Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Conditions d’octroi - Etrangers - Séjour - Titre de séjour - Décision - Motivation - Signature - Régularité
 

Dossier no 130157

Mme Y...
Séance du 17 juin 2014

Décision lue en séance publique le 30 septembre 2014

    Vu la requête du 28 février 2013, présentée par Mme Y... assistée de son conseil Maître Sylvie LE TOQUIN-MERSIN tendant à l’annulation de la décision du 6 avril 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décisions du 10 juillet 2008 par laquelle la caisse d’allocations familiales agissant par délégation du président du conseil de Paris, a rejeté sa demande de revenu minimum d’insertion au motif qu’elle ne justifiait pas de cinq années de séjour régulier en France à la date de sa demande ;
    La requérante soutient que le président du conseil de Paris a rejeté, par décision en date du 10 juillet 2008, sa demande de revenu minimum d’insertion et que la commission départementale d’aide sociale de Paris a reconnu que cette décision n’était ni signée ni motivée et était dépourvue du nom de son auteur. Elle fait valoir que la commission départementale d’aide sociale a commis une erreur de droit en confirmant la décision du président du conseil général. Elle soutient qu’étant titulaire d’une carte de séjour vie privée et familiale d’un an et l’article 14 alinéa 1 de l’ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ayant été abrogé en 2005, elle aurait dû se voir ouvert un droit au revenu minimum d’insertion ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces du dossier desquelles il ressort que Mme Y... a obtenu l’aide juridictionnelle par décision du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris en date du 26 novembre 2012, la dispensant ainsi de s’acquitter de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la convention générale du 12 juin 1979 conclue entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la sécurité sociale ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 17 juin 2014, Mme Hortense GAUTIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-9 du code de l’action sociale et des familles : « Les étrangers titulaires de la carte de résident ou du titre de séjour prévu au cinquième alinéa de l’article 12 de l’ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France, ou encore d’un titre de même durée que ce dernier et conférant des droits équivalents, sous réserve d’avoir satisfait sous ce régime aux conditions prévues au premier alinéa de l’article 14 de ladite ordonnance, ainsi que les étrangers titulaires d’un titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux de la carte de résident, peuvent prétendre au revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes du cinquième alinéa de l’article 12 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, codifié à l’article L. 313-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans sa rédaction applicable au litige : « La carte de séjour temporaire délivrée à l’étranger qui, désirant exercer en France une activité professionnelle soumise à autorisation, justifie l’avoir obtenue porte la mention de cette activité, conformément aux lois et règlements en vigueur » ; qu’en vertu du premier alinéa de l’article 14 de l’ordonnance précitée, codifié à l’article L. 314-8 du même code dans sa rédaction applicable au litige : « Tout étranger qui justifie d’une résidence ininterrompue d’au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, peut obtenir une carte de résident » ;
    Considérant qu’il résulte de ces dispositions combinées, qu’indépendamment du respect des autres conditions posées par le code de l’action sociale et des familles et sous réserve de l’incidence des engagements internationaux introduits dans l’ordre juridique interne, une personne de nationalité étrangère doit, pour se voir reconnaître le bénéfice du revenu minimum d’insertion, être titulaire, à la date du dépôt de sa demande, soit d’une carte de résident ou d’un titre de séjour prévu par un accord international et conférant des droits équivalents, soit, à défaut, d’un titre de séjour l’autorisant à exercer une activité professionnelle pour autant que l’intéressé justifie en cette qualité d’une résidence ininterrompue de cinq années ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction du dossier que Mme Y..., de nationalité malienne, a formé, en date du 19 février 2008, une demande de revenu minimum d’insertion ; que, par décision en date du 10 juillet 2008, la caisse d’allocations familiales de Paris a rejeté sa demande ; que, par décision en date du 6 avril 2012, la commission départementale d’aide sociale de Paris a confirmé la décision de la caisse d’allocations familiales et refusé de faire droit à la demande de Mme Y... ; que, par courrier en date du 28 février 2013, Mme Y... assistée de son conseil Maître Sylvie LE TOQUIN-MERSIN, a relevé appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale précitée ;
    Considérant que la décision du président du conseil de Paris en date du 10 juillet 2008 rejetant la demande de revenu minimum d’insertion formée par Mme Y... n’est ni motivée ni signée ; qu’elle ne mentionne pas le nom de son auteur ; que la commission départementale d’aide sociale, dans sa décision en date du 6 avril 2012, a relevé que cette décision du président du conseil de Paris était irrégulière mais ne l’a toutefois pas annulée ; qu’il s’en suit que la décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris doit être annulée pour erreur de droit ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant qu’il ressort du 2 de l’article premier de la convention générale susvisée que : « Les ressortissants maliens exerçant en France une activité salariée ou assimilée sont soumis aux législations de sécurité sociale énumérées à l’article 3 de la présente convention, applicables en France, et en bénéficient, ainsi que leurs ayants droit résidant en France, dans les mêmes conditions que les ressortissants français » ; qu’il ressort du 1 de l’article 3 de cette convention générale que « Les législations auxquelles s’applique la présente convention sont : En France : a) La législation fixant l’organisation de la sécurité sociale » ; que ces dispositions qui concernent la législation de la sécurité sociale s’appliquent aux mesures aménagées sous forme d’assistance ; qu’elles incluent par suite l’allocation de revenu minimum d’insertion, comme l’a jugé le Conseil d’Etat par décision du 8 juillet 1998, ministre du travail c/Z..., no 177487 ;
    Considérant en l’espèce, que Mme Y..., de nationalité malienne, était titulaire, lors de sa demande de revenu minimum d’insertion, d’un titre de séjour l’autorisant à travailler en France ; qu’elle remplissait dès lors le critère matériel posé par l’article 3.1 de la convention générale susvisée ; qu’il suit de là que Mme Y... n’avait pas à satisfaire à la condition de résidence de cinq ans pour être éligible au droit au revenu minimum d’insertion ; que par suite, Mme Y... est fondée à soutenir que c’est à tort que la caisse d’allocations familiales agissant par délégation du président du conseil de Paris lui a refusé l’ouverture du droit au revenu minimum d’insertion par sa décision du 10 juillet 2008, et qu’il y a donc lieu de procéder à l’annulation de celle-ci,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale de Paris en date du 6 avril 2012, ensemble la décision de la caisse d’allocations familiales agissant par délégation du président du conseil de Paris en date du 10 juillet 2008, sont annulées.
    Art. 2.  -  Mme Y... est rétablie dans son droit au revenu minimum d’insertion à compter de février 2008, date de sa demande.
    Art. 3.  -  La présente décision sera notifiée à Maître Sylvie LE TOQUIN-MERSIN, à Mme Y..., au président du conseil de Paris. copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 17 juin 2014 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GAUTIER, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 30 septembre 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente La rapporteure

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet