Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Recours en récupération - Donation - Assurance-vie
 

Dossier no 100915

Mme X...
Séance du 20 mai 2011

Décision lue en séance publique le 1er juillet 2011

    Vu enregistré à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Loire, le 29 septembre 2009, l’appel par lequel M. Y..., demeurant dans la Loire, demande à la commission centrale d’aide sociale d’annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de la Loire en date du 18 juin 2009 ayant confirmé celle du président du conseil général de ce département du 9 février 2009, d’exercer, dans la limite des frais d’hébergement et d’entretien de l’intéressée pris en charge au titre de l’aide sociale du 1er juin 2005 au 19 janvier 2008, soit la somme de 11 702,59 euros, un recours en récupération des primes versées de son vivant par Mme X... dans le cadre d’un contrat d’assurance en cas de décès, requalifié en donation indirecte par l’administration et souscrit par celle-ci le 22 avril 1997 pour un montant de 100 000 francs (15 244,90 euros), et ce par le moyen que « la prime versée le 22 avril 1997 n’était pas exagérée puisque son patrimoine en 2002 et 2003 s’élevait à 64 681,96 euros » ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré à l’agence régionale de santé Rhône-Alpes, le 9 juillet 2010, le mémoire en défense par lequel le président du conseil général de la Loire conclut au rejet des conclusions de l’appel susvisé par le motif que Mme X... en souscrivant à l’âge de 89 ans un contrat d’assurance en cas de décès d’une durée de vingt-cinq ans au profit de son fils, seul héritier, moyennant le versement d’une prime de 100 000 francs, alors que ses ressources étaient très modestes, a entendu se dépouiller irrévocablement de cette somme en faveur de M. Y... ;
    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale, le 21 octobre 2010, le mémoire en réponse par lequel M. Y... soutient que sa mère a souscrit un contrat d’assurance en cas de décès susceptible d’être modifié à tout moment et réglé ses frais de séjour en établissement en puisant sur ses économies du 14 août 1998 au 31 mai 2005 de sorte que l’intention libérale ne serait pas établie ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 20 mai 2011 M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas, par l’Etat ou le département : 1o Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; 2o Contre le donataire, lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande (...) » ;
    Considérant, par ailleurs, qu’aux termes de l’article L. 132-12 du code des assurances : « Le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l’assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l’assuré. » ; que le contrat souscrit à cet effet auprès de l’assureur, s’il ne constitue pas une donation au sens de l’article 931 du code civil en tant qu’il n’est pas un acte authentique, peut être néanmoins requalifié de donation indirecte lorsqu’il procède d’une intention libérale du souscripteur ; que l’administration, sous le contrôle du juge, est fondée à rechercher cette intention en vue de récupérer les dépenses d’aide sociale engagées en faveur d’une personne décédée ayant conclu un tel contrat ; qu’il lui appartient de l’établir en tenant compte notamment de l’âge de l’assisté à la date de la souscription, du mode de versement des primes, de leur montant au regard de l’ensemble de ses disponibilités ;
    Considérant qu’à l’âge de 89 ans Mme X... a souscrit, le 22 avril 1997, un contrat d’assurance en cas de décès d’une durée de vingt-cinq ans moyennant le versement d’une prime de 100 000 francs (15 244 euros) ; qu’elle a désigné M. Y..., son fils, comme bénéficiaire du capital à verser en fin de contrat dans l’hypothèse, dont la réalisation était très probable en l’espèce, d’un décès de la titulaire avant le terme des conventions ; que Mme X... a été admise, le 14 août 1998, à la maison de retraite R... ; qu’en raison de ses modestes ressources, elle a puisé dans son patrimoine pour couvrir les frais de son hébergement et de son entretien dans cet établissement jusqu’au 1er juin 2005, date à partir de laquelle ils ont été partiellement pris en charge au titre de l’aide sociale jusqu’à son décès, survenu le 19 janvier 2008 ; que, toutefois, elle n’a pas modifié ou révoqué le contrat d’assurance en cas de décès pour subvenir plus longtemps à ses besoins ;
    Considérant qu’il suit de ce qui précède que l’intention libérale de Mme X..., qui s’apprécie à la date de souscription du contrat mais peut être corroborée par des éléments postérieurs constatés à la date à laquelle statue le juge de plein contentieux de l’aide sociale, paraît établie dès lors que, compte tenu de sa durée et de l’âge auquel l’intéressée y a adhéré, le contrat n’avait pas pour objet de constituer une épargne personnelle mais correspondait à un dépouillement de la prime versée en vue de procurer un capital à son fils, alors que postérieurement à la souscription les capitaux dont il s’agit ils n’ont pas été utilisés à la différence d’autres capitaux alors en possession de l’assistée pour pourvoir à ses frais de placement ; qu’ainsi le président du conseil général de la Loire était fondé à requalifier ce contrat en donation indirecte en vue de récupérer, dans la limite de leur montant, les dépenses d’aide sociale engagées en faveur de sa mère du 1er mai 2005 au 19 janvier 2008,

Décide

    Art. 1er.  -  L’appel de M. Y... est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 20 mai 2011, où siégeaient M. LEVY, président, Mlle THOMAS, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 1er juillet 2011.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer