en population générale (cf. note 5) .

Santé bucco-dentaire

    Bien qu’elles soient souvent fragmentaires, les données disponibles soulignent toutes le mauvais état de santé bucco-dentaire des personnes détenues.
    Ainsi, le rapport du Haut Comité de la Santé publique sur la santé en milieu carcéral publié en janvier 1993 soulignait déjà l’importance des besoins en soins dentaires des personnes détenues. En 2003, la moitié des entrants en détention nécessitait des soins bucco-dentaires et 2,7 % des soins urgents (DREES). Diverses études locales ou régionales, notamment l’enquête conduite en 2006-2007 par le service médical de l’assurance maladie dans les établissements pénitentiaires de Bretagne, confirment la forte prévalence des pathologies bucco-dentaires dans cette population : caries, parodontopathies, séquelles de traumatismes dentaires, nombre de dents absentes.
    Cette situation s’explique par les facteurs suivants :
    -  les détenus proviennent très majoritairement de milieux sociaux défavorisés et leur mauvais état bucco-dentaire est d’abord le reflet de cette réalité sociologique et la conséquence des facteurs de risque qui l’accompagnent : pratiques d’hygiène bucco-dentaires moins largement diffusées que dans la population générale ; moindre recours à la prévention par les fluorures ; moindre recours aux soins (crainte de la douleur, obstacles financiers à l’accès aux soins, prothétiques en particulier) ;
    -  au cours du séjour en détention, il existe des facteurs d’aggravation de cet état : alimentation déséquilibrée (prises répétées de produits sucrés et de sodas) ; stress, états dépressifs et prise de psychotropes (d’où sécheresse buccale favorisant la carie) ; tabac ; alcool ; autres toxiques.
    Ce mauvais état bucco-dentaire n’est pas sans conséquences sur l’état général (douleur, infection), et peut entraîner des complications, en particulier en cas de pathologies associées (VIH, diabète, maladies cardio-vasculaires). En outre, un très mauvais état dentaire peut être un handicap dans la vie sociale et même constituer un véritable marqueur de marginalité. La restauration d’un bon état de santé bucco-dentaire, au-delà de son enjeu de santé, contribue donc également à une meilleure image de soi, et, par là, à de meilleures chances de réinsertion.
    La période de détention permet, dans certains cas, d’entreprendre le traitement des pathologies préexistantes et d’informer les détenus sur les comportements (hygiène, alimentation, sevrage alcoolo-tabagique,...) favorables à la santé bucco-dentaire. Mais la santé bucco-dentaire est souvent sous-estimée dans la prise en charge sanitaire des personnes détenues et les moyens matériels humains et organisationnels affectés à la prise en charge de la santé bucco-dentaire en milieu carcéral ne permettent pas toujours de répondre de façon satisfaisante à la situation.
    A la demande de la DGS, un groupe de travail sur ce sujet a été constitué en 2007 et une étude sur la prise en charge de la santé bucco-dentaire des détenus est en cours. Elle devrait déboucher, en 2008, sur des propositions de mesures d’amélioration.

Recommandations

    Les politiques de santé publique doivent être adaptées au milieu pénitentiaire. Certaines recommandations citées ci-dessus et concernant les jeunes, les gens du voyage et migrants ont du sens à s’appliquer au public détenu.
    La prise en charge thérapeutique de l’infection par le VIH et les hépatites est identique à celle préconisée en milieu libre.
    Il convient également de mieux prendre en compte la continuité des soins à la sortie.
    Les actions de prévention et d’éducation pour la santé ont une grande importance dans un lieu de privation de liberté où l’état de santé des personnes est déficient.

Les gens du voyage

    L’Etat français n’autorise pas les recensements ethniques. Une étude publiée en 2000 met en évidence combien, si le repérage est nécessaire pour la connaissance de la population et l’engagement d’actions appropriées, il peut être générateur de stigmatisation et de précarisation pour la population étudiée. En conséquence, les données chiffrées sur ce public de nationalité française sont imprécises.
    En France, les gens du voyage sédentaires seraient le groupe le plus nombreux, puis les semi-sédentaires, enfin les itinérants, au nombre de 140 000 environ.
    Sous l’appellation générique gens du voyage et/ou « tsigane », on distingue généralement, notamment en France :
    -  les Manouches ou Sinti qui se trouvent dans le Nord, l’Ouest, l’Alsace-Lorraine ;
    -  les Gitans regroupés en Provence, Languedoc-Roussillon, Pyrénées, et marqués par une influence espagnole ;
    -  les Rom, dernier groupe arrivé d’Europe centrale et très traditionaliste ;
    -  enfin des individus isolés ou membres de multiples groupes qui vivent en habitat mobile.
    La région Ile-de-France et certaines villes situées sur les grands axes de circulation routiers constituent également des territoires d’accueil pour les gens du voyage ; 10 000 places de stationnement sont actuellement installées ; les besoins recensés s’élèveraient à plus de 38 000 places permanentes auxquelles s’ajoutent celles nécessaires au stationnement de passage.
    En termes de revenus économiques et à titre d’exemple : en Charente-Maritime, 70 % des gens du voyage perçoivent le RMI.
    Environ 60 % des enfants de familles itinérantes sont scolarisés. La fréquentation des collèges, et plus encore des lycées, est très faible.
    Pour de nombreux enfants du voyage, le français n’est pas la langue maternelle.
    Selon le Conseil de l’Europe, 80 % des adultes sont analphabètes ou illettrés.

a)  Etudes et statistiques sur l’état de santé

    La paupérisation des familles entraîne, comme chez la plupart des démunis, la négligence des domaines relatifs à la santé et à l’hygiène. Les gens du voyage sont dans la situation générale des populations précaires pour lesquelles des inégalités en matière de santé sont souvent citées :
    -  au niveau de l’Europe élargie, de nombreux rapports font état d’une espérance de vie réduite (seulement 3 % des Tsiganes ont plus de 60 ans). L’exclusion, les expulsions, l’absence de conditions de vie décentes sont fréquemment citées comme facteurs premiers de l’écart entre l’espérance de vie des Tsiganes et celle de l’ensemble de la population ;
    -  en France, 45 % des gens du voyage sont représentés par la tranche d’âge 0-16 ans ;
    -  des habitudes alimentaires marquées par la précarité qui génèrent des problèmes de santé ;
    -  d’après Médecins du monde, 93 % des gens pouvant prétendre à une couverture médicale n’ont aucun droit ouvert et 26 % des patients ignorent tout de leurs droits à celle-ci.
    On dispose de peu de données précises sur la prévalence des différentes maladies chez les gens du voyage, toutefois certains rapports font état :
    D’une plus grande fréquence de certaines pathologies, par exemple :
    -  le saturnisme chez les enfants séjournant sur des terrains présentant une surcharge en plomb excessive ;
    -  les maladies cardio-vasculaires dues à une mauvaise alimentation générant obésité, surpoids et quelquefois cholestérol et diabète ;
    -  les accidents domestiques, en partie attribués aux modes et aux conditions de vie, le stress en lien avec « la traque » ;
    -  certains professionnels de santé notent que beaucoup d’enfants prennent des tranquillisants et parlent d’état d’angoisse intergénérationnelle ;
    -  un mauvais suivi de grossesse et des grossesses précoces. L’absence de précautions hygiéno-diététiques entraîne des troubles et l’absence de repos favorise les fausses couches, la prématurité, etc. ;
    -  les maladies génétiques en lien avec la consanguinité des parents.
    L’augmentation de la fréquence de ces pathologies est souvent attribuée à la promiscuité, à l’habituelle accumulation de petites pathologies mal prises en compte qui, à la longue, sont responsables de séquelles et d’usures prématurées.
    On observe également l’insuffisance du taux de couverture vaccinale chez les enfants.
    L’accès à la prévention en matière de santé rencontre les mêmes difficultés que pour les populations en situation de précarité. Mais s’y ajoute le fait que les Tsiganes constituent un public à part à cause du fort taux d’illettrisme parmi les adultes et de leur mode de vie itinérante.
    L’accès aux services de santé. C’est une démarche particulièrement difficile pour les personnes qui n’ont pas de domicile fixe. 55 % des individus ayant besoin d’une domiciliation administrative pour la CMU/AME n’en ont pas. Les gens du voyage constituent moins de 1 % des allocataires de la CAF de Paris. Par contre, ils représentent près de la moitié des saisies sur prestations pour frais d’hôpitaux. Ce chiffre signifie que la majorité d’entre eux ne disposent pas de mutuelle et ne peuvent avancer les frais d’hôpital. En effet, la CMU complémentaire est gratuite lorsque les revenus mensuels sont inférieurs aux barèmes fixés en fonction de la composition du foyer. Mais l’effet de seuil génère de nouvelles exclusions (allocation adulte handicapé et minimum vieillesse par exemple).
    L’accès à la médecine de ville reste également difficile. Il n’est pas facile de trouver des infirmières, voire des médecins, qui acceptent de venir sur les terrains dispenser leurs soins. Dans le cadre de la réforme de l’assurance maladie relative au médecin traitant les gens du voyage sont traités comme les VRP ou les forains. « Ils sont invités à choisir un médecin traitant. Ils le font en fonction de ce qui est le plus commode pour eux : proche du lieu de résidence habituelle ou de travail. Lorsqu’ils sont en déplacement ou si leur médecin traitant est indisponible, ils peuvent consulter un autre médecin sans aucune pénalité. Par ailleurs, il leur est toujours possible de changer de médecin traitant à l’occasion d’une prochaine consultation médicale ». Il sera sans doute nécessaire d’être vigilant afin que cette disposition ne représente pas un frein supplémentaire à l’accès aux soins des gens du voyage.
    Le recours aux services hospitaliers représente aujourd’hui la voie principale d’accès aux soins pour les publics en situation de précarité. Le mode de vie itinérant d’une partie des populations tsiganes les conduit à préférer les urgences hospitalières à la médecine de ville. Une fois entré, le patient a accès à l’ensemble des services, ce qui provoque moins de discriminations négatives dans l’accès aux soins.
    Par contre, certains patients hospitalisés sortent de l’hôpital contre avis médical (absence de mutuelle, impossibilité de stationner à proximité de l’hôpital, mauvaises interprétations des informations médicales, méfiance à l’égard du corps médical, sentiments que les pratiques médicales prescrites sont dangereuses pour les Gitans, que l’on fait souffrir plus que les autres patients, etc.). Selon une étude réalisée par Yseult Foucher, 50 % des femmes tsiganes sortent de la maternité contre avis médical.
    Propositions :
    1.  Promouvoir le recours à la prévention, en facilitant l’accès aux dispositifs de prévention par des interventions de santé, et permettre aux gens du voyage de bénéficier des actions de prévention définies dans les plans nationaux de santé publique.
    2.  Favoriser l’accès et la continuité des soins, en s’assurant de l’ouverture de leurs droits et en facilitant l’accès aux professionnels de santé (médecin traitants, PASS...) notamment pour le suivi des pathologies chroniques.
    3.  Appuyer, renforcer, l’action locale pour mettre en oeuvre, sans discrimination, les dispositifs existants, en mobilisant les préfets, les partenaires notamment associatifs, et l’ensemble des réseaux locaux.

Autres publics
Les grands exclus

    L’accès à la santé des personnes les plus exclues, appelées encore « en errance », « à la rue », « sans domicile stable », est caractérisée par l’interaction de ces personnes avec le système de santé. Effectivement, l’accès à la santé de ce type de populations n’est pas simple pour de multiples raisons relevant à la fois des problèmes sanitaires et sociaux caractéristiques de la très grande précarité et de la forme que prend le système de santé pour y répondre, mais aussi des réactions individuelles face à la santé de personnes en situation de souffrance.
    Comme bon nombre d’études le démontrent, la précarité est un état de vulnérabilité où l’individu se trouve confronté à des risques économiques et sociaux qui peuvent avoir des répercussions sur son état de santé physique et psychique (cf. note 6) . Les personnes en situation sociale difficile sont, plus que la moyenne, exposées tout au long de leur vie à des risques de santé. Ceci est dû au cumul de facteurs de risques qu’ils subissent, résultat de l’intrication des conditions de vie, des comportements, de l’environnement et de l’histoire individuelle (cf. note 7) . Cependant, si le statut socio-économique de la personne joue un rôle important dans la perception de la santé et de l’accès au système de soins, les déterminants individuels (les personnes à la rue ont souvent un passé difficile (cf. note 8) fait de ruptures familiales graves) et macroscopique (environnement immédiat ; la rue est un environnement violent où le stress est omniprésent ainsi que la possibilité d’accéder à un certain nombre de toxiques) sont également à prendre en compte. Cette imbrication de multiples déterminants génère de la complexité dans la prise en charge sanitaire et sociale de cette population (cf. note 9) et la bonne réponse en termes d’accès à la santé est difficile à trouver.
    Les dispositifs semblant les plus appréciés par les personnes « à la rue » sont les structures dites « à bas seuil d’exigence », ou « dispositifs intermédiaires » puisqu’ils sont effectivement à mi-chemin du droit commun, s’adaptant aux capacités de ce public, adoptant un seuil d’exigence minimum pour y être accueilli (cf. note 10) . Le principe de ces dispositifs est d’offrir une permanence, une présence constante du personnel qui permet d’établir un lien de confiance, de restaurer un lien humain et social, étape indispensable et préalable à toutes les autres. Ces dispositifs permettent alors un accompagnement personnalisé vers le droit commun et ont pour objectif de ramener petit à petit la personne vers celui-ci et de l’autonomiser dans son rapport aux institutions.
    Toutefois, on observe un « effet pervers » de ce type de fonctionnement. Effectivement, l’accès à ce type d’accompagnement vers le droit commun est rassurant et confortable pour des personnes souvent très vulnérables et l’inconditionnalité de l’accueil offert par ces structures ne permet d’en refuser l’accès à qui que ce soit même si la personne se présente de multiple fois et que les projets mis en place échouent systématiquement. Cependant, on se retrouve face à un circuit alternatif qui permet, certes d’offrir un accès à la santé le plus efficace possible à cette population très précarisée (c’est de la réduction des risques), mais qui ne permet pas (ou difficilement) un retour vers le droit commun, les personnes n’arrivant pas à s’émanciper de ces dispositifs qui ne peuvent pas les rejeter (cf. note 11) .
    Les difficultés principales rencontrées par ce public pour accéder à la santé, d’un point de vue structurel, sont le rapport difficile aux institutions (beaucoup d’entre eux ont eu un passé institutionnel lié à une enfance douloureuse), un rapport au temps dégradé qui empêche d’honorer les rendez-vous, une défiance face à la règle et un refus de la frustration (pour les plus jeunes particulièrement), la perte fréquente des papiers nécessaires aux démarches, l’impossibilité de suivre des démarches sur le long terme. Au niveau individuel, la désocialisation, des identités en miettes, une perte de l’estime de soi sont autant de facteurs influant sur l’attention à son propre corps et à sa santé, qui va être largement dégradée, jusqu’à devenir inexistante. Dans les conduites addictives, le corps devient un outil qui permet à l’esprit d’oublier et la désocialisation s’accompagne d’une perte d’attention à soi, en témoigne l’état d’hygiène et d’abandon (devenu pathologique) de ceux que l’on appelle les « clochards (cf. note 12)  ». Tous les professionnels de la santé et du social s’accordent à dire que la dégradation de l’état physique d’une personne, dû à un manque d’hygiène et à une perte d’attention à son corps, est un signal d’alarme fort de désocialisation.
    Les pathologies rencontrées chez les personnes vivant à la rue sont très souvent des pathologies aggravées (les mêmes qu’en population générale mais avec une prévalence plus forte) et non des pathologies spécifiques de la rue. Selon une exploitation de l’enquête INSEE de 2001 auprès des personnes fréquentant les services d’hébergement ou de distribution des repas chauds, « vivre longtemps dans la rue accentue la dégradation physique » et « l’état de santé se dégrade proportionnellement à la durée globale passée dans la rue et cela quelle que soit la maladie. Ainsi, parmi les personnes ayant passé plus d’une année dans la rue au cours de leur vie, 31 % souffrent de dépression. Viennent ensuite les maladies respiratoires, les maladies du système digestif, du foie et de la peau. Si les maladies psychiques peuvent rendre plus difficiles les conditions d’hébergement, les conditions de vie dans la rue entraînent aussi une forte souffrance psychologique et compliquent l’accès aux soins et le suivi des traitements (cf. note 13) . Un tiers des personnes ayant vécu au total plus d’une année dans la rue déclare boire souvent du vin, de la bière ou de l’alcool pour se sentir en forme le matin (cf. note 14)  ».
    Selon une nouvelle exploitation de l’enquête INSEE de 2001 sur les sans-domicile, l’existence ou non d’un lien social joue aussi un rôle en matière de santé (en termes de recours aux soins et d’abus d’alcool) : ceux qui entretiennent toujours des liens sociaux ont une meilleure santé perçue.
    « En 2001, 16 % des sans-domicile usagers des services d’aide s’estiment en mauvaise santé, contre 3 % de la population ayant un logement personnel. Les conditions de vie difficiles, le stress, une mauvaise alimentation fragilisent cette population et augmentent les risques d’être malade. Ainsi, plus d’un sans-domicile sur dix souffre de maladies respiratoires, de séquelles d’accidents ou de maladies graves. Un sur quatre se juge dépressif. Les sans-domicile consultent des médecins assez régulièrement et trois sur dix ont été hospitalisés au moins une fois durant l’année 2000, le plus souvent en raison de troubles psychologiques. Quatre sur dix, bien que souffrant des dents, ne consultent pas le dentiste, et un tiers déclare avoir des problèmes de vue non corrigés. Cependant cette situation n’est pas propre aux sans-domicile (cf. note 15)  ».

Le public recourant à l’aide alimentaire

    Environ 3 millions de personnes recourent chaque année à l’aide alimentaire. Cette aide financée tant par l’Europe que par l’Etat est fortement portée par la société civile (grandes entreprises, citoyens...). Elle repose sur des associations locales ou nationales qui ont la charge de la distribution des aliments.
    L’étude ABENA (alimentation et état nutritionnel des bénéficiaires de l’aide alimentaire) commandée par Dominique Versini en 2003, est la première étude portant directement sur cette population.
    Les résultats épidémiologiques de cette étude indiquent que l’état sanitaire des bénéficiaires de l’aide alimentaire comparé à celui de la population générale est significativement dégradé. Ainsi la prévalence de l’obésité et du surpoids, de l’anémie chez les femmes, est trois fois supérieure à celle de la population générale. De même le nombre des hommes et des femmes hypertendus est très supérieur à celui de la population générale. Enfin les anomalies lipidiques et glucidiques sont beaucoup plus souvent rencontrées chez les sujets de l’étude que dans la population générale, indiquant un risque élevé de maladies chroniques notamment de diabète et de maladies cardiovasculaires.

Les personnes âgées pluri-dépendantes

    Une population très particulière n’arrive pas à être prise en charge actuellement tant sanitairement que socialement. Ce sont des personnes présentant des pathologies chroniques dégénératives et/ou induisant une absence d’autonomie. Ces pathologies physiologiques (Korsakov, sclérose en plaques, Parkinson...) et/ou mentales (psychose, schizophrénie,...) touchent des personnes âgées de 50 ans et plus, très désocialisées, fortement alcooliques. Leur état sanitaire, parce que stable, ne relève pas de l’hôpital et leur état social empêche leur entrée dans les établissements existants : EPAD, MAS, LHSS, CHRS, maison relais... Faute de savoir où les placer ces personnes errent d’un CHRS à un LHSS, d’une maison de retraite à l’hôpital. Ces déplacements successifs détériorent leur état sanitaire et social. Actuellement, ce public embolise 35 % des LHSS mais en l’absence de solution pérenne ces structures les gardent « en attendant ».

Population résidente en ZUS

    La diversité des territoires et des contextes confirme la nécessité d’avoir une connaissance fine des caractéristiques de la population résidente. Les choix des publics cibles et les stratégies d’actions préventives en découlent.
    Les études nationales comparatives entre territoires visent à donner aux opérateurs et décideurs locaux des pistes de réflexion pour la connaissance de leurs territoires.
    L’ONZUS (cf. note 16)  et d’autres études originales commanditées par la DIV (IRDES, INSERM 707) font apparaître les écarts de santé entre publics des territoires et la surreprésentation de certaines catégories de population (âge, genre, composition familiale, revenus...). Plusieurs études concernant différentes caractéristiques individuelles ou faisant référence à la diversité des quartiers de résidence ont été réalisées et publiées (cf. note 17)  à partir d’une cohorte représentative de l’agglomération parisienne qui constitue un échantillon permettant d’effectuer des analyses géographiques, spatiales et contextuelles sur le rôle que les déterminants territoriaux ont sur les dimensions de santé étudiées. Elles recueillent des données sociales très complètes, objectives et subjectives, sur les conditions de vie.
    Près du tiers des résidents en ZUS (cf. note 18)  se déclarent en mauvaise santé contre un quart des personnes qui ne vivent pas en ZUS, toutes choses égales par ailleurs, les personnes âgées de 60 à 79 ans résidant en ZUS ont plus de risque de se déclarer en mauvaise santé que celles âgées de 18 à 29 ans, et ont une plus forte probabilité d’être hospitalisés. Quel que soit la tranche d’âge, ce sont toujours les personnes vivant en ZUS qui ont la plus grande probabilité de se faire hospitaliser. L’impact des déterminants de l’état de santé est plus important pour la population des ZUS.
    Ainsi, la description sur la composition des ménages montre que les familles monoparentales (famille avec au moins un enfant de moins de 25 ans) sont les ménages chez lesquels on observe la plus grande proportion d’habitat en logement social (44,7 %) et sont surreprésentées dans la tranche de revenu la plus faible. Dans les ZUS, on compte davantage de familles monoparentales 21 % que dans les autres quartiers (15 %).
    Les familles monoparentales féminines sont particulièrement touchées par la pauvreté notamment dans les ZUS, où 33 % d’entre elles vivent sous le seuil de la pauvreté (- de 617 Euro nets par unité de consommation et par mois), quartiers de type « ouvrier » hors ZUS (23 %) et l’ensemble des autres quartiers (13 %).
    Dans le cadre du recours régulier au médecin, c’est dans les quartiers les plus défavorisés que le suivi gynécologique est le moins fréquent. A tous les âges, l’absence de suivi régulier y est au minimum deux fois plus fréquent que dans les quartiers favorisés. Il est quatre fois plus fréquent entre 30 et 39 ans. Le suivi à l’hôpital, aux dispensaires est deux fois plus fréquent dans les quartiers les plus défavorisés que dans les autres.
    Le choix de publics cibles tels que les familles monoparentales féminines et les personnes âgées vise à attirer l’attention en direction d’un public dont l’un est surreprésenté et l’autre en augmentation dans les ZUS (ONZUS, Démographie, rapport 2004), ils ont en commun les déterminants sociaux et le recours tardifs d’accès aux soins et à la prévention.

ANNEXE  III b
LES DISPOSITIFS

LES CENTRES HÉBERGEMENT DE RÉINSERTION SOCIALE (CHRS) : UN DISPOSITIF CENTRAL DE LA LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS
    Les CHRS offrent actuellement une capacité de plus de 32 000 places d’hébergement dont 3 000 sont plus particulièrement destinées à l’accueil en urgence. Ils constituent donc près d’un sixième du parc d’hébergement d’urgence destiné aux personnes en grande difficulté. Par ailleurs, une centaine de CHRS sur les 800 actuellement ouverts, participent d’une façon ou d’une autre à l’organisation de la veille sociale départementale, à travers la gestion des 115, d’équipes mobiles ou encore d’accueils de jour.
    En 2005, ils ont accueilli plus de 140 000 personnes dont des familles avec enfants pour une proportion de près de 40 % (source : tableaux de bord CHRS 2005) ; 58 % des personnes hébergées ont plus de vingt-six ans, et 23 % ont entre dix-huit et vingt-cinq ans.
    En moyenne, les personnes accueillies hors hébergement d’urgence restent environ 137 jours, ce qui représente un taux de rotation moyen du parc de 3,52 % des personnes hébergées en CHRS d’insertion ont pu être orientées en 2005 dans un logement.
    Principales missions :
    -  accueil, notamment dans les situations d’urgence et hébergement (de l’urgence à la réinsertion sociale) ;
    -  soutien et/ou accompagnement social ;
    -  veille sociale ;
    -  adaptation à la vie active et insertion par l’activité professionnelle ;
    Activités pouvant être réalisées dans le cadre de ces missions (elles peuvent être développées avec ou sans hébergement) :
    -  hébergement : collectif ou individuel, regroupé ou éclaté ;
    -  actions de transition vers le logement ;
    -  soutien et accompagnement social :
    Accueil de jour (point accueil, point écoute, vestiaire, etc.) ; prestations ambulatoires en milieu ordinaire.
    Veille sociale :
    -  service téléphonique d’urgence (115) ;
    -  services mobiles allant « au devant » (équipes mobiles de type Samu social) ;
    -  services d’accueil et d’orientation.
    Adaptation à la vie active et insertion par l’activité économique (partie accompagnement social).

Les centres d’hébergement d’urgence

    Les centres d’hébergement d’urgence sont des établissements non conventionnés à l’aide sociale qui assurent la mise à l’abri sans discrimination de toute personne ou famille dépourvue d’un toit. Il y avait environ 22 000 places d’urgence en 2007 (avant la mise en oeuvre du PARSA) dont 9 000 en places d’hôtels.

Principales missions et caractéristiques

    L’hébergement d’urgence est conçu comme inconditionnel. Cela signifie que l’admission n’est pas conditionnée à l’entrée dans une démarche d’insertion mais doit être adapté à la diversité des publics accueillis.
    Les prestations d’hébergement d’urgence recouvrent, sur une période de temps limitée, le gîte, le couvert, l’hygiène et une première aide et orientation à caractère social et sanitaire.
    Après le moment de l’accueil en urgence, l’équipe d’intervenants qualifiés doit être en mesure de proposer soit un autre mode de prise en charge dans le même établissement, soit une orientation effective vers une solution adaptée.
    L’offre de solutions au-delà de l’accueil en urgence relève de la coresponsabilité de l’ensemble des acteurs du dispositif et plus largement encore, de l’ensemble des acteurs sociaux.

Les maisons relais

    Devant le constat des difficultés d’accès à un logement autonome pour des personnes rencontrant des difficultés économiques et sociales, auxquelles s’ajoutaient des problématiques personnelles d’isolement ou d’exclusion, il a été en 2002 et suite à une expérimentation de cinq ans les maisons relais.
    Cette formule de logements alternatifs répond à la nécessité de créer ou de recréer du lien social. La conception même des maisons relais, en petites unités de 15 à 25 logements, avec la présence quotidienne d’un hôte (ou d’un couple d’hôtes) qui leur porte une attention personnalisée, facilite l’instauration de ce lien, en même temps qu’elle offre un environnement sécurisant et chaleureux.
    Les maisons relais constituent un outil supplémentaire dans les modes de prise en charge des personnes en situation de grande exclusion et dont les perspectives d’insertion et de retour à l’autonomie sont très faibles : elles proposent un logement durable, sans limitation de durée, où les personnes peuvent, selon leurs propres termes : « enfin se poser » sans la préoccupation du lendemain.

Les résidences accueil

    Le comité interministériel de lutte contre les exclusions (CILE) le 12 mai 2006 a décidé, dans le cadre de la recherche de solutions de logement adapté pour les personnes ayant un handicap psychique, la mise en place d’une expérimentation.
    Il s’agit par ce programme qui relève du champ du logement social de proposer une offre de logements adaptés, avec trois caractéristiques essentielles : la présence d’un hôte, un accompagnement social formalisé par des conventions et un accompagnement sanitaire, lui aussi formalisé par des conventions, notamment avec le secteur psychiatrique.
    Le cahier des charges s’est largement inspiré de l’expérience réussie des maisons relais mais les modalités de fonctionnement ont été adaptées aux besoins tout à fait spécifiques des personnes souffrant de handicap psychique, d’où le choix d’une dénomination particulière.

Lits halte soins santé (LHSS)

    Crée en 2005 suite à la décision du Comité interministériel de lutte contre les exclusions (CILE) du 6 juillet 2004, le dispositif lits halte soins santé constitue un service médico-social au sens de l’article L. 312-1 9o du code de l’action sociale et des familles.
    En l’absence de domicile, les lits halte soins santé permettent aux personnes de « garder la chambre », de recevoir des soins médicaux et paramédicaux, qui leur seraient dispensés à domicile s’ils en disposaient.
    Ils constituent une modalité de prise en charge globale articulant fortement une dimension sociale avec hébergement temporaire, en un lieu spécifique ou non, de personnes sans domicile, quelle que soit leur situation administrative, et une dimension de soins et de prévention. Ce dispositif ne se substitue à aucune catégorie de structure sanitaire, médico-sociale ou sociale existante et ne doit pas être dédié à un type de pathologie donnée.
    Financés sur l’ONDAM médico-social, au 28 février 2007, 470 lits ont été créés.

Equipes mobiles de psychiatrie

    Le CILE du 6 juillet 2004 a prévu de définir et de développer les équipes mobiles de psychiatrie. L’objet de ces équipes est d’intervenir tant auprès des personnes en situation de précarité et d’exclusion qu’auprès des personnes travaillant auprès d’elles, là où se trouvent les personnes en difficulté : rue (en équipe de maraude) lieux d’accueil social ou d’hébergement... En trois ans 70 équipes mobiles de psychiatrie ont été créées ou renforcées (13 en 2005, 31 en 2006 et 26 en 2007).

Le dispositif des permanences d’accès aux soins (PASS)
Définition des PASS

    Les PASS sont des cellules de prise en charge médico-sociale, créées dans les établissements de santé en application de l’article L. 6112-6 du code de la santé publique. Leur mission est de faciliter l’accès et la prise en charge des personnes démunies non seulement à l’hôpital, mais aussi aux réseaux institutionnels ou associatifs de soins, d’accueil et d’accompagnement social.
    L’article L. 6112-6 du code de la santé publique (CSP) a prévu la mise en place de permanences d’accès aux soins de santé, par les établissements de santé. « Dans le cadre des programmes régionaux pour l’accès à la prévention et aux soins prévus à l’article L. 1411-11, les établissements publics de santé et les établissements de santé privés participant au service public hospitalier mettent en place des permanences d’accès aux soins de santé, qui comprennent notamment des permanences d’orthogénie, adaptées aux personnes en situation de précarité, visant à faciliter leur accès au système de santé, et à les accompagner dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits. Ils concluent avec l’Etat des conventions prévoyant, en cas de nécessité, la prise en charge des consultations externes, des actes diagnostiques et thérapeutiques ainsi que des traitements qui sont délivrés gratuitement à ces personnes. »
    L’article L. 1411-11 du CSP prévoit que le plan régional de santé publique (PRSP), comporte parmi ses programmes et actions, « un programme régional pour l’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies ».
    Incombe en outre aux établissements de santé, selon les articles L. 6112-1, 7o et L. 6112-2 du CSP, la mission de service public de contribuer « à la lutte contre l’exclusion sociale, en relation avec les autres professions et institutions compétentes en ce domaine, ainsi que les associations qui oeuvrent dans le domaine de l’insertion et de la lutte contre l’exclusion, dans une dynamique de réseaux ».

Complémentarité de la PASS avec les autres acteurs sociaux

    Il appartient aux établissements de santé de garantir « l’égal accès de tous aux soins qu’ils dispensent », de veiller « à la continuité de ces soins, en s’assurant qu’à l’issue de leur admission ou de leur hébergement, tous les patients disposent des conditions d’existence nécessaires à la poursuite de leur traitement. A cette fin, ils orientent les patients sortants ne disposant pas de telles conditions d’existence vers des structures prenant en compte la précarité de leur situation » (art. L. 6112-2 du CSP).
    En outre, « l’assistant de service social » « affecté, pour tout ou partie de son temps, à la structure des urgences est notamment chargé », d’organiser « la prise en charge sanitaire et sociale adaptée » des patients à leur « sortie de cette structure » (art. D. 6124-21 du code de la santé publique).
    Le rôle de la PASS qui favorise l’accès à la santé et l’ouverture des droits pour les publics les plus en difficulté, s’articule avec celui des professionnels chargés du suivi sanitaire, social, administratif des patients : équipes de soins, service social de l’hôpital, assistant de service social affecté à la structure des urgences, bureau des entrées...

Bilan du dispositif

    16 millions d’euros ont été accordés depuis 1999 pour leur fonctionnement par les lois de financement de la sécurité sociale. Pour améliorer l’accès aux soins des femmes enceintes en situation de précarité, le plan périnatalité a prévu un financement de 0.150 millions d’euros pendant cinq ans (2005 à 2009).
    A ce jour, près de 400 permanences d’accès aux soins de santé sont implantées en France : pour la plupart dans les centres hospitaliers disposant d’un service d’urgences pour un objectif initial de 300 PASS (circulaire DH-AF1/DGS-SP2/DAS-RV3 no 98-736 du 17 décembre 1998).

Elaboration de recommandations sur l’organisation des PASS

    Les évaluations commandées par la DHOS, l’ANAES et l’IGAS en 2003 montrent le bien-fondé du dispositif, une couverture géographique satisfaisante et une adéquation aux besoins des populations visées.
    A partir de ces travaux et d’un certain nombre de retours d’expériences recueillis auprès des acteurs opérationnels lors de journées régionales ou de formations, un tableau de recommandations et de bonnes pratiques sur l’organisation des permanences d’accès aux soins de santé (PASS) est en cours de finalisation. Il s’agit notamment de mobiliser les acteurs clefs de la PASS (service social, encadrement infirmier, corps médical, direction, comité de pilotage), de formaliser les partenariats internes et externes, d’établir des protocoles de repérage, d’orientation et de suivi des patients, d’inscrire la PASS dans les démarches d’évaluation de la qualité, et de mesurer son activité. La diffusion de ces recommandations est prévue fin 2007.

Formation des acteurs à l’accès aux soins des publics
en situation de précarité

    Enfin, des actions de formations nationales sont également proposées depuis 2006 par l’association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier (ANFH) aux professionnels des PASS (et aussi des services d’urgence) afin de les aider à mieux prendre en charge les publics en situation de précarité dont les migrants, à mieux structurer la PASS et améliorer sa performance.

ANNEXE  III c
LES POLITIQUES LOCALES
Les ASV

    La loi du 1er août 2003 a été élaborée en vue de réduire les inégalités sociales et les écarts de développement entre les territoires (en particulier entre les quartiers sensibles et le reste de leur agglomération). L’Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs élaborent et mettent en oeuvre, par décisions concertées ou par voie de conventions, des programmes d’action dans les zones urbaines sensibles définies au 3 de l’article 42 de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. Ces programmes et actions s’appliquent aussi désormais aux nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville définis avec les Contrats urbains de cohésion sociale qui font suite aux contrats de ville (2000-2006).
    La santé est affirmée comme un des cinq thèmes prioritaires de la politique de la ville pour la cohésion sociale afin d’encourager les acteurs locaux à mieux prendre en compte la prévention et l’accès aux soins pour les habitants des quartiers en difficulté.
    La politique de santé et la politique de la ville convergent donc aujourd’hui pour reconnaître la nécessité de prendre en compte la situation de certains territoires où se concentrent des difficultés sociales et urbaines, et de faire de la démarche des ateliers santé ville l’une des déclinaisons territoriales des plans régionaux de santé publique (PRSP).
    Le PRSP a vocation à bénéficier à l’ensemble de la région et tient compte de la géographie des territoires : inégalités observées, territoires de santé du SROS, compétences territoriales notamment sur le cadre de vie et doit cibler les ressources locales au vu des priorités.
    Dans cette optique, il a été décidé dans le cadre de l’élaboration des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) de généraliser la démarche des ateliers santé ville, expérimentée dans le cadre de la politique de la ville. A partir de 2006, 160 nouveaux ateliers santé ville seront créés, pour porter à 300 le nombre d’ASV pour 2008 (9). (On en comptait 140 fin 2005.) Comme pour l’ensemble des autres secteurs d’intervention des CUCS, l’ASV doit comporter des programmes d’actions pluriannuels évaluables.

Missions

    Pour le développement et le suivi de projets locaux de santé publique entre les élus et les services déconcentrés de l’Etat, les ateliers santé ville doivent présenter une programmation dont les préalables sont structurés par trois composantes :
    -  la composante connaissance et identification des besoins (diagnostic) a pour objet d’objectiver l’état de santé de la population locale et ses déterminants, notamment les conditions de vie souvent mises en cause dans les perceptions des acteurs locaux de la santé ;
    -  la composante santé publique et prévention consiste, par la connaissance territoriale de la situation sanitaire et sociale au niveau local, à définir les objectifs prioritaires des projets locaux de santé publique, au titre des ASV dans le cadre des CUCS, et à mettre en oeuvre les moyens de leur réalisation (exemple : programmation des activités ASV suivant les objectifs stratégiques et opérationnels concernant les thématiques de santé mentale, addictions, nutrition, accessibilité et offre de soin, habitat, dépistages, formations...) ;
    -  la composante accès et recours au système de soins et de santé doit conduire à préciser et aider à résoudre les difficultés d’accès au système de santé et à l’offre de soins, compte tenu des éléments d’analyse contenus dans le schéma régional d’organisation sanitaire (III) et le PRAPS, s’agissant en particulier des liens entre les établissements de santé (projets locaux de santé) et les publics isolés et démunis des territoires prioritaires des communes.
    Recommandations :
    -  s’associer au travail des ASV pour définir les actions prioritaires à mettre en oeuvre dans le cadre des PRAPS au sein des territoires défavorisés ;
    -  outre un maillage plus fin de l’organisation socio-sanitaire (établissement de santé, centre de soins, médecine de ville...), il convient de favoriser l’implantation de dispositifs spécifiques tels : les équipes mobiles spécialisées en psychiatrie (EMP), les médiateurs sociaux existants à former sur des thèmes de prévention en santé, les maisons de santé et espaces de prévention, les permanences hospitalières d’accès aux soins de santé, les réseaux de santé médico-sociaux de proximité, en veillant particulièrement à l’interaction entre les dispositifs existants et les acteurs de la politique de la ville.
    Eléments pour une labellisation du projet atelier santé ville et du suivi de la démarche, programme 2007-2009 du volet santé du contrat urbain de cohésion sociale (DIV).
I.  -  CADRE OPÉRATIONNEL DE MISE EN OEUVRE ET DE SUIVI ASV DE L’ÉTAT : CONSTITUTION DE COMITÉS DE PILOTAGE
    Les comités de pilotage (pour la création d’un ASV puis pour sa programmation annuelle) à mobiliser se situent à différents niveaux :
    -  communal ou intercommunal : le comité de pilotage opérationnel local pour le suivi des projets locaux de santé publique de l’ASV dans certains cas au niveau de l’agglomération où les villes doivent garder une place prépondérante ;
    -  départemental : préfectures et DDASS animent et mobilisent les représentants des communes concernées, des associations et des réseaux médico-sociaux au service des projets locaux de santé publique suivis par les ateliers santé ville qui élaborent le plan local de santé publique ;
    -  régional : le niveau régional (DRASS/SGAR) est un appui au développement des méthodes de projet, à élaborer des diagnostics territoriaux infra régionaux et à développer des formations pour les activités de l’ASV et des acteurs impliqués via l’INPES, l’ORS, les SREPS, les CODES, les universités, les centres de ressources politique de la ville...
II.  -  ÉLÉMENTS PRINCIPAUX À IDENTIFIER DANS LE PROJET ASV (CES DISPOSITIONS S’APPLIQUENT AUX PROJETS EXISTANTS AINSI QU’AUX NOUVEAUX PROJETS ASV 2007)

II a.  Pilotage, suivi et évaluation

    Identification d’une équipe locale responsable de la démarche ASV et présidée par l(es) élu(s) concerné(s) ;
    Réalisation d’un diagnostic local partagé préexistant au projet territorial et/ou éléments de contexte motivant d’une part, la déclinaison locale des objectifs des plans nationaux et PRSP et d’autre part, ceux concernant les actions spécifiques aux territoires ;
    Présentation d’une programmation annuelle des activités de l’ASV ;
    Descriptif d’une méthodologie envisagée pour le suivi et l’évaluation des projets locaux de santé publique ;
    Qualification des ressources de proximité en matière de soins et de prévention (état des lieux de la démographie médicale et para médicale publique et privée).

II b.  Coordination territoriale au service des projets locaux
de santé publique

    Identification du positionnement transversal du coordinateur de l’ASV dans l’organigramme de la commune pour une plus grande marge de réalisation des activités de la démarche :
    -  données recueillies pour le suivi d’un observatoire local de santé ;
    -  implication des habitants explicite dans la méthodologie de projets, de suivi et d’évaluation ;
    -  mobilisation de professionnels de santé publics/privés et des associations ;
    -  articulation avec d’autres dispositifs ou programmes de la politique de la ville ;
    -  articulation avec d’autres dispositifs ou programmes de la politique de santé publique, dont les articulations avec les projets de santé des établissements de santé dans le cadre du SROS III.

III. c.  Indicateurs d’activités de l’ASV

    Les principaux indicateurs à prendre en compte sont :
    -  nombre de projets de santé publique, objectifs et thèmes suivis par l’ASV (initiatives locales spécifiques et déclinaison PRSP, MILDT, etc.) ;
    -  nombre d’habitants impliqués dans les projets de santé publique ;
    -  crédits demandés/crédits accordés concernant les projets de santé publique initiés par l’ASV et ceux concernant la déclinaison des PRSP (appel à projets) ;
    -  partenaires institutionnels sollicités/partenaires effectivement impliqués ;
    -  professionnels de santé secteur public sollicités/ professionnels effectivement impliqués ;
    -  professionnels de santé secteur privé sollicités/ professionnels effectivement impliqués.
    Les autres indicateurs du tableau de bord des activités de l’ASV est en cours de finalisation au terme d’une expérimentation menée au 1er semestre 2007 sur trois régions.

Textes de référence

    Loi no 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. JO du 2 août 2003. Chapitre 1er : réduction des inégalités dans les zones urbaines sensibles, annexe I, point 4 : santé.
    Plan santé mentale : circulaire DHOS/O2/DGS/6C/DGAS/1A/1B no 2005-521 du 23 novembre 2005 relative à la prise en charge des besoins en santé mentale des personnes en situation de précarité et d’exclusion et à la mise en oeuvre d’équipes mobiles spécialisées en psychiatrie.
    Circulaire DHOS/O2/DGS/6c/DGAS/1A/1B no 2005-521 du 23 novembre 2005 relative à la prise en charge des besoins en santé mentale des personnes en situation de précarité et d’exclusion et à la mise en oeuvre d’équipes mobiles spécialisées en psychiatrie.
    Comité interministériel des villes du 9 mars 2006.
    Circulaire relative à l’élaboration des contrats urbains de cohésion sociale, 24 mai 2006 et fiche « Programmation santé des contrats urbain de cohésion sociale ».
    Circulaire interministérielle DGS/DHOS/SD 1A no 2006-383 du 4 septembre 2006 relative à l’élaboration et à la mise en oeuvre des projets de santé publique dans les territoires de proximité et au développement des ateliers santé ville.

ANNEXE  IV

ÉVALUATION NATIONALE DES PROGRAMMES RÉGIONAUX D’ACCÈS À LA PRÉVENTION ET AUX SOINS (PRAPS) (JUILLET 2003)

Résumé analytique

    Le comité de pilotage du 16 avril 2003 a clôturé l’évaluation nationale de la première génération (2000-2002) des 26 Programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins (PRAPS) en examinant le rapport final et les recommandations émises par l’évaluateur. Lancée en mai 2002 par la DGS, cette évaluation fait directement suite à un certain nombre de constats : si les PRAPS 1 ont permis de créer une dynamique partenariale et de décloisonner les secteurs et acteurs concernés dans le champ sanitaire et social, il convient toutefois que les PRAPS 2 - en cours d’élaboration - intègrent un certain nombre d’évolutions, s’agissant de leur méthode d’élaboration, de leur pertinence, de leur mise en oeuvre et de leur suivi et évaluation, tant au niveau régional que national.
    Les conclusions remises par l’évaluateur ont permis de répondre en majeure partie aux 9 questions évaluatives posées dans le cahier des charges, établi par la DGS début 2002 :
    1.  Dans quelle mesure les actions mises en oeuvre localement par les PRAPS sont pertinentes par rapport aux besoins constatés dans chaque région ?
    2.  En quoi les PRAPS ont permis d’identifier les populations vulnérables et de mieux connaître leurs problèmes de santé ?
    3.  Dans quelle mesure les actions mises en oeuvre localement par les PRAPS sont-elles cohérentes au regard des objectifs fixés par la loi et les directives nationales et au regard des autres programmes de santé et de prévention ?
    4.  De quelle façon les PRAPS ont-ils favorisé l’accès au droit commun des personnes vivant dans des conditions précaires ?
    5.  Les PRAPS ont-ils contribué à créer ou pérenniser des dispositifs spécifiques ?
    6.  Dans quelle mesure le travail en réseau, recommandé par les PRAPS, est-il une stratégie de mobilisation efficace dans l’objectif d’améliorer l’accessibilité ?
    7.  Des instruments de suivi et de mesure et des indicateurs adaptés ont-ils été mis en place localement ?
    8.  Les outils mis en place par l’administration centrale ont-ils été pertinents et adaptés au pilotage national des PRAPS ?
    9.  Quelles modalités de gestion des PRAPS pourraient être modifiées pour renforcer les impacts attendus en matière d’accès aux droits, à la prévention et aux soins ?
    Les constats majeurs formulés par l’évaluateur sont, comme généralement en évaluation, à la fois positifs et critiques. Le jugement évaluatif est prolongé par des recommandations autour de 3 axes :
    -  l’identification et la prise en compte des caractéristiques et des besoins des populations cibles ;
    -  la cohérence interne et la cohérence externe des PRAPS ;
    -  les outils de suivi, de pilotage et d’évaluation des PRAPS, notamment au niveau national.
    L’évaluation, qui s’est déroulée de fin mai 2002 à mi-avril 2003, s’est notamment fondée sur l’étude approfondie de 4 régions : Picardie, Poitou-Charentes, PACA et Rhône-Alpes. Elle a donné lieu à l’élaboration de différents rapports de « diagnostic » et à une série de recommandations (13 fiches) que la présente note de communication synthétise à grands traits.
    Les PRAPS, de quoi parle-t-on ?
    Rapide photographie des PRAPS des 22 régions métropolitaines en 2000.
    En 2000, première année « opérationnelle » pour les PRAPS 1, plus de 1 390 actions ont été mises en oeuvre dans les 22 régions métropolitaines.

Les financements

    Au total, les PRAPS ont bénéficié de 33,5 millions d’euros en 2000 (plus de 220 millions de francs), quelles que soient les sources de financements (Etat, collectivités territoriales, assurance maladie...). Les analyses de la répartition entre financeurs montrent que :
    -  en tenant compte de l’ensemble des chapitres budgétaires concernés, l’Etat est le 1er financeur des PRAPS avec près de 18,3 millions d’euros (120 millions de francs). Le 47-11-20 représente à lui seul 45 % du volume total des financements ;
    -  les collectivités territoriales arrivent en deuxième position, avec plus de 22 % du volume total des financements, soit plus de 7,4 millions d’Euros (plus de 49 millions de francs) ;
    -  la ligne PRAPS du FNPEIS n’a été créée qu’en 2001, mais les données disponibles pour l’année 2000 montrent que la CNAM a abondé les PRAPS pour près de 1,8 million d’euros (plus de 12 millions de francs).

Les opérateurs

    Les actions des PRAPS sont largement mises en oeuvre par le secteur associatif (21 % des porteurs de projets) puis par les missions locales ou PAIO (14 %), les centres d’accueil ou d’hébergement (8 %) et les hôpitaux (7 %). Cependant, l’analyse des données disponibles reste limitée du fait du poids de la catégorie « autres porteurs de projets » (30 %) ou des non réponses (6 %). Ces porteurs de projets, et donc les actions mises en oeuvre grâce aux PRAPS, se concentrent en zones urbaines (plus de 70 % des actions) et notamment dans les quartiers ou territoires « politique de la ville ».

Les publics bénéficiaires

    Enfin, les publics bénéficiaires des PRAPS en 2000 se répartissent en 8 catégories. Parmi celles-ci, les jeunes de 16 à 25 ans (26 % des publics), les professionnels (11 %) semblent être prioritairement visés, alors que la catégorie « tout public précaire » arrive en tête (28 %).
    Une pertinence et une cohérence externe globalement avérées mais qui méritent d’être améliorées.
    Les réponses apportées par les PRAPS correspondent aux objectifs identifiés au niveau national et régional... mais à eux seuls : ainsi, les PRAPS sont des programmes dont la pertinence est réelle, mais en partie limitée par la faiblesse des « diagnostics ». En effet, force est de constater que les diagnostics n’ont pas toujours su identifier l’ensemble des besoins des publics et des territoires cibles. Cette difficulté de diagnostic (identification et caractérisation des situations, besoins et attentes des publics cibles) a d’ailleurs été récemment soulignée par l’IGAS. Par défaut de méthodes, d’outils, de moyens et de capitalisation, les PRAPS n’ont donc pas toujours permis de mieux connaître globalement les publics vulnérables et leurs problèmes de santé sur tous les territoires régionaux couverts. Ils ont en revanche permis de mieux les connaître au niveau local (là où sont mises en oeuvre les actions étudiées), et parfois au-delà lorsque les diagnostics préalables à l’élaboration du PRAPS étaient suffisamment affinés.
    Les « diagnostics » et les objectifs des PRAPS ont été formalisés selon des modalités variables et présentent des contenus hétérogènes notamment parce qu’ils ont été élaborés à partir de la combinaison variable de différentes données. Certaines régions ont privilégié une approche « quantitative » (indicateurs statistiques), d’autres ont travaillé selon une approche ascendante et qualitative via des groupes de travail ou des études ad hoc, d’autres enfin ont combiné les différentes approches. Aujourd’hui la difficulté est la même partout : comment actualiser les diagnostics et intégrer aux PRAPS 2 les évolutions de la situation sanitaire et sociale des territoires et des caractéristiques et besoins des publics ? Les évaluations régionales des PRAPS 1 dans la quasi-totalité des régions sont toutefois l’occasion de réactualiser ces diagnostics. En ce qui concerne les objectifs, le passage du diagnostic à la définition des objectifs, semble avoir conduit dans de nombreuses régions à une certaine « dilution ».
    Ainsi, les objectifs des PRAPS sont souvent jugés trop « consensuels » ou trop généraux par une grande majorité des acteurs rencontrés, même si leur élaboration a donné lieu à de nombreux échanges et débats en GTR et CRPS.
    Enfin, l’évaluateur souligne que l’articulation entre les différents programmes et acteurs reste insuffisante, sauf entre PRAPS et PRS, deux dispositifs qui s’articulent généralement bien, même si cette articulation est plus de niveau stratégique qu’opérationnel. Enfin, parmi les acteurs concernés par les PRAPS, il convient de relever l’absence de participation du secteur privé ou libéral du champ sanitaire, sauf exceptions.
    Une efficacité réelle mais encore en devenir en direction des bénéficiaires
    Tous les impacts des PRAPS 1 n’ont pas pu être mis en évidence via l’évaluation nationale car pour certains ils ne se sont pas encore produits (comme le souligne aussi l’IGAS dans son dernier rapport). L’évaluateur considère d’ailleurs que les PRAPS agissent le plus souvent en deux temps :
    -  d’abord sur les professionnels et acteurs de terrain du champ sanitaire et social ;
    -  ensuite seulement sur les publics en situation précaire... d’où la nécessité de poursuivre certaines actions via les PRAPS 2 et de pouvoir réaliser régulièrement leur évaluation, tant au niveau régional que national.
    Les PRAPS ont globalement produit des résultats positifs qui ont été classés en trois grandes catégories par l’évaluateur.

1. Les réponses apportées aux publics précaires
vont dans le sens d’une meilleure prise en charge

    Les actions étudiées montrent que les PRAPS permettent une meilleure prise en compte et prise en charge des problèmes de santé des publics touchés. Ils ont notamment permis un accueil renforcé, une plus grande écoute et une meilleure prise en charge des publics dans les lieux d’accueil, d’hébergement, d’insertion... Toutefois, les résultats produits par les actions étudiées ne permettent pas de se prononcer de manière fiable sur l’accès des publics au droit commun : si les actions ont souvent conduit à accompagner les publics « pris en charge » vers le soin, la question de la « fin » de l’accompagnement reste entièrement posée : à quel moment l’accompagnant peut-il et doit-il considérer que la personne accompagnée est suffisamment autonome, reconstruite ou apte à prendre en charge seule sa santé ?

2. Les actions innovantes ou expérimentales
en direction des publics

    Les PRAPS ont dans quelques cas permis de mettre en oeuvre des actions innovantes, avec cependant une limite liée à la nature même du « processus » qui laisse insuffisamment le temps de l’expérimentation, le droit à l’erreur et qui ne permet pas toujours d’étendre ces actions expérimentales. Ces actions nouvelles en direction des publics ont pu voir le jour grâce aux PRAPS selon trois « canaux » différents :
    -  en amont grâce à l’identification de besoins spécifiques auxquels les autres dispositifs ne répondaient pas ;
    -  via l’apport de financements qui faisaient défaut à des actions déjà « dans les cartons » ou de compléments de financement à des actions pré existantes ;
    -  enfin, par l’expérimentation hors des cadres pré définis par des dispositifs « de droit commun ».
3. Les résultats indéniables au niveau des professionnels concernés qui montrent l’importance que revêt le travail en réseau
    Au niveau des professionnels eux-mêmes, les PRAPS ont été un facteur évident de dynamisation, de structuration et d’institutionnalisation des réseaux santé/social. Ils ont d’autres parts conduits à l’évolution et à l’amélioration des pratiques professionnelles de part et d’autre à l’image d’une « fertilisation croisée ».
    Des modalités de gestion, de suivi et de pilotage à homogénéiser et à structurer pour qu’elles ne soient plus le talon d’Achille des PRAPS Si l’on constate une sensibilisation croissante aux méthodes et outils de suivi, de pilotage et d’évaluation, les « procédures et pratiques » actuelles restent encore trop hétérogènes et insuffisamment outillées par les acteurs locaux (DRASS et DDASS) et de portée limitée au niveau national qui rencontre des difficultés à « rendre compte » des PRAPS. Faute de méthodes, outils et moyens adéquats, aux niveaux départemental, régional et national, les actions ne font pas systématiquement l’objet de bilans permettant de mettre en évidence et de comparer leurs apports, leurs résultats ou les difficultés rencontrées. Ce défaut de connaissance qualitative (effets constatés sur les publics touchés), mais aussi quantitative (nombre de personnes touchées par les actions), ne permet pas de valoriser comme il se doit les actions financées par les PRAPS. Ainsi, la reconduction, l’extension (extension territoriale et sur des cibles de publics plus importantes) ou l’arrêt (parce que certaines actions ne sont pas pertinentes, efficientes ou efficaces) des actions ne dépendent donc pas d’analyses formalisées et objectivées, mais essentiellement de la connaissance qu’en ont les coordonnateurs départementaux ou des capacités de financement... Enfin, l’évaluation des actions est partout considérée et affichée en tant qu’exigence impérative conditionnant la connaissance des caractéristiques et besoins des publics cibles, la pertinence du PRAPS, l’attribution des financements... Les DRASS et DDASS se donnent peu à peu les moyens de pallier cette difficulté via les évaluations régionales des PRAPS lancées quasiment partout.
    Au-delà du pilotage opérationnel, se pose la question de l’animation du réseau des « partenaires institutionnels » du PRAPS. Or, il convient de constater que parmi l’ensemble des partenaires potentiels ou effectifs (ARH, URCAM et organismes de type CAF/MSA, collectivités territoriales, secteur sanitaire libéral...), deux types de partenaires sont impliqués à un niveau moindre que les autres. D’une part, les collectivités territoriales restent trop peu impliquées en amont (définition des objectifs, choix des actions à financer...), à l’exception de certains CPER dont les volets santé « intègrent » les PRAPS, alors qu’elles sont les premiers co-financeurs des PRAPS. D’autre part, le secteur sanitaire libéral, malgré l’adhésion des représentants rencontrés par l’évaluateur à la « philosophie » des PRAPS, s’implique plutôt dans d’autres dispositifs, comme les réseaux ville - hôpital ou d’autres réseaux plutôt du « ressort » des ARH. Par ailleurs, en dépit des résultats positifs soulignés par l’ensemble des professionnels rencontrés et constatés par l’évaluateur, ces résultats souffrent de limites qui sont plus liées au dispositif PRAPS lui-même qu’à la nature des actions mises en oeuvre et qui laissent à penser que la pérennité des actions « lancées » par les PRAPS n’est pas complètement assurée (y compris via d’autres dispositifs spécifiques ou de droit commun). Si les processus de sélection des actions se sont largement améliorés grâce aux appels à projets de plus en plus communs avec l’assurance maladie (les URCAM), ils engendrent encore trop souvent une logique de « guichet » et ne favorisent pas toujours l’émergence de nouveaux porteurs de projets, de nouvelles actions ou de nouveaux territoires d’intervention.
    Enfin, les modalités de financement des PRAPS ne permettent pas de garantir la pérennité des actions financées : principe de l’annualité budgétaire, faiblesse des montants financiers en jeu rapportés au nombre d’actions financées, complexité des procédures de financement des porteurs de projets, sous utilisation de la possibilité de signer des conventions pluriannuelles...

Evaluation nationale du lancement des PRAPS
de deuxième génération (2003-2006)
Résumé analytique

    Se situant à la phase de lancement des PRAPS de seconde génération, la présente évaluation porte sur la pertinence de leurs objectifs au regard des besoins régionaux et nationaux, et sur leurs modalités de pilotage. Les questions évaluatives étaient les suivantes :
    1. Qualité du diagnostic des besoins régionaux et infra-régionaux ;
    2. Pertinence des objectifs au regard de ce diagnostic ;
    3. Cohérence des stratégies et actions inscrites aux PRAPS, par rapport à ces objectifs ;
    4. Cohérence avec les autres dispositifs de l’Etat et des collectivités ;
    5. Implication actuelle et programmée des partenaires restés à la marge des cercles de décision des PRAPS 1 : collectivités territoriales, secteur libéral, bénéficiaires visés ;
    6. Caractère opérationnel du système de pilotage et de suivi à l’échelle nationale et régionale.
    Ce dernier point revêt une importance particulière dans le contexte des lois LOLF et LSP : la DGS et en particulier les programmes de santé publique sont en effet un champ d’expérimentation pour le suivi de l’action ministérielle.
    L’analyse s’est appuyée sur les sources d’information suivantes :
    -  études de cas, par entretiens et étude documentaire, dans cinq régions : Basse-Normandie, PACA, Pays de la Loire, Bretagne, Martinique ;
    -  dans toutes les autres régions, étude documentaire légère, entretien avec le coordonnateur PRAPS, et questionnaire rempli par celui-ci ;
    -  entretiens au niveau national, interactions avec le comité de pilotage de l’évaluation, présentationsavec les coordonnateurs PRAPS.

Mission, objectifs et moyens impartis aux PRAPS

    Les programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins (PRAPS) en direction des personnes en situation de précarité ont été institués par la loi du 29 juillet 1998 (circulaire DGS/SP2 no 1999-110 du 23 février 1999 relative à la mise en place de programmes régionaux d’accès à la prévention et aux soins pour les personnes en situation de précarité.)
    Les PRAPS de la seconde génération couvrent la période 2003-2006 et font l’objet de la circulaire DGS/DS6D no 2002-100 du 19 février 2002. relative à la lutte contre les exclusions (art. 71).
    Selon le rapport du haut comité de la santé publique (1998), les personnes en situation de précarité représentent 20 à 25 % de la population française. »
    Les PRAPS « constituent un outil de concertation et de coordination permettant d’associer de multiples partenaires : associations, mutuelles, organismes d’assurance maladie, hôpitaux, organismes professionnels, collectivités locales et services de l’Etat », et « invitent l’ensemble des acteurs du système sanitaire et social ainsi que tous les citoyens à s’interroger sur les causes » des « inégalités sociales en matière de santé » (Les passages entre guillemets dans ces lignes de présentation sont extraits du site « PRAPS » de la DGS.).
    Des actions auprès des publics précaires et des professionnels sont financées par les DRASS sur un « budget PRAPS », qui fait partie des budgets déconcentrés des programmes de santé publique, utilisés pour alimenter un ou des appels à projets annuels. Ce budget est de l’ordre d’1 euro par personne en situation précaire et par an.
    Initialement, le PRAPS 1 disposait d’un financement dédié : 15,1 MEuro en 2000. Depuis 2001, les budgets PRAPS ont été fondus avec ceux d’autres programmes de santé dans la ligne 47.11.20. En 2004, ils ont été situés dans les « autres programmes de santé publique », pour l’ensemble desquels 13,4 MEuro ont été inscrits en loi de finances initiale.

A. -  DU DIAGNOSTIC AU PROGRAMME :
L’ÉLABORATION DES PRAPS 2

    Mi-2004, 13 documents PRAPS 2 avaient été produits ; l’élaboration était en cours dans les autres régions.
A.1. Souvent associé à l’évaluation du PRAPS 1, le diagnostic régional des besoins indique généralement les publics cibles, mais explicite peu leurs problèmes d’accès
    Le diagnostic préalable au PRAPS 2 a pris, d’une région à l’autre, des formes variées. Il a souvent été associé à une forme d’évaluation du PRAPS 1, axée soit sur le fonctionnement du programme, soit, plus fréquemment, sur les actions financées. Dans une région sur deux, ce diagnostic a compris un repérage géographique des besoins.
    Les PRAPS 2 désignent, plus précisément que les PRAPS 1, des publics en situation précaire, parmi lesquels sont cités, d’une région à l’autre, les jeunes de 16 à 25 ans sans emploi, les habitants de zones rurales, les immigrés en situation irrégulière.
    Les données sanitaires par publics sont très rares et les PRAPS 2 ont rarement explicité quels obstacles rencontre chaque public.
    Des problèmes sont cependant cités, essentiellement :
    -  les obstacles physiques ou géographiques à l’accès aux soins ;
    -  la méconnaissance du système de santé et les problèmes de communication entre professionnels et personnes démunies ;
    -  la marginalisation vis-à-vis des systèmes sociaux et le désintérêt pour la santé ;
    -  le coût des soins pour certaines personnes pauvres.
    Les trois premiers obstacles, non financiers, à l’accès au système de santé, sont plus souvent cités dans les PRAPS 2 que dans les PRAPS 1, préparés alors que la CMU et la redéfinition de l’AME étaient encore en projet.
    Les évaluateurs recommandent que soit visé dans chaque région un diagnostic partagé entre acteurs, portant sur la relation entre offre et besoins des publics, ceci en explicitant la diversité des publics, notamment selon la géographie. Tout en mobilisant les données quantitatives d’origine nationale sur les problèmes d’accès et la santé, ce diagnostic s’appuierait sur une information qualitative constituée sur place pour le PRAPS.
A.2. Les actions répertoriées par les PRAPS sont pertinentes ; cependant, les conditions ne sont que partiellement réunies pour que l’efficacité des PRAPS soit à l’échelle des problèmes et des publics
    La politique d’accès aux soins bénéficie, plus que d’autres politiques, d’un consensus évident sur les principes. Les DRASS-DDASS, n’ayant qu’un poids limité sur l’offre du système de santé, s’appuient utilement sur ce consensus, mais au prix d’objectifs généraux donc peu opérationnels, qui font rarement référence aux publics identifiés dans le diagnostic, précisent peu les acteurs à mobiliser, rarement les indicateurs de réalisations ou résultats, et jamais les budgets nécessaires.
    Par ailleurs, les moyens humains et financiers alloués aux PRAPS sont limités : dans ce cadre, pour que les réponses qu’ils contiennent soient à l’échelle des problèmes d’accès et des publics visés, des conditions doivent être réunies :
    -  Les actions auprès des publics ne peuvent toucher, sur budget PRAPS, qu’une fraction minime des personnes en situation précaire. Elles trouvent un sens si elles sont pilotes, expérimentales, si elles produisent des leçons utilisables ensuite par d’autres. Cela demande à la fois un suivi-évaluation et une communication sur les actions (cf. B infra).
    -  L’action auprès des organisations a des effets concrets pour les publics seulement à travers les solutions apportées par ces organisations aux problèmes de ces publics. Donc selon la cohérence entre ce qu’elles font, et le PRAPS (cf. A.3 infra).
    -  L’action en direction des professionnels n’a de portée pour les publics, que si l’ensemble des professionnels de première ligne sont touchés. Ce n’est le cas que là où le territoire est couvert à un niveau fin, et/ou dans les quelques régions où a été fait un gros effort de communication sur les PRAPS.
    Concernant ce dernier point, les PRAPS 2 comme les PRAPS 1 ont mis en avant une stratégie censée concilier modestie des moyens et diversité des situations des publics : le décloisonnement ou mise en réseau des professionnels de la santé et du social, de nature à favoriser une meilleure prise en charge, donc un meilleur accès à la prévention et aux soins : les professionnels de santé orientant plus facilement les personnes démunies vers les professionnels sociaux, et vice versa.
    L’effectivité de cette mise en réseau locale varie très fortement d’un département à l’autre : c’est au niveau départemental (et non régional) qu’elle peut être pilotée.
    Elle a plutôt progressé depuis le PRAPS 1 : par exemple, des rencontres au sujet des populations précaires entre personnels soignants de psychiatrie et travailleurs sociaux, ont été organisées dans un secteur de psychiatrie sur cinq ; au total, les réunions locales sur le PRAPS ont associé sur douze mois près de 10 000 personnes ; un effectif significatif, même si les professionnels de la santé et du social sont plus d’un million.
    Cependant, nombre de DRASS et DDASS ressentent, à tort ou à raison, que la priorité donnée par le Ministère aux PRAPS s’amoindrit ce qui peut les inciter au repli sur un « mini-réseau » de correspondants proches d’eux, à l’inverse de la mobilisation visée.
    Selon les évaluateurs, les finalités du PRAPS peuvent s’inscrire dans les objectifs proposés par le GTNDO, en visant l’égalité dans le recours aux dépistages et aux soins, la mise en oeuvre efficace des dispositifs CMU, AME, PASS, et en soutenant les dynamiques en ville et à l’hôpital visant à créer des réseaux de santé et des dispositifs de proximité prenant en compte la santé des personnes précaires.
    La mise en oeuvre des PRAPS requiert non seulement des moyens financiers, mais aussi des ressources humaines accrues dans les DDASS et DRASS, condition de l’effet de levier à obtenir sur l’affectation des moyens de l’assurance maladie et des collectivités locales (Des recommandations sur les actions elles-mêmes, appuyées sur les différents constats de l’évaluation, figurent plus loin (A.4)).
A.3. Les PRAPS 2 sont cohérents avec les autres dispositifs sanitaires, PRS notamment. Le lien avec les Conseils généraux et leurs dispositifs est variable. Professionnels libéraux et usagers restent en marge des PRAPS
    La recherche de cohérence entre le PRAPS et les autres dispositifs de l’État et des collectivités a été accrue dans les PRAPS 2, à en juger par les fréquentes citations, dans le texte des PRAPS, de dispositifs régionaux (PRS, SREPS, SROS) mais aussi nationaux (CMU, AME, politique de la ville) et départementaux (Sur un échantillon de 5 régions, entre 8 et 14 dispositifs sont cités dans le PRAPS 2, contre 1 à 6 dans le PRAPS 1).
    La cohérence avec les dispositifs de santé est bien attestée. La cohérence entre le PRAPS et les PRS est favorisée par l’existence d’appels à projets communs pour ces programmes ; certains coordonnateurs PRAPS sont aussi coordonnateurs des PRS.
    En revanche, la prise en compte des dispositifs sociaux dans les PRAPS est hétérogène. Les DRASS et DDASS rencontrent des difficultés à toucher l’ensemble des acteurs « sociaux » concernés, les publics visés par le PRAPS relevant de dispositifs très divers selon qu’on se situe au niveau national, régional ou départemental.
    En particulier, les dispositifs départementaux (souvent sociaux) sont mentionnés irrégulièrement. Ainsi, la PMI, qui pourrait être considérée comme au coeur d’une approche à la fois sanitaire et sociale, est citée dans 3 PRAPS sur 12.
    Ceci est à rapprocher de l’implication des conseils généraux dans les PRAPS, très variable d’une région et d’un département à l’autre. Dans la configuration institutionnelle existante, cette implication s’est au moins avérée faisable : près d’un conseil général sur deux est représenté au comité de suivi ; autant ont intégré une partie du PRAPS dans le volet santé de leur PDI ; un sur cinq prend part à la sélection des projets financés au titre du PRAPS...
    D’autres partenaires potentiels, qui étaient à la marge des cercles de décision des PRAPS 1, le sont aussi pour les PRAPS 2 :
    -  la participation des professionnels libéraux au programme reste modeste à l’étape du diagnostic et marginale ensuite, même si, dans la moitié des régions, des professionnels soignants (pas forcément libéraux) sont au comité de suivi ;
    -  la participation d’usagers au PRAPS est restée limitée à des cas isolés. Pour le PRAPS 2, le Limousin est cette exception : un comité des usagers y a été constitué pour le diagnostic, puis maintenu pour le suivi du programme.
    Ailleurs, plusieurs freins institutionnels et sociologiques s’opposent à la participation pourtant requise par la circulaire de 2002 ; l’argument du manque de savoir-faire devrait, en revanche, être moins invoqué à l’avenir, grâce aux premières expériences et aux méthodes développées par ATD-quart monde (sachant que le savoir-faire est un aspect second, les freins principaux étant du côté de la volonté d’associer des usagers, et du temps de personne que les administrations y consacrent).
    Concernant les appels à projets (ou appels d’offre), les évaluateurs recommandent que l’octroi de crédits soit fondé sur des prévisions explicites de réalisations et de résultats. Une large communication devrait être faite sur les appels à projets et spécifiquement sur les priorités du PRAPS.
    Plus largement, les évaluateurs recommandent que l’animation par les DRASS et DDASS, associant des usagers dans un rôle consultatif, veille à un suivi des inégalités au sein de chacune des politiques régionales de santé, et utilise une partie de ses crédits pour saisir des opportunités d’intervention au-delà des appels à projets.
    Le rôle du niveau national (DGS) serait non seulement de faire vivre le « label » PRAPS et de catalyser l’échange de bonnes pratiques, mais aussi d’apporter des expériences internationales ainsi que des données statistiques de référence.

A.4. Recommandations spécifiques sur les actions
au titre des PRAPS

    L’évaluation n’a pas porté sur les actions menées au titre des PRAPS 2, ceux-ci étant en phase de lancement ; cependant, les analyses de la stratégie des PRAPS (A.2 supra) et de leur fonctionnement partenarial (A.3) ont conduit les évaluateurs à des recommandations pour les actions futures.
    Les actions auprès des publics en situation précaire devraient avoir une dimension expérimentale, donc produire et diffuser une information de suivi/auto-évaluation. Peuvent entrer dans le cadre du PRAPS les actions qui contribuent de façon identifiable et vérifiable à un meilleur accès à la santé, et sont une occasion de mobiliser les institutions et organismes de droit commun.
    Les actions auprès des professionnels devraient permettre leur mise en réseau à l’échelle locale ; de nombreuses actions à vocation d’interpellation/formation ont aussi leur place : interventions dans les formations initiales, dialogue entre personnes en situation précaire et professionnels, création d’évènements autour des problèmes des publics précaires et des solutions - la mobilisation des professionnels étant utilisée comme levier pour influer sur les organisations.
    Les actions visant directement les organisations devraient viser la prise en compte dans les schémas, budgets, décisions d’organisation, non seulement de la situation de publics « précaires » mais aussi des expériences capitalisées dans le cadre des PRAPS. Parmi les occasions d’y contribuer, on compte :
    -  les révisions des PRAPS eux-mêmes, notamment celle dont la préparation du PRSP devrait être l’occasion ;
    -  un travail entre financeurs sur les besoins spécifiques des publics, à l’occasion de la préparation des appels à projets/appels d’offres ;
    -  des travaux d’évaluation, diagnostic, ou relecture analysant les politiques et systèmes de santé sous l’angle des inégalités.

B. LE SYSTÈME DE SUIVI
ET DE PILOTAGE DES PRAPS 2

B.1. Des outils sont progressivement constitués, et jugés légitimes, pour le suivi des actions financées par les DRASS sur « budget PRAPS »
    Le « suivi » effectué par les DDASS consiste à rencontrer les structures financées, apprécier la qualité de leur travail, voire estimer les résultats de leurs actions. Il s’agit d’une « relation de suivi » individualisée, plus que d’un « système de suivi » homogène.
    Les DRASS, pour leur mission de programmation, devraient pouvoir juger de la valeur des actions menées au regard des objectifs poursuivis ; pour ce faire, à défaut de systèmes d’information capables de retracer ces informations souvent qualitatives et spécifiques, et à défaut de contacts directs avec les porteurs de projet ou les publics, elles s’appuient essentiellement sur la « relation de suivi » des DDASS.
    Il n’y a donc pas de phasage entre une « programmation régionale » d’abord, une « mise en oeuvre départementale » ensuite ; mais une situation d’interface des coordonnateurs DRASS, entre le niveau départemental où se passe l’essentiel du PRAPS, et le niveau national qui réglemente les programmes, en demande le texte et en alloue les fonds.
    La pression du niveau national est donc la motivation principale pour la constitution de données de suivi harmonisées. Cette pression est jugée légitime par les professionnels de la santé publique, conscients de l’utilité d’indicateurs homogènes et quantifiables ; en échange de ce suivi, ils attendent du niveau national un retour d’information, notamment pour nourrir les diagnostics territoriaux.
    Par rapport aux débuts du PRAPS 1, un nombre accru de DRASS ont mis en place des outils formalisés de description des actions, allant au-delà du document-type national COSA de demande de subvention. Parmi les informations demandées : les résultats passés (pour une demande de renouvellement), le programme dans lequel l’action s’inscrit (PRAPS, PRS...), l’objectif général, spécifique, opérationnel auquel elle concourt, le territoire concerné, les moyens mobilisés...
    Quelques DRASS émettent également des documents types à remplir ex post, fournissant des données plus précises et comparables que celles du rapport d’activité de la structure financée (la DRASS Bourgogne l’avait fait pour le PRAPS 1). Des outils d’auto-évaluation des actions par les porteurs de projets, ont été définis dans 9 régions malgré la difficulté de toute (auto-)évaluation dans ce domaine. Ils traitent des résultats, et aussi du pourquoi et comment ces résultats sont obtenus.
    Par ailleurs, la DGS travaille, en lien avec des DRASS expérimentatrices, sur des indicateurs de suivi pour les PRAPS comme pour les autres programmes de santé.

B.2 Souvent limité à la gestion des fonds, le suivi couvre mal
les mécanismes de succès des PRAPS

    L’efficacité des PRAPS - programmes à budget réduit, à vocation incitative et mobilisatrice - passe par un effet de levier sur les pratiques des professionnels et les décisions des organisations.
    Certaines actions auprès des professionnels, de même que les actions auprès des organisations, ne relèvent pas des appels à projets, mais se traduisent plutôt par l’investissement en temps de personnel de l’administration, ainsi que par des achats de prestations : l’édition d’un bulletin d’information par exemple.
    Or, rares sont les PRAPS qui annoncent l’évaluation de ce type d’intervention (en associant, à chaque objectif, un ou des indicateurs de résultat), et encore plus rares sont ceux qui en ont prévu les moyens pratiques.
    Globalement, si les systèmes de suivi des fonds (nouvelle version de GLB, India) et des temps (type AR peuvent permettre à l’avenir de reconstituer les moyens alloués à divers types d’actions, ils ne diront rien de ce qui est fait de ces moyens.
    Pour rendre compte de l’ensemble des résultats du programme, il faudrait des indicateurs adaptés à chaque mode d’intervention du PRAPS (actions directement tournées vers les publics, auprès des professionnels, auprès des organisations), et couvrant les différentes étapes du cycle de l’intervention publique, notamment :
    -  situation : type de problème à résoudre par l’action, public visé ;
    -  moyens : financements, temps de personne, ventilation par public et par territoire ;
    -  mise en oeuvre (certes diverse à la mesure de la variété des actions) ;
    -  Réalisations ;
    -  Résultats.
    Dans le cas, qui devrait être fréquent, des actions à vocation expérimentale, leurs responsables devraient aussi faire l’estimation des coûts, réalisation, résultats, que donnerait l’action si on passait du cadre expérimental à un régime de croisière.
    La mesure des impacts, en revanche, échappe au suivi de chaque projet, et relève plutôt d’outils d’enquête, ou de traitement statistique, régionaux ou nationaux.
    Les évaluateurs recommandent l’implantation d’outils harmonisés nationaux de suivi des actions, qui prévoiraient des variables paramétrables en fonction du PRAPS régional. Chaque action à vocation « expérimentale » devrait, en outre, être dotée d’un dispositif adapté de suivi et d’évaluation interne ou externe. Enfin, des évaluations des PRAPS, lancées en fonction des questions qui se posent à l’échelle régionale, devraient bénéficier d’un financement national.
    Le niveau national pourrait concentrer ses propres efforts d’évaluation sur le fonctionnement du système de suivi, sur les outils nationaux d’enquête ou de gestion, ainsi que sur la mesure de la situation : accès effectif des publics en situation précaire au système de santé, connaissances, attitudes, comportements des professionnels de santé.

B.3. Indicateurs recommandés pour le système de suivi

    En complément de l’évaluation proprement dite, et en tenant compte de travaux en cours à la DGS (outillage lié à la LOLF, nouvelle version de GLB...), les évaluateurs ont étudié et recommandé des indicateurs en fonction des types d’action (cf. rapport, 5.3 et 6.3.2).
    Parmi ces indicateurs (à compléter par une information qualitative sur les voies et moyens de la réussite de chaque action) :
    -  Indicateurs de situation : effectifs, sur le territoire, de la population ciblée ; problème à résoudre par l’action (nomenclature nationale).
    -  Indicateurs de moyens : financements Etat ; temps de personnel (y compris les professionnels participant à des actions) ; publics directs et publics finaux ; zone géographique et milieu d’intervention.
    -  Indicateurs de mise en oeuvre : type de structure intervenante ; partenariat.
    -  Indicateurs de réalisations : comparaison des réalisations visées (ex ante) et effectives (ex post) ; retombées média ; nomenclature de types d’actions ; indicateur de volume du service offert (horaires...).
    -  Indicateurs de résultats : comparaison des résultats visés (ex ante) et effectifs (ex post) ; nombre de personnes directement.

ANNEXE  V
PROMOTION DE LA SANTÉ
Charte d’Ottawa

    La première conférence internationale pour la promotion de la santé, réunie à Ottawa, a adopté le 21 novembre 1986 la présente « Charte » en vue de contribuer à la réalisation de l’objectif de la santé pour tous d’ici à l’an 2000 et au-delà.
    Inspirée avant tout, par l’attente, de plus en plus manifeste, d’un nouveau mouvement en faveur de la santé publique dans le monde, cette conférence s’est concentrée sur les besoins des pays industrialisés, sans négliger pour autant ceux des autres régions. Elle a pris comme point de départ les progrès accomplis grâce à la déclaration d’Alma-Ata sur les soins de santé primaires, les buts fixés par l’OMS dans le cadre de la stratégie de la santé pour tous et le débat sur l’action intersectorielle pour la santé, à l’Assemblée mondiale de la santé.

Promotion de la santé

    La promotion de la santé a pour but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l’améliorer. Pour parvenir à un état de complet bien-être physique, mental et social, l’individu, ou le groupe, doit pouvoir identifier et réaliser ses ambitions, satisfaire ses besoins et évoluer avec son milieu ou s’y adapter. La santé est donc perçue comme une ressource de la vie quotidienne, et non comme le but de la vie ; c’est un concept positif mettant l’accent sur les ressources sociales et personnelles, et sur les capacités physiques. La promotion de la santé ne relève donc pas seulement du secteur de la santé : elle ne se borne pas seulement à préconiser l’adoption de modes de vie qui favorisent la bonne santé ; son ambition est le bien-être complet de l’individu.

Conditions indispensables à la santé

    La santé exige un certain nombre de conditions et de ressources préalables, l’individu devant pouvoir notamment :
    -  se loger ;
    -  accéder à l’éducation ;
    -  se nourrir convenablement ;
    -  disposer d’un certain revenu ;
    -  bénéficier d’un écosystème stable ;
    -  compter sur un apport durable de ressources ;
    -  avoir droit à la justice sociale et à un traitement équitable.
    Tels sont les préalables indispensables à toute amélioration de la santé.

Plaidoyer pour la santé

    La bonne santé est une ressource majeure pour le développement social, économique et individuel et une importante dimension de la qualité de la vie. Divers facteurs - politiques, économiques, sociaux, culturels, environnementaux, comportementaux et biologiques - peuvent tous la favoriser ou, au contraire, lui porter atteinte. La promotion de la santé a précisément pour but de créer, grâce à un effort de sensibilisation, les conditions favorables indispensables à l’épanouissement de la santé.

Mise en place des moyens

    L’effort de promotion de la santé vise à l’équité en matière de santé. Le but est de réduire les écarts actuels dans l’état de santé et de donner à tous les individus les moyens et les occasions voulus pour réaliser pleinement leur potentiel de santé. Cela suppose notamment que ceux-ci puissent s’appuyer sur un environnement favorable, aient accès à l’information, possèdent dans la vie les aptitudes nécessaires pour faire des choix judicieux en matière de santé et sachent tirer profit des occasions qui leur sont offertes d’opter pour une vie saine. Sans prise sur les divers paramètres qui déterminent la santé, les gens ne peuvent espérer parvenir à leur état de santé optimal, et il en est de même pour les femmes que pour les hommes.

Médiation

    Le secteur de la santé ne peut, à lui seul, assurer le cadre préalable et futur le plus propice à la santé. La promotion de la santé exige, en fait, l’action coordonnée de tous les intéressés : gouvernements, secteur de la santé et autres secteurs sociaux et économiques, organisations non gouvernementales et bénévoles, autorités locales, industries et médias. Quel que soit leur milieu, les gens sont amenés à intervenir en tant qu’individus, ou à titre de membres d’une famille ou d’une communauté. Les groupes professionnels et sociaux, tout comme les personnels de santé sont, quant à eux, particulièrement responsables de la médiation entre les intérêts divergents qui se manifestent dans la société à l’égard de la santé.
    Les programmes et les stratégies de promotion de la santé doivent être adaptés aux possibilités et aux besoins locaux des pays et des régions et prendre en compte les divers systèmes sociaux, culturels et économiques.

ACTIONS POUR PROMOUVOIR LA SANTÉ
Elaboration de politiques pour la santé

    La promotion de la santé va bien au-delà des simples soins de santé. Elle inscrit la santé à l’ordre du jour des responsables politiques de tous les secteurs et à tous les niveaux, en les incitant à prendre conscience des conséquences de leurs décisions sur la santé et en les amenant à admettre leur responsabilité à cet égard.
    La politique de promotion de la santé associe des approches différentes, mais complémentaires : mesures législatives, financières et fiscales et changements organisationnels, notamment. Il s’agit d’une action coordonnée conduisant à des politiques de santé, financières et sociales qui favorisent davantage d’équité. L’action commune permet d’offrir des biens et des services plus sûrs et plus sains, des services publics qui favorisent davantage la santé et des environnements plus propres et plus agréables.
    La politique de promotion de la santé suppose que l’on identifie les obstacles à l’adoption de politiques pour la santé dans les secteurs non sanitaires, et les moyens de surmonter ces obstacles.
    Le but doit être de faire en sorte que le choix le plus facile pour les responsables des politiques soit aussi le choix le meilleur du point de vue de la santé.

Création d’environnements favorables

    Nos sociétés sont complexes et interconnectées et l’on ne peut séparer la santé des autres objectifs.
    Les liens qui unissent de façon inextricable les individus à leur milieu constituent la base d’une approche socio-écologique à l’égard de la santé. Le grand principe directeur, pour le monde entier, comme pour les régions, les nations et les communautés, est la nécessité d’une prise de conscience des tâches qui nous incombent tous, les uns envers les autres et vis-à-vis de notre communauté et de notre milieu naturel. Il faut appeler l’attention sur le fait que la conservation des ressources naturelles, où qu’elles soient, doit être considérée comme une responsabilité mondiale.
    L’évolution des modes de vie, de travail et de loisir doit être une source de santé pour la population, et la façon dont la société organise le travail doit permettre de créer une société plus saine. La promotion de la santé engendre des conditions de vie et de travail à la fois sûres, stimulantes, gratifiantes et agréables.
    L’évaluation systématique des effets sur la santé d’un environnement en évolution rapide notamment dans les domaines de la technologie, du travail, de l’énergie et de l’urbanisation est indispensable et doit être suivie d’une action garantissant le caractère positif de ces effets sur la santé du public. La protection des milieux naturels et des espaces construits, ainsi que la conservation des ressources naturelles, doivent être prises en compte dans toute stratégie de promotion de la santé.

Renforcement de l’action communautaire

    La promotion de la santé passe par la participation effective et concrète de la communauté à la fixation des priorités, à la prise des décisions et à l’élaboration et à la mise en oeuvre des stratégies de planification en vue d’atteindre une meilleure santé. Au coeur même de ce processus, il y a la dévolution de pouvoir aux communautés considérées comme capables de prendre en main leurs destinées et d’assumer la responsabilité de leurs actions.
    Le développement communautaire puise dans les ressources humaines et matérielles de la communauté pour stimuler l’auto-assistance et le soutien social et pour instaurer des systèmes souples susceptibles de renforcer la participation et le contrôle du public en matière de santé. Cela exige un accès total et permanent à l’information et aux possibilités d’acquisition de connaissances concernant la santé, ainsi qu’une aide financière.

Acquisition d’aptitudes individuelles

    La promotion de la santé appuie le développement individuel et social grâce à l’information, à l’éducation pour la santé et au perfectionnement des aptitudes indispensables à la vie. Ce faisant, elle donne aux gens davantage de possibilités de contrôle de leur propre santé et de leur environnement et les rend mieux aptes à faire des choix judicieux.
    Il est crucial de permettre aux gens d’apprendre à faire face à tous les stades de leur vie et à se préparer à affronter les traumatismes et les maladies chroniques. Ce travail doit être facilité dans le cadre scolaire, familial, professionnel et communautaire et une action doit être menée par l’intermédiaire des organismes éducatifs, professionnels, commerciaux et bénévoles et dans les institutions elles-mêmes.

Réorientation des services de santé

    Dans le cadre des services de santé, la tâche de promotion est partagée entre les particuliers, les groupes communautaires, les professionnels de la santé, les établissements de services, et les gouvernements. Tous doivent oeuvrer ensemble à la création d’un système de soins servant au mieux les intérêts de la santé.
    Par-delà son mandat qui consiste à offrir des services cliniques et curatifs, le secteur de la santé doit s’orienter de plus en plus dans le sens de la promotion de la santé. Les services de santé doivent se doter d’un mandat plus vaste, moins rigide et plus respectueux des besoins culturels, qui les amène à soutenir les individus et les groupes dans leur recherche d’une vie plus saine et qui ouvre la voie à une conception élargie de la santé, en faisant intervenir, à côté du secteur de la santé proprement dit, d’autres composantes de caractère social, politique, économique et environnemental. La réorientation des services de santé exige également une attention accrue à l’égard de la recherche, ainsi que des changements dans l’enseignement et la formation des professionnels. Il faut que cela fasse évoluer l’attitude et l’organisation des services de santé, en les recentrant sur la totalité des besoins de l’individu considérés dans son intégralité.

