Sécurité du patient aux plans européen et mondial

1. Union européenne (UE)

1.1 Contexte européen

L’Article 152.5 du Traité instituant la Communauté européenne prévoit que l’organisation et la fourniture des services de santé et de soins médicaux relèvent de la compétence des Etats membres. La mise en oeuvre du principe de subsidiarité ne fait néanmoins pas obstacle au développement d’une coopération soutenue entre Etats membres.
La libre circulation des professionnels de santé ainsi que celle des patients est reconnue depuis plusieurs années par les instances européennes, depuis que la jurisprudence européenne en a affirmé le principe (arrêt Kholl et Decker en 1998). Ces principes ont conduit la Commission Européenne à prendre en compte les enjeux de qualité, de sécurité et d’accessibilité aux services de santé et à développer une coopération, au delà de la veille et de la gestion indispensables de certains risques sanitaires (SRAS, pandémie grippale, par exemple).

Ainsi, un accord de principe existe entre Etats Membres de l’UE en faveur d’une stratégie européenne sur la sécurité des patients. Il consiste en une volonté de travail en commun entre autorités nationales, sous l’égide de la Commission, sur toute question d’intérêt communautaire. Un accompagnement par la Communauté des politiques menées par les Etats membres dans ce domaine, comme prévu dans le Traité, est dés lors possible.

1.2 Stratégie pour la sécurité des patients de l’Union européenne

La Commission européenne a initié, avec les Ministres de la santé des Etats membres de l’UE, un processus de réflexion à haut niveau sur la mobilité des patients et l’évolution des soins de santé dans l’Union européenne. A cet effet, elle a mis en place en 2004 un groupe de réflexion appelé "groupe à haut niveau sur les services de santé et les soins médicaux" afin que les Etats membres puissent partager leur expérience, comparer leur politique et leur performance et développer en commun des actions concrètes

 Groupe à haut niveau sur les services de santé et les soins médicaux sur le site Europa

Dans ce cadre, le thème de la sécurité des patients fait l’objet d’un groupe de travail spécifique (« patient safety working group »). Celui est par ailleurs étroitement associé aux travaux préparatoires des différentes initiatives législatives de la Commission en la matière, et constitue également un forum de discussions et de propositions dans le domaine considéré.

 Site dédié « patient safety »

A l’initiative de la France, les travaux du « Patient Safety working group » ont permis d’obtenir le financement, par le programme communautaire de santé publique, du projet EUNetPaS (« European Network for Patient Safety ») relatif à la mise en place d’un réseau européen sur la sécurité des patients, dont la coordination a été confiée à la Haute Autorité de Santé (2008-2011). Ce réseau a pour objet le partage d’informations et de bonnes pratiques dans l’ensemble des Etats-Membres. Il porte sur quatre thèmes : la promotion d’une culture de sécurité des soins, la formation à la sécurité des soins, la promotion des systèmes de notification des événements indésirables, la sécurité de la prescription.

Dans le cadre de la préparation de ses initiatives législatives, les deux consultations publiques afférentes de la Commission, l’une sur la prévention et le contrôle des infections associées aux soins de santé (2005-2006), l’autre sur la sécurité des patients (2008) ont également été préparées par le « Patient Safety working group ».

S’agissant de cette seconde consultation, la France a accompagné sa réponse officielle à la Commission d’une note politique exposant notamment les principes de coopération auxquels elle est attachée, ainsi que les grands axes stratégiques en la matière qui relèveraient du niveau communautaire, selon elle.

Ce groupe de travail a en outre contribué à l’élaboration de la Communication relative à « la sécurité des patients, y compris la prévention des infections associées aux soins et à la lutte contre celles-ci », adoptée le 15 décembre 2008 par la Commission.

Il a de même contribué à l’élaboration de la Recommandation adoptée le 9 juin 2009 par le Conseil des ministres de la santé de l’UE, relative à « la sécurité des patients, y compris la prévention des infections associées aux soins et la lutte contre celles-ci ».

Cette Recommandation témoigne d’une volonté marquée de progresser vers une plus grande sécurité et une meilleure qualité des soins partagées par tous les Etats-Membres. Ce document politique est composé de deux parties demandant des avancées sur différents aspects transversaux de la sécurité, et sur les infections associées aux soins.

S’agissant de la sécurité des soins, la Recommandation préconise particulièrement la mise en place de politiques et de plans nationaux, l’information et la participation des citoyens au système de santé, la mise en place de systèmes de déclaration volontaire des événements indésirables axés sur l’analyse systémique à des fins d’apprentissage et de prévention des erreurs (« blame free »), la formation initiale et continue des professionnels de santé, la promotion de la recherche dans le domaine de la sécurité des patients, la coopération entre les Etats-Membres en vue d’améliorer le suivi et l’évaluation des mesures adoptées et mises en œuvre par les Etats membres dans le domaine de la sécurité des patients et de partager les bonnes pratiques, en lien notamment avec le projet afférent conduit par l’OCDE et l’initiative « ECHI : European Community Health Indicators » développée depuis plusieurs années par la Commission, en lien étroit avec les Etats membres

Dans sa deuxième partie, traitant de la lutte contre les infections associées aux soins de santé, la recommandation fixe les principaux objectifs suivants : définition et déclinaison de stratégies aux niveaux national, régional et local, amélioration de l’observation, de la mesure et du suivi des infections, mise en place de programmes de formation des professionnels de santé, information et implication des usagers, développement d’indicateurs de mesure, d’évaluation, et de suivi comparables au niveau de Union Européenne.

Sur l’ensemble de ces préconisations, qu’elles se rapportent à la sécurité des patients en général ou à la prévention des infections associées aux soins de santé en particulier, la France s’est d’ores et déjà dotée de stratégies et d’outils adaptés, dépassant parfois les préconisations contenues dans la présente Recommandation

1.3. Programmes d’action communautaire dans le domaine de la santé publique

Le programme d’action communautaire dans le domaine de la santé publique (2003-2007), premier programme « intégré » dans ce domaine, a contribué à des améliorations essentielles en matière de santé publique.

Le thème de la sécurité des patients a fait l’objet d’appels à propositions. Dans ce cadre., un projet relatif à l’amélioration de la sécurité du patient en Europe, intitulé « SIMPATIE - Safety Improvement for Patients in Europe » - a été financé. Ce projet multipartenaires visait à définir à travers une approche concertée une politique européenne de gestion des risques : cartographie des activités liées à la sécurité des patients d’une vingtaine d’Etats membres, outils d’amélioration de la sécurité des patients (vocabulaire commun, outils d’analyse, indicateurs..), recommandations européennes dans les domaines technique et politique, notamment.

Un deuxième programme « intégré » d’action communautaire dans le domaine de la santé a été instauré pour la période 2008 - 2013. Il prend appui sur les réalisations du programme précédent en le complétant. Il a également pour objectif général de soutenir les politiques des États membres dans les grands champs de la santé publique qui sont traités au niveau de l’UE.

Ce second programme poursuit les trois mêmes grands objectifs que le précédent : améliorer la sécurité sanitaire des citoyens, promouvoir la santé (y compris la réduction des inégalités de santé), produire et diffuser l’information et la connaissance en santé.

Ce programme est doté d’une enveloppe financière de 321 500 000 euros pour la période 2008-2013. Il est mis en œuvre par la Commission, en étroite collaboration avec les États membres, dans le cadre de leurs domaines respectifs de compétence.

1.4. Conférences des différentes Présidences successives du Conseil de l’Union européenne

Compte tenu de son importance le thème " sécurité du patient " a donné lieu à des conférences sous les différentes présidences de l’Union Européenne (UE). La conférence du Luxembourg, "La sécurité des patients : en faire une réalité " (avril 2005) et la conférence britannique " Sommet de Londres sur la sécurité des patients " (novembre 2005) ont confirmé la volonté de l’UE d’inscrire la sécurité du patient à son agenda politique pour développer une stratégie européenne de promotion de la sécurité des patients.
La conférence luxembourgeoise a permis l’adoption d’une déclaration, dite déclaration du Luxembourg, comportant des recommandations aux autorités nationales et aux professionnels de santé.

 

pdf Déclaration du Luxembourg Téléchargement du pdf (887.3 kio)

La conférence britannique, élargie à l’OMS et réunissant la plupart des ministres européens de la santé, a permis d’une part de sensibiliser la société civile par une mobilisation des patients, en accordant une place importante à leurs témoignages, et, d’autre part d’aborder les questions relatives au recueil et à l’analyse de données, aux expériences issues des secteurs industriels en matière de sécurité, à l’enseignement, à la formation et à la recherche.

La déclaration de Varsovie, qui consolide la déclaration du Luxembourg, a été adoptée à l’issue de la conférence de Varsovie " La sécurité des patients : un défi européen " (avril 2005).

La Présidence française de l’Union européenne (2ème semestre 2008) a été marquée par la conférence ministérielle intitulée « L’Europe de la santé au service des patients » des 13 et 14 octobre 2008. Cette conférence a permis d’aborder des expériences concrètes d’amélioration de la qualité des soins et de promotion de l’information sur la qualité, y compris vis-à-vis du public. A cette occasion, la France a pu partager son expérience, qu’elle développe et améliore constamment depuis 2006, de diffusion publique d’indicateurs sur les infections nosocomiales.

2. Conseil de l’Europe

2.1 Recommandations du Conseil de l’Europe

Un projet de recommandations intitulé "Prévention des évènements indésirables dans les soins de santé : une approche systémique " comportant 10 points clés, a été adopté en juin 2005 par le Comité européen de la santé (CDSP). Ces recommandations élaborées avec la participation des nombreux pays européens s’inscrivent dans le droit fil de la déclaration du Luxembourg.

3. Activités au sein de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)

La sécurité des patients représente également un enjeu mondial comme en témoignent les études concordantes des différents pays sur la fréquence des événements indésirables liés aux soins. En effet, quel que soit le système de santé, au moins 10% des admissions à l’hôpital entraînent des événements indésirables pour les patients hospitalisés, la moitié d’entre eux étant considérés comme évitables. Ces événements qui peuvent avoir des conséquences sévères (décès, handicap) ont un impact économique non négligeable.

Lors de la cinquante-cinquième Assemblée Mondiale de la santé en 2002, une résolution "Qualité des soins : sécurité des patients" invitait les pays à accorder la plus grande attention à ce sujet et incitait l’OMS à promouvoir le développement d’une politique de sécurité des patients en établissant notamment des standards internationaux, en encourageant la recherche et en appuyant les efforts des Etats Membres de l’OMS.

Alliance Mondiale pour la sécurité des patients

Dans ce contexte, l’Alliance Mondiale pour la sécurité des patients a été créée en octobre 2004. Des lignes d’action "Global Patient Safety Challenge" ont été définies pour un cycle de deux ans ; les travaux pour la période 2005-2006 portent sur les infections associées aux soins ("Clean Care is Safer Care ").

Les différents volets du programme de l’Alliance Mondiale concernent l’implication des patients et usagers, le développement d’une taxonomie internationale, la recherche et la mise en place de "solutions" pour améliorer la sécurité des patients.

Un projet de recommandations relatif aux systèmes de déclaration et d’apprentissage des événements indésirables liés aux soins (WHO draft guidelines for adverse event reporting and learning systems, from information to action) a été diffusé aux Etats Membres de l’OMS lors du sommet de Londres fin 2005 et est accessible sur le site de l’OMS.

En mai 2007 l’OMS a lancé le projet "Neuf solutions pour la sécurité des patients" dans le but de contribuer à réduire les préjudices liées aux soins de santé qui affectent des millions de personnes à travers le monde. Parmi les thèmes ciblés : la cohérence des noms des médicaments, l’identification des patients, la communication durant le transfert des patients, la réconciliation médicamenteuse, la maîtrise de la préparation des solutions d’électrolytes concentrées, la sécurité lors des branchements de cathéters et de tuyaux, l’usage unique des dispositifs d’injection et une meilleure hygiène des mains pour prévenir les infections associées aux soins de santé.

Le projet Hi Five’s de l’Alliance Mondiale pour la sécurité du patient se met en place afin de promouvoir la mise en œuvre et la mesure de l’impact de solutions standardisées. Ses thèmes sont retenus parmi les « Neuf solutions ». Il s’agit de l’amélioration de la communication, de la prévention des erreurs de patients ou de site en chirurgie, du contrôle de la concentration des solutions d’électrolytes, du suivi systématique et exhaustif de la prescription lors du parcours de soins et de l’hygiène des mains. Un comité de pilotage réunit les pays suivants : Australie, Canada, Allemagne, Royaume Uni, Pays -Bas, Etats-Unis d’Amérique. La France s’engage en 2009 dans le projet et charge la Haute Autorité de Santé de piloter et de coordonner sa participation, en lien avec le Ministère de la Santé et des Sports.