LA MARCHE VERS L’AVENIR

    La santé est engendrée et vécue dans les divers contextes de la vie quotidienne, là où l’individu s’instruit, travaille, se délasse ou se laisse aller à manifester ses sentiments. Elle résulte du soin que l’on prend de soi-même et d’autrui et de la capacité à prendre des décisions et à maîtriser ses conditions de vie ; elle réclame, en outre, une société dans laquelle les conditions voulues sont réunies pour permettre à tous d’arriver à vivre en bonne santé.
    L’altruisme, la vision globale et l’écologie fondent les stratégies de promotion de la santé. Les auteurs de ces stratégies doivent donc partir du principe qu’à tous les niveaux de la planification, de la mise en oeuvre et de l’évaluation de la promotion de la santé, tous les partenaires, hommes ou femmes, doivent être considérés comme égaux.

L’engagement à l’égard de la promotion
de la santé

    Les participants à la conférence s’engagent à :
    -  se lancer dans le combat afin de promouvoir des politiques pour la santé et à plaider en faveur d’un engagement politique clair en faveur de la santé et de l’équité dans tous les secteurs ;
    -  lutter contre les pressions exercées en faveur de produits dangereux, de la déplétion des ressources, de conditions et de cadres de vie malsains et d’une alimentation déséquilibrée ; à appeler également l’attention sur les questions de santé publique posées, par exemple, par la pollution, les dangers d’ordre professionnel, l’habitat et les peuplements ;
    -  combler les écarts de niveau de santé dans les sociétés et à lutter contre les inégalités dues aux règles et aux pratiques de ces sociétés ;
    -  reconnaître que les individus constituent la principale ressource de santé ; à les soutenir et à leur donner les moyens de demeurer en bonne santé, ainsi que leurs familles et leurs amis, par des moyens financiers et autres, et à accepter la communauté comme principal porte-parole en matière de santé, de conditions de vie et de bien-être ;
    -  réorienter les services de santé et leurs ressources au profit de la promotion de la santé ; à partager leur pouvoir avec d’autres secteurs, d’autres disciplines et, plus important encore, avec la population elle-même ;
    -  reconnaître que la santé et son maintien constituent un investissement social et un défi majeur ; et à traiter le problème général que posent les modes de vie sur le plan de l’écologie.
    Les participants à la conférence prient instamment toutes les personnes intéressées de se joindre à eux dans leur engagement en faveur d’une puissante alliance pour la santé.

Appel pour une action internationale

    La conférence demande à l’Organisation mondiale de la santé et aux autres organismes internationaux de plaider en faveur de la promotion de la santé, dans le cadre de tous les forums appropriés, et d’aider les pays à établir des stratégies et des programmes de promotion de la santé.
    Les participants à la conférence sont fermement convaincus que, si les gens de tous milieux, les organisations non gouvernementales et bénévoles, les gouvernements, l’Organisation mondiale de la santé et tous les autres organismes concernés s’unissent pour lancer des stratégies de promotion de la santé conformes aux valeurs morales et sociales dont s’inspire cette charte, la santé pour tous d’ici l’an 2000 deviendra réalité.

ANNEXE  VI

GRILLE INPES D’ANALYSE DES BONNES PRATIQUES DANS LES INTERVENTIONS VISANT À RÉDUIRE LES INÉGALITÉS SOCIALES DE SANTÉ
    De 2004 à 2007, l’Institut national de prévention et d’éducation à la santé (INPES) a participé au projet européen « Closing the gap : strategies for action to tackle health inequalities » [1], dont un des volets portait sur le développement d’une base de données européenne des « bonnes pratiques » en promotion de la santé pour lutter contre les inégalités sociales de santé.
    Ce projet initié en collaboration avec les agences de santé publique et de promotion de la santé de vingt-deux pays européens a permis de recenser près de quatre-vingt-dix projets (voir http ://www.health-inequalities.org). Les représentants institutionnels de chaque pays ont analysé les projets à partir d’une liste de 11 critères de qualité (participation du public, accessibilité de l’action, approche par lieux, diagnostic des besoins, pouvoir d’agir, partenariats, évaluation, pérennisation, etc.). Ont été retenus les projets qui répondaient à au moins trois de ces critères. L’objectif était plus de s’assurer de la qualité de la démarche (du processus) plutôt que de la preuve de l’efficacité. Parmi les projets retenus, la très grande majorité ciblait les publics de faible statut socio-économique, en situation familiale qualifiée de « difficile » ou résidant dans des quartiers défavorisés. Il s’agissait principalement d’actions mettant en oeuvre une démarche d’éducation pour la santé, ciblant les déterminants individuels (exemple : comportements liés à la nutrition, le tabac, l’alcool...), le système de santé ou l’insertion sociale. Très peu concernaient des déterminants de la santé plus macroscopiques comme les conditions environnementales, l’environnement physique au travail ou à l’école, le logement.
    Les connaissances relatives aux stratégies d’actions à entreprendre pour infléchir efficacement la tendance sont peu développées. La plupart du temps en effet, ces actions sont conduites dans des contextes où les approches évaluatives classiques de l’efficacité (études expérimentales ou quasi) sont impossibles à organiser. Afin de développer les connaissances et de soutenir la mise en place d’actions de qualité dans ce domaine, et à partir de l’expérience européenne, l’INPES conduit en 2007 un projet expérimental de sélection et d’analyse de la qualité des actions menées en milieux complexes. Ce projet associe trois régions (Bretagne, Limousin, Rhône-Alpes). A terme, ce projet pilote devrait aboutir à la création d’une base de données nationale des bonnes pratiques en promotion de la santé pour lutter contre les inégalités sociales de santé. Pour ce projet, l’institut développe une méthodologie de sélection et d’évaluation des interventions fondée sur une approche d’évaluation réaliste [1].
    Une grille d’analyse de la qualité des actions/projets menés dans la perspective de réduire les inégalités sociales de santé est en cours d’utilisation à titre expérimental. Il s’agit d’une grille construite à partir de trois outils d’évaluation des pratiques dans le champ de la promotion de la santé : a) la grille canadienne d’évaluation de l’efficacité des actions de santé communautaire [2], b) Preffi 2.0 [3] grille d’analyse de l’efficacité attendue des projets en promotion de la santé, et c) la grille d’analyse des bonnes pratiques pour lutter contre les inégalités de santé élaborée dans le cadre du projet européen « Closing the gap » [4].
    Cette grille est construite sous la forme d’un questionnaire qui reprend les différentes étapes d’une démarche de projet (planification de l’action, mise en oeuvre, évaluation, pérennisation), ainsi qu’une rubrique spécifique concernant le renforcement du pouvoir d’agir (empowerment) considéré comme une dimension essentielle dans un objectif de réduction des inégalités sociales de santé [5].
    A chaque étape, des critères (activités, mécanismes, déterminants) généralistes de qualité d’un projet de promotion de la santé ont été extraits des trois grilles citées ci-dessus, puis adaptés à la problématique des inégalités sociales de santé lorsque cela s’imposait.
    Exemples de critères de qualité explorés par la grille :
    -  pertinence de l’intervention au regard de la problématique des inégalités sociales de santé au niveau local/régional (analyse du problème) ;
    -  choix et conception des actions pour réduire les inégalités de santé ;
    -  implication des partenaires régionaux/locaux ;
    -  participation du public cible ;
    -  renforcement du pouvoir d’agir (empowerment) du public cible ;
    -  adaptation et accessibilité de l’action au public cible ;
    -  évaluation des processus et des effets de l’action au regard des inégalités de santé.

Exemples d’items de la grille d’analyse
1.  Planification :
analyse du problème et des besoins

    La nature du problème des inégalités de santé est décrite dans le projet.
    Les déterminants sociaux susceptibles d’avoir un effet sur la problématique des inégalités sociales de santé identifiée sont décrits.
    Des déterminants différents ont été identifiés pour les différents sous-groupes cibles de la population (âge, sexe, culture, position sociale...) concernés.

2.  Mise en oeuvre :
accessibilité de l’action

    Les barrières de communication (langue, culture) sont prises en compte.
    Les contraintes économiques du public bénéficiaire ont été prises en compte.
    Les sources de discrimination (sexuelles, religieuses, culturelles...) sont prises en compte.

3.  Evaluation

    Les indicateurs d’effets prennent en compte les sous-groupes de la population (ex : entre riches/pauvres, hommes/femmes, catégories socioprofessionnelles, etc.).
    L’évaluation s’interroge sur d’éventuels circonstances ou effets secondaires imprévus ou contreproductifs (ex : accroissement des inégalités sociales de santé).

4.  Pérennisation

    Des activités propices à la poursuite des activités et de leurs effets à la suite de l’arrêt de l’action ont été prévues dès le début de la planification du projet.
    Des actions ont été entreprises pour stabiliser les ressources organisationnelles (financières, humaines, matérielles, formation) consacrées aux activités de l’intervention.

5.  Pouvoir d’agir (empowerment)

    L’intervention vise à renforcer la capacité d’agir du(des) public(s) cible(s).
    Des activités (ex : formations, jeux de rôle...) sont mises en place pour améliorer la « conscience critique ».
    Bibliographie :
    [1] Pawson, R. (2002). « Evidence-based Policy : The Promise of “Realist Synthesis”. » Evaluation 8(3) : 340-358. Canada on behalf of the Canadian Consortium of Health Promotion Research ; 223 pages.
    [2] Hills, M. O’Neill, M. Carroll, S. MacDonald, M. (2004) ; Effectiveness of Community Initiatives to Promote Health : An Assessment Tool ; Research report submitted to Health.
    [3] Preffi 2.0 : outil de pilotage et d’analyse de l’efficacité attendue des interventions en promotion de la santé.
    [4] http://www.health-inequalities.eu/?uid=dd33438 859b94d45856cd3cbbb673 a41&id=main2.
    [5] Ridde V, Delormier T, Gaudreau L. Evaluation of Empowerment and Effectiveness : Universal Concepts ? In : McQueen DV, Jones CM, eds. Global Perspectives on Health Promotion Effectiveness. Volume I New York : Springer Science & Business Media, 2007 : 389-403.

NOTE (S) :


(1) Rapport du groupe technique national de définition des objectifs (analyse des connaissances disponibles sur des problèmes de santé sélectionnés, leurs déterminants et les stratégies de santé publique. Définition des objectifs) - 2003


(2) M-C Mouquet, La santé des personnes entrées en prison en 2003, ministère de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, ministère des solidarités, de la santé et de la famille, DREES, Etudes et Résultats no 386 mars 2005.


(3) Enquête permanente sur les conditions de vie réalisée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE)


(4) DREES, La santé des personnes entrées en prison en 2003, Etudes et résultats no 386 mars 2005.


(5) D. Che, D. Bitar, Les cas de tuberculose déclarés en France en 2004. BEH no 18-2006.


(6) De façon plus précise et plus complexe, il y a une interrelation entre la précarité, ce qu’elle génère et ce qui la cause puisqu’on sait, notamment, que certaines pathologies mentales peuvent être à l’origine d’un état de précarisation tout comme la précarisation peut en être un déclencheur.


(7) Emmanuelle Cambois (DREES), Les personnes en situation sociale difficile et leur santé, Les Travaux de l’Observatoire, 2003-2004, p 101.


(8) Lagarde E. « Le passé difficile des jeunes sans domicile », dans Populations & sociétés, Bulletin mensuel d’information de l’institut national d’études démographiques, no 363, décembre 2000.


(9) En considérant la santé dans son sens global, nous prendrons en compte la prise en charge sociale au même titre que la prise en charge sanitaire, comme participant à un état de bien-être social, physique et mental.


(10) C’est-à-dire que le règlement y est minimum et concerne le respect des règles de la vie en commun, du lieu et du personnel qui y travaille.


(11) Rothé C. thèse de sciences politiques (en cours), Les « Jeunes en errance » et l’accès aux soins. Une comparaison France-Irlande, université de Rennes 1, CRAPE/LAPSS, 2007.


(12) Voir P. Declerck, Les Naufragés, avec les clochards de Paris.


(13) Il faut donc préciser que, si la vie à la rue facilite le développement de pathologies mentales, celles-ci peuvent aussi préexister à la vie à la rue et en être un des déclencheurs. C’est notamment le cas pour des individus atteints de pathologies comme la schizophrénie ou les troubles bipolaires aigus ; ils ne peuvent pas vivre de façon autonome et, coupé d’un lien social ou familial fort, se retrouvent rapidement en situation de précarité extrême.


(14) De la Rochère B., « La santé des sans-domicile usagers des services d’aide », Insee Première, n o 893 avril 2003.


(15) De la Rochère B., « La santé des sans-domicile usagers des services d’aide », Insee Première, n o 893 avril 2003.


(16) Rapport ONZUS, pp 67,71 sur les revenus et CMUc, pp 97, 113.


(17) SIRS Info INSERM 707 no 3 juillet 2007.


(18) http : //sig.ville.gouv.fr